University of Minnesota



Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Mexique, U.N. Doc. CAT/C/34/Add.2 (1996).



Troisièmes rapports périodiques devant être présentés en 1996

Additif


MEXIQUE

Pour le rapport initial présenté par le Gouvernement mexicain, voir le document CAT/C/5/Add.7; pour son examen par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.16 et 17 et les Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-quatrième session, supplément No 46 (A/44/46), par. 170 à 201. Pour le deuxième rapport périodique, voir le document CAT/C/17/Add.3; pour son examen par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.130, 131 et 131/Add.2 et les Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-huitième session, supplément No A/48/44, par. 208 à 229.


[25 juin 1996]

TABLE DES MATIERES

Paragraphes


INTRODUCTION.......................... 1 - 13

ANALYSE PAR ARTICLE............ 14 - 164
Article 2........................................... 14 - 37
Article 3........................................... 38 - 52
Article 4 ...........................................53 - 63
Article 5........................................... 64 - 71
Article 6 ...........................................72 - 90
Article 7........................................... 91 - 98
Article 8............................................... 99
Article 9 .........................................100 - 102
Article 10 .......................................103 - 130
Article 11 .......................................131 - 136
Article 12 .......................................137 - 147
Article 13....................................... 148 - 154
Article 14....................................... 155 - 158
Article 15 .......................................159 - 160
Article 16....................................... 161 - 164

Liste des annexes

 


INTRODUCTION

1. Le Mexique, en tant qu'Etat partie à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, soumet à l'examen du Comité contre la torture son troisième rapport périodique, conformément aux dispositions de l'article 19 de cet instrument multilatéral et aux directives générales du Comité concernant la présentation des rapports.

2. L'article 133 de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique dispose que la Constitution, les lois du Congrès fédéral et les traités internationaux conclus par le Président de la République avec l'approbation du Sénat constituent la loi suprême de toute la nation; il s'ensuit que la Convention fait partie de la législation nationale et peut servir de base à toute action en justice.

3. Conformément aux principes consacrés dans la Constitution des Etats-Unis du Mexique, l'Etat du Mexique partage les responsabilités et les préoccupations de la communauté internationale concernant la protection et le respect des droits fondamentaux de l'être humain et a signé et ratifié divers instruments de portée mondiale et régionale dans ce domaine.

4. La Convention contre la torture est conforme à la Constitution. En la ratifiant, le Mexique a réaffirmé la pleine application à l'échelon national des droits reconnus dans la Convention, contribuant ainsi à étendre sa portée universelle et prenant à cet égard un engagement clair envers la communauté internationale.

5. Le Gouvernement mexicain a exposé en détail dans son rapport initial, dans son deuxième rapport périodique et dans le rapport complémentaire de mai 1996, les dispositions constitutionnelles et les normes particulières de sa législation qui garantissent le respect des droits fondamentaux de tous les individus se trouvant sur son territoire et soumis à sa juridiction, sans aucune distinction.

6. Le deuxième rapport périodique, qui portait sur la période allant jusqu'au mois de juin 1992, traitait longuement de la création, par le décret du 6 juin 1990, de la Commission nationale des droits de l'homme (CNDH) et de l'adoption en décembre 1995 d'une nouvelle loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture.

7. Le rapport complémentaire présenté en mai 1996 comprend des informations fournies par différents organes et portant sur la période comprise entre mai 1992 et décembre 1995, en particulier en ce qui concerne les activités de la Commission nationale des droits de l'homme et du Bureau du Procureur général de la République, ainsi que l'application de la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture.

8. Il convient de souligner que, durant la période visée par le rapport complémentaire, une commission des droits de l'homme a été créée dans chacun des Etats de la République, conformément au décret du 28 janvier 1992 qui renforce l'article 102 de la Constitution par un alinéa b), habilitant le Congrès fédéral et les Congrès des Etats, dans leur domaine de compétence, à mettre en place des organismes de protection des droits de l'homme ayant rang constitutionnel.

9. A l'époque où le deuxième rapport périodique du Mexique était présenté devant le Comité, toutes les plaintes pour torture étaient examinées par la Commission nationale des droits de l'homme. Aujourd'hui, les plaintes mettant en cause des autorités fédérales sont traitées par la Commission nationale, tandis que celles qui mettent en cause des autorités des Etats sont examinées, en première instance, par les commissions créées dans chaque Etat. Cependant, la Commission nationale peut exercer son pouvoir d'évocation.

10. La Mexique a participé avec détermination et enthousiasme au grand mouvement qui a donné un caractère international à la protection des droits de l'homme, par des déclarations, des pactes, des conventions, des commissions et des organes juridictionnels, en vue d'améliorer et d'accroître l'efficacité de cette protection. Le Gouvernement mexicain a ainsi signé et ratifié, le 23 janvier 1986, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, entrée en vigueur le 26 juin 1987.

11. Au Mexique, l'amour de la liberté est ce qui fonde l'attachement à la défense des droits de l'homme des Mexicains, à l'intérieur comme à l'extérieur des frontières. Les principes de coexistence et de civilisation qui règnent au Mexique font que l'absence de respect général et effectif des droits de l'homme est inconcevable. La protection de ces droits n'est pas une concession faite à la société, mais la première obligation qui incombe au Gouvernement à l'égard des Mexicains.

12. Le Gouvernement mexicain reconnaît la nécessité d'assurer strictement le respect sans réserve de la légalité et l'observation absolue des droits de l'homme proclamés dans la Constitution mexicaine. Le chapitre de notre Constitution consacré aux garanties individuelles et aux droits sociaux fait honneur au constitutionnalisme mexicain et traduit la conception la plus moderne du droit universel.

13. Le Gouvernement mexicain a envoyé d'autres renseignements de caractère général, que l'on trouvera dans le document de base portant la cote HRI/CORE/1/Add.12/Rev.2.

ANALYSE PAR ARTICLE

Article 2

Mesures législatives, administratives et judiciaires prises
par le Gouvernement mexicain pour donner effet
aux dispositions de la Convention


14. Conformément à la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture, la torture est une infraction constituée dans le cas où un agent public inflige des douleurs ou des souffrances graves à autrui; ce seul fait suffit à constituer l'infraction, indépendamment du résultat ou des conséquences de l'acte et la peine prévue par la loi est appliquée. Pour cette raison, l'agent public qui se livre à un acte de torture, généralement physique, peut commettre, en plus de cette infraction, d'autres infractions - menaces, coups et blessures ou même coups et blessures ayant entraîné la mort; en pareil cas, il y a cumul d'infractions.


15. Dans la pratique, l'article 64 du Code pénal fédéral et l'article 25 du Code pénal pour le District fédéral disposent que cette catégorie d'infractions sont punies de "la peine prévue pour l'infraction entraînant la peine la plus grave, qui pourra être augmentée de la moitié de la durée maximale de la réclusion sans pour autant dépasser la peine maximale, qui est de 50 ans de réclusion".


16. Les agents publics qui se rendent coupables du délit de torture sont donc poursuivis et réprimés conformément aux dispositions susmentionnées et non pas seulement pour avoir éventuellement provoqué des lésions graves ou la mort.


17. Pendant la période considérée dans le présent rapport, il a été apporté à divers textes législatifs des modifications qui ont été incorporées à la législation fédérale en janvier 1994, de sorte que le Gouvernement fédéral est désormais directement responsable de la réparation des dommages et préjudices y compris le préjudice moral, causés par des actes illicites des agents publics.


18. En ce qui concerne la législation nationale applicable en matière de restitution, d'indemnisation et de traitement des victimes de violations graves des droits de l'homme, des réformes ont été apportées aux textes ci-après et ont été publiées le 10 janvier 1994 au Journal officiel de la Fédération (annexe I) :


Code pénal pour le District fédéral en matière de juridiction commune et pour l'ensemble de la République en matière de juridiction fédérale;


Codes de procédure pénale fédéral et du District fédéral;


Loi d'amparo;


Loi relative à l'extradition;


Code civil pour le District fédéral en matière de juridiction commune et pour l'ensemble de la République en matière fédérale;


Loi fédérale sur la responsabilité des agents publics;


Loi portant organisation de la Cour des comptes de la Fédération;


Loi relative au tribunal administratif du District fédéral;


Loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture;


Loi relative au budget, à la comptabilité et aux dépenses publiques fédérales;


Loi portant organisation du pouvoir judiciaire de la Fédération.


19. En ce qui concerne la réparation du dommage causé par un acte illicite, les réformes prévoient notamment l'indemnisation du préjudice matériel et moral, y compris la prise en charge financière du traitement nécessaire au rétablissement de la santé de la victime.


20. En outre, il est désormais prévu que l'Etat est solidairement responsable de la réparation du dommage causé par les actes illicites de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions et, subsidiairement responsable dans le cas d'actes illicites pour faute; il a été prévu à cet effet une enveloppe budgétaire spéciale.


21. Par ailleurs, si le dommage résulte d'actes qui ne sont pas considérés comme délictueux, le Code civil oblige l'Etat à assurer l'indemnisation des dommages et préjudices causés par ses agents dans l'exercice de leurs fonctions. En règle générale, la responsabilité de l'Etat est subsidiaire sauf dans les cas d'actes intentionnels où elle est solidaire. Ainsi, la responsabilité de l'Etat n'est engagée que dans le cas où l'agent public directement responsable n'est pas suffisamment solvable pour faire face à sa responsabilité.


22. En ce qui concerne la responsabilité administrative, la procédure à suivre pour obtenir réparation des dommages a été simplifiée de sorte que les délais et les formalités sont plus rapides : avant la réforme, les délais et la lourdeur excessive de la bureaucratie étaient tels qu'il était en fait impossible d'obtenir réparation. De plus, la voie judiciaire reste ouverte pour obtenir réparation dans les cas où l'agent public responsable refuse de s'acquitter de ses obligations.


23. Les modifications ainsi apportées pour rendre l'Etat responsable et, ce qui est le plus important, pour réglementer les moyens de faire valoir les droits reconnus ont des effets préventifs en ce qui concerne la torture. Quand les autorités ont l'obligation de réparer les dommages, comme la Commission nationale des droits de l'homme l'a demandé dans des recommandations récentes, comme la recommandation No 98/95 (annexe II), elles comprennent mieux combien il est nécessaire de mettre au point des mécanismes de contrôle efficace pour assurer le respect de la loi par les agents publics et de dispenser aux agents publics une formation en matière de droits de l'homme.


24. La recommandation No 98/95 citée au paragraphe précédent concernait les troubles qui avaient éclaté les 3 et 4 mai 1995 dans le Centre de réadaptation sociale de Guadalajara, où des agents de la police d'Etat et de la police fédérale avaient roué de coups et maltraité des détenus, faisant sept morts; la recommandation était adressée au Gouverneur de l'Etat de Jalisco et au Procureur général de la République.


25. L'article 27 du Code fédéral de procédure pénale dispose que l'aveu est une déclaration volontaire faite devant le ministère public, le juge ou le tribunal chargé de la cause, par une personne d'au moins 18 ans jouissant de toutes ses facultés mentales, sur des faits constitutifs de l'infraction qui lui est reprochée et conformément aux normes définies à l'article 20 de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique. La déclaration est recueillie à tout moment de la procédure, jusqu'au prononcé du jugement définitif.


26. Pour que l'aveu d'un inculpé ait valeur de preuve, il doit être fait devant un représentant du ministère public ou devant le juge et doit en outre satisfaire aux autres conditions exigées à l'article 287 du Code de procédure pénale, à savoir qu'il faut :


" I. Que l'aveu soit fait par une personne d'au moins 18 ans contre elle-même, en pleine connaissance de cause et sans contrainte ni violence physique ou morale;


II. Qu'il soit fait devant un représentant du ministère public ou devant le tribunal chargé de la cause, en présence de l'avocat ou d'une personne de confiance, le prévenu étant dûment informé de la procédure;


III. Qu'il soit fait de la propre initiative de l'intéressé;


IV. Qu'il n'existe aucun élément qui, de l'avis du juge ou du tribunal, rende l'aveu invraisemblable."


27. Les mêmes textes disposent également qu'une personne ne saurait être traduite en justice si le seul élément retenu contre elle est l'aveu. En outre, chose très importante, la police judiciaire a seulement faculté pour faire rapport, mais n'est pas habilitée à recueillir des aveux. Les aveux obtenus en contravention de cette règle n'auraient aucune valeur, comme il est expressément mentionné à l'article 287.


28. En ce sens, le dernier paragraphe de l'article susmentionné, récemment modifié par un décret publié le 10 janvier 1994 au Journal officiel de la Fédération, ne reconnaît aux renseignements obtenus par les agents de la police judiciaire fédérale ou locale qu'une valeur de témoignage, ces témoignages devant, avant de figurer dans l'ordonnance de renvoi, être complétés par d'autres mesures d'instruction de la part du ministère public. Toutefois, en aucun cas on ne pourra considérer comme un aveu une déclaration faite lors des premières enquêtes. De même, les tribunaux sont tenus d'exposer dans leurs décisions les considérations qu'ils ont prises en compte pour procéder à l'appréciation des preuves (art. 290).


29. Enfin, suite aux modifications apportées en 1991 au Code fédéral de procédure pénale, l'article 127 bis garantit le droit de toute personne de bénéficier, lors de sa comparution, de l'assistance d'un avocat désigné par elle. L'avocat peut objecter aux questions posées au prévenu si celles-ci ne sont pas appropriées ou sont contraires au droit, mais il ne peut pas dicter ni influencer les réponses de son client.


30. En outre, les modifications apportées au Code de procédure pénale pour le District fédéral sont similaires, dans leur teneur et dans leur portée, à celles apportées au Code fédéral, mais la disposition énoncée aux troisième et quatrième paragraphes de l'article 134 bis, modifié le 10 février 1994, mérite d'être signalée : en effet le ministère public est tenu d'empêcher que le responsable présumé d'un délit soit placé au secret, subisse des mesures d'intimidation ou des tortures. En outre, dès l'enquête préliminaire, le suspect doit pouvoir désigner un avocat ou une personne de confiance pour assurer sa défense; à défaut, le ministère public en commet un d'office.


31. A la suite de ces modifications législatives, la pratique judiciaire au Mexique a notablement changé, comme l'atteste la jurisprudence de la Cour suprême de justice et des tribunaux collégiaux de circuit, dont les jugements sont conformes à ces réformes.


Bureau du Procureur général de la République


32. Conformément aux dispositions de l'article 2 de la Convention qui fait obligation aux Etats parties de prendre des mesures législatives, administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture ne soient commis, le Bureau du Procureur général de la République veille à tout moment à ce que les agents publics respectent les obligations prévues dans la loi de procédure et les engagements contractés en vertu de la Convention et d'autres instruments internationaux, comme la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture.


33. De juin 1992 à décembre 1995, le Bureau du Procureur général de la République a publié les textes suivants régissant le comportement de ses agents publics en vue de protéger les droits de l'homme et de lutter contre l'impunité :


Le Code de déontologie des représentants fédéraux du ministère public et de la police judiciaire, publié le 24 mars 1993;


Le règlement de la police judiciaire fédérale, publié également le 24 mars 1993;


Une circulaire du Procureur général de la République (No 010/93, datée du 6 avril 1993) portant création du Groupe de suivi des recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme. L'objectif est d'assurer qu'il soit donné la suite voulue aux recommandations formulées par la Commission nationale des droits de l'homme, en ce qui concerne en particulier les plaintes dénonçant un délit commis lors de l'enquête préalable, par exemple un acte de torture ou toute autre faute grave;


Le Code de conduite et de pratique institutionnelle, adopté en 1995 (annexe III);
La définition du rôle du Bureau du Procureur général de la République, adoptée en septembre 1995, qui est la suivante :


" Le Bureau du Procureur général de la République, dont relève le ministère public, est un organe essentiel du système fédéral de la justice qui, dans l'intérêt des individus, de la société et de l'Etat, assure la promotion et la surveillance du respect de l'ordre constitutionnel et veille à la bonne administration de la justice dans son domaine de compétence. Il participe en outre à la prévention des infractions afin d'assurer la sécurité publique.


Cette mission doit être accomplie dans le strict respect des principes constitutionnels et des lois applicables, ainsi que des droits de l'homme, condition indispensable au maintien de la légalité.
Le ministère public fédéral et ses auxiliaires s'acquitteront toujours de leurs fonctions humainement et de bonne foi, en s'inspirant des principes de moralité, de professionnalisme, d'impartialité, de loyauté et d'efficacité.";
La circulaire No 001/95 du 10 mars 1995, où il est prescrit que l'agent public du Bureau du Procureur général de la République qui doit communiquer avec la Commission nationale des droits de l'homme doit passer par les services du Contrôleur interne, à l'exclusion de tout autre intermédiaire.


Direction générale de la protection des droits de l'homme


34. En 1993, il a été créé au sein du Bureau du Procureur général de la République la Direction générale de la protection des droits de l'homme, qui a des attributions précises décrites à l'article 29 du règlement d'application de la loi portant organisation du Bureau du Procureur : la surveillance, la protection et la promotion des droits de l'homme, ainsi que la diffusion des valeurs qui doivent guider les agents publics au service de la justice, afin d'empêcher, par des actions préventives, des délits tels que la torture.


Commission nationale des droits de l'homme


35. Bien que, pour des raisons de compétence, ce soient maintenant les commissions locales qui connaissent en premier lieu des plaintes pour actes de torture mettant en cause des agents des autorités des différents Etats, la Commission nationale a un pouvoir de révision en seconde instance, tout en pouvant exercer son droit d'évocation dans des affaires particulièrement graves dont l'importance dépasse le cadre de l'Etat.


36. Il convient de préciser que, dans les affaires fédérales, comme les affaires de torture, il n'y a pas de délai pour le dépôt d'une plainte, ce qui renforce la lutte systématique contre l'impunité et tend à éviter qu'un acte de torture ne soit pas dénoncé pour ne pas l'avoir été à temps. Il faut ajouter à ce sujet que la loi organique relative à la Commission nationale des droits de l'homme constitue un précédent affirmant l'imprescriptibilité des actes de torture, désormais assimilés à un crime contre l'humanité.


37. On signalera également que le 22 novembre 1994 a été publié au Journal officiel de la Fédération le Règlement général des prisons militaires (annexe IV).

Article 3

Mesures législatives ou autres visant à interdire l'expulsion,
le refoulement ou l'extradition d'une personne vers
un autre Etat où il y a des motifs sérieux de croire
qu'elle risque d'être soumise à la torture

38. Au plan national comme à l'échelle internationale, l'Etat mexicain n'a jamais varié dans sa condamnation résolue de la torture.

39. L'article 22 de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique prohibe les peines de mutilation et les peines infamantes, la flagellation, la bastonnade, la torture de quelque sorte qu'elle soit, l'amende excessive, la confiscation des biens et toutes autres peines inusitées et aux conséquences graves.


40. En outre, l'article 15 de la Constitution politique interdit la signature de traités d'extradition pour les prisonniers politiques ou les détenus de droit commun qui étaient tenus en esclavage dans le pays où ils ont commis le délit, ou de traités et conventions en vertu desquels les droits de l'homme ou du citoyen garantis par la Constitution pourraient être bafoués.


41. Cet article est conforme à l'article 3 de la Convention. Dans le même ordre d'idées, la loi relative à l'extradition dispose, en ses articles 8 et 9, que l'extradition n'est jamais accordée dans le cas d'une personne qui risque de faire l'objet de persécutions politiques de la part de l'Etat requérant ou qui était tenue en esclavage dans le pays où le délit a été commis, ni dans le cas où les faits pour lesquels elle est poursuivie relèvent de la juridiction militaire.


42. En vertu de l'article 10 de la même loi, l'Etat mexicain exigera, avant de donner suite à la demande d'extradition, que l'Etat requérant accepte entre autres conditions que, si le délit imputé à la personne réclamée emporte la peine de mort ou l'une des peines énoncées à l'article 22 de la Constitution, elle ne puisse être condamnée qu'à une peine de prison ou à toute autre peine moins grave prévue par la législation de l'Etat pour un tel crime, directement ou par substitution ou commutation.


43. En ce qui concerne l'expulsion, l'article 42 (sect. VI) de la loi générale relative à la population prévoit que le réfugié ne peut être refoulé vers son pays d'origine ni envoyé dans un autre pays où sa vie, sa liberté ou sa sécurité seraient menacées; ces dispositions sont également conformes à l'article 3 de la Convention.


Normes d'évaluation du risque et politique suivies par le Gouvernement mexicain pour accorder le statut de réfugié


44. L'article 89 du règlement d'application de la loi générale relative à la population fixe comme suit les règles d'admission sur le territoire des non-immigrants et des réfugiés :


" I. A leur arrivée sur le territoire national, les étrangers qui fuient leur pays d'origine parce que leur vie, leur sécurité ou leur liberté est menacée par une situation de violence généralisée, une agression extérieure, des conflits internes, la violation systématique des droits de l'homme ou d'autres circonstances perturbant gravement l'ordre public sont admis à titre provisoire par les services d'immigration et doivent demeurer dans le port d'entrée en attendant que le Ministère statue sur leur cas. Le service d'immigration compétent en informe par les voies les plus rapides le Service central, qui décide de la suite à donner pour chaque cas.


II. Le requérant d'asile doit donner les raisons pour lesquelles il a fui son pays d'origine, exposer sa situation personnelle et indiquer les éléments nécessaires à son identification ainsi que le moyen de transport emprunté.


III. Quand le Service central a donné son aval, les mesures nécessaires sont prises pour assurer la sécurité du réfugié et son transport jusqu'au lieu où il devra résider, lequel est précisé dans l'autorisation.


IV. N'est pas admis en tant que réfugié l'étranger en provenance d'un pays autre que celui où sa vie, sa sécurité ou sa liberté est menacée, sauf s'il peut prouver qu'il a été refoulé par le pays d'où il vient ou que dans ce pays il a été exposé au danger qui l'avait contraint à fuir son pays d'origine.


V. Tous les étrangers admis dans le pays en tant que réfugiés sont soumis aux conditions ci-après :


a) Le Ministère détermine le lieu de résidence du réfugié ainsi que les activités auxquelles il peut se livrer et définit les autres modalités régissant son séjour, s'il le juge nécessaire au vu des circonstances.


b) Le réfugié peut demander l'acceptation au Mexique de son conjoint et de ses enfants mineurs ou incapables, qui seront à sa charge; le même statut pourra leur être accordé tout comme aux parents du réfugié, le cas échéant.


c) Les étrangers qui ont été admis en tant que réfugiés ne peuvent sortir du pays qu'avec l'autorisation du Service central. S'ils quittent le pays sans autorisation ou si leur absence excède la durée autorisée, ils perdent leurs droits de migrant.


d) Le réfugié ne peut être refoulé vers son pays d'origine ni envoyé dans un autre pays où sa vie, sa liberté ou sa sécurité serait menacée.


e) Le Ministère peut dispenser de la sanction prévue en cas d'entrée illégale sur le territoire l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié.


f) Les autorisations visées par le présent article sont accordées pour la durée que le Ministère juge appropriée. Les permis de séjour sont délivrés pour un an et, si nécessaire, peuvent être prorogés à plusieurs reprises. Pour ce faire, l'intéressé doit demander le renouvellement de son permis dans un délai de 30 jours avant son expiration. Le renouvellement est accepté si les motifs qui ont justifié l'octroi du statut de réfugié existent toujours et si l'intéressé s'est conformé aux conditions et aux modalités fixées par le Ministère. La même procédure est suivie en ce qui concerne les membres de sa famille.


g) Le changement de lieu de résidence du réfugié, le développement ou le changement de ses activités sont soumis à autorisation, conformément aux conditions fixées par le Ministère.


h) Le séjour dans le pays en tant que réfugié ne donne pas droit à un permis de résidence.


i) Si le Ministère juge que les circonstances qui avaient motivé la demande de statut de réfugié ont pris fin, l'intéressé a 30 jours pour quitter le pays avec les membres de sa famille bénéficiaires du même statut, à moins qu'il ne fasse valoir les dispositions de l'article 59 de la loi.


j) Les réfugiés sont tenus de signaler tout changement d'état civil ainsi que la naissance d'enfants sur le territoire national, dans un délai maximal de 30 jours."


Autorité qui décide l'extradition, l'expulsion ou le refoulement et recours possibles


45. Conformément à l'article 6 (sect. XIV) du règlement intérieur du Ministère des relations extérieures, c'est le ministre qui signe les décisions visées aux articles 19, 20, 21 et 30 de la loi relative à l'extradition.


46. De même, en vertu des dispositions de l'article 16 (sect. IV) du même texte, la Direction générale des affaires juridiques du Ministère des relations extérieures intervient dans les procédures d'extradition, conformément à la loi relative à l'extradition ainsi qu'aux traités et conventions signés entre le Mexique et d'autres Etats.


47. L'organe compétent pour faire exécuter les mesures d'expulsion est le service de coordination juridique et de contrôle de l'immigration de l'Institut national des migrations du Ministère de l'intérieur, conformément aux dispositions de l'article 10 (sect. I) du décret portant création de l'Institut national des migrations en tant qu'organe technique décentralisé relevant du Ministère de l'intérieur.


48. En ce qui concerne l'extradition, le paragraphe 2 de l'article 33 de la loi relative à l'extradition dispose que le seul recours disponible contre la décision d'extradition est la procédure d'amparo. S'agissant de l'expulsion, on considère que la décision pourrait également être attaquée par la même voie de recours, c'est-à-dire la procédure d'amparo.


Formation spéciale permettant de déterminer s'il est probable que la personne sera soumise à la torture en cas d'expulsion ou s'il est vraisemblable qu'elle a déjà été torturée dans son pays d'origine


49. Il est nécessaire d'assurer la formation générale des agents de l'immigration, par des stages et des programmes de formation et de perfectionnement. Pour ce qui est de déterminer si une personne a été soumise à des tortures ou risque d'être torturée, il est indispensable de faire appel à des médecins et des psychologues spécialement formés, lesquels sont tenus de porter à la connaissance des autorités des services d'immigration le résultat de leurs examens.


50. Il importe également que la Commission nationale des droits de l'homme soit représentée dans les bureaux des services d'immigration pour que soit garanti le respect de l'intégrité physique et morale des étrangers et que des mesures de prévention et de protection soient appliquées. De même, il faut renforcer les peines que peuvent encourir les responsables d'actes de torture.


Données statistiques


51. On trouvera exposé ci-après le nombre d'expulsions effectuées en 1995 :


Janvier 9 943

Février 9 155

Mars 10 527

Avril 8 498

Mai 9 217

Juin 9 593

Juillet 8 533

Août 8 048

Septembre 8 797

Octobre 8 637

Novembre 7 941

Décembre 6 174


TOTAL 105 063


52. En 1995, les étrangers dont les noms suivent, craignant de retourner dans leur pays, ont sollicité une entrevue avec le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés :


Nom Nationalité


Orlando Bernal Ruiz Cubaine

Afeadz Ahfaz Arfhad Pakistanaise

Udoka Okechu Kwu Nigériane

Remon Abukhaber Jordanienne

Roda Ali Hussein Somalienne

Hibo Mourid Somalienne

Amadu Osman Libérienne

Joseph Sarpong Libérienne

Abmad Aftab Pakistanaise

Hallak Samul Sarein Iraquienne

Luis Manuel Espinoza Betancourt Cubaine

Wilfredo Prendes Cubaine

David Carter Nigériane

Ryan Smith Nigériane

Mohiuddin Choudaury Bangladaise

Reza Sistar Iranienne

Diana Angie Sierra-léonienne

Joseph Williams Libérienne

Rosa Galan Chica Salvadorienne

Joseph Williams Qdob Libérienne

Article 4


Données statistiques sur les cas d'application de la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture, sanctionnant des agents de la fonction publique pour délits de torture ou d'homicide à la suite de tortures


53. La lutte contre la pratique de la torture a été au centre des préoccupations de la Commission nationale des droits de l'homme. Ainsi, au cours des six dernières années et particulièrement depuis la présentation du rapport initial, des progrès importants ont été accomplis en ce qui concerne la répression du délit de torture.


54. Le tableau qui suit montre l'évolution du nombre de plaintes pour torture, selon les registres de la Commission nationale.

Semestre ou année
Nombre total
de plaintes reçues
Nombre de plaintes
pour torture
Juin-décembre 1990
1 343
180
Décembre 1990-juin 1991
1 913
266
Juin-décembre 1991
2 485
156
Décembre 1991-mai 1992
4 503
134
Mai 1992-mai 1993
8 793
246
Mai 1993-mai 1994
8 8804
141
Mai 1994-mai 1995
8 912
45
Mai 1995-mai 1996
8 357
59

 


55. On notera au sujet de ces chiffres que, sur les 59 plaintes pour torture reçues pendant le dernier exercice, 43 seulement étaient du ressort de la Commission nationale. Les autres ont été transmises aux commissions des Etats parce qu'elles concernaient des agents publics non fédéraux, et ces commissions se sont déclarées incompétentes du fait que les autorités judiciaires avaient déjà statué sur les actes présumés de torture, ou bien que la victime avait retiré sa plainte devant la Commission nationale ou avait souhaité l'arrêt de la procédure.


56. Il est aussi important de signaler que, sur les 43 plaintes mentionnées, 16 portent sur des faits qui ont eu lieu en 1996, 23 sur des faits datant de 1995 et le reste sur des faits antérieurs. Par ailleurs, de 1992 à ce jour, 37 enquêtes préliminaires pour torture ont été menées comme suit :


Année Nombre de personnes inculpées


1992 18

1993 8

1994 0

1995 10


57. En outre, la Direction générale chargée du suivi des recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme, relevant du Bureau du Procureur général de la République, a saisi plusieurs juges de district de 31 dossiers d'enquête préliminaire pour torture, comme suit :


Année Nombre de personnes inculpées


1992 28

1993 0

1994 3

1995 0


58. La Commission nationale a eu connaissance des poursuites pénales engagées contre 53 agents publics pour le délit de torture ainsi que de 14 affaires d'homicide résultant de tortures. Dans deux affaires, le juge de la cause a déclaré les inculpés coupables du délit de torture et dans cinq affaires il a déclaré les accusés coupables d'homicide résultant de tortures. Ces affaires sont récapitulées comme suit :


a) Poursuites pénales pour délit de torture :


i) Recommandation 73/91 : affaire Martín Arroyo Luna et consorts. Poursuites pénales engagées contre Gustavo Castrejón Aguilar (annexe V);


ii) Recommandation 42/92 : affaire William Darío Kerguelen Pinilla. Poursuites pénales engagées contre Mario Santander Embriz (annexe VI);


b) Poursuites pénales pour homicide résultant de tortures :


i) Recommandation 3/90 : affaire Jorge Argáez Pérez. Poursuites pénales engagées contre Alejandro San Pedro González (annexe VII);


ii) Recommandation 29/90 : affaire du village d'Aguililla (Etat de Michoacán). Poursuites pénales engagées contre Raymundo Gutiérrez Jiménez (annexe VIII);


iii) Recommandation 1/91 : affaire Pedro et Felipe de Jesús Yescas Martínez. Poursuites pénales engagées contre Omar Olguín Alpízar (annexe IX);


iv) Recommandation 15/91 : affaire Ricardo López Juárez. Poursuites pénales engagées contre Enrique Alvarez Palacios (annexe X);


v) Recommandation 50/91 : affaire José del Carmen Llergo Totosaus. Poursuites pénales engagées contre José Rojas Garrido (annexe XI).


59. En outre, dans sept affaires, la procédure est toujours en cours; dans 13 affaires, un mandat d'arrestation a été délivré mais les intéressés n'ont pas encore été arrêtés; les juges ont refusé de signer ou ont annulé 25 autres mandats d'arrestation, et une ordonnance de mise en détention provisoire a été annulée.


60. La Commission nationale des droits de l'homme a fait 1 022 recommandations au total, de sa création au mois de décembre 1995;

dans 105 cas, elle a établi qu'il y avait eu torture et elle a fait connaître publiquement les activités illégales des agents publics indignes, en divulguant leur identité et en recommandant une procédure administrative et des poursuites pénales selon le cas. Ces recommandations étaient fondées non seulement sur la législation nationale mais aussi sur les conventions et les traités ratifiés par le Gouvernement mexicain, dont la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.


61. Sur les 105 cas dans lesquels la Commission a établi qu'il y avait eu torture, 72 recommandations ont été entièrement suivies d'effets, 32 ont partiellement été réalisées, l'exécution de deux autres est toujours en cours parce que les recommandations sont récentes, et une seulement n'a pas été acceptée par le Président du tribunal supérieur de justice de l'Etat de Sinaloa.


62. De même, la Direction générale chargée du suivi des recommandations de la CNDH, relevant du Bureau du Procureur général de la République, a enregistré, de 1992 à ce jour, les données suivantes qu'elle a tirées des recommandations formulées par la Commission :


Recommandations15

Mandats'arrêt:demandés50

délivrés 33 en attente de décision- en attente d'exécution 10

refusés 17

annulés 6

exécutés17

en suspens10

Mandats d'arrêt :

refusés et confirmés17

refusés et n'ayant pas fait l'objet

d'un recours -

refusés et en attente de décision

sur le recours-

annulés pour cause de décès2

annulés pour cause de prescription-

annulés à la suite du recours en amparo4

annulation de l'ordonnance de mise en détention provisoire2

ordonnances de mise en liberté3

instruction-

réarrestations1

en attente de conclusions-

en attente de jugement-

jugés 11

TOTAL 50

verdicts de condamnation8

verdictsd'acquittement3


63. On trouvera énumérés ci-après, selon leur grade et leurs qualités, les agents de la fonction publique poursuivis pour torture dans le cadre de ces enquêtes préliminaires et de ces procès :


1 ancien délégué d'Etat

2 représentants du ministère public fédéral

6 commandants de la police judiciaire fédérale

3 chefs de groupe de la police judiciaire fédérale

1 agent de la police de prévention criminelle mandaté par la police
judiciaire fédérale


3 agents administratifs

34 agents de la police judiciaire fédérale


soit 50 agents au total.


Article 5

Champ d'application des lois en la matière


64. Comme il était indiqué dans le rapport initial du Gouvernement mexicain, il existe divers textes qui portent sur la torture, comme la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture, dont l'article 3 dispose :


" Se rend coupable du délit de torture tout agent public qui, dans l'exercice de ses fonctions, inflige à une personne des douleurs ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, afin d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, ou de la punir d'un acte qu'elle a commis ou est soupçonnée d'avoir commis, ou de la contraindre à accomplir ou à cesser d'accomplir un acte déterminé.".


65. Ainsi, cette loi est applicable à tout agent public de la Fédération ou du District fédéral qui a recours, directement ou par des tiers, à ces méthodes illégales. De même, chaque Etat du Mexique dispose d'un arsenal législatif pour combattre et réprimer la torture, au niveau de l'Etat et au niveau local.


66. Diverses autres dispositions légales visent les traitements dégradants et les tortures graves, notamment le Code pénal et la loi fédérale sur la responsabilité des agents de la fonction publique.


67. Ainsi, le dernier paragraphe de l'article 19 de la Constitution, même s'il ne contient pas le mot "torture", évoque les mauvais traitements et les peines :


" Tout mauvais traitement lors de l'arrestation ou dans les prisons, toute tracasserie infligée sans motif légal, tous droits ou contributions exigés des prisonniers sont des abus que la loi doit corriger et que les autorités doivent réprimer."


68. Plus précisément, l'article 20 (sect. II) de la Loi fondamentale dispose ce qui suit en matière de torture :


" Dans tout procès au pénal, l'accusé bénéficie des garanties suivantes :


II. Il ne peut être contraint à faire une déclaration. Toute forme d'isolement, d'intimidation ou de torture est interdite et punie par la loi pénale..."


69. L'article 22 de la Constitution est plus précis encore :


" Sont interdits les mutilations et peines infamantes, le marquage, la flagellation, la bastonnade, la torture de quelque sorte qu'elle soit, l'amende excessive, la confiscation des biens et toutes autres peines inusitées et aux conséquences graves."


Nationalité de l'auteur et de la victime du délit de torture


70. A cet égard, l'article premier de la Constitution politique, dispose :


" Aux Etats-Unis du Mexique, tout individu jouit des garanties qu'octroie la présente Constitution, lesquelles ne pourront être restreintes ou suspendues que dans les cas et conditions qu'elle-même établit."


71. En vertu de la Constitution, tout individu, qu'il soit mexicain ou étranger, jouit des garanties individuelles, qui ne peuvent être suspendues ou restreintes que dans les cas expressément prévus par la Loi fondamentale. De même, la loi prévoit qu'il sera versé à la victime du délit de torture, qu'elle soit mexicaine ou étrangère, ou, en cas de décès, aux membres de sa famille, une indemnité en réparation des dommages subis et des préjudices causés par cet acte odieux. En ce qui concerne l'auteur présumé du délit de torture, qu'il soit mexicain ou étranger, il doit être jugé selon les règles fondamentales de la procédure et conformément aux lois applicables, et il ne peut être traité d'une manière qui porte atteinte à ses droits, et doit être protégé contre la torture et toute autre méthode dégradante.

Article 6

Procédures visant à assurer la rétention des personnes soupçonnées
d'actes de torture pendant la durée nécessaire pour engager
la procédure pénale ou la procédure d'extradition

72. La procédure d'extradition est régie par l'article 119 de la Constitution du Mexique dont le troisième paragraphe dispose :


" Les demandes d'extradition provenant d'un Etat étranger sont traitées par le pouvoir exécutif fédéral, avec l'intervention de l'autorité judiciaire, conformément à la présente Constitution, aux traités internationaux conclus en la matière et aux dispositions réglementaires. La décision du juge demandant l'exécution de la mesure est suffisante pour motiver la rétention pendant une durée maximale de 60 jours civils."
Les extraditions doivent donc répondre à certaines conditions définies dans la loi relative à l'extradition (en l'absence de traité international avec l'Etat requérant) et dans les conventions internationales en la matière signées par le Mexique.


Loi relative à l'extradition


73. La loi relative à l'extradition est entrée en vigueur le 30 décembre 1975. Ses dispositions, qui sont d'ordre public et revêtent un caractère fédéral, visent à déterminer, lorsqu'il n'existe pas de traité international, les conditions et les modalités de la remise à l'Etat requérant des personnes traduites en justice ou condamnées pour des infractions de droit commun.


74. Par conséquent, les dispositions énoncées dans cette loi doivent être appliquées pour examiner toute demande d'extradition et pour statuer sur le sort de la personne réclamée.


Conditions requises


75. La loi autorise la remise des auteurs présumés d'un délit contre lesquels une procédure pénale a été engagée dans un autre pays ou qui sont recherchés pour exécuter le jugement prononcé par l'autorité judiciaire de l'Etat requérant. La demande officielle d'extradition ainsi que les documents justificatifs doivent contenir :


" I. La qualification pénale des faits pour lesquels l'extradition est demandée;


II. Les preuves des éléments constitutifs de l'infraction et de la responsabilité probable de l'individu réclamé. Si l'intéressé a été condamné par un tribunal de l'Etat requérant, il suffira de joindre une copie certifiée conforme du jugement exécutoire;


III. Les éléments visés à l'article 10, dans les cas où il n'existe pas de traité d'extradition avec l'Etat requérant;


IV. Le texte des dispositions de la législation de l'Etat requérant qui définissent l'infraction et déterminent la peine, les textes relatifs à la prescription de l'action et de la peine applicable et une déclaration officielle attestant que ces dispositions étaient en vigueur au moment où a été commis le délit;


V. La copie certifiée conforme du mandat d'arrêt éventuellement délivré à l'encontre de la personne réclamée;


VI. Les éléments d'information permettant d'identifier et, autant que possible, de localiser la personne recherchée."


76. Les documents indiqués ainsi que tous les autres documents soumis et rédigés dans une langue étrangère devront être accompagnés de leur traduction en espagnol et légalisés (par apostille) conformément aux dispositions du Code fédéral de procédure pénale.


77. La loi relative à l'extradition prévoit un autre mécanisme, appelé "détention provisoire aux fins d'extradition", qui est utilisé à titre exceptionnel dans le cadre de la procédure d'extradition.


78. Ce mécanisme intervient lorsque l'Etat requérant, en faisant part de son intention de présenter une demande officielle d'extradition, sollicite l'adoption de mesures de sûreté à l'égard de la personne réclamée. Cette requête ne pourra être satisfaite que si la demande de détention provisoire aux fins d'extradition présentée par l'Etat requérant précise la nature des faits reprochés à la personne réclamée et indique qu'un mandat d'arrêt a été délivré par une autorité compétente.


79. Ainsi, s'il estime que la demande est fondée, le Ministère des relations extérieures la transmet au Procureur général de la République, qui saisit immédiatement le juge de district compétent, lequel prend les mesures appropriées. Celles-ci pourront être, à la demande du Procureur général de la République, une assignation à résidence ou toute autre mesure prévue par les traités ou lois en la matière.


80. Si, dans le délai de deux mois prévu par l'article 119 de la Constitution et commençant à courir à partir de la date d'exécution des mesures visées à l'article précédent, la demande officielle d'extradition n'a pas été présentée au Ministère des relations extérieures, les mesures seront immédiatement levées. Le juge chargé de l'affaire notifiera au Ministère des relations extérieures le commencement du délai de 60 jours, afin que le Ministère en informe à son tour l'Etat requérant.


81. En outre, si la demande est acceptée, le Ministère des relations extérieures envoie la décision, accompagnée du dossier, au Procureur général de la République pour qu'il saisisse le juge de district compétent. Celui-ci délivre un mandat d'exécution ordonnant la détention de la personne réclamée, ainsi que, le cas échéant, la mise sous séquestre, si l'Etat requérant en fait la demande, des documents, des sommes d'argent ou d'autres objets se trouvant en sa possession, qui ont un rapport avec le délit imputé ou qui peuvent constituer des éléments de preuve.


82. Une fois arrêtée, la personne réclamée doit être déférée dans les plus brefs délais au juge de district compétent, lequel l'informe de la teneur de la demande d'extradition et des documents joints. Au cours de la même audience, elle peut désigner un avocat. Si elle n'en connaît pas mais souhaite en prendre un, on lui présente une liste d'avocats d'office parmi lesquels elle fait son choix. Sinon, le juge le fait à sa place. Le détenu peut demander au juge de différer l'ouverture de l'enquête en attendant que l'avocat choisi donne son accord, au cas où ce dernier n'est pas présent quand il a été désigné pour se charger de l'affaire.


83. En conséquence, quand la procédure énoncée dans la loi relative à l'extradition et dans le Code de procédure pénale a été dûment engagée, le Ministère des relations extérieures a 20 jours pour accorder ou refuser l'extradition, en se fondant sur le dossier et sur l'avis du juge. Si le Ministère accorde l'extradition, il en informe l'intéressé et le Ministère de l'intérieur. Le Gouvernement mexicain remet alors l'intéressé, par l'intermédiaire du Bureau du Procureur général de la République, aux agents compétents de l'Etat requérant, au poste frontière ou, le cas échéant, dans l'avion à bord duquel doit voyager la personne extradée.


Traités internationaux


84. Il faut signaler que dans les conventions internationales signées en la matière avec d'autres Etats, il est prévu que l'examen de toute demande d'extradition, la procédure ainsi que la décision seront régis par les conditions fixées d'un commun accord.


85. Cependant, le Gouvernement mexicain et les Etats avec lesquels il a signé des conventions d'extradition s'engagent à remettre à l'autre partie, conformément aux dispositions de ces traités, les personnes contre lesquelles les autorités compétentes de la partie requérante ont engagé une procédure pénale, qui ont été déclarées coupables d'une infraction ou qui sont réclamées par les autorités pour exécuter une peine de privation de liberté prononcée par un tribunal pour une infraction commise sur le territoire de la partie requérante.


86. Pour être extradé, un individu doit avoir commis à l'étranger des actes qui entrent dans les catégories d'infractions énoncées dans les annexes du traité international et punissables, selon les lois des deux parties contractantes, d'une peine minimum d'un an d'emprisonnement.


87. De même, le Gouvernement mexicain a pour principe de refuser l'extradition quand les personnes sont recherchées en vue d'être jugées pour un délit d'ordre militaire ou politique, quand la personne réclamée a déjà été traduite en justice et condamnée ou acquittée dans l'Etat requérant pour le délit motivant la demande d'extradition, en cas de prescription de l'action pénale ou de la peine pour laquelle l'extradition est demandée et quand la personne réclamée risque la peine de mort.


88. Il convient de souligner que dans les conventions internationales signées et ratifiées par le Mexique, la procédure d'extradition est identique à celle qui est énoncée dans la loi pertinente mentionnée plus haut.


89. Le Gouvernement mexicain a conclu des traités d'extradition avec les pays suivants : Allemagne, Australie, Bahamas, Belgique, Belize, Brésil, Canada, Colombie, Cuba, El Salvador, Espagne, Etats-Unis d'Amérique, Guatemala, Italie, Panama, Pays-Bas et Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord.


90. Sur le plan multilatéral, le Gouvernement mexicain a ratifié la Convention sur l'extradition (1933), dans le cadre des organisations régionales américaines.

Article 7

Exercice de l'action pénale contre quiconque commet
des actes de torture et n'est pas extradé


91. Cette question est traitée à l'article 4 du Code pénal fédéral, qui se lit comme suit :


" Les infractions commises à l'étranger, dont l'auteur est mexicain et la victime étrangère ou mexicaine ou dont l'auteur est étranger et la victime mexicaine, sont passibles, sur le territoire de la République, des peines prévues par les lois fédérales, lorsque les conditions suivantes sont réunies :


I. L'inculpé se trouve sur le territoire de la République;


II. L'inculpé n'a pas fait l'objet d'un jugement définitif dans le pays où il a commis l'infraction; et


III. Les faits qui lui sont reprochés sont qualifiés de délit à la fois par la législation du pays où ils ont été commis et par la législation mexicaine."


92. Il s'ensuit que si l'Etat requérant demande l'extradition d'un ressortissant mexicain qu'il soupçonne fortement d'avoir commis le délit de torture, conformément à la décision du Ministère des relations extérieures, l'extradition sera refusée au seul motif que cette personne possède la nationalité mexicaine.


93. L'article 30 de la Constitution prévoit toutefois des exceptions à cette règle, de même que l'article 14 de la loi relative à l'extradition, qui dispose qu'un national mexicain ne peut pas être remis à un Etat étranger sauf dans des cas exceptionnels, sur décision du pouvoir exécutif.


94. Le Ministère des relations extérieures notifie ensuite la décision au détenu et au Procureur général de la République, met le détenu à sa disposition et lui remet le dossier afin que le ministère public renvoie s'il y a lieu l'affaire au tribunal compétent en suivant la procédure prévue à l'article 20 de la Constitution, exposée en détail plus haut.


95. Ainsi, le Gouvernement mexicain lutte contre l'impunité dont pourrait bénéficier un ressortissant mexicain auteur du délit de torture.


96. De même, les conventions et traités internationaux ratifiés par le Mexique en matière d'extradition précisent toujours que si l'Etat requis rejette une demande d'extradition au motif que sa législation lui interdit de livrer ses nationaux à un Etat étranger, il devra alors soumettre l'affaire à ses autorités compétentes qui devront engager l'action pénale, quand il a compétence pour poursuivre.


97. Il importe à ce propos de signaler qu'il n'existe aucune décision de justice relative à cette question. En effet, jamais au cours de son histoire, le Mexique n'a été saisi d'une demande de détention provisoire aux fins d'extradition ni d'une demande officielle d'extradition visant une personne fortement soupçonnée d'avoir commis le délit de torture. Les autorités judiciaires mexicaines n'ont donc jamais eu l'occasion de se prononcer en la matière.


98. Aucune des 120 demandes d'extradition présentées au Gouvernement mexicain par différents Etats pendant la période 1994-1996 ne portait sur le délit de torture, qui est pourtant qualifié dans le Code pénal fédéral et prévu dans les traités internationaux relatifs à l'extradition ratifiés par le Mexique.

Article 8


99. Textes régissant l'extradition :


En matière de juridiction fédérale


Constitution des Etats-Unis du Mexique (art. 119 et 15);


Conventions et traités internationaux relatifs à l'extradition ou à l'entraide judiciaire;


Code pénal fédéral;


Code de procédure pénale;


Code de procédure civile;


Loi fédérale relative aux agents de la fonction publique;


Loi relative à l'extradition;


Loi organique relative au Bureau du Procureur général de la République;


Loi organique relative à l'administration publique;


Jurisprudence de la deuxième chambre de la Cour suprême de justice de la nation.


En matière de juridiction commune


Code pénal en matière de juridiction commune;


Code de procédure pénale en matière de juridiction commune;


Code de procédure civile en matière de juridiction commune;


Loi organique relative au Bureau du Procureur général de justice de l'Etat.

Article 9

Dispositions concernant l'entraide judiciaire dans les procédures
pénales relatives aux affaires de torture


100. En ratifiant la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Mexique s'est engagé à accorder aux autres Etats parties l'entraide judiciaire la plus large possible dans toute procédure pénale concernant les infractions visées à l'article 4, y compris en ce qui concerne la communication de tous les éléments de preuve dont il dispose et qui sont nécessaires aux fins de la procédure. Le 12 février 1986, le Président de la République a promulgué le décret portant ratification de la Convention, qui a été publié au Journal officiel de la Fédération le 6 mars 1986.

101. Par ailleurs, le Gouvernement mexicain s'acquitte des obligations internationales relatives aux procédures pénales concernant le délit de torture qui lui incombent en vertu des accords de coopération et d'entraide judiciaire qu'il a conclus avec les Etats suivants : Allemagne, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Espagne et Etats-Unis d'Amérique.


102. Au niveau multilatéral, le Mexique a ratifié les instruments internationaux relatifs à la coopération et à l'entraide judiciaire dans les procédures pénales relatives au délit de torture ou y a adhéré : Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, divers accords relatifs à l'administration des preuves à l'étranger et à l'information concernant le droit des autres pays.

Article 10

Enseignement et information concernant l'interdiction de la torture :
formation du personnel civil et militaire, du personnel médical,
des agents de la fonction publique et des autres personnes
qui peuvent intervenir dans la garde, l'interrogatoire ou le
traitement des individus arrêtés, détenus ou emprisonnés


103. L'article 2 de la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture dispose ce qui suit :

"Les organes du pouvoir exécutif fédéral chargés de l'administration de la justice mettront en oeuvre des programmes permanents et établiront des procédures visant à :
...

II) organiser des cours de formation à l'intention de son personnel pour promouvoir le respect des droits de l'homme;

III) assurer la professionnalisation des personnels de justice;


IV) promouvoir la professionnalisation des agents publics qui interviennent dans la garde et le traitement de tout individu arrêté, détenu ou emprisonné."


104. En application de cet article, les divers organes du pouvoir exécutif fédéral ont élaboré, le plus souvent en coordination avec la Commission nationale des droits de l'homme, des programmes de formation à l'intention des agents publics appelés à intervenir et du personnel médical, pour leur enseigner à reconnaître les cas de torture et à détecter les séquelles de tortures physiques ou psychologiques.


Commission nationale des droits de l'homme


105. Pour renforcer la culture des droits de l'homme, la Commission nationale dispense une formation en la matière aux membres des divers corps de sécurité et des forces armées. Les programmes de formation sont tout d'abord destinés aux agents publics fédéraux en raison de la compétence de la Commission nationale des droits de l'homme; toutefois, pour assurer une action préventive et promouvoir une culture des droits de l'homme, la Commission dispense aussi une formation aux agents municipaux et aux agents des Etats fédérés, en coordination avec les commissions de chaque Etat et en faisant appel aux universités et à des organisations non gouvernementales.


106. Il existe actuellement des programmes de formation destinés aux membres des organes responsables suivants de la sécurité publique ou nationale : agents de police en cours d'études, agents de police en activité exerçant des fonctions préventives ou municipales, agents de la police judiciaire des Etats et du ministère public de la juridiction commune, gardiens, agents des services d'immigration, membres de la police fédérale de la route, personnel des services du Procureur général de la République (agents administratifs, agents de la police judiciaire fédérale et agents du ministère public fédéral).


Ecoles de police


107. Une campagne de sensibilisation a été lancée à l'intention de tous les agents de police de tous les organismes fédéraux et de chaque Etat. Un programme pilote a été mis sur pied à l'école de police de l'Etat d'Aguascalientes, selon un modèle de formation permettant non seulement d'incorporer au programme des cours le thème des droits de l'homme, mais de l'évoquer dans toutes les disciplines enseignées.


108. C'est ainsi que les techniques de neutralisation ne demandent pas seulement la connaissance des moyens de maîtriser les individus et les groupes, le maniement d'armes et des exercices physiques, mais également la connaissance de la portée de l'utilisation de la force sur le plan temporel et technique et eu égard au principe de proportionnalité. Ces techniques doivent être apprises en même temps que les diverses techniques de police et non pas comme des cours théoriques sans rapport avec la réalité.


109. Avant le programme actuel, la Commission nationale des droits de l'homme avait élaboré un guide de l'agent de police et une brochure, largement diffusés aux organes de police.


Agents de police municipaux et agents de la police de prévention criminelle


110. Un programme de formation a été lancé à l'intention des agents de la police de prévention criminelle et des agents municipaux dans l'Etat de Nayarit; il s'agissait de les familiariser avec les principes fondamentaux de respect des droits de l'homme et de leur montrer les conséquences et les limites de leur action.


Agents de la police judiciaire des Etats


111. Pendant la période considérée, des programmes de formation ont été menés en collaboration avec les commissions des droits de l'homme de chaque Etat et avec les bureaux du Procureur général dans les Etats de Hidalgo, Oaxaca, San Luis Potosí, Chihuahua, Tamaulipas et dans le District fédéral. Il est prévu d'organiser les mêmes programmes dans les Etats de Veracruz, Yucatán et Quintana Roo. De mai à décembre 1995, 342 représentants du ministère public et 693 agents de la police judiciaire ont reçu une formation, qui concerne principalement l'usage de la force et le problème de la détention arbitraire et vise également à inculquer les règles à respecter dans l'exercice des fonctions de police.


Gardiens de prison


112. Dans le cadre d'un programme intitulé "Les droits de l'homme dans le Centre de réadaptation sociale - CERESO", permettant d'aborder des questions essentielles comme celle de connaître les droits qui peuvent être violés dans le centre de réadaptation sociale et les droits des détenus que les gardiens de prison peuvent être amenés à violer, une formation a été dispensée à l'intention des gardiens de prison de l'Etat de Querétaro et a bénéficié à ce jour à 70 personnes. Il est prévu d'étendre très largement le programme en collaboration avec des organisations non gouvernementales et avec les établissements pénitentiaires, en tenant compte particulièrement de la situation des autochtones et de la situation des femmes détenues. Des cours de formation seront également organisés dans la colonie pénitentiaire des Iles Marías.


Agents des services d'immigration


113. Un nouveau programme a été lancé dans le cadre de la formation entreprise à l'intention des agents des services d'immigration, à la suite de la publication par la Commission nationale des droits de l'homme en avril 1995 d'un rapport intitulé "Frontera Sur, Informe sobre Violaciones a los Derechos Humanos de los Immigrantes" (Frontière Sud : Rapport sur les violations des droits fondamentaux des immigrants). Dans deux villes du Chiapas, Tapachula et Comitán, 102 agents des services d'immigration ont reçu une formation, ce qui portait à 230 le nombre d'agents formés dans les Etats du Chiapas, de Veracruz, de Tabasco et de Oaxaca.


114. La formation a été organisée en tenant compte des constatations et des suggestions de la Commission nationale des droits de l'homme; elle vise à déterminer les droits fondamentaux qui doivent être protégés lors de l'exercice de leurs fonctions par les agents des services d'immigration et à élaborer une brochure destinée aux immigrants sans papier, afin de les informer sur leurs droits et sur le traitement digne qu'ils doivent recevoir sur le territoire mexicain.


Police fédérale de la route


115. Le programme de formation des agents de la police fédérale de la route a été lancé dans l'Etat de Nayarit, sous la forme d'un atelier auquel ont participé près de 800 agents; il s'agissait d'un premier cours de sensibilisation portant sur deux thèmes : la dignité avec laquelle eux-mêmes doivent être traités en tant que sujets de droits fondamentaux et la dignité avec laquelle ils doivent à leur tour traiter la population, dans le strict respect des droits fondamentaux.


Agents de la police judiciaire fédérale


116. Un programme de sensibilisation à l'intention de 1 975 agents du Bureau du Procureur général de la République a été mené à bien dans tout le pays; 579 représentants fédéraux du ministère public, 746 agents de la police judiciaire fédérale et 50 agents administratifs y ont participé.


117. La formation a été dispensée aux personnels en fonction, dans leur propre service. La première phase de sensibilisation portait sur trois droits fondamentaux, le droit à la vie, le droit à la dignité et le droit à la liberté; chacun a été analysé sous ses deux aspects, celui de l'agent public en tant que sujet de droit et celui du traitement qu'il doit accorder à la population dans l'accomplissement de ses obligations d'agent de la police judiciaire fédérale.


118. A chaque fois, les formateurs se sont efforcés d'unifier les critères concernant les notions, l'éthique et la science des valeurs morales qui sous-tendent ces principes fondamentaux ainsi que leur expression juridique et leurs conséquences juridiques, en vue de remédier à l'absence d'information particulière sur la torture, les détentions arbitraires, l'utilisation d'armes à feu, la législation nationale et les instruments internationaux ratifiés par le Mexique par exemple.


119. En outre, comme l'avaient demandé les agents publics eux-mêmes, tous les bureaux du Procureur général de la République, dans tous les Etats, ont reçu des publications et une information sur le thème des droits de l'homme et sur les questions qui doivent faire l'objet d'une attention particulière; en outre des séminaires ont été organisés avec la participation de la Commission nationale des droits de l'homme et de l'Institut de formation du Bureau du Procureur général de la République.


Ecole militaire supérieure


120. La Commission nationale des droits de l'homme a lancé des programmes de formation en la matière dans le cadre de la formation de l'état-major de l'armée de terre et de l'armée de l'air, ainsi qu'à l'intention du personnel de direction, du corps enseignant et, à l'occasion de cours spéciaux de l'Ecole supérieure militaire, de tous les officiers de l'armée mexicaine et de boursiers étrangers.


121. Les cours consistaient notamment en une analyse des courants philosophiques et moraux, avec un rappel historique de l'évolution théorique et juridique des droits de l'homme dans le monde entier, du droit constitutionnel mexicain et du droit international, du droit humanitaire et de la législation militaire du Mexique ainsi que des instruments de protection des droits de l'homme, une place particulière étant faite à l'institution de l'ombudsman et au fonctionnement de la Commission nationale des droits de l'homme. En 1995, 440 officiers supérieurs ont participé à ces cours.


Bureau du Procureur général de la République


122. Conformément à l'article 10 de la Convention, le Bureau du Procureur général de la République s'est employé à faire connaître, enseigner et promouvoir les droits de l'homme en son sein même, en organisant des cours de formation et des programmes de prévention à l'intention des groupes vulnérables et en diffusant des publications et du matériel didactique. Ce travail permanent a contribué à une réduction manifeste des plaintes déposées pour torture, comme l'atteste le dernier rapport de la Commission nationale des droits de l'homme.


123. Les programmes de formation mis en oeuvre par l'Institut de formation du Bureau du Procureur général de la République visent à obtenir que les représentants du ministère public fédéral et les agents de la police judiciaire fédérale s'acquittent mieux de leurs fonctions.


124. En 1995, le Bureau du Procureur général de la République, par l'intermédiaire des services du contrôleur interne, a mené diverses actions tendant non seulement à réprimer les agents publics qui avaient enfreint la loi mais aussi à organiser un programme de formation aux droits de l'homme ayant un caractère permanent, en vue de donner une formation aux agents publics de l'institution, de façon que la justice soit administrée avec plus d'efficacité et dans un plus grand respect de la légalité, comme l'autorité judiciaire en a la responsabilité à l'égard de la société.


125. Récemment, le Bureau du Procureur général de la République a compilé plusieurs instruments nationaux et internationaux en vigueur pour le Mexique qui portent sur la protection des droits de l'homme, en vue de publier un recueil à l'intention des représentants du ministère public fédéral et d'une façon générale des agents publics relevant du Bureau du Procureur genéral qui disposeront ainsi d'un ouvrage de référence leur permettant de s'acquitter de leurs fonctions dans le strict respect de la loi et d'éviter à tout moment de commettre des actes qui puissent être considérés comme attentatoires aux droits fondamentaux des individus.


Ministère de la défense nationale


126. Le Ministère de la défense nationale organise des cours de perfectionnement à l'intention des agents de l'Etat qui participent à la garde, à l'interrogatoire ou au traitement de tout individu arrêté, détenu ou emprisonné.


127. En outre les personnels de la justice militaire ont suivi divers cours sur les droits de l'homme, organisés conjointement par l'Université nationale autonome de Mexico et par l'Académie mexicaine des droits de l'homme, afin de mettre constamment à jour leurs connaissances, qu'ils transmettent à leur tour au reste du personnel militaire, dans le cadre des écoles militaires et par des conférences.


128. Le Ministère de la défense nationale a publié plusieurs manuels, mémentos et recueils d'instructions, par exemple :


Manuel sur le comportement du personnel de l'armée de terre et de l'armée de l'air dans la lutte permanente contre le trafic de stupéfiants
Comportement au combat


Résolution de problèmes particuliers liés à l'application des règles de la guerre


129. On notera que les deux derniers manuels s'inspirent des Conventions de Genève de 1949 et des Conventions concernant les lois et coutumes de la guerre adoptées par la Conférence internationale de La Haye.


130. La directive concernant l'instruction, les programmes institutionnels et les programmes généraux d'étude des unités, services, installations et centres de formation des forces armées, contient aussi un volet consacré à l'enseignement et au respect des droits de l'homme et à l'application de la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture.

Article 11

Surveillance systématique sur les règles, méthodes et instructions
concernant le traitement des personnes interrogées,
arrêtées, détenues ou emprisonnées


131. On trouvera exposés ci-après les lois et règlements qui régissent l'exécution des peines, et où se trouve consacré le principe du traitement digne et humain à accorder à tout détenu :


Loi établissant les normes minimales relatives à la réadaptation sociale des condamnés dans tous les Etats de la Fédération


Règlement des centres fédéraux de réadaptation sociale


Règlement de la colonie pénitentiaire fédérale des Iles Marías


Règlement des centres de réclusion et des centres de réadaptation sociale du District fédéral


Règlements des centres de réadaptation sociale et des centres de réclusion dans les Etats de la Fédération


Loi et règlement de la Commission des droits de l'homme du District fédéral


Lois et règlements des commissions des droits de l'homme des Etats.


132. Le personnel pénitentiaire est placé sous la supervision des autorités locales et fédérales ainsi que des Commissions des droits de l'homme compétentes.


133. La Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale, qui relève du Ministère de l'intérieur, nomme des délégués régionaux. Dans chaque Etat la Direction de la prévention et de la réadaptation sociale, la Commission des droits de l'homme ainsi que les visiteurs généraux et les visiteurs adjoints se rendent régulièrement dans les prisons.


134. Les détenus peuvent adresser des plaintes à différents organes, par exemple au Conseil technique interdisciplinaire des centres de détention qui les examine et statue conformément au règlement de l'établissement.


135. Les autres mécanismes, au fonctionnement desquels la Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale du Ministère de l'intérieur est directement associée, sont les suivants :


a) Les délégués régionaux se rendent dans les prisons et entendent les détenus. Ils transmettent les plaintes qu'ils reçoivent à l'autorité hiérarchique, et une enquête est menée en collaboration avec le personnel de la Direction générale;


b) Des "boîtes aux lettres rouges" ont été installées dans les établissements pénitentiaires afin de permettre aux détenus d'adresser directement leurs plaintes au Ministère de l'intérieur sans passer par les autorités pénitentiaires. Les requêtes déposées par les détenus dans la boîte aux lettres sont acheminées par le Service postal mexicain à la "Coordination des boîtes aux lettres pénitentiaires", qui les envoie à la Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale où elles sont immédiatement examinées. Le service compétent informe par écrit le demandeur de la suite donnée à sa plainte ou à sa requête;


c) Acheminement direct de la correspondance des détenus ou des membres de leur famille. La Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale fait parvenir ce courrier au service compétent qui l'examine immédiatement. Le délégué régional est chargé de mener une enquête;


d) Le Service de l'information juridique, qui relève directement de la Direction générale, répond, à la lumière du dossier du détenu, aux demandes de renseignement des membres de la famille. Les plaintes sont transmises au Secrétaire particulier du Directeur général et au délégué régional afin qu'ils enquêtent sur les faits allégués.


136. Les droits et garanties des prisonniers sont énoncés dans les textes suivants :


a) Loi établissant les normes minimales relatives à la réadaptation sociale des condamnés :


" Article 13, paragraphe 3 :


... les détenus ont le droit d'être reçus et entendus par les fonctionnaires de l'établissement pénitentiaire, de présenter des plaintes et des demandes, formulées en termes pondérés et respectueux, aux autorités extérieures à l'établissement et de les présenter personnellement aux fonctionnaires officiellement chargés de visiter les prisons.


Toutes formes de punition consistant en tortures ou en traitements cruels ou en violences inutiles sont interdites. Les pavillons ou quartiers dits "de distinction" accueillant les détenus en fonction de leurs ressources, moyennant le paiement d'une contribution ou d'une pension sont également interdits ..."


b) Règlement des centres fédéraux de réadaptation sociale


" Chapitre X : Du régime intérieur, article 122


Tout détenu peut, par l'intermédiaire du représentant du Directeur général de la prévention et de la réadaptation sociale dans le Centre, adresser des plaintes et des requêtes individuelles à la Direction générale, qui les examine et y donne suite."


" Chapitre XI : Des mesures disciplinaires, article 128


Tout interne peut, par lui même ou par l'intermédiaire d'un membre de sa famille, de son défenseur ou de toute personne désignée par lui, contester, verbalement ou par écrit, la mesure disciplinaire dont il fait l'objet devant le Conseil technique interdisciplinaire ou devant la Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale qui, dans un délai de 48 heures prennent une décision et la communiquent au directeur de l'établissement en vue de son exécution et à l'intéressé, en versant une copie de la décision à son dossier."


" Article 129


Il est interdit d'infliger des tortures ou des mauvais traitements portant atteinte à la santé physique ou mentale des détenus à titre de sanctions disciplinaires.


La violation de cette disposition donne lieu aux sanctions prévues dans le présent règlement, sans préjudice de la responsabilité qui pourrait incomber au personnel des centres fédéraux de réadaptation sociale au regard du droit pénal, du droit administratif et du droit du travail."


c) Règlement de la colonie pénitentiaire fédérale des îles Marías :


" Chapitre VIII : Des incitations et des sanctions, article 52


La procédure prévue pour prendre des sanctions en cas d'infraction au présent règlement consiste en une audience unique présidée par le Directeur de l'établissement qui, après avoir entendu le contrevenant et recueilli des éléments susceptibles de prouver qu'il y a eu faute et d'établir la responsabilité, rend une décision motivée conformément au présent règlement et à la lumière de l'avis émis par le Conseil technique interdisciplinaire."


" Article 53


Il est formellement interdit d'aménager des cellules disciplinaires ou des cachots et de recourir à des tortures ou à des mauvais traitements psychiques ou moraux qui portent atteinte à la santé ou à la dignité du détenu. Toute infraction au présent article entraîne la révocation immédiate de la personne qui l'a commise ou ordonnée, sans préjudice des sanctions pénales prévues par la loi."


" Article 54


Le contrevenant peut, dans les 15 jours suivant le jour de la notification de la sanction disciplinaire, faire appel de cette décision par écrit devant la Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale."


" Article 55


La Direction générale de la réadaptation sociale prend une décision définitive dans un délai de dix jours à compter de la formation du recours et notifie cette décision au contrevenant."
d) Règlement des établissements pénitentiaires et des centres de réadaptation sociale du District fédéral :


" Chapitre X : Le régime intérieur des établissements pénitentiaires, article 136
Il est interdit à une autorité quelle qu'elle soit de recourir à toute violence physique ou morale ou à des procédés portant atteinte à la dignité des détenus, ou d'inciter autrui à le faire."


" Article 138


... traiter les détenus et les membres de leur famille de manière affable et juste et respecter leur dignité ..."
" Article 149


Les sanctions disciplinaires visées à l'article 148 sont imposées sur avis du Conseil technique interdisciplinaire, rendu à la séance qui suit immédiatement la date à laquelle l'infraction a été commise."


" Article 150


Un détenu ne peut être puni sans avoir été informé de l'infraction qui lui est reprochée et sans avoir présenté sa défense."


" Article 151


Dès qu'il est informé qu'une infraction est imputée à un détenu, le directeur ou son remplaçant ordonne la comparution du contrevenant présumé devant le Conseil technique interdisciplinaire, qui l'entend et prend une décision. Cette décision est consignée par écrit, le texte original est versé au dossier et une copie est remise au détenu. La décision doit mentionner de façon succincte la faute commise, les arguments invoqués par le contrevenant pour sa défense et, s'il y a lieu, la sanction disciplinaire infligée."


" Article 152


Le détenu, un parent, son défenseur ou toute personne désignée par lui peut, oralement ou par écrit, directement ou selon la procédure prévue à l'article 25 du présent règlement, contester la sanction disciplinaire auprès du Conseil technique interdisciplinaire ou de la Direction générale des établissements pénitentiaires et des centres de réadaptation sociale. Le Conseil ou selon le cas la Direction se prononce dans un délai de 48 heures et la communique au directeur de l'établissement, en vue de son exécution et à l'intéressé."


" Article 154


Les délits ou les fautes commis par le personnel du système pénitentiaire du District fédéral sont sanctionnés conformément à la loi fédérale sur la responsabilité des agents de la fonction publique et aux dispositions applicables du Code pénal et du Code du travail."

Article 12

Autorités chargées de procéder immédiatement à une enquête impartiale
sur les actes de torture, leurs fonctions et leurs méthodes de travail


137. En matière de juridiction fédérale, c'est au Bureau du Procureur général de la République qu'il incombe d'enquêter rapidement et de manière impartiale sur les actes de torture, par l'intermédiaire des services du contrôleur interne, dont les attributions sont définies par le décret d'application de la loi organique relative au Bureau du Procureur général de la République. Il a notamment les fonctions suivantes :


" Chapitre V, article 8


I. Il réalise les études sur l'organisation et la mise en mouvement du système intégré de contrôle du Bureau du Procureur général de la République, afin d'évaluer leur fonctionnement, de vérifier s'ils utilisent efficacement les ressources dont ils disposent et d'éviter d'éventuelles irrégularités. Il communique les résultats de ces études au Procureur ainsi qu'au secrétariat des services de contrôle et du développement administratif en vue de renforcer le système d'évaluation et de contrôle de l'Etat;
...


V. Il enquête et statue, conformément aux règles et procédures établies par le secrétariat des services de contrôle et du développement administratif et par les instruments juridiques applicables, sur les plaintes dont il est saisi, qui dénoncent des manquements des agents publics dans l'exercice de leurs fonctions;


VI. Il prend à l'égard des agents publics les sanctions prévues par la loi fédérale sur la responsabilité des agents publics;


VII. Il dresse, s'il y a lieu, la liste des irrégularités imputées aux agents publics, dans l'exercice de leurs fonctions ...
...


XIII. Il surveille et évalue la mise en oeuvre des mesures visant à remédier aux irrégularités constatées et prend les sanctions voulues à l'égard des agents publics qui n'ont pas suivi les recommandations qui leur avaient été faites, conformément à la loi fédérale sur la responsabilité des agents de la fonction publique;
...


XV. Il ordonne la suspension temporaire des agents publics, conformément aux dispositions de la loi fédérale sur la responsabilité des agents publics."
138. Le Bureau du Procureur général de la République est aussi, en dernier ressort, l'organe de contrôle de tous les représentants fédéraux du ministère public, y compris le Procureur général du District fédéral et chacun des procureurs généraux des Etats qui représentent le ministère public dans leur juridiction.


Etablissements de détention et de réclusion


139. Plusieurs organes sont chargés de la supervision des établissements de détention et de réclusion :


Au niveau national


140. La Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale a créé un corps de délégués régionaux chargés d'examiner les plaintes et d'inspecter les établissements de détention, dans lesquels ils se rendent même en l'absence de plaintes. S'ils reçoivent une plainte d'un détenu ou d'un membre de sa famille, ils se rendent dans l'établissement, mènent une enquête et font rapport aux autorités compétentes.


141. La Commission nationale des droits de l'homme comprend un service - la troisième inspection des affaires pénitentiaires - qui est chargé d'examiner toutes les plaintes des personnes privées de liberté. Les visiteurs se rendent dans les établissements de détention pour enquêter et formulent des recommandations s'ils constatent une violation des droits fondamentaux des détenus.


142. Il existe dans chaque Etat de la Fédération une commission des droits de l'homme dotée des mêmes attributions que la Commission nationale; ces commissions inspectent les prisons sans qu'il y ait nécessairement plainte, et si elles reçoivent une plainte d'un détenu ou de sa famille elles lui rendent visite pour enquêter, et font rapport aux autorités compétentes.


District fédéral


143. La Direction générale des établissements pénitentiaires et des centres de réadaptation sociale, qui est visée aux articles 159, 160 et 161 du Règlement relatif aux établissements pénitentiaires et aux centres de réadaptation sociale du District fédéral, est un organe de contrôle général chargé d'assurer la supervision permanente de tous les centres de détention du Département du district fédéral, et composé de représentants des organes suivants :


a) Assemblée des représentants du District fédéral;


b) Direction de la réadaptation sociale;


c) Direction générale de la prévention et de la réadaptation sociale;


d) Bureau du Procureur général du District fédéral;


e) Coordination générale juridique du Département du District fédéral;


f) Tribunal supérieur de justice du District fédéral;


g) Direction générale des services médicaux du Département du District fédéral.


144. L'organe de contrôle vérifie sur place comment les établissements sont administrés et gérés et si les détenus sont traités dans le strict respect de la loi relative aux règles minima et du règlement susmentionné. Il porte les irrégularités constatées ou les plaintes entendues à la connaissance de la Direction générale et saisit les autorités compétentes si des actes illicites ont été commis.


145. La Commission des droits de l'homme du District fédéral dépêche dans les établissements de détention de la ville de Mexico des inspecteurs qui sont notamment chargés d'enquêter sur les plaintes des détenus et de formuler des recommandations lorsqu'ils constatent des violations des droits fondamentaux des détenus.


Ministère de la défense nationale


146. Après la création, le 6 juin 1990, de la Commission nationale des droits de l'homme, le Ministère de la défense nationale a demandé au Bureau du Procureur général militaire de prêter une attention particulière à chacune des plaintes qui lui sont adressées. Ce Bureau a donc créé un service spécialement chargé d'examiner les plaintes et d'y donner suite conformément à la procédure et aux règles indiquées par la Commission nationale des droits de l'homme.


147. Il existe en outre au sein de l'Inspection générale de l'armée de terre et de l'armée de l'air des services chargés de recevoir les plaintes. Lorsqu'ils soupçonnent qu'une infraction pénale a été commise, ils en avisent le parquet militaire afin qu'une enquête soit menée; s'il y a lieu, des poursuites sont engagées contre le ou les auteurs présumés et l'affaire est renvoyée à l'autorité judiciaire compétente, qui a pour instruction de mener l'enquête préliminaire consciencieusement, minutieusement et professionnellement, en se fondant sur la technique, les règles et la logique juridiques. Si au contraire il n'existe pas d'élément suffisant pour attester qu'une infraction a été commise ou si la plainte n'est pas fondée, le dossier est transmis au Bureau du Procureur général militaire qui l'étudie, l'analyse et donne son avis puis, s'il y a lieu, classe l'affaire et en informe les intéressés, ou ordonne un complément d'enquête.

Article 13

Droit de porter plainte pour torture et d'être protégé contre
tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison
de la plainte déposée


Statistiques relatives aux plaintes pour délit de torture


148. D'après la Commission des droits de l'homme, entre mai 1992 et mai 1993, les actes de torture venaient en septième position dans la liste des faits attentatoires aux droits de l'homme; au nombre de 246, les plaintes pour torture représentaient 2,8 % du nombre total des plaintes reçues par la Commission des droits de l'homme, s'élevant à 8 793, soit une baisse de 43 % par rapport à l'année précédente.


149. Durant sa quatrième année d'existence, de mai 1993 à mai 1994, la Commission nationale des droits de l'homme a reçu 141 plaintes pour torture, représentant 1,6 % des 8 804 plaintes déposées pour violation des droits de l'homme; la torture était donc au dixième rang. Entre mai 1994 et mai 1995, les plaintes pour torture avaient diminué de 68,1 % par rapport à l'année précédente. Quarante-six plaintes reçues pendant cette période pour des actes qualifiés attentatoires aux droits de l'homme portaient sur des tortures.


150. On peut expliquer la diminution des cas de torture par les réformes législatives ainsi que par le développement des cours de formation qui ont permis de progresser dans le traitement des affaires de torture, puisqu'on s'efforce maintenant davantage de déceler les cas de torture même en l'absence de marques physiques, étant donné que les tortionnaires évitent les méthodes qui laissent des traces. De grands progrès ont été accomplis dans la formation de ceux qui procèdent aux expertises nécessaires pour déceler la torture psychologique.


151. Au-delà des simples chiffres, le Mexique poursuit ses efforts pour que les sanctions prévues dans les dispositions juridiques et politiques soient effectivement appliquées aux responsables du délit de torture. Malgré tous les progrès enregistrés, il reste encore beaucoup à faire pour que les diverses autorités soient pénétrées de l'importance d'une répression sévère de la torture, conformément à la loi.


152. Deux questions fondamentales se posent : la valeur des recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme dans tous les domaines de la vie publique et la volonté politique des autorités. Il reste encore beaucoup à faire à ces deux égards, mais les effets de ce qui a déjà été réalisé ont grandement changé la vie publique mexicaine. La nécessité de respecter les droits de l'homme est peu à peu admise dans les institutions mexicaines, en particulier en ce qui concerne l'administration de la justice.


153. Le Gouvernement mexicain considère qu'il est possible d'exercer pleinement et de façon responsable les fonctions de sécurité publique et de lutte contre la délinquance dans le strict respect des garanties individuelles. Certes, la culture favorable au respect des garanties individuelles est encore fragile au Mexique mais le respect de la légalité et l'édification d'une culture des droits de l'homme ont pu être peu à peu renforcés.


154. On mesure ainsi les progrès réalisés par l'Etat mexicain conformément aux engagements contractés en vertu de la Convention contre la torture, même s'il faut reconnaître qu'il reste encore beaucoup à faire pour atteindre l'objectif visé, qui est l'élimination totale de la pratique de la torture.

Article 14

Mesures juridiques et autres visant à assurer aux victimes de torture
une réparation et une indemnisation équitable et adéquate


155. Les mesures juridiques et autres visant à assurer aux victimes de torture une bonne réparation du dommage et à les indemniser de façon équitable et adéquate sont énoncées à l'article 10 de la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture, qui se lit comme suit :


" Quiconque se rend coupable des infractions visées dans la présente loi est tenu de prendre à sa charge les frais d'assistance juridique, les frais médicaux et funéraires, les coûts de la réadaptation ou les frais de toute autre nature engagés par la victime ou sa famille à la suite de l'infraction.
Il est également tenu de réparer le préjudice et de verser une indemnité à raison des dommages causés à la victime ou aux personnes à sa charge dans les cas suivants :


I. Décès;

II. Atteinte à la santé;
III. Perte de la liberté;
IV. Perte de revenus économiques;

V. Incapacité de travail;

VI. Perte de biens ou atteinte à la propriété;

VII. Atteinte à la réputation.


Pour fixer les montants de ces indemnités, le juge tient compte de l'ampleur du dommage causé.
L'Etat est tenu de réparer les dommages et préjudices selon les dispositions des articles 1927 et 1928 du Code civil."


156. En vertu de ces dispositions relatives à la responsabilité de l'Etat pour le District fédéral en matière de juridiction commune et pour l'ensemble de la République en matière de juridiction fédérale, l'Etat a une obligation subsidiaire de réparation.


157. On notera que ces mesures s'appliquent non seulement aux citoyens mexicains mais aussi aux étrangers, notamment aux réfugiés, puisque la Constitution dispose, en son article premier, que toutes les personnes jouissent des garanties individuelles qu'elle énonce.


158. En ce qui concerne la réadaptation physique et psychologique, le Bureau du Procureur général du District fédéral met en oeuvre des programmes spéciaux, par l'intermédiaire de son organe subsidiaire chargé des droits de l'homme et de la Direction générale d'aide aux victimes.

Article 15

Mesures juridiques visant à éviter que les déclarations obtenues par
la torture puissent être invoquées comme un élément de preuve


159. Cette question est traitée à l'article 20 de la Constitution qui se lit comme suit :


" Dans tout procès pénal, l'inculpé bénéficie des garanties suivantes :


I. Dès qu'il le demande, le juge doit lui accorder la liberté provisoire sous caution, à condition que le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction et des peines pécuniaires encourues soit garanti et qu'il ne s'agisse pas d'une infraction d'une gravité telle que la loi exclut la possibilité de cette mesure.


Pour déterminer le montant et les modalités de la caution, il est tenu compte des ressources de l'inculpé. La loi fixe les circonstances dans lesquelles l'autorité judiciaire peut réduire le montant initial de la caution.


Le juge peut mettre fin à la liberté provisoire lorsque l'inculpé manque gravement à l'une quelconque des obligations légales qui lui incombent dans le cadre de son procès;


II. L'inculpé ne peut pas être contraint de faire une déclaration. Toute mise au secret, intimidation ou torture est interdite et réprimée par la loi pénale. Les aveux faits devant toute autorité autre que le ministère public ou le juge, ou devant ceux-ci sans l'assistance du défenseur, n'ont aucune valeur de preuve;


III. L'inculpé est informé en audience publique et dans les 48 heures à compter du moment où il aura été mis à la disposition de la justice, du nom de l'accusateur ainsi que de la nature et du motif de l'accusation, afin qu'il connaisse l'acte punissable qui lui est imputé et qu'il puisse contester les faits qui lui sont reprochés lors de sa première comparution;


IV. S'il le demande, il est confronté aux témoins à charge, en présence du juge;


V. Les témoignages et les autres preuves qu'il produira seront admis; il dispose du temps que la loi estime nécessaire à cet effet et il bénéficie de l'assistance requise pour obtenir la comparution de ses témoins, à condition qu'ils se trouvent sur le lieu du procès;


VI. L'inculpé est jugé en audience publique par un juge ou par un jury composé de citoyens sachant lire et écrire, domiciliés dans la circonscription où l'infraction a été commise, si elle est punie d'un emprisonnement de plus d'un an. Dans tous les cas, les délits commis par voie de presse contre l'ordre public ou la sécurité extérieure ou intérieure de la nation sont jugés par un jury;


VII. Il reçoit tous les renseignements qu'il demande pour se défendre et qui intéressent le procès;


VIII. Il doit être jugé dans un délai de quatre mois s'il s'agit d'un délit passible d'une peine maximale de deux ans d'emprisonnement, et dans un délai d'un an si la peine maximale excède cette durée, à moins qu'il ne demande un allongement du délai pour préparer sa défense;


IX. Dès le début de la procédure, il sera informé des droits que lui confère la présente Constitution et aura droit à une défense adéquate qui sera assurée par lui-même, par un avocat ou par une personne de confiance. S'il ne veut ou ne peut désigner de défenseur après avoir été invité à le faire, le juge lui en commet un d'office. Le défenseur a le droit et le devoir d'être présent à tous les actes de procédure, chaque fois que nécessaire;


X. En aucun cas la privation de liberté ne pourra être prolongée pour non-paiement des honoraires du défenseur ou de toute autre dette, pour cause de responsabilité civile ou pour tout autre motif analogue. De même, la détention provisoire ne peut être prolongée d'une durée supérieure à la peine maximale encourue. Le temps passé en détention provisoire sera déduit de la durée de la peine d'emprisonnement à laquelle l'inculpé pourrait être condamné.


Les garanties prévues aux sections V, VI et IX s'appliquent également pendant l'enquête préliminaire, dans les conditions prévues par la loi; les dispositions des sections I et II ne sont soumises à aucune condition. Dans tout procès pénal, la victime ou la personne lésée par une quelconque infraction, aura le droit de recevoir des conseils juridiques, d'obtenir réparation du préjudice subi s'il y a lieu, de collaborer avec le ministère public, de recevoir une aide médicale d'urgence lorsqu'elle le demande et aura tous les autres droits prévus par la loi."


160. Dans le Code pénal pour le District fédéral en matière de juridiction commune et pour l'ensemble de la République en matière de juridiction fédérale, le paragraphe XII de l'article 225 dispose que se rend coupable de délit contre l'administration de la justice l'agent de la fonction publique, qui "oblige l'inculpé à faire une déclaration en recourant au placement au secret, à l'intimidation ou à la torture,... ."

Article 16

Mesures visant à lutter contre les autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants


161. Les mesures visant à prévenir les mauvais traitements dont pourraient être victimes les personnes qui ont affaire à la justice sont énoncées à la section II de l'article 20 (voir par. 159) et au premier paragraphe de l'article 22 de la Constitution aux termes duquel "sont interdites les peines de mutilation et les peines infamantes, la marque, la flagellation, la bastonnade, la torture de quelque sorte qu'elle soit, l'amende excessive, la confiscation des biens et toutes autres peines inusitées et aux conséquences graves."


162. En vertu du paragraphe XII de l'article 225 du Code pénal, se rend coupable de délit contre l'administration de la justice l'agent de la fonction publique qui "oblige l'inculpé à faire une déclaration en recourant au placement au secret, à l'intimidation ou à la torture... ."


163. La loi fédérale visant à prévenir et réprimer la torture, qui s'applique sur tout le territoire national en matière de juridiction fédérale et dans le District fédéral en matière de juridiction commune, a été promulguée pour compléter les dispositions constitutionnelles visant à lutter contre les peines cruelles, inhumaines ou dégradantes. Son article 4 se lit comme suit :


" Quiconque commet le délit de torture est puni d'un emprisonnement de 3 à 12 ans, de 200 à 500 jours-amende et d'une incapacité d'exercer une fonction, une charge ou un emploi public pendant une durée pouvant aller jusqu'à deux fois la durée de la privation de liberté prononcée. Aux fins de fixer le nombre de jours-amende, il sera tenu compte des dispositions de l'article 29 du Code pénal pour le District fédéral en matière de juridiction commune, et pour l'ensemble de la République en matière de juridiction fédérale."
164. Outre les dispositions législatives mentionnées, on notera les mesures suivantes :


a) Aggravation des peines encourues par les responsables des délits de mauvais traitements, de peines cruelles, inhumaines ou dégradantes;


b) Intensification par le Bureau du Procureur général de la République des efforts tendant à faire appliquer les lois, accords et circulaires, afin que tous les représentants du ministère public s'acquittent le mieux possible de leur tâche;


c) Formation continue et orientation professionnelle à l'intention du personnel de ces services, en vue d'améliorer l'administration de la justice dans le respect des droits de l'homme.

Liste des annexes

Ces documents peuvent être consultés, en espagnol, aux archives du Centre pour les droits de l'homme.


I. Restitution, réparation et réadaptation des victimes de violations graves des droits de l'homme, circulaire publiée au Journal officiel de la Fédération le 10 janvier 1994.

II. Recommandation 98/95 de la Commission nationale des droits de l'homme adressée au Gouverneur de l'Etat de Jalisco et au Procureur général de la République.

III. Code de conduite et de pratique institutionnelle, adopté en 1995.

IV. Règlement général des prisons militaires.

V. Recommandation 73/91 - Affaire Martín Arroyo Luna et consorts.

VI. Recommandation 42/92 - Affaire William Darío Kerguelen Pinilla.

VII. Recommandation 3/90 - Affaire Jorge Argáez Pérez.

VIII. Recommandation 29/90 - Affaire village d'Aguililla (Michoacán).

IX. Recommandation 1/91 - Affaire Pedro et Felipe de Jesús Yescas Martínez.

X. Recommandation 15/91 - Affaire Ricardo López Juárez.

XI. Recommandation 50/91 - Affaire José del Carmen Llergo Totosaus.

 



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