Deuxièmes rapports périodiques des Etats parties prévus en 1992
Additif
MEXIQUE
/Le présent document contient des renseignements complémentaires demandés
par le Comité contre la torture à sa neuvième session, à la fin de son
examen du deuxième rapport périodique du Mexique (CAT/C/17/Add.3), le
17 novembre 1992 (voir les documents CAT/C/SR.130 et 131); voir également
le rapport annuel du Comité contre la torture : Documents officiels de
l'Assemblée générale, quarante-huitième session, Supplément No 44 (A/48/44,
par. 208 à 229).
[28 mai 1996]
TABLE DES MATIERES
Paragraphes
Introduction 1 - 4
I. MESURES LEGISLATIVES 5 - 17
II. STATISTIQUES DES PLAINTES ET DES POURSUITES POUR DELIT DE TORTURE 18
- 30
III. ACTIVITES DE LA COMMISSION NATIONALE DES DROITS DE L'HOMME 31 - 42
IV. ACTIVITES DES SERVICES DU PROCUREUR GENERAL
DE LA REPUBLIQUE 43 - 46
Introduction
1. Le deuxième rapport périodique comprenait des informations jusqu'au
mois de juin 1992 et faisait ressortir l'établissement de la Commission
nationale des droits de l'homme par décret du 6 juin 1990 et l'adoption,
en décembre 1991, de la nouvelle loi fédérale visant à prévenir et à
réprimer la torture.
2. Le présent rapport présente des renseignements fournis par divers organismes,
correspondant à la période allant de mai 1992 à décembre 1995, et concernant
en particulier les activités de la Commission nationale des droits de
l'homme et des services du Procureur général de la République, ainsi
que l'application de la loi fédérale visant à prévenir et réprimer la
torture.
3. Il convient de signaler qu'au cours de la période considérée, il a été
créé des commissions des droits de l'homme dans chacun des Etats de la
République, conformément au décret du 28 janvier 1992, qui a ajouté à
l'article 102 de la Constitution un alinéa B habilitant le Congrès fédéral
et les congrès des Etats à établir des organismes de protection des droits
de l'homme de caractère constitutionnel dans leur domaine respectif de
compétence.
4. On se rappellera que, lorsque le Gouvernement mexicain a soumis au Comité
contre la torture son premier rapport, la Commission nationale était
saisie de toutes les plaintes en la matière. Actuellement, les plaintes
de torture qui impliquent des autorités fédérales sont du ressort de
la Commission nationale et, lorsque ce sont des autorités de tel ou tel
Etat qui sont mises en cause, les plaintes relèvent, en première instance,
de la Commission de l'Etat intéressé, quoique la Commission nationale
puisse exercer son droit d'évocation à cet égard.
I. MESURES LEGISLATIVES
5. Conformément à la loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture,
la torture est un délit punissable en tant que tel du seul fait qu'un
agent public inflige à une personne une douleur ou des souffrances aiguës,
quel que soit le résultat ou les conséquences de ce comportement. C'est
pourquoi lorsqu'un agent public se livre à des actes de torture, généralement
de manière physique, ce délit peut être accompagné d'autres infractions,
telles que celles consistant à proférer des menaces ou à provoquer des
lésions ou même la mort et, lorsque tel est le cas, il se produit ce
que l'on désigne juridiquement sous l'appellation de cumul d'infractions.
6. Dans la pratique, les articles 64 du Code pénal fédéral et 25 du Code
pénal du district fédéral stipulent que cette catégorie d'infractions
est punissable de "la
peine correspondant à l'infraction entraînant la peine la plus grave,
qui pourrait être augmentée de la moitié de la durée maximum de prison
y relative, sans dépasser cependant la peine maximum qui est de 50 ans
d'emprisonnement".
7. Les agents publics qui se rendent coupables du délit de torture sont
donc poursuivis et punis conformément aux dispositions susmentionnées,
et non seulement pour torture, mais pour avoir éventuellement provoqué
aussi des lésions graves ou la mort.
8. Durant la période considérée dans le présent rapport, il a été apporté
à divers textes juridiques des amendements qui ont été incorporés à la
législation fédérale en janvier 1994, de telle sorte que le gouvernement
fédéral est directement responsable de la réparation des dommages et
préjudices causés par le comportement illicite des agents publics, y
compris les préjudices moraux.
9. Quant à la législation nationale applicable en matière de restitution,
d'indemnisation et de traitement des victimes de violations graves des
droits de l'homme, les textes suivants ont été publiés le 10 janvier
1994 au Journal officiel de la Fédération (annexe I) Les annexes mentionnées
dans le rapport peuvent être consultées au secrétariat du Centre des
Nations Unies pour les droits de l'homme. :
a) Code pénal pour le district fédéral en matière de juridiction ordinaire
et pour toute la République en matière de juridiction fédérale;
b) Codes de procédure pénale fédéral et du district fédéral;
c) Loi relative à l'amparo;
d) Loi relative à l'extradition internationale;
e) Code civil pour le district fédéral en matière de juridiction ordinaire
et pour toute la République en matière de juridiction fédérale;
f) Loi fédérale sur la responsabilité des agents de la fonction publique;
g) Loi organique relative au tribunal fiscal de la Fédération;
h) Loi relative au tribunal du contentieux administratif du district fédéral;
i) Loi fédérale visant à prévenir et à réprimer la torture;
j) Loi relative au budget, à la comptabilité et aux dépenses publiques
fédérales;
k) Loi organique relative au pouvoir judiciaire de la Fédération.
10. Selon les amendements susmentionnés, la réparation des dommages provoqués
par un acte illicite comprend, entre autres, l'indemnisation du préjudice
matériel et moral causé, notamment le paiement du traitement nécessaire
au rétablissement de la santé de la victime.
11. Il a été d'autre part stipulé que l'Etat est solidairement responsable
de la réparation des dommages causés par les actes illicites perpétrés
délibérément par ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, et subsidiairement
responsable lorsque de tels actes découlent d'une simple faute; il a
été prévu, à cet effet, des crédits spéciaux dans le budget de l'Etat.
12. Si le dommage découle, d'autre part, d'actes non considérés comme délictueux,
l'Etat est tenu, conformément au Code civil, de garantir l'indemnisation
des dommages et préjudices causés par ses agents dans l'exercice de leurs
fonctions. D'une façon générale, dans tous les cas où la responsabilité
de l'Etat est subsidiaire, il est fait exception des actes perpétrés
délibérément qui engagent, eux, la responsabilité solidaire de l'Etat.
Ainsi, la responsabilité de l'Etat n'est en jeu que lorsque l'agent directement
responsable n'est pas suffisamment solvable pour faire face à sa propre
responsabilité.
13. S'agissant de la responsabilité administrative, on a simplifié le processus
de réparation des dommages, tant en ce qui concerne les délais que les
procédures, puisque, avant les amendements adoptés, il était en fait
impossible d'obtenir réparation en raison des délais requis et de formalités
bureaucratiques excessives. On a, par ailleurs, laissé ouverte la voie
judiciaire aux fins d'une réparation effective au cas où l'agent public
responsable refuserait de s'acquitter de ses obligations.
14. Les amendements ainsi introduits pour rendre l'Etat responsable et,
ce qui est le plus important, réglementer les moyens de faire valoir
les droits reconnus ont des effets préventifs à l'égard de la torture.
Lorsqu'elles se voient tenues de réparer les dommages, comme cela a été
le cas conformément aux récentes recommandations de la Commission nationale
des droits de l'homme, notamment la recommandation 98/95, les autorités
se rendent mieux compte de la nécessité de mettre au point des mécanismes
de contrôle efficaces pour s'assurer que leurs agents publics respectent
la loi, et de dispenser auxdits agents une formation dans le domaine
des droits de l'homme.
15. La recommandation 98/95 (annexe II) précitée 1/, destinée au Gouverneur
de l'Etat de Jalisco et au Procureur général de la République, concernait
les troubles survenus les 3 et 4 mai 1995 dans le Centre de réadaptation
sociale de Guadalajara, où des agents de la police d'Etat et de la police
fédérale ont maltraité des internes et tué sept d'entre eux.
16. Cependant, les services du Procureur général de la République, en application
des dispositions de l'article 2 de la Convention contre la torture, visant
l'obligation, pour les Etats parties, de prendre des mesures législatives,
administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher
que des actes de torture soient commis, veillent à tout moment à ce que
les agents publics respectent les obligations prévues dans la loi d'application
et les engagements souscrits au titre de ladite convention et d'autres
instruments internationaux, comme la Convention interaméricaine pour
la prévention et la répression de la torture.
17. De juin 1992 à décembre 1995, les services du Procureur général de
la République ont publié les textes suivants régissant le comportement
de leurs agents publics en vue de protéger les droits de l'homme et de
lutter contre l'impunité :
a) Le règlement de la loi organique relative aux services du Procureur
général de la République. En 1993, il a été créé la Direction générale
de protection des droits de l'homme, relevant des services du Procureur
général de la République et ayant des fonctions précises conformément
à l'article 29 dudit règlement, comprenant la surveillance, la protection
et la promotion des droits de l'homme, ainsi que la diffusion des valeurs
dont doivent s'inspirer les agents publics au service de la justice,
afin d'éviter des délits comme la torture au moyen d'actions préventives;
b) Le Code de déontologie des agents fédéraux du ministère public et de
la police judiciaire, publié le 24 mars 1993;
c) Le règlement relatif à la carrière des agents de la police judiciaire
fédérale, publié le 24 mars 1993 également;
d) La circulaire du Procureur général de la République 010/93 du 6 avril
1993, portant création du Groupe de suivi des recommandations de la Commission
nationale des droits de l'homme. Cette circulaire vise à permettre de
suivre de manière appropriée les recommandations formulées par la Commission
nationale des droits de l'homme, en ce qui concerne en particulier les
plaintes à l'égard des enquêtes préalables portant sur un délit présumé
de torture ou toute autre faute grave;
e) Le Code de conduite et de pratique institutionnelle, adopté en 1995
(annexe III) 1/;
f) La définition de la mission des services du Procureur général de la
République, adoptée en septembre 1995, selon laquelle :
"
Les services du Procureur général de la République, dont relève le ministère
public, sont un organe essentiel du système fédéral de la justice qui,
dans l'intérêt des individus, de la société et de l'Etat, assure la promotion
et la surveillance du respect de l'ordre
constitutionnel et veille au bon déroulement de la justice dans son domaine de compétence. Ces services participent d'autre part à la prévention des infractions afin d'assurer la sécurité publique.
Cette mission doit être accomplie dans le strict respect des principes
constitutionnels et des lois pertinentes, ainsi que des droits de l'homme,
en tant que condition indispensable au maintien de l'état de droit.
Le ministère public fédéral et ses auxiliaires s'acquitteront toujours
de leurs fonctions humainement et de bonne foi, en s'inspirant des principes
de moralité, de professionnalisme, d'impartialité, de loyauté et d'efficacité.";
g) La circulaire No 001/95 du 10 mars 1995, dans laquelle il est stipulé
que toute communication à laquelle devra procéder un agent public des
services du Procureur général de la République avec la Commission nationale
des
droits de l'homme devra être effectuée par l'intermédiaire des services
du Contrôleur interne, qui seront le seul moyen de liaison avec ledit
organisme.
II. STATISTIQUES DES PLAINTES ET DES POURSUITES
POUR DELIT DE TORTURE
18. Durant la période de mai 1992 à mai 1993, la Commission nationale
des droits de l'homme a situé la torture à la septième place parmi
les violations
présumées des droits de l'homme, compte tenu des 246 plaintes pour torture,
représentant 2,8 % du total de 8 793 plaintes reçues par cet organisme,
le nombre de plaintes pour torture ayant baissé de 43 % par rapport à
l'année précédente.
19. Durant la quatrième année d'existence de la Commission nationale des
droits de l'homme - mai 1993 à mai 1994 - il a été déposé 141 plaintes
pour torture, ces plaintes se situant à la dixième place parmi les violations
présumées des droits de l'homme, et représentant 1,6 % des 8 804 plaintes
déposées au total.
20. De mai 1994 à mai 1995, le nombre de plaintes pour torture a baissé
de 68,1 % par rapport à l'année précédente. Dans 46 plaintes déposées
pendant cette période pour violation présumée des droits de l'homme,
le plaignant a fait état d'actes de torture.
21. Quant aux poursuites pour torture, il a été mené, de 1992 à ce jour,
un total de 37 enquêtes préalables pour torture, se répartissant comme
suit :
Année |
Nombre de personnes mises en examen |
1992 | 18 |
1993 | 8 |
1994 | 0 |
1995 | 10 |
22. D'autre part, la Direction générale de suivi des recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme, relevant des services du Procureur général de la République, a saisi divers juges de district de 31 enquêtes préalables pour délit présumé de torture, se répartissant comme suit :
Année |
Année |
1992 | 28 |
1993 | 0 |
1994 | 3 |
1995 | 0 |
23. La Commission nationale des droits de l'homme a connaissance du fait
que des poursuites pénales ont été engagées contre 53 agents publics
pour délit de torture, ainsi que de l'existence de 14 affaires d'homicide
provoqué par la torture. Le juge compétent a rendu une sentence condamnatoire
pour délit de torture dans 2 affaires et pour délit d'homicide provoqué
par la torture dans 5 autres affaires. Ces affaires sont les suivantes
:
Poursuites pénales pour délit de torture
1. Conformément à la recommandation 73/91, relative à l'affaire Martín
Arroyo Luna et autres, des poursuites pénales ont été exercées contre
Gustavo Castrejón Aguilar (annexe IV) 1/.
2. Conformément à la recommandation 42/92, relative à l'affaire William
Darío Kerguelen Pinilla, des poursuites pénales ont été exercées contre
Mario Santander Embriz (annexe V) 1/.
Poursuites pénales pour délit d'homicide provoqué par la torture
1. Conformément à la recommandation 3/90, relative à l'affaire Jorge Argáez
Pérez, des poursuites pénales ont été exercées contre Alejandro San Pedro
González (annexe VI) 1/.
2. Conformément à la recommandation 29/90, relative à la commune d'Aguililla
Michoacán, des poursuites pénales ont été exercées contre Raymundo Gutiérrez
Jiménez (annexe VII) 1/.
3. Conformément à la recommandation 1/91, relative à l'affaire Pedro
et Felipe de Jesús Yescas Martínez, des poursuites pénales ont été
exercées
contre Omar Olguín Alpízar (annexe VIII) 1/.
4. Conformément à la recommandation 15/91, relative à l'affaire Ricardo
López Juárez, des poursuites pénales ont été exercées contre Enrique
Alvarez Palacios (annexe IX) 1/.
5. Conformément à la recommandation 50/91, relative à l'affaire José
del Carmen Llergo Totosaus, des poursuites pénales ont été exercées
contre
José Rojas Garrido (annexe X) 1/.
24. En outre, dans 7 affaires, la procédure judiciaire n'est pas achevée,
dans 13 autres, les mandats d'arrêt respectifs n'ont pas été exécutés,
et dans 25 autres, les mandats d'arrêt ont été refusés ou annulés par
le juge et un mandat formel de dépôt a été annulé.
25. Parmi les 1 022 recommandations qu'a formulées au total la Commission
nationale des droits de l'homme depuis sa création jusqu'en décembre
1995, des actes avérés de torture ont fait l'objet de 105 d'entre elles,
qui ont fait publiquement ressortir le caractère illégal du comportement
d'agents publics, dont les noms ont été publiés, et où il a été recommandé
d'engager des procédures administratives et pénales. Lesdites recommandations
sont fondées, non seulement sur la législation nationale, mais aussi
sur les traités et accords souscrits par le Gouvernement mexicain, comme
la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants.
26. Des 105 recommandations dont a fait l'objet la torture, il y a lieu
de signaler qu'il a été donné pleinement effet à 72 d'entre elles et
partiellement effet à 32 autres, que 2 demeurent en suspens en raison
de leur caractère récent et qu'une seule n'a pas été acceptée par le
Président du Tribunal supérieur de justice de l'Etat de Sinaloa.
27. Il y a lieu d'analyser la diminution des cas de torture compte tenu
des amendements législatifs dont il a été question plus haut, ainsi que
du développement des cours de formation, grâce auxquels il a été enregistré
un progrès qualitatif du traitement de la torture qui a permis de déceler
des actes de torture en l'absence de traces physiques puisque ceux qui
s'y livrent évitent de laisser aucun indice. On a d'autre part beaucoup
avancé en matière de formation en vue de la réalisation d'examens d'experts
auxquels il doit être procédé pour déceler la torture psychologique.
28. Au-delà des chiffres, le Mexique continue de s'efforcer pour qu'il
soit donné entièrement effet aux sanctions juridiques et politiques dont
font l'objet les auteurs d'actes de torture. Nonobstant ce qui précède,
beaucoup reste encore cependant à faire pour sensibiliser les diverses
autorités à l'importance d'une rigoureuse répression de la torture conformément
au droit.
29. Deux questions fondamentales se posent simultanément, à savoir celle
de la valeur des recommandations de la Commission nationale des droits
de l'homme dans tous les domaines de la vie publique et celle de la volonté
politique des autorités. Des progrès restent encore à réaliser à ces
deux égards, mais les effets des mesures prises ont changé en grande
partie la vie publique mexicaine. Le respect des droits de l'homme est
progressivement admis dans nos institutions, notamment en ce qui concerne
l'administration de la justice.
30. Le Gouvernement mexicain considère qu'il est possible d'exercer entièrement
et de manière responsable les fonctions de sécurité publique et de lutte
contre la criminalité dans le plein respect des garanties individuelles.
Bien que la culture tendant à promouvoir les garanties individuelles
soit encore fragile, on a réussi à renforcer l'état de droit et le développement
d'une culture des droits de l'homme.
III. ACTIVITES DE LA COMMISSION NATIONALE DES DROITS DE L'HOMME
31. Bien que, pour des raisons de compétence, ce soient maintenant les
commissions locales qui connaissent en premier lieu des plaintes pour
actes de torture de la part des agents des autorités des différents Etats,
la Commission nationale a un pouvoir de révision en seconde instance,
tout en pouvant exercer son droit d'évocation dans les cas suivants :
a) Lorsqu'il s'agit d'affaires mettant en cause des agents publics tant
de la Fédération que des entités fédérées ou des municipalités;
b) En vertu du dépôt de plaintes et de l'exercice de recours à l'égard
des procédures ou résolutions des commissions des droits de l'homme des
différents Etats, ainsi que des informations des autorités locales sur
l'application des recommandations formulées par ces commissions;
c) En cas d'évocation d'une affaire en raison de l'inertie d'une commission
d'un Etat, ou lorsqu'il s'agit d'une violation présumée dont l'importance
dépasse les intérêts de l'Etat fédéré et influe sur l'opinion publique,
sous réserve toutefois que l'affaire revête une gravité particulière.
32. Il convient de préciser que, dans les affaires fédérales, comme il
en est de la torture, il n'existe aucun délai pour le dépôt d'une plainte,
ce qui renforce la lutte systématique contre l'impunité et tend à garantir
qu'un acte de torture puisse ne pas être dénoncé pour ne pas l'avoir
été à temps. Dans ce sens, il y a lieu d'indiquer que la loi organique
relative à la Commission nationale des droits de l'homme constitue un
précédent quant à l'imprescriptibilité du dépôt d'une plainte, la torture
étant ainsi considérée comme un crime contre l'humanité.
Programme de formation pour le développement d'une culture
des droits de l'homme
33. Pour renforcer la culture des droits de l'homme, la Commission nationale
dispense une formation en la matière aux membres des divers corps de sécurité
et des forces armées. Les programmes de formation sont tout d'abord destinés
aux agents publics fédéraux en raison de la compétence de la Commission
nationale des droits de l'homme; pour assurer cependant une action préventive
et promouvoir une culture des droits de l'homme, la Commission dispense
aussi une formation aux agents municipaux et aux agents des Etats fédérés,
en coordination avec les commissions des Etats respectifs et en faisant
appel aux universités et à des organisations non gouvernementales.
34. Il existe actuellement des programmes de formation destinés aux membres
des organes responsables suivants de la sécurité publique ou nationale
: agents de police en cours d'études, agents de police en activité exerçant
des fonctions préventives ou municipales, agents de la police judiciaire
des Etats et du ministère public de la juridiction ordinaire, gardiens,
agents de la migration, membres de la police fédérale de la route, personnel
des services du Procureur général de la République, comprenant agents
administratifs, agents de la police judiciaire fédérale et agents du
ministère public fédéral.
35. Ecoles de police. Il a été entamé un processus de sensibilisation visant
tous les agents de police de tous les organismes fédéraux et des différents
Etats. On a lancé un programme pilote à l'école de police de l'Etat d'Aguascalientes
avec un modèle de formation permettant non seulement d'incorporer au
programme des cours le thème des droits de l'homme, mais d'en imprégner
aussi toutes les matières d'étude. C'est ainsi que les techniques de
neutralisation n'appellent pas seulement la connaissance des techniques
d'assujettissement et des tactiques correspondantes, tant individuelles
que de groupe, le maniement d'armes et des exercices physiques, mais
également la connaissance de la portée de l'utilisation de la force sur
le plan temporel et technique et eu égard au principe de proportionnalité.
Ces techniques doivent être apprises en même temps que les diverses techniques
de police et non pas comme des cours théoriques sans rapport avec la
réalité. Avant le programme actuel, la Commission nationale des droits
de l'homme a élaboré un Guide des agents de police et une brochure, largement
diffusés tous deux aux différents organismes de police.
36. Agents de police municipaux et agents de police préventifs. On a commencé
à former les agents de police préventifs et municipaux en activité dans
l'Etat de Nayarit, afin de les familiariser avec les concepts fondamentaux
touchant les droits de l'homme et de leur faire connaître la portée et
les limites de leurs activités.
37. Agents de la police judiciaire des Etats. Durant la période considérée,
il a été mené des programmes de formation en collaboration avec les commissions
des droits de l'homme de différents Etats et les services du Procureur
général dans les Etats de Hidalgo, Oaxaca, San Luis Potosí, Chihuahua
et Tamaulipas, ainsi que dans le district fédéral. On en fera de même
dans les Etats de Veracruz, Yucatán et Quintana Roo. On a formé, de mai
à décembre 1995, 342 agents du ministère public et 693 agents de la police
judiciaire. La formation concerne essentiellement l'utilisation de la
force et le problème de la détention arbitraire, ainsi que la manière,
pour les différents agents publics, de s'acquitter dûment de leurs fonctions.
38. Gardiens. Avec le thème "Les
droits de l'homme au CERESO" et des questions fondamentales comme celle de savoir quels droits sont violés
au CERESO (Centre de réadaptation sociale) et quels droits des internes
pourraient être menacés, on a procédé à la formation de gardiens dans l'Etat
de Querétaro, à laquelle ont pris part 70 personnes jusqu'à présent. Ce
programme, où l'on aborde aussi les problèmes spécifiques des autochtones
et la situation des femmes en détention et qui est mené en collaboration
avec des organisations non gouvernementales et les centres de détention
eux-mêmes, aura d'importants effets. On dispensera également des cours
de formation dans l'établissement pénitentiaire des îles Marías.
39. Agents de la migration. Dans la phase actuelle de formation destinée
aux agents de la migration, on a entamé un nouveau programme à la suite
du rapport publié par la Commission nationale des droits de l'homme en
avril 1995 sous le titre Frontière sud, rapport sur les violations des
droits de l'homme des immigrants. Dans les villes de Tapachula et Comitán
de la région de Chiapas, on a formé 102 agents de la migration, ce qui
porte à 230 le total des agents ainsi formés dans les Etats de Chiapas,
Veracruz, Tabasco et Oaxaca. Le processus de formation, fondé sur les
conclusions et suggestions du rapport précité, vise à déterminer les
droits fondamentaux que ces agents doivent sauvegarder dans l'exercice
de leurs fonctions, ainsi qu'à élaborer une brochure destinée aux personnes
se trouvant au Mexique sans papiers afin de leur faire connaître leurs
droits et le traitement digne auquel elles doivent pouvoir s'attendre
en territoire mexicain.
40. Police fédérale de la route. On a commencé, dans l'Etat de Nayarit,
un programme de formation de la police fédérale de la route par un atelier
auquel ont participé près de 800 agents de la police fédérale de la route
et qui a consisté en une première sensibilisation à deux thèmes, à savoir
celui de dignité avec laquelle ces agents doivent être traités en tant
que sujets des droits de l'homme et celui du traitement digne qu'ils
doivent à leur tour accorder à la population dans le cadre du respect
des droits de l'homme.
41. Agents de la police judiciaire fédérale. On a achevé un processus de
sensibilisation de 1 975 agents des services du Procureur général de
la République dans tout le pays, se répartissant comme suit : 579 agents
fédéraux du ministère public, 746 agents de la police judiciaire fédérale
et 650 agents administratifs. Cette formation a été dispensée aux personnels
en activité dans leurs propres services. La phase initiale de sensibilisation
a concerné trois droits fondamentaux, à savoir les droits à la vie, à
la dignité et à la liberté, dont chacun a été analysé sous ses deux aspects,
celui de l'agent public en tant que sujet de droit et celui du traitement
qu'il doit accorder à la population dans l'accomplissement de ses obligations
en tant qu'agent de la police judiciaire fédérale. On a, chaque fois,
essayé d'unifier les critères sur les plans de la conceptualisation,
de l'éthique et de l'axiologie qui sous-tendent ces principes fondamentaux,
ainsi que dans leur expression et leurs conséquences juridiques, afin
de remédier au manque d'informations spécifiques sur des sujets comme
la torture, la détention arbitraire, l'utilisation des armes à feu, la
législation nationale et les instruments internationaux souscrits par
le Mexique. On a, d'autre part, répondu aux demandes des agents publics
concernant la distribution, dans tous les services du Procureur général
de la République des différents Etats, de publications et d'informations
sur le thème des droits de l'homme et des sujets appelant une attention
particulière; il a été enfin tenu des séminaires avec la participation
de la Commission nationale des droits de l'homme et l'Institut de formation
des services du Procureur général de la République.
42. Ecole supérieure de guerre. La Commission nationale des droits de l'homme
a commencé à dispenser des cours dans le cadre de la formation militaire
supérieure, ainsi que des cours destinés au personnel supérieur et aux
enseignants, tout en organisant des cours spéciaux à l'Ecole supérieure
de guerre à l'intention des officiers supérieurs des forces armées et
de boursiers étrangers. Ces cours ont porté sur une analyse des tendances
philosophiques et éthiques, un rappel historique de la genèse conceptuelle
et juridique des droits de l'homme au niveau mondial, du droit constitutionnel
mexicain et du droit international, le droit humanitaire, la législation
militaire du Mexique et les instruments de protection des droits de l'homme,
une attention particulière étant accordée à l'institution de l'ombudsman
et aux activités de la Commission nationale des droits de l'homme. Depuis
1995, 440 officiers supérieurs ont participé à ces cours.
IV. ACTIVITES DES SERVICES DU PROCUREUR GENERAL
DE LA REPUBLIQUE
43. Conformément à l'article 10 de la Convention, les services du Procureur
général de la République se sont employés à diffuser, enseigner et promouvoir
en leur sein même les droits de l'homme au moyen de cours de formation,
de programmes préventifs à l'égard de groupes vulnérables, de publications
et d'élaboration de matériaux. Cette tâche permanente a contribué à une
diminution manifeste des plaintes déposées pour torture, ainsi qu'il
ressort du dernier rapport de la Commission nationale des droits de l'homme.
44. Au cours de 1995, les services du Procureur général de la République,
par le biais des services du Contrôleur interne, ont exercé des poursuites
tendant à sanctionner les agents publics ayant enfreint la loi et ont
d'autre part établi un programme de formation de caractère permanent
dans le domaine des droits de l'homme destiné aux agents publics de ces
services, en vue d'accroître l'efficacité de l'administration de la justice
conformément aux lois ainsi qu'aux responsabilités incombant à ces agents.
a) De mars à novembre 1995, il a été réalisé 156 ateliers de formation
d'au moins quatre heures chacun au bénéfice de 31 services du Procureur
général de la République, auxquels ont participé 2 367 agents publics,
dont 686 agents du ministère public, 913 agents de la police judiciaire
et 768 agents administratifs;
b) D'octobre à décembre 1995, il a été réalisé des ateliers de formation
pour le personnel du district fédéral, comprenant 74 sessions de travail
auxquelles ont participé 1 657 agents publics, dont 422 agents du ministère
public, 382 agents de la police judiciaire et 853 agents administratifs;
c) Les résultats de 1995 indiquent que, de mars à décembre, il a été réalisé
230 ateliers de formation, auxquels ont participé 4 024 agents publics,
dont 1 108 agents du ministère public, 1 295 agents de la police judiciaire
et 1 621 agents administratifs.
45. Récemment, par ailleurs, les services du Procureur général de la République
ont procédé à une récapitulation des divers instruments normatifs nationaux
et internationaux en vigueur au Mexique touchant la protection des droits
de l'homme, en vue de publier un recueil de ces textes à l'intention
des agents du ministère public fédéral et, d'une manière générale, des
agents publics relevant des services du Procureur général de la République,
en vue de mettre à leur disposition un ouvrage de référence qui leur
permette d'accomplir leurs fonctions dans le strict respect des lois
et d'éviter à tout moment des actes pouvant être considérés comme allant
à l'encontre des droits fondamentaux des personnes; ces instruments sont
les suivants :
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants;
Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la
torture;
Principes d'éthique médicale applicables au rôle du personnel de santé,
en particulier des médecins, dans la protection des prisonniers et des
détenus contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants;
Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises
à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement;
Principes de base sur le recours à la force et l'utilisation des armes
à feu par les responsables de l'application des lois;
Loi fédérale de 1992 visant à prévenir et à réprimer la torture.
46. On voit ainsi quels progrès a réalisés l'Etat mexicain, conformément
aux engagements pris au titre de la Convention contre la torture, bien
qu'il y ait lieu de reconnaître qu'il reste encore beaucoup à faire eu
égard à l'objectif consistant à éliminer entièrement la torture.