Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Danemark, U.N. Doc. CAT/C/17/Add.13 (1995).
Deuxièmes rapports périodiques des Etats parties attendus en
1992
Additif
DANEMARK
/ Le rapport initial présenté par le Gouvernement danois porte la cote CAT/C/5/Add.4;
il est rendu compte de l'examen de ce rapport par le Comité dans les documents
CAT/C/SR.12 et 13, ainsi que dans les Documents officiels de l'Assemblée, quarante-sixième
session, supplément No 44 (A/46/44), paragraphes 94 à 122.
[22 février 1995]
TABLE DES MATIERES
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INTRODUCTION
1. Le présent rapport est présenté conformément au paragraphe 1 de l'article
19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants qui a pris effet à l'égard du Danemark le 26 juin 1987.
2. Le rapport a été établi conformément aux directives générales concernant
la forme et le contenu des rapports que les Etats parties doivent présenter
en application du paragraphe 1 de l'article 19 de la Convention (CAT/C/14).
3. Le rapport est centré sur les faits nouveaux survenus depuis la présentation
du rapport initial en 1988. En outre, on voudra bien prendre note de la description
générale de la société danoise, dans le document de base qui sera soumis prochainement,
ainsi que des observations du Rehabilitation and Research Center for Torture
Victims jointes à l'annexe du présent rapport.
4. Depuis la présentation du rapport initial en 1988, le Danemark a ratifié
la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements
inhumains ou dégradants et le Comité européen pour la prévention de la torture
et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a effectué une visite
de routine au Danemark du 2 au 8 décembre 1990. Il ressort du rapport qu'il
a consacré à cette visite, en juillet 1991, qu'il n'a relevé aucun signe de
torture dans les prisons danoises dans lesquelles il s'est rendu. Bien au contraire,
le Comité a été, à maints égards, favorablement impressionné par les prisons
danoises, s'agissant par exemple de la possibilité pour les détenus de recevoir
des visites, l'hygiène dans les établissements pénitentiaires, les moyens d'éducation
et de formation prévus pour les détenus, le système de bibliothèque et le projet
de désignation d'un porte-parole.
5. A l'issue de sa visite, le CPT a formulé un certain nombre de recommandations
et d'observations auxquelles les autorités danoises ont, dans une large mesure,
donné suite. Certains points continuent d'être débattus dans le cadre du processus
de communication en cours entre le CPT et le gouvernement, et prévu dans la
Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants.
6. Depuis la présentation du rapport initial en 1988, le Danemark a incorporé
en bloc, par la loi No 285 du 29 avril 1992, la Convention européenne des droits
de l'homme dans la législation danoise. S'il a incorporé dans sa législation
cette convention, à laquelle il est partie depuis 1953, c'est essentiellement
parce qu'il tenait à ce que les juges, le ministère public, la police et les
avocats ainsi que la société tout entière en acquièrent une connaissance plus
intime.
7. Les tribunaux danois appliquaient aussi la Convention européenne des droits
de l'homme avant qu'elle ne soit incorporée dans la législation danoise. Il
semble toutefois que, depuis lors un plus grand nombre de décisions judiciaires
s'y réfèrent directement.
8. Depuis la présentation du rapport initial en 1988, le Danemark a, en outre,
le 24 avril 1994, ratifié le deuxième Protocole facultatif se rapportant au
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir
la peine de mort. En conséquence, le Protocole est entré en vigueur à l'égard
du Danemark le 24 mai 1994. Afin de permettre au Danemark de ratifier ce protocole,
la disposition qui prévoyait l'application de la peine de mort aux auteurs de
certains crimes graves commis pendant l'occupation du Danemark au cours de la
seconde guerre mondiale a été abrogée. L'abrogation a été opérée par la loi
No 1097 du 22 décembre 1993, si bien que la peine de mort n'est même plus prévue
en théorie, au Danemark.
Renseignements sur les nouvelles mesures et les nouveaux faits touchant l'application
de la Convention (art. 1er à 16)
Articles 1er à 4
9. Aucun changement n'est intervenu dans la législation ou la pratique en ce
qui concerne ces dispositions.
Article 5
10. Comme on l'a mentionné dans le rapport initial (par. 19), le Danemark a,
en 1986, pour satisfaire aux exigences énoncées à l'article 5, établi sa compétence
en fonction du principe aut dedere aut judicare.
11. On notera qu'au titre de la compétence ainsi établie, des accusations ont
été portées contre une personne résidant aujourd'hui au Danemark, pour avoir
eu recours, dans 24 cas, dans un camp de prisonniers croate, à des violences
d'un caractère particulièrement cruel, brutal et dangereux et d'une nature grave
au point de constituer des circonstances particulièrement aggravantes. Deux
des victimes sont décédées.
12. L'affaire concerne une personne de l'ex-Yougoslavie, un Musulman marié avec
une Croate. Cet homme était lui-même prisonnier de guerre dans un camp de prisonniers
croate mais jouait - probablement parce qu'il était marié avec une Croate -
un rôle particulier dans la surveillance du camp. Dans leurs dépositions à la
police, les parties lésées ont qualifié le défendeur de gardien de prison, surveillant
et "détenu supérieur".
13. Le procès pénal contre la personne en cause s'est ouvert devant un jury
au tribunal oriental de première instance, le 7 novembre 1994. Le 22 novembre
1994 le défendeur, après avoir été déclaré coupable sur la majorité des chefs
d'accusation, a été condamné à une peine d'emprisonnement de 8 ans. Le défendeur
a interjeté appel de la décision auprès de la Cour suprême danoise.
Article 6
14. On voudra bien se reporter au rapport initial du Danemark (par. 20 à 24),
les renseignements fournis dans ce rapport demeurant valables. Il convient de
signaler que la personne qui a été condamnée à une peine d'emprisonnement de
8 ans pour avoir commis des crimes de guerre dans un camp de prisonniers croate
(voir plus haut par. 11 à 13) est en détention depuis que les autorités danoises
ont été informées des accusations portées contre elle.
Article 7
15. On voudra bien se reporter aux paragraphes 11 à 13 ci-dessus qui traitent
des accusations de crimes de guerre portées contre une personne de l'ex-Yougoslavie.
Articles 8 et 9
16. Par ses activités au sein de l'Organisation des Nations Unies, le Danemark
a participé à la création du Tribunal international chargé de poursuivre les
personnes présumées responsables de violations graves du droit international
humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991. Les
bases juridiques de la coopération danoise avec le Tribunal et les dispositions
législatives nécessaires à cet égard, concernant notamment l'extradition de
suspects en vue de l'exercice de poursuites par le Tribunal, ont été établies
par la loi No 1099 du 21 décembre 1994 sur l'exercice de poursuites par le Tribunal
international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations
graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.
Cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1995.
17. En vertu de ladite loi, le Ministre de la justice peut décider que, sous
réserve des modifications nécessaires, celle-ci pourrait s'appliquer dans d'autres
cas où des poursuites à raison de crimes de guerre seraient exercées au plan
international. Elle pourrait, par exemple, être appliquée à l'égard d'autres
tribunaux en vue de l'exercice de telles poursuites, notamment à l'égard du
Tribunal international pour le Rwanda que le Conseil de sécurité a décidé de
créer le 8 novembre 1994 (résolution 955 (1994)).
18. Jusqu'à présent le Tribunal international chargé de poursuivre les personnes
présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire
commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie n'a pas demandé l'extradition,
aux fins de poursuites, de personnes résidant au Danemark. On voudra bien noter
que le défenseur de la personne mentionnée aux paragraphes 11 à 13 ci-dessus
a demandé au Procureur près ce tribunal si une telle demande d'extradition serait
présentée en ce qui concerne ladite personne. Le Procureur a répondu qu'une
telle demande ne serait pas présentée pour l'instant.
19. Enfin, il convient de signaler que le Danemark a pris plusieurs initiatives
en vue de fournir des informations pour les activités futures du Tribunal. Il
a ainsi été décidé que la police pourra interroger des personnes de l'ex-Yougoslavie
désireuses de faire des dépositions à titre soit de victimes, soit de témoins
de crimes de guerre ou de violations graves des droits de l'homme liés au conflit
dans l'ex-Yougoslavie.
20. Un arrangement spécial a été conclu en vue d'assurer la communication de
toutes les informations concernant des crimes de guerre commis dans l'ex-Yougoslavie,
que des personnes résidant au Danemark pourraient détenir. L'arrangement fonctionne
de la manière suivante : des infirmières des centres de la Croix-Rouge, où des
personnes de l'ex-Yougoslavie résident, remettent des questionnaires à celles
d'entre elles qui pensent détenir des informations sur des crimes de guerre.
21. Ces questionnaires sont ensuite adressés au Bureau du Commissaire national
de la police danoise (Rigspolitiet), qui détermine si, sur la base des informations
recueillies, une procédure pourrait être engagée contre un ou plusieurs auteurs.
Le cas échéant, le Bureau du Commissaire national convoque aux fins d'un interrogatoire
plus approfondi la personne qui a rempli le questionnaire. Lorsque toutes les
informations pertinentes ont été recueillies, le Bureau du Commissaire national
transmet les informations, selon les circonstances de l'espèce, au Ministère
des affaires étrangères en vue de leur communication au Tribunal et/ou à d'autres
organisations ou organes des Nations Unies.
22. Outre cet arrangement spécial, la police procède, comme à l'accoutumée,
à une enquête pénale type dans les cas où des personnes résidant au Danemark
sont soupçonnées d'avoir commis des crimes de guerre ou d'avoir été complices
de leur perpétration.
Article 10
23. En ce qui concerne le personnel de la police, il convient de noter que dans
le cadre de la formation que tous les membres des forces de police reçoivent
obligatoirement à l'Académie danoise de police (Politiskolen), lors de leur
admission dans la force, l'interdiction d'user d'une force excessive, dans l'exercice
de leurs fonctions, leur est expressément signifiée. Leur attention est constamment
appelée sur ce fait au cours de leur formation à l'Académie. A cet égard, il
y a lieu de signaler qu'il ressort directement de la loi danoise sur l'administration
de la justice (retsplejeloven) qu'une arrestation doit être opérée de la manière
la plus délicate possible (par. 1 de l'article 758). A partir de l'été 1995,
le sujet "droits de l'homme" figurera au programme de formation de
base des agents de la force publique.
24. En ce qui concerne le personnel du service pénitentiaire (kriminalforsorgen),
il convient de noter que tout agent de ce service est tenu, lors de son entrée
en fonctions, de suivre un programme de formation liminaire qui comporte, entre
autres, un exposé général des conventions internationales, y compris la Convention
contre la torture. Dans la formation en cours d'emploi des agents, ce sujet
revient constamment sur le tapis. Dans le cadre du cours "formation au
service pénitentiaire" (kriminalforsorgslære), les agents en tenue sont
informés des conventions internationales les plus importantes concernant le
traitement des détenus. La Convention contre la torture figure expressément
au programme.
25. Afin que les agents du service pénitentiaire soient parfaitement adaptés
à l'exercice de leurs fonctions, la formation du personnel met l'accent non
pas simplement sur la connaissance que le stagiaire a des sujets mais sur sa
volonté et sa capacité d'appliquer cette connaissance en pratique. Aussi l'attitude
du stagiaire est-elle d'une importance déterminante.
26. De plus, le système pénitentiaire danois est un système très ouvert, ce
qui constitue en soi une importante garantie contre les violations : les visites
que les détenus ont la possibilité de recevoir à des intervalles rapprochés
offrent en effet un moyen efficace de contrôle des conditions de détention.
27. Les médecins qui oeuvrent dans le cadre du service pénitentiaire sont formés
à la situation particulière dont ils doivent avoir conscience. Cette formation
leur est dispensée, par exemple, à des conférences sur l'éthique médicale organisées
à l'intention des médecins du service pénitentiaire, où ces derniers sont informés
du contenu des conventions internationales relatives à cette question.
Article 11
28. On voudra bien se reporter aux paragraphes 29 à 31 du rapport initial du
Danemark, qui demeurent valables.
29. Au cours de l'examen, par le Comité, du rapport initial du Danemark, d'aucuns
ont demandé, entre autres, un exposé détaillé sur deux aspects, à savoir les
circonstances dans lesquelles des affaires pénales sont examinées oralement
et la réglementation concernant la désignation d'avocats de la défense.
30. On notera à cet égard que toutes les affaires pénales sont examinées oralement.
Au cours de l'instruction, certaines décisions peuvent, en revanche, être rendues
sans qu'il soit procédé à un examen oral. Ces décisions concernent, par exemple,
des auditions sur recours, s'agissant de questions telles que la détention provisoire,
les perquisitions et d'autres mesures ordonnées dans le cadre de la procédure
pénale. De même, tel ou tel recours à propos de questions de forme apparues
au cours de la phase orale d'une procédure pénale sera examiné par écrit, à
moins que l'instance de recours ne fasse droit à une demande d'examen oral de
l'affaire.
31. En ce qui concerne la réglementation relative à l'assistance d'un défenseur,
la position juridique au Danemark est que toute personne inculpée d'une infraction
pénale est en droit de constituer avocat. Si, au cours de la procédure pénale,
il apparaît que la sanction qui sera prononcée ne sera pas limitée à une amende
ou une simple peine privative de liberté, un avocat sera commis pour le défendeur
si la partie en cause n'a pas déjà retenu les services d'un avocat. Il en va
de même s'il doit être fait recours à des assesseurs non juristes, si l'interrogatoire
du défendeur doit se dérouler à huis clos et si la procédure a été engagée par
voie de plainte, indépendamment du fait que le défendeur était déjà assisté
d'un avocat au tribunal de première instance.
32. Les honoraires d'un avocat ainsi commis seront initialement réglés par l'Etat
mais si le défendeur est déclaré coupable, la partie en cause pourra être condamnée
aux frais. Le cas échéant, les autorités s'efforceront de recouvrer auprès de
la partie condamnée les honoraires versés au défenseur.
Articles 12 et 13
33. En 1990, le tribunal de Copenhague a rendu son jugement dans un procès pénal
privé en diffamation que l'Union danoise du personnel pénitentiaire avait intenté
à deux infirmières précédemment employées au service pénitentiaire à Copenhague,
en se fondant sur un article dans lequel ces deux personnes avaient critiqué
la manière dont les demandeurs d'asile étaient traités dans les prisons de la
ville. Bien qu'il ait été établi que quelques-unes des assertions faites par
les deux infirmières étaient dénuées de tout fondement en fait, celles-ci furent
acquittées.
34. Dans ces conditions, et eu égard aux engagements internationaux contractés
dans le cadre de l'ONU, le Ministère de la justice a ordonné une enquête judiciaire
sur le traitement des réfugiés dans les prisons de Copenhague. En février 1991,
l'enquête a été étendue à deux cas précis concernant le traitement d'étrangers.
35. En mars 1992, le juge chargé de l'enquête a présenté un rapport sur ces
deux cas. Bien qu'il n'ait relevé, en l'espèce, ni actes de torture ni autres
traitements dégradants, il a signalé que le personnel avait commis certaines
erreurs et négligences dans les deux cas. Il n'a toutefois pas conclu que celles-ci
entraînaient la responsabilité pénale ou justifiaient l'adoption de mesures
disciplinaires plus graves contre les personnes en cause. Un blâme a été infligé
à certains employés, sur la base dudit rapport.
36. En 1993, le juge a soumis la partie générale de son rapport, d'où il ressort
qu'aucun "noyau" d'employés ayant adopté un comportement hostile à
l'égard des réfugiés n'a pu être identifié. Après avoir examiné plusieurs cas
précis le juge a cependant critiqué certains fonctionnaires du service pénitentiaire.
Le Département des prisons et de la probation du Ministère de la justice a estimé
qu'il n'y avait pas lieu d'adopter des mesures disciplinaires contre les personnes
en cause, mais a souscrit aux critiques émises par le juge et signalé les incidents
aux personnes concernées.
37. Tenant compte des conditions que le juge avait prises en considération dans
ses rapports, le service pénitentiaire a procédé à plusieurs réformes et modifications
structurelles, améliorant notamment l'information des étrangers détenus ainsi
que la formation du personnel afin de lui permettre de mieux gérer les situations
de crise. De plus, le Département des prisons et de la probation du Ministère
de la justice a publié des directives rappelant au personnel son obligation
de signaler immédiatement et directement à la direction de son lieu de travail
les actes de violence et autres cas de comportement critiquable à l'égard des
détenus.
38. Des procès concernant la question de l'indemnisation des deux personnes
lésées dans les deux affaires susmentionnées sont en cours devant les tribunaux.
39. Amnesty International a fait état des deux affaires, tant directement auprès
du Gouvernement danois que dans ses rapports annuels, et s'est aussi montrée
critique à l'égard des deux rapports soumis par le juge, en la matière. Amnesty
International a estimé pour l'essentiel que les appréciations du juge sur le
point de savoir si l'on était en présence de cas de torture ou autres traitements
dégradants étaient inexactes, que les incidents auraient dû entraîner des conséquences
disciplinaires pour les fonctionnaires en cause et que, de plus, les deux parties
en cause auraient dû être indemnisées.
40. En juin 1994, Amnesty International a publié un rapport sur la police danoise,
dans lequel celle-ci était généralement critiquée à plusieurs titres. Ces critiques
étaient fondées, pour partie, sur plusieurs cas précis et, pour partie, sur
un certain nombre d'aspects généraux, y compris le recours par la police danoise
à la position du "passement de pied".
41. En août 1994, le Gouvernement danois a reçu de l'ONU une demande de renseignements
complémentaires sur les mêmes questions que celles qu'Amnesty International
avait soulevées dans son rapport de juin 1994.
42. Immédiatement après la publication du rapport d'Amnesty International, les
autorités danoises ont ordonné plusieurs enquêtes, aussi bien sur les aspects
généraux que sur les cas précis, mentionnés dans le rapport.
43. En ce qui concerne l'utilisation du "passement de pied" par la
police, le Ministre danois de la justice a décidé, le 29 juin 1994, de suspendre
l'utilisation du "passement de pied" de type "fixe", cependant
que le Ministère danois de la justice demandait au conseil médico-légal, organe
médical autonome, de procéder à une évaluation des risques médicaux liés à l'utilisation
de ce type particulier de passement de pied fixe.
44. Le 30 novembre 1994, le conseil médico-légal déclarait qu'en l'absence d'examens
scientifiques précis, il n'était pas possible d'écarter la possibilité que la
position du passement de pied fixe puisse être dangereuse pour des personnes
qui seraient régulièrement maintenues dans cette position et qu'en conséquence,
le conseil estimait que la méthode ne pouvait être considérée comme ne comportant
pas de risques médicaux. Le conseil estimait en outre qu'il fallait surveiller
attentivement, et le pouls et la respiration, en cas d'utilisation de passements
de pied de quelque type que ce soit, dès lors que l'intéressé était étendu face
au sol.
45. Dans une lettre datée du 2 décembre 1994, le Ministère de la justice a demandé
au Commissaire national de la police danoise d'informer toutes les circonscriptions
de police des résultats de l'expertise médico-légale et de ce que, par voie
de conséquence, l'utilisation du type susmentionné de passement de pied fixe
était définitivement suspendue.
46. En ce qui concerne les cas précis examinés par Amnesty international, les
autorités danoises ont ordonné plusieurs enquêtes. Des enquêtes sont actuellement
menées par le tribunal de Copenhague, le procureur général de l'Etat et le procureur
de district pour l'île de Seeland.
47. Le Gouvernement danois a informé le Haut Commissaire des Nations Unies aux
droits de l'homme des dispositions exposées ci-dessus et a aussi, évidemment,
promis d'informer l'ONU des résultats des enquêtes, dès qu'ils seront disponibles.
Article 14
48. Une personne soumise à la torture au Danemark a le droit de demander à être
indemnisée par la personne qui l'a soumise à la torture, dans le cadre d'une
procédure pénale intentée contre l'auteur présumé. Si celui-ci est déclaré coupable
par le tribunal, il appartient au tribunal de se prononcer sur la demande d'indemnisation
de la partie lésée, à moins que les renseignements concernant la question de
l'indemnisation en l'espèce ne soient jugés insuffisants. Le tribunal peut,
dans certains cas, s'il y a lieu, commettre un avocat pour la partie lésée si
celle-ci en formule la demande.
49. Sous réserve des dispositions de la loi sur l'indemnisation par l'Etat des
victimes d'infractions pénales, l'Etat accorde une indemnité au titre des préjudices
corporels causés par une violation du Code pénal. L'indemnité n'est toutefois
accordée qu'à la condition que la violation soit signalée à la police sans retard
indu. En revanche, elle est accordée même si l'auteur ne peut être retrouvé.
50. Il découle de la loi susmentionnée, d'une part, que la personne qui a pu
être soumise à la torture au Danemark sera en mesure d'obtenir que la justice
se prononce sur sa demande d'indemnisation par l'auteur, dans le cadre de la
procédure pénale qui sera éventuellement intentée contre l'auteur présumé et,
d'autre part, que la partie lésée pourra recevoir une indemnité de l'Etat si,
par exemple, l'auteur n'est pas retrouvé ou s'il ne dispose pas de moyens suffisants
pour verser l'indemnité.
Article 15
51. Aucune modification n'est intervenue dans la législation ou la pratique
en ce qui concerne cette disposition.
Article 16
52. On voudra bien se reporter aux paragraphes 33 à 45 ci-dessus.
Annexe
OBSERVATIONS DU REHABILITATION AND RESEARCH CENTRE
FOR TORTURE VICTIMS
1. Eu égard à l'annexe du document CAT/C/5/Add.4, les observations formulées
ci-après concernent principalement les faits nouveaux intervenus depuis 1988.
2. Le Rehabilitation and Research Centre for Torture Victims (RCT) et sa succursale
le Conseil international de réadaptation pour les victimes de la torture (CIRT)
sont des organisations privées autonomes. Ils bénéficient toutefois d'importantes
subventions du Gouvernement danois : en 1994, 7 885 800 couronnes danoises ont
été attribuées au Centre et 14 759 200 couronnes danoises au Conseil. Le Centre
contribue à l'exécution des engagements contractés par le Danemark au titre
de la Convention contre la torture, et plus particulièrement de ses articles
3, 10 et 14.
Article 3
3. Afin d'éviter que des personnes soient refoulées, il est indispensable que
ceux qui sont appelés à traiter des demandes d'asile soient familiarisés avec
le comportement de victimes de la torture. Le Centre dispense un enseignement
sur la question à un certain nombre de personnes et d'organisations :
i) Les membres de la police des frontières (qui sont les premiers à accueillir
les demandeurs d'asile;
ii) Le personnel de la Croix-Rouge danoise, qui est chargé de gérer les centres
où les demandeurs d'asile résideront jusqu'à ce qu'il soit statué sur leurs
demandes d'asile;
iii) Les personnes qui, dans les diverses circonscriptions de police, sont chargées
des étrangers; et enfin,
iv) Les membres du Conseil danois pour les réfugiés, Conseil qui décide si l'asile
doit être accordé ou refusé à une personne.
Article 10
4. Comme il l'a indiqué dans le document CAT/C/5/Add.4, le Gouvernement danois
attache une très grande importance à l'enseignement et à l'information en matière
de prévention de la torture. Le Centre/le Conseil affectent 21,5 % de leurs
budgets à des activités d'enseignement et d'information. En 1994, par exemple,
6 680 personnes dont 3 168 citoyens danois et 3 512 étrangers ont bénéficié
d'une formation et d'une information pendant une période plus ou moins prolongée.
En 1988, l'enseignement dispensé à des groupes particuliers a été étendu, notamment
aux groupes mentionnés au titre de l'article 3. De plus, un enseignement complémentaire
est dispensé à la police, aux juges et à tous les médecins d'établissements
pénitentiaires danois.
5. Le programme de préparation aux diplômes prévoit désormais un enseignement
pour tous les étudiants en médecine, tous les étudiants en dentisterie, toutes
les futures infirmières et tous les étudiants en physiothérapie au Danemark,
et des cours facultatifs sont organisés dans le cadre des études de droit.
6. Un enseignement de haute spécialisation est dispensé à certains groupes de
juristes ainsi qu'à tous les psychiatres.
7. Le Centre a produit, à l'intention des divers groupes, du matériel didactique
approprié, en danois évidemment, mais aussi, pour partie, en albanais, anglais,
arabe, espagnol, français, italien, suédois, turc et ukrainien.
Article 14
8. Comme il ressort du paragraphe 35 du premier rapport périodique, nul au Danemark
n'a été inculpé de pratique de la torture, et par voie de conséquence il n'y
a pas de victimes danoises de la torture.
9. Le Centre traite des personnes qui ont obtenu l'asile au Danemark et qui
ont précédemment été exposées à la torture. Il s'efforce de "réadapter
le plus complètement possible" les survivants de la torture et leurs proches
par un traitement psychologique et physiologique et des conseils sociaux, compte
dûment tenu des différences culturelles. Jusqu'à présent, le Centre de Copenhague
a traité des personnes de plus de 50 nationalités différentes.
10. Le Centre, première institution de ce type, s'est efforcé au cours des années
de porter, par la voie de la recherche, le traitement des survivants à la perfection.
Le Centre a diffusé ce savoir dans le monde entier : il dispose aujourd'hui
d'un réseau de 74 centres de traitement dans 43 pays, cependant que des initiatives
ont été prises dans 28 autres pays.
11. Le Centre fournit des services consultatifs pour les questions budgétaires
touchant le traitement des victimes de la torture dans l'Union européenne ainsi
qu'au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes
de la torture.
12. Le Centre a consacré plusieurs réunions internationales aux problèmes de
"La torture en tant que problème de santé" et aux "Médecins tortionnaires".
A l'une de ces réunions, il a adopté la "Déclaration d'Istanbul".
Le texte de la Déclaration a été reproduit dans un document de la Commission
des droits de l'homme (E/CN.4/1993/23/Add.2, annexe).