University of Minnesota


Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Guatemala, U.N. Doc. CAT/C/29/Add.3 (1997).


Deuxième rapport périodique des Etats parties
devant être soumis en 1995

Additif

GUATEMALA





Le rapport initial présenté par le Gouvernement guatémaltèque porte la cote CAT/C/12/Add.5 et 6; il est rendu compte de l'examen de ce rapport par le Comité dans les documents CAT/C/SR.232, 233/Add.1 et Add.2, et 237/Add.1, ainsi que dans les Documents officiels de l'Assemblée générale, cinquante et unième session, Supplément No 44 (A/51/44, par. 42 à 57).

[13 février 1997]



TABLE DES MATIERES

 
    Paragraphes
.
    Introduction
    1 - 6
I.
    SITUATION GENERALE DU PAYS
    7 - 20
II.
    CADRE DE LA POLITIQUE EN MATIERE
    DE DROITS DE L'HOMME
    21 - 24
III.
    SITUATION DES DROITS PROTEGES PAR LA CONVENTION
    CONTRE LA TORTURE ET AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS
    CRUELS, INHUMAINS OU DEGRADANTS AU GUATEMALA
    25 - 30
IV.
    INFORMATIONS SUR LES MESURES ET FAITS EN RAPPORT
    AVEC L'APPLICATION DE LA CONVENTION CONTRE
    LA TORTURE ET AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS
    CRUELS, INHUMAINS OU DEGRADANTS
    31 - 66
A.
    Mesures visant à  renforcer l'état de droit
    31 - 43
B.
    Programmes intensifs de formation
    à  l'intention des procureurs, juges
    et policiers
    44 - 51
C.
    Moyens et ressources matérielles mis
    à  la disposition des procureurs, des juges
    et de la police nationale pour mieux faire
    respecter la loi
    52 - 58
D.
    Mesures adoptées pour assurer la
    protection des témoins, des juges et
    des procureurs qui ont fait l'objet
    de menaces ou d'actes d'intimidation
    59 - 63
E.
    Entraves à l'application de la Convention
    contre la torture et autres peines ou
    traitements cruels, inhumains ou dégradants
    64 - 66

 

Introduction


1. Le présent document contient le premier rapport complémentaire (deuxième rapport périodique) que l'Etat du Guatemala soumet au Comité contre la torture, conformément à l'article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Cet article prévoit que les Etats parties doivent présenter tous les quatre ans au Comité des rapports complémentaires qui portent sur les nouvelles dispositions qu'ils ont prises pour donner effet à leurs engagements en vertu de la Convention.


2. Le présent rapport rend compte des mesures que le Gouvernement a prises pour s'acquitter de ses obligations internationales dans ce domaine entre le 31 juillet 1995 et le 30 août 1996. En effet, le rapport initial du Guatemala a été examiné par le Comité contre la torture à ses 232ème et 233ème séances, le 16 novembre 1995, mais le Gouvernement guatémaltèque avait, en prévision de cet examen, soumis le 31 juillet 1995 un document publié sous la cote CAT/C/12/Add.6 en date du 10 août 1995, qui complétait le rapport initial. Le présent document reflète les efforts déployés par le Gouvernement guatémaltèque pour remplir ses engagements à la lumière des observations formulées par la communauté internationale par l'intermédiaire du Comité contre la torture.


3. La première partie donne un aperçu de la situation générale du pays, en particulier pendant les premiers mois du mandat du Gouvernement, qui a été mis en place le 14 janvier de cette année.


4. La deuxième partie porte sur le cadre général de la politique en matière de droits de l'homme et sur les résultats les plus significatifs qui ont été enregistrés dans ce domaine.


5. La troisième partie contient une analyse descriptive de la situation au Guatemala en ce qui concerne les droits garantis par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Cette analyse se fonde sur les données publiées par la Mission de vérification des Nations Unies pour les droits de l'homme au Guatemala (MINUGUA) et par les organisations non gouvernementales les plus importantes qui s'occupent de la promotion et de la protection des droits de l'homme.


6. La quatrième partie expose les principales initiatives qui ont été prises pour mettre en oeuvre la Convention ainsi que les obstacles qui entravent l'action que le Gouvernement mène pour améliorer la situation, conformément à la décision et à l'engagement qu'il a pris de redoubler d'efforts, car cette action a été jusqu'ici insuffisante, et de venir à bout des obstacles qui jusqu'ici ont été insurmontables (Discours prononcé par M. Alvaro Arzú Irigoyen à son accession à la présidence de la République le 4 janvier 1996.)






I. SITUATION GENERALE DU PAYS


7. La transparence des résultats du processus électoral, qui a commencé à la fin de 1995 et s'est achevé le 7 janvier de l'année en cours avec le second tour de scrutin, permet d'affirmer qu'un pas décisif a été fait vers le renforcement de la démocratisation si l'on tient compte du fait que, chose nouvelle, les autochtones et les militants des droits de l'homme en particulier y ont largement participé.


8. Ces faits sont également significatifs dans la mesure où il s'agit non seulement d'un changement d'autorités mais aussi de la mise en pratique d'un projet de réformes et de transformations en vue d'une démocratisation profonde que l'on ne peut mener à bien que par une action de grande envergure dans des domaines sensibles, notamment la sécurité des citoyens, l'instauration de la paix, la lutte contre l'impunité, la discrimination et les privilèges, l'amélioration des conditions de vie et la modernisation de l'Etat, questions qui sont les axes fondamentaux du programme du Gouvernement pour 1996-2000.


9. La situation actuelle du pays est caractérisée dans une large mesure par le dynamisme insufflé aux négociations de paix. Dans ce domaine, la première initiative du Gouvernement a été d'instituer une nouvelle commission gouvernementale pour la paix, ce qui a favorisé la création de conditions propices à la négociation qui permettra sans doute de parvenir à un accord de paix solide et durable et de mettre ainsi un terme au conflit armé que le pays a connu ces 36 dernières années.


10. A cela s'ajoute la décision unilatérale prise par le Commandement général de l'Union révolutionnaire nationale guatémaltèque (URNG) de suspendre ses opérations militaires contre des objectifs militaires, ce qui a conduit le Président de la République à annoncer officiellement, en sa qualité de chef des forces armées, qu'il avait été donné instruction à l'armée guatémaltèque, par l'intermédiaire de tous ses organes de commandement, de suspendre ses opérations anti-insurrectionnelles.


11. Ces nouvelles conditions ont rendu possible la signature, le 6 mai dernier à Mexico, de l'Accord sur les aspects socio-économiques et la situation agraire, qui porte sur des questions importantes comme la participation et la concertation sociale, la participation de la femme au développement économique et social, l'éducation et la formation, la santé, la sécurité sociale, le logement, l'accès à la terre et aux ressources productives, les structures d'appui, le cadre et la sécurité juridiques, la protection du travail, la protection de l'environnement, les ressources, la modernisation de l'administration publique et la politique budgétaire. C'est en agissant dans ces domaines que l'on entend faire face à la réalité guatémaltèque de l'après-guerre.


12. Le processus de négociation de la paix a suivi son cours et il faut espérer que sera conclu prochainement l'Accord relatif au renforcement du pouvoir civil et au rôle de l'armée dans une société démocratique.


13. Dans le cadre des efforts déployés pour parvenir à la conclusion d'un accord de paix solide et durable, le Président de la République a, le 5 juin 1996, présenté officiellement les membres de la Commission politique de la coopération internationale pour la paix. Cette Commission a pour objet d'obtenir et de gérer l'aide financière internationale qui facilitera l'application des accords conclus pendant ce processus.


14. En ce qui concerne la sécurité des citoyens, on constate que les initiatives prises précédemment dans ce domaine ont été insuffisantes puisque l'insécurité, les risques élevés, la corruption, la crise dans l'administration et l'application de la justice subsistent, et qu'en somme, les citoyens n'ont pas confiance dans les organes chargés de garantir la sécurité.


15. Dans son programme pour 1996-2000, le Gouvernement se propose, face à cette situation, de garantir la sécurité publique en prenant les mesures suivantes : a) assurer l'exercice libre et responsable des droits et libertés individuels et collectifs consacrés dans la Constitution; b) agir par tous les moyens de prévention ou d'action nécessaires pour réduire les risques qu'encourent les particuliers, groupes et communautés, de manière à garantir la coexistence harmonieuse et pacifique des citoyens; c) venir en aide aux particuliers, groupes et communautés dans les situations d'urgence et en cas de catastrophe; d) mener des activités visant à prévenir la commission d'actes délictueux, enquêter sur les délits et en poursuivre les auteurs; e) en cas de troubles de l'ordre public, rétablir une situation normale et la tranquillité par les moyens appropriés; et f) planifier la politique de sécurité publique.


16. A propos de l'administration de la justice, il est clair qu'il faut de toute urgence faire en sorte de l'améliorer. En effet, on constate encore les problèmes suivants : lenteur des procédures judiciaires; insuffisance de la formation donnée aux magistrats et juges, aux greffiers, huissiers et autres auxiliaires de justice; coût trop élevé des procédures pour la population; éloignement des tribunaux dont le nombre est en outre insuffisant; obligation de saisir la justice par écrit, en langue espagnole et, le plus souvent, par l'intermédiaire d'un avocat; difficultés d'application du nouveau Code de procédure pénale, qui requiert la participation de juges, de défenseurs et d'interprètes bilingues. De même, les fonctionnaires chargés de l'administration de la justice ne sont pas suffisamment sensibles aux problèmes sociaux et n'ont pas les capacités nécessaires pour s'acquitter de leur tâche. A cela s'ajoute le comportement irrégulier des fonctionnaires du système judiciaire.


17. Face à cette déplorable situation, le Gouvernement a estimé, dans son programme d'action pour 1996-2000, qu'il était impératif d'organiser de manière efficace l'appareil judiciaire et notamment de mettre à sa disposition toutes les ressources humaines et matérielles nécessaires afin de garantir la justice et d'appliquer la loi chaque fois qu'un citoyen le demande.


18. Dans ce domaine, le Gouvernement a pour objectif fondamental d'appuyer fermement la restructuration du pouvoir judiciaire tout en respectant et en garantissant pleinement son indépendance, afin que la population reprenne confiance dans l'administration de la justice, laquelle doit satisfaire aux principes d'accessibilité, d'indépendance et d'efficacité.


19. La persistance de lenteurs dans l'application de la loi, de l'arbitraire, de la violence, de la corruption, de l'impunité et de l'abus de pouvoir renforce au contraire les conditions qui font obstacle à la consolidation de l'état de droit.


20. La mission du Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme, qui s'est rendue dans le pays à la fin du mois de mai, a grandement contribué aux efforts visant à surmonter les difficultés qui entravent encore l'exercice des droits de l'homme au Guatemala. Cette visite avait pour objectif de déterminer les domaines dans lesquels diverses institutions, notamment le Service du Procureur aux droits de l'homme et la police nationale, avaient besoin de programmes d'assistance technique.



II. CADRE DE LA POLITIQUE EN MATIERE DE DROITS DE L'HOMME


21. L'élaboration d'une nouvelle politique en matière de droits de l'homme traduit le fait que des progrès ont été faits sur le plan institutionnel dans ce domaine. Toutefois, malgré la législation en vigueur les citoyens n'ont pas confiance dans les institutions chargées de veiller à la paix sociale.


22. Il est donc nécessaire de renforcer la protection et la défense des droits de l'homme et, pour ce faire, d'accroître la participation de la société civile, dont les membres doivent simplement, sans entraves et en toute confiance, pouvoir faire valoir leurs droits et assumer leurs responsabilités. Autrement dit, l'action entreprise doit impliquer la société tout entière et pas seulement le Gouvernement.


23. L'élaboration d'une politique dans ce sens n'est possible que sur la base d'une appréciation de la situation au niveau tant national qu'international, qui reste prudemment réaliste. En d'autres termes, le Guatemala doit reconnaître publiquement ses difficultés, erreurs et insuffisances pour trouver des solutions pratiques et réalistes / Déclaration de M. Eduardo Stein, Ministre des affaires étrangères de la République du Guatemala, devant la Commission des droits de l'homme à sa cinquante-deuxième session, à Genève (Suisse). /.


24. La mise en oeuvre d'une politique de ce type exige la restructuration des organes gouvernementaux compétents. Conformément aux engagements pris par le Gouvernement devant la communauté internationale */, un processus de ce type est en cours au sein de la Commission présidentielle de coordination de la politique du pouvoir exécutif en matière de droits de l'homme (COPREDEH). La Commission s'est ainsi employée, dans la pratique, à :


a) Prendre directement contact avec les organisations non gouvernementales de défense des droits de l'homme et avec les représentants des victimes pour connaître leur version des faits ainsi que leurs griefs quant à la manière dont les organismes de l'Etat ont agi;


b) Reconnaître l'éventuelle responsabilité d'agents de l'Etat dans des violations des droits de l'homme lorsqu'elle a été saisie de plaintes contre l'Etat et a enquêté à leur sujet;


c) Faciliter l'exécution des mandats d'arrêt délivrés par les instances judiciaires contre les personnes accusées de violations des droits de l'homme;


d) Appuyer, dans la mesure de ses capacités, l'action du ministère public et de la police nationale afin que les enquêtes fournissent des éléments d'appréciation permettant aux autorités d'engager les procédures nécessaires dans le respect des garanties prévues par la loi;


e) Encourager les organes et organismes du pouvoir exécutif à prendre des mesures énergiques pour lutter contre l'impunité dont la population a subi les conséquences;


f) Encourager, conformément aux accords de paix, la rationalisation des effectifs des forces armées et la dissolution des Comités de volontaires pour la défense civile;


g) En ce qui concerne les cas dont est saisie la Commission interaméricaine des droits de l'homme et la Cour interaméricaine des droits de l'homme, il a été tenu compte de la situation dont le pays a souffert au cours des 36 dernières années. Il apparaît également nécessaire de rechercher des solutions amiables dans les cas de plaintes contre l'Etat;


h) Instituer à nouveau l'organe chargé d'accorder une protection aux personnes faisant l'objet de menaces.



III. SITUATION DES DROITS PROTEGES PAR LA CONVENTION CONTRE
LA TORTURE ET AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS CRUELS,
INHUMAINS OU DEGRADANTS AU GUATEMALA


25. Pendant la période du 1er janvier au 30 juin 1996, diverses institutions et organisations non gouvernementales ont procédé à des études statistiques sur le respect ou la violation des droits de l'homme au Guatemala. Les statistiques relatives aux droits consacrés par la Convention contre la torture font apparaître une diminution des cas de torture proprement dite signalés. En revanche, on continue d'enregistrer des plaintes pour traitements cruels, inhumains ou dégradants commis en particulier par des agents de l'Etat.

26. Dans son cinquième rapport au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (A/50/1006), en date du 19 juillet 1996, la Mission des Nations Unies pour la vérification des droits de l'homme et du respect des engagements pris aux termes de l'Accord général relatif aux droits de l'homme au Guatemala (MINUGUA) indique que, pendant la période visée dans le rapport, elle n'a jugé recevables que quatre plaintes pour torture. Ces plaintes font état implicitement de la violation présumée de huit droits. Deux violations seulement ont été vérifiées et l'existence d'aucune d'elles n'a été établie.


27. Quant aux cas de traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Mission a jugé recevables sept plaintes faisant état de la violation de dix droits. Neuf violations ont été vérifiées et l'existence de cinq d'entre elles seulement a été établie.


28. Pour ce qui est des violences, la MINUGUA a jugé recevables 39 plaintes au total portant sur 73 violations du droit à l'intégrité de la personne. La Mission a vérifié 27 de ces violations et l'existence de 21 d'entre elles a été établie.


29. Pour sa part, le Service des droits de l'homme de l'archevêché du Guatemala a enregistré pendant la même période trois cas documentés de torture et 255 cas de menaces. La Commission des droits de l'homme du Guatemala (CDHG) a indiqué que, pendant le premier trimestre de 1996, 97 cas de menaces de mort avaient été signalés et que dans deux cas de disparition forcée, les victimes portaient des marques de torture.


30. En ce qui concerne ces résultats, il convient de citer la MINUGUA selon laquelle : "Bien que les plaintes faisant état d'actes de tortures soient moins fréquentes, le nombre élevé de violations du droit à l'intégrité et à la sécurité de la personne indique que le Gouvernement ne le garantit pas suffisamment, notamment lorsqu'il s'agit de traitements cruels, inhumains ou dégradants commis par des agents de l'Etat" (A/50/1006, par. 170). Cela confirme une fois de plus que ce problème résulte d'une carence de l'Etat et non d'une politique délibérée de sa part contre la population. Il s'agit donc de mettre en place et de perfectionner les mécanismes nécessaires pour que l'Etat, par le biais du Gouvernement, garantisse pleinement, comme il s'y est engagé, la protection de la population et fasse traduire en justice les agents de l'Etat responsables de ces infractions.



IV. INFORMATIONS SUR LES MESURES ET FAITS EN RAPPORT AVEC L'APPLICATION DE LA CONVENTION CONTRE LA TORTURE ET
AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS CRUELS,
INHUMAINS OU DEGRADANTS



A. Mesures visant à renforcer l'état de droit


31. Comme suite aux recommandations adressées par la communauté internationale au Gouvernement et grâce aux services consultatifs dont l'Etat bénéficie en matière de droits de l'homme, le Code pénal, en vertu des décrets No 48-95 et 58-95 du Congrès de la République, a fait l'objet de modifications visant à qualifier de délit les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et la torture, tous actes qui n'étaient pas prévus jusqu'alors dans la législation guatémaltèque. Ces modifications traduisent la conviction que ces actes nuisent gravement à la société, qu'ils sont principalement des facteurs d'insécurité, d'angoisse et de trouble et qu'ils mettent gravement en péril l'intégrité physique et la vie des personnes (voir annexe 1).


32. La fonction de "comisionado militar" (auxiliaire militaire) a été supprimée et 24 400 "comisionados militares" ont donc été démobilisés le 14 septembre 1995. Pour compléter ces mesures, le Congrès de la République a, en vertu du décret No 79-95, modifié en ce sens la loi constitutive des forces armées. En outre, le Règlement relatif aux comisionados militares a été abrogé par le décret exécutif No 434-95, en date du 15 septembre 1995 (voir annexe 2).


33. Conformément aux dispositions susmentionnées, le Ministère de la défense nationale a ordonné à tous les commandements de lancer une campagne nationale d'information pour que la population soit mise au courant de cette démobilisation et il a réitéré l'ordre de recueillir toutes les cartes de comisionado militar ou de collaborateur afin d'éviter qu'il en soit fait mauvais usage (circulaires No DI-85-01-0086-07 et DI-85-01-0087-07 du 11 mai 1996).


34. La suppression de la fonction de comisionado militar s'est traduite par un renforcement de l'autorité civile, là où les agents de l'Etat étaient en petit nombre et, donc, de l'état de droit.


35. Le présent rapport rend ainsi compte de la réforme du Code pénal et de la suppression de la fonction de comisionado militar, faits dont le Comité contre la torture avait simplement été informé oralement lors de ses 232ème et 233ème séances, le 16 novembre 1995.


36. Conformément à l'engagement pris, les procédures illégales de recrutement et la conscription obligatoire ont été totalement supprimées afin de donner effet au droit et au devoir constitutionnel d'accomplissement du service militaire.


37. L'Etat reste fidèle à son engagement de ne pas encourager la formation de nouveaux comités de volontaires pour la défense civile. A ce sujet, il est à noter qu'indépendamment du fait que cela pourrait être prévu dans l'Accord pour une paix ferme et durable, le processus de dissolution des comités susmentionnés, qui comptaient alors 220 000 personnes environ, dont 15 000 étaient armées, a été engagé le 15 juillet 1996.


38. Le 9 août 1996, dans la localité de Colotenango du Département de Huehuetenango, 800 membres de patrouilles civiles de la région ont été désarmés et démobilisés, ce qui a beaucoup contribué au développement des communautés locales qui, comme tant d'autres, ont souffert du conflit armé. Cette action, qui a été menée en dehors du calendrier prévu et a fait suite à une demande de la COPREDEH, visait à donner dans cette région la priorité à la démobilisation.


39. Il convient d'ajouter que le Gouvernement actuel est conscient que cette démobilisation ne dispense pas les membres des comités qui auraient commis des infractions à la loi de comparaître devant les tribunaux pour clarifier leur situation.


40. En vertu du décret 32-96 du Congrès, le Code de procédure pénale a fait l'objet de modifications destinées à améliorer l'administration de la justice. Ainsi, il est désormais interdit de prononcer des mesures de substitution (assignation à résidence, versement d'une caution, entre autres) dans les cas de récidive ou de délinquance d'habitude, d'homicide volontaire, d'assassinat, de parricide, de viol commis dans des circonstances aggravantes, de viol qualifié, de viol d'un mineur de moins de 12 ans, d'enlèvement, à des fins de rançon ou à d'autres fins, de sabotage, de vol qualifié ou de vol commis dans des circonstances aggravantes (voir annexe 3).


41. Le décret 41-96 du Congrès porte modification de l'article 2 de la deuxième partie du décret 214-1878 (Code militaire) et le décret 2-89 du Congrès porte suppression du paragraphe f) de l'article 58 de la loi relative au pouvoir judiciaire afin que, d'une part, seuls les délits ou infractions d'ordre essentiellement militaire soient du ressort des tribunaux établis en vertu du Code militaire et que, d'autre part, le Code de procédure pénale s'applique aux délits ou infractions de droit commun ou délits assimilés commis par des militaires, lesquels seront alors jugés par les tribunaux ordinaires sur lesquels porte la loi relative au pouvoir judiciaire. Ces modifications donnent effet à une recommandation de la MINUGUA relative à la réforme du système de justice militaire. Ainsi, à partir du 24 juillet 1997 quelque 400 affaires de droit commun instruites contre des membres des forces armées par des tribunaux militaires ont été transférées à des tribunaux civils (voir annexe 4).


42. De nombreux membres de la police nationale et de la Guardia de Hacienda (police financière) ont été démis de leurs fonctions et mis à la disposition des autorités au motif qu'ils auraient participé à des violations des droits de l'homme et commis des fautes justifiant leur remplacement. Dans le cadre des mesures d'épuration, dans un premier temps, 118 agents et par la suite 122 agents de la police nationale soupçonnés principalement de corruption ont été livrés aux autorités. Six anciens policiers, accusés de mauvais traitements à l'encontre d'enfants de la rue, font l'objet d'un mandat d'arrêt.


43. En vertu du décret 63-96, le Congrès de la République a modifié la loi relative aux armes et aux munitions afin d'interdire le port d'armes aux personnes de moins de 25 ans, sauf s'il s'agit de membres actifs des forces armées et des forces de sécurité civile (voir annexe 5). Il convient de noter à ce sujet qu'au cours des premiers mois de 1996 le nombre d'armes saisies par les organes de sécurité a considérablement augmenté, la police nationale ayant saisi 1 108 armes, contre 572 pendant la période correspondante de 1995. C'est grâce au renforcement des efforts pour lutter contre la prolifération des armes en possession de particuliers que deux fois plus d'armes ont été saisies pendant cette période que l'année précédente et les nouvelles dispositions de la loi susmentionnée permettront au Gouvernement de contrôler progressivement la situation.



B. Programmes intensifs de formation à l'intention
des procureurs, juges et policiers


44. Le ministère public, par l'intermédiaire de son service de perfectionnement, de formation et de développement des ressources humaines, avec l'appui de la MINUGUA et du Centre d'appui à l'Etat de droit (CREA), a organisé entre mai et novembre 1995 divers cours dans les domaines suivants :

a) Instruction des affaires;


b) Système de justice pénale (débutants et intermédiaire);


c) Introduction à l'enquête criminelle.


45. Ces cours étaient destinés aux agents des services du procureur et agents auxiliaires et528 d'entre eux (104 femmes et 424 hommes) en ont bénéficié pendant la période en question.


46. Entre mars et juin 1996, le ministère public, avec l'appui du CREA, a organisé deux séminaires, intitulés respectivement : a) Procédures spécifiques prévues dans le Code de procédure pénale et b) Théorie du délit. Ces séminaires, dirigés par des procureurs de district et des agents auxiliaires, ont été suivis par 278 personnes (56 femmes et 222 hommes).


47. En 1995, l'école d'études judiciaires, qui dépend du pouvoir judiciaire, a organisé 58 stages de formation qui ont été suivis par 1 778 fonctionnaires du système judiciaire. Entre janvier et juillet 1996, il a été organisé 44 stages de formation dont 473 fonctionnaires du système judiciaire ont bénéficié.


48. Dans le cadre du Programme institutionnel pour la formation à l'enquête criminelle (ICITAP en anglais) 24 cours ont été dispensés entre février et juin 1996 à 557 personnes (procureurs et agents du ministère public, inspecteurs de la police nationale et agents du Département de la lutte contre la drogue de la Guardia de Hacienda.


49. Le Groupe conjoint MINUGUA/PNUD s'occupe d'un cours de base à l'intention des futurs agents de la police nationale. A cette fin, un programme d'études de six mois a été mis en place. Ce cours est dispensé à 480 élèves de l'Ecole de police nationale. Le Groupe conjoint met également actuellement au point le matériel pédagogique nécessaire à l'exécution du programme d'études proposé.


50. A cet égard, la présence de cinq observateurs de la MINUGUA au sein de la police nationale contribue à l'amélioration de cette institution. Ces observateurs ont axé leur action d'abord sur les domaines sensibles de la formation des policiers et des enquêtes criminelles. La Mission a également recommandé l'adoption d'un système de roulement au sein du Service d'identification et du Département des enquêtes criminelles afin d'améliorer la coordination requise lors de la réalisation d'une enquête.


51. Pendant les six premiers mois de 1996, la COPREDEH a dispensé des cours sur les droits de l'homme à 1 677 membres de la police nationale et de la Guardia de Hacienda.



C. Moyens et ressources matérielles mis à la disposition des procureurs, des juges
et de la police nationale pour mieux faire respecter la loi


52. Il est reconnu qu'il faut renforcer le ministère public pour remédier aux insuffisances manifestes. A cette fin, un accord de coopération a été conclu entre le ministère public et la MINUGUA en février 1995, et reconduit en août 1995.


53. Cet accord a débouché sur la création de l'Unité d'assistance technique. Ces derniers mois, celle-ci s'est donné pour tâche d'élaborer une première ébauche du Manuel du procureur. Elle prépare également des formulaires qui permettront de faciliter le travail du ministère public. C'est elle qui a établi les projets de règlements relatifs à l'organisation des carrières au sein du ministère public et au fonctionnement du Conseil du ministère public, qui ont été approuvés en février 1996.


54. Dans le cadre de ce même accord, une assistance est fournie au Procureur général au sujet des mesures d'ordre général à prendre concernant l'organisation technique des ministères publics. A cette fin, on travaille à l'élaboration d'un plan global de réorganisation du ministère public métropolitain, ainsi qu'à l'amélioration de la collaboration avec la police nationale et à la mise en place de mécanismes en vue du regroupement, dans un avenir proche, des moyens d'enquête scientifique.


55. Un nouveau procureur général est entré en fonctions le 16 mai 1996 et il a été décidé de répartir de manière appropriée les ressources dont le ministère public dispose afin de renforcer les fonctions des procureurs. A cet effet, diverses mesures ont été prises, entre autres :


a) La fourniture d'ordinateurs aux procureurs de district ainsi que du mobilier et du matériel propres à faciliter la tâche des procureurs et nécessaires dans le cadre du processus de restructuration des services du ministère public;


b) La fourniture de véhicules aux procureurs de district et du matériel dont ils font la demande en fonction des besoins et particularités de chaque région.


56. En ce qui concerne le système judiciaire, la MINUGUA fournit une aide importante dans le domaine de l'administration de la justice. Elle appuie notamment les projets suivants :


a) Création d'un centre d'administration de la justice dans la Région où vivent les Ixils qui abritera un tribunal de première instance, les services du défenseur du peuple et un bureau de traduction et d'interprétation dans les langues d'origine maya. Le ministère public mettra en place une antenne du ministère public et de la police nationale, et le Fonds national pour la paix (FONAPAZ) couvrira les dépenses d'équipement et de personnel de ces institutions pendant un an. Le projet sera mis en oeuvre pendant l'année en cours;


b) Exécution du projet "Administration de la justice et pluralisme linguistique" qui vise à intégrer l'emploi des langues mayas dans le système d'administration de la justice. L'autorité judiciaire et le ministère public ont approuvé ce projet et y participent, de même que les organisations autochtones de la région;


c) Création de cabinets juridiques populaires dans les départements de Quiché et de Petén, en coopération avec les autorités locales et des universités privées;


d) Organisation de séminaires sur des solutions locales à la crise dans l'administration de la justice qui visent à offrir des espaces de dialogue et de formation conjointe aux divers fonctionnaires chargés de l'administration de la justice, à savoir les magistrats du ministère public, les juges et les agents de la police nationale;


e) Conclusion d'un accord de coopération technique avec le Service public de défense pénale du pouvoir judiciaire.


57. En ce qui concerne les forces de sécurité, il est urgent d'augmenter leur salaire et de les doter de l'équipement et de l'armement nécessaires pour qu'elles s'acquittent mieux de leurs fonctions. On constate dans ce domaine de nombreuses lacunes. Toutefois, au cours des six premiers mois du mandat du Gouvernement actuel, plus de 25 millions de quetzales ont été investis dans ces équipements.


58. La police nationale a mis à la disposition du public le numéro de téléphone 110 pour recevoir des plaintes ou des informations confidentielles. Ce numéro est en service 24 heures sur 24. Il a contribué à une meilleure application de la loi puisque la population a ainsi la possibilité de collaborer avec les autorités dans la lutte contre le crime organisé.



D. Mesures adoptées pour assurer la protection des témoins, des juges et des
procureurs qui ont fait l'objet de menaces ou d'actes d'intimidation


59. A la suite des menaces dont des juges, des procureurs et des témoins ont fait l'objet, la police nationale a dû constituer une brigade spéciale afin de garantir un certain degré de protection à ces personnes.


60. De plus, on notera que le Congrès de la République a, en vertu du décret 70-96, adopté la loi portant création du Service de protection des personnes qui interviennent dans des procès et des personnes chargées de l'administration de la justice. Ce décret établit que, pour rendre efficace l'administration de la justice, il est nécessaire de garantir l'intégrité et la sécurité des juges, des procureurs, des défenseurs et des autres personnes qui interviennent dans des procès et qui pourront désormais, si elles sont menacées, demander même que leur ligne téléphonique soit placée sur écoute pour déterminer l'origine des menaces.


61. L'organisme qui administrera ce service comprendra des représentants du Procureur général de la République et du Ministère de l'intérieur et le Directeur du Bureau de la protection, qui constitueront un conseil chargé d'examiner la demande et de déterminer s'il y a lieu ou non d'accorder une protection.


62. Les mesures de protection prévues par cette loi seront prises après examen préalable de la demande par le Bureau et, dans le cas de témoins, il faudra s'assurer que le risque auquel est exposé le demandeur est raisonnablement certain et tenir compte de la gravité des faits, du caractère probant de la déclaration, et de la possibilité d'obtenir par d'autres moyens des informations permettant d'identifier des personnes ayant participé à d'autres actes liés à l'affaire considérée.


63. Le ministère public a réalisé une étude en matière de sécurité afin de formuler un ensemble de recommandations concrètes à l'intention des procureurs et agents de leurs services. Cette étude a débouché sur un document intitulé "Instructions en matière de sécurité à l'intention des fonctionnaires des services judiciaires et du ministère public".



E. Entraves à l'application de la Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants


64. Indépendamment des résultats obtenus à ce jour, il est manifeste que des difficultés entravent les efforts déployés pour faire appliquer les dispositions de la Convention contre la torture. L'identification des principales difficultés et, plus particulièrement, la recherche de solutions pour les surmonter ont amené le Gouvernement à reconnaître que l'action dans ce domaine est insuffisante.


65. Force est de constater que subsistent notamment les facteurs suivants : a) un climat de violence qui est source d'insécurité pour la population; b) un nombre élevé de menaces, d'enlèvements et d'autres délits dont les auteurs n'ont pas encore été identifiés; et c) les réserves émises par la population quant à l'efficacité des institutions chargées d'enquêter sur ces délits et de les punir, situation qui, dans une certaine mesure, conduit à des cas, certes isolés mais déplorables, de personnes qui se chargent d'administrer la justice elles-mêmes. Les autorités doivent donc faire davantage d'efforts pour mettre fin à ces actes inacceptables, comme l'a signalé la MINUGUA dans son cinquième rapport.


66. Il convient de reconnaître qu'il existe un ensemble de causes qui, d'une certaine manière, expliquent les problèmes constatés. Mais le Gouvernement s'emploie à surmonter ces obstacles afin de pouvoir, à brève échéance, dûment garantir la sécurité des citoyens et s'acquitter des responsabilités qui lui incombent en vertu des conventions et pactes relatifs aux droits de l'homme auxquels l'Etat du Guatemala a adhéré, y compris la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est donc indispensable d'accélérer la mise en place d'une politique globale de lutte contre l'impunité et d'établir des mécanismes efficaces de coordination entre l'autorité judiciaire, le ministère public et les forces de sécurité.



Liste des documents annexés


Les annexes peuvent être consultées dans les archives du Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme.

1. Décret No 48-95 du Congrès de la République du Guatemala sur la réforme du Code pénal, décret 17-73.


2. Décret No 79-95 du Congrès de la République du Guatemala.


3. Décret No 32-96 du Congrès de la République du Guatemala.


4. Décret No 41-96 du Congrès de la République du Guatemala.


5. Décret No 63-96 du Congrès de la République du Guatemala.


6. Décret No 70-96 du Congrès de la République du Guatemala.



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