University of Minnesota


Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, République tchèque, U.N. Doc. CAT/C/38/Add.1 (2000).

Deuxièmes rapports périodiques des États parties devant être soumis en 1997

 

Additif

 

 

RÉPUBLIQUE TCHÈQUE*

 

[14 février 2000]


TABLE DES MATIÈRES

                                                                                                                           Paragraphes    

       I.     RENSEIGNEMENTS SUR LES NOUVELLES MESURES

ET LES FAITS NOUVEAUX TOUCHANT L'APPLICATION

DE LA CONVENTION..........................................................................        1 – 7             

 

      II.     RENSEIGNEMENTS RELATIFS AUX ARTICLES DE
     LA CONVENTION...............................................................................       8 – 122           

 

Articles premier et 2.....................................................................................            8                

Article 3...................................................................................................        9 – 11            

Article 4..................................................................................................       12 – 13           

Article 5......................................................................................................           14               

Article 6......................................................................................................           15               

Article 7..................................................................................................       16 – 17           

Article 8..................................................................................................       18 – 21           

Article 9......................................................................................................           22               

Article 10................................................................................................       23 – 31           

Article 11...............................................................................................      32 – 100        

Article 12..............................................................................................     101 – 104       

Article 13..............................................................................................     105 – 114       

Article 14..............................................................................................     115 – 120   

Article 15...................................................................................................          121        

Article 16...................................................................................................          122        

 

     III.     RÉPONSE AUX CONCLUSIONS ET RECOMANDATIONS
     DU COMITÉ.............................................................................................          123           

 


I.  RENSEIGNEMENTS SUR LES NOUVELLES MESURES ET LES FAITS
NOUVEAUX TOUCHANT L'APPLICATION DE LA CONVENTION

Renseignements d'ordre général

1.       Le deuxième rapport périodique de la République tchèque, soumis au Comité contre la torture (ci‑après dénommé le "Comité") conformément aux dispositions du paragraphe premier de l'article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, fait suite au rapport initial en date du 18 avril 1994 (CAT/C/21/Add.2). Pour l'élaboration du rapport, il a été tenu compte des éléments suivants :

          a)       Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les États parties à la Convention doivent présenter sur le respect de leurs engagements (CAT/C/14);

          b)      Examen par le Comité (CAT/C/SR.197) du rapport initial de la République tchèque (CAT/C/21/Add.2) et conclusions et recommandations adoptées par le Comité à l'issue de cet examen (A/50/44, par. 86 à 94);

          c)       Faits intéressants intervenus et nouvelles mesures adoptées par la République tchèque pour s'acquitter de ses engagements en vertu de la Convention durant la période à l'examen.

2.       Le deuxième rapport périodique de la République tchèque porte sur la période allant du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1997. Les faits intéressants intervenus entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 1999 seront consignés dans le troisième rapport périodique, que la République tchèque présentera à la fin de 2001 conformément aux dispositions de l'article 19 de la Convention. Cependant, un certain nombre de faits intervenus avant ou après la période à l'examen sont mentionnés dans le présent rapport.

3.       La période à l'examen est caractérisée par un renforcement accru des garanties légales et du respect général de l'interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La République tchèque, pour qui ces pratiques sont parmi les formes les plus graves de violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a adopté des mesures aux niveaux national et international de nature à remédier à certaines lacunes qui persistent dans la mise en œuvre systématique des obligations juridiques internationales et des normes nationales, contribuant ainsi à améliorer une situation déjà satisfaisante.

4.       La République tchèque a vu le jour le 1er janvier 1993 en tant qu'un des deux États successeurs de la République fédérative tchèque et slovaque. La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, du 10 décembre 1984 (la "Convention"), l'un des instruments fondamentaux des Nations Unies, a été signée par la République socialiste tchèque et slovaque (la "Tchécoslovaquie") à New York le 8 septembre 1986. Elle est entrée en vigueur pour la Tchécoslovaquie le 6 août 1988 (et a été rendue publique par une notification du Ministère des affaires étrangères No 143 (Recueil de 1988). Par sa note du 22 février 1993 adressée au Secrétaire général de l'ONU en tant que dépositaire de la Convention, la République tchèque a fait siens les engagements pris au titre de la Convention par l'ex‑République fédérative tchèque et slovaque, avec effet rétroactif au 1er janvier 1993. Entre 1994 et 1996 la République tchèque a adopté les mesures suivantes : le 19 novembre 1995, elle a retiré la réserve visant l'article 59 de la Convention faite par la Tchécoslovaquie au moment de la signature de la Convention; le 3 septembre 1996, elle a retiré la réserve visant l'article 20 de la Convention et a fait la déclaration prévue aux articles 21 et 22. La réserve au paragraphe 1 de l'article 30 de la Convention, émise par la Tchécoslovaquie au moment de la signature de la Convention, avait été retirée par la République fédérative tchèque et slovaque le 26 avril 1991. Pour ce qui est du statut juridique de la Convention dans la législation tchèque, le Gouvernement tchèque renvoie le Comité à la partie pertinente du rapport initial (CAT/C/21/Add.2).

5.       Durant la période à l'examen, la République tchèque a signé les instruments internationaux suivants :

La Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (Série des traités européens - STE No 126), son Protocole No 1 (STE No 151) et son Protocole No 2 (STE No 152) (les Protocoles ne sont pas encore entrés en vigueur);

L'Accord européen concernant les personnes participant aux procédures devant la Commission et la Cour européennes des droits de l'homme (STE No 67);

Le Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition (STE No 86);

Le deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition (STE No 98);

Le Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (STE No 99);

Le Protocole No 11 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (STE No 155).

6.       Du 16 au 26 février 1997, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a effectué sa première visite régulière en République tchèque. Le rapport de ce Comité (le "CPT") sur sa visite, qui est joint au présent rapport, et la réponse du Gouvernement tchèque ont été publiés le 15 avril 1999.

7.       Conformément aux dispositions du paragraphe premier de l'article 19 de la Convention, la République tchèque aurait dû présenter le deuxième rapport périodique avant le 31 décembre 1997. Étant donné les insuffisances générales constatées en matière d'élaboration des rapports demandés en application des divers instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, le nouveau Gouvernement a créé le Conseil des droits de  l'homme du Gouvernement de la République tchèque, organe gouvernemental de consultation et de coordination chargé de surveiller la mise en œuvre, au niveau national, des engagements internationaux contractés dans le domaine des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le Gouvernement tchèque a autorisé son Commissaire aux droits de l'homme, qui préside le Conseil des droits de l'homme, à établir des rapports sur le respect des engagements pris en vertu des instruments internationaux.

II.  Renseignements relatifs aux articles de la Convention

Article premier et article 2

8.       La République tchèque n'a pas de faits nouveaux à rapporter concernant ces articles.

Article 3

9.       Durant la période de l'examen, deux modifications aux dispositions du Code pénal relatives à l'expulsion des ressortissants étrangers sont entrées en vigueur. Avec effet au 1er janvier 1994, l'article 57 du Code pénal a été modifié de façon à interdire l'expulsion d'une personne ayant obtenu le statut de réfugié (modification No 290/Recueil de 1993). La nouvelle disposition protège donc de l'expulsion les personnes auxquelles la République tchèque a accordé le statut de réfugié conformément à la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole y relatif, et qui ont commis des faits délictueux non seulement au regard de leur pays d'origine mais aussi de pays tiers.

10.     Une autre modification importante à la même disposition de l'article 57 du Code pénal a été adoptée par le Parlement par la loi No 253/Recueil de 1997, le 24 septembre 1997. Conformément à la nouvelle rédaction de l'alinéa d) du paragraphe 3 de l'article 57, un tribunal ne peut pas ordonner l'expulsion d'une personne si elle risque d'être persécutée en raison de sa race, de son appartenance à un groupe ethnique ou social, de ses opinions politiques ou religieuses ou si elle risque d'être soumise à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Cette disposition est donc conforme au paragraphe 1 de l'article 3 de la Convention. La modification au Code pénal est entrée en vigueur le 1er janvier 1998.

11.     Comme il est indiqué dans le rapport initial, la République tchèque, qui est partie à la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés, applique le principe du non‑refoulement, en vertu duquel un étranger ne peut être expulsé vers le territoire d'un pays où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de son appartenance ethnique, de son statut social ou de son opinion politique. La République tchèque a également respecté cette interdiction durant la période allant de 1994 à 1997 et n'a jamais renvoyé de réfugiés ou de demandeurs d'asile dans de tels cas. En outre, en application de l'article 3, les réfugiés originaires de pays où un conflit armé se déroulait, comme la Bosnie, n'ont pas été refoulés. L'autorité chargée de l'octroi du statut de réfugié et de l'intégration des étrangers est le Département pour les réfugiés et l'intégration des étrangers du Ministère de l'intérieur, qui s'emploie également à rassembler des informations sur les pays d'origine des demandeurs d'asile pour déterminer s'ils connaissent des violations massives des droits de l'homme.

Article 4

12.     Comme il était indiqué dans le rapport initial, le délit de "torture et autres traitements inhumains ou cruels" est qualifié à l'article 259a du Code pénal, qui est entré en vigueur le 1er janvier 1994 (modification au Code pénal No 290/Recueil de 1993). Cette disposition n'a pas été modifiée durant la période à l'examen.

13.     La définition donnée de ce délit dans le Code pénal est plus large que celle de l'article 4. Comme il était indiqué dans le rapport initial, elle couvre toutes les situations dans lesquelles des souffrances physiques ou mentales sont infligées par des actes de torture ou d'autres traitements inhumains et cruels commis dans le cadre de l'exercice de la puissance publique (autorité gouvernementale, y compris un tribunal ou un gouvernement local). Le coupable est puni d'un emprisonnement allant de six mois à trois ans. Contrairement à ce qui est prévu à l'article premier de la Convention, il n'est pas nécessaire que les actes de torture ou autres traitements cruels soient infligés par un agent de la force publique ou à son instigation ou avec son consentement pour tomber sous le coup du Code pénal. En revanche, si le coupable est un agent de la force publique, s'il a commis l'acte avec au moins deux autres personnes ou de façon répétée pendant un certain temps, il sera condamné à une peine de prison allant de un à cinq ans. Si la victime a subi des lésions corporelles graves, la peine est un emprisonnement de cinq à dix ans et si elle décède, un emprisonnement de huit à 15 ans.

Article 5

14.     Comme il était indiqué dans le rapport initial, les modifications apportées aux dispositions du paragraphe 3, de l'article 17, de l'article 18, du paragraphe 1 de l'article 20, et du paragraphe 1 de l'article 20 a) du Code pénal donnent effet à cet article de la Convention. Ces dispositions n'ont pas changé durant la période à l'examen.

Article 6

15.     Les règles régissant l'ouverture d'une procédure pénale, la détention de personnes accusées d'un délit conformément à l'article 4 de la Convention, ou la décision de placer un accusé en détention ont été exposées dans le rapport initial. Ces dispositions n'ont pas changé. Selon les informations fournies par le procureur général et les procureurs régionaux, il n'a été procédé à aucune arrestation de personnes soupçonnées d'avoir commis le délit de torture ou d'autres traitements inhumains et cruels visés à l'article 259a du Code pénal durant la période à l'examen. Il n'y a pas eu non plus de cas de placement en détention de personnes poursuivies pour le même motif.

Article 7

16.     Les dispositions régissant l'ouverture et le déroulement des procédures pour les délits visés à l'article 4 de la Convention ont été décrites dans le rapport initial. Le procureur général est tenu de poursuivre tous les crimes dont il a à connaître à moins que la loi ou un traité international juridiquement contraignant pour la République tchèque n'en dispose autrement. Cette disposition n'a pas changé durant la période à l'examen.

17.     Les chiffres concernant les affaires instruites dans des affaires présumées de torture, d'autres traitements inhumains et cruels ou de violations des droits et des intérêts protégés des soldats conformément aux articles 259a, 279a, 279b du Code pénal sont les suivants :

 

1994

1995

1996

1997

Article 259a

0

0

0

0

Article 279a

104

284

80

65

Article 279b

92

107

138

89

Il ressort du tableau et des informations fournies par le procureur général que durant la période à l'examen personne n'a été poursuivi, accusé ou condamné pour un délit tombant sous le coup de l'article 259a du Code pénal (torture et autres traitements inhumains et cruels).

Article 8

18.     Comme il était indiqué dans le rapport initial, aucune disposition de la législation interne ne va à l'encontre des obligations résultant de la Convention. La Convention étant directement applicable, elle est suffisante pour permettre l'extradition d'une personne soupçonnée d'avoir commis un crime au regard de l'article 4, même vers un pays avec lequel la République tchèque n'a pas conclu de traité d'extradition.

19.     Au niveau multilatéral, la République tchèque est partie à la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 (Notification du Ministère fédéral des affaires étrangères No 549/Recueil de 1992). Elle est également liée par un certain nombre de traités bilatéraux sur l'entraide judiciaire en matière de droit pénal. Si l'État qui a besoin d'une assistance juridique a ratifié la Convention européenne d'extradition, le traité bilatéral antérieur (bien que toujours valable) n'est pas appliqué. À la fin de 1997, la République tchèque avait conclu des traités d'extradition avec 15 États et des traités d'entraide judiciaire avec 44 États au total. En outre, la République tchèque ne subordonne pas l'extradition à la négociation d'un traité international mais accepte d'extrader des personnes sur la base de la réciprocité.

20.     Durant la période à l'examen, la République tchèque a adhéré au deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition (Notification du Ministère des affaires étrangères No 30/Recueil de 1997), adopté à Strasbourg le 17 mars 1978 et signé au nom de la République tchèque à Strasbourg le 18 décembre 1995. L'instrument de ratification a été déposé auprès du Secrétaire général du Conseil de l'Europe, dépositaire de ce traité, le 19 novembre 1996. Le deuxième Protocole additionnel est entré en vigueur conformément au paragraphe 2 de son article 6, le 5 juin 1983 et conformément au paragraphe 3 du même article, il est entré en vigueur pour la République tchèque le 17 février 1997.

21.     Conformément à l'article premier du Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition, les délits spécifiés à l'article premier de la Convention européenne ne sont pas considérés comme infractions politiques en République tchèque. Rien ne s'oppose donc à ce qu'ils fassent l'objet de poursuites pénales conformément au Code pénal et aux règles de procédure pénale (comme par le passé). Parmi ces délits, on peut citer par exemple :

i)        Les crimes contre l'humanité prévus dans les Conventions de Genève de 1949;

ii)       Les infractions prévues à l'article 50 de la Convention de Genève de 1949 pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, à l'article 51 de la Convention de Genève de 1949 pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, à l'article 130 de la Convention de Genève de 1949 relative au traitement des prisonniers de guerre et à l'article 147 de la Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en tant de guerre;

iii)      Toutes violations analogues des lois de la guerre en vigueur lors de l'entrée en application du Protocole additionnel et des coutumes de la guerre existant à ce moment, qui ne sont pas déjà prévues par les dispositions susvisées des Conventions de Genève.

Article 9

22.     Durant la période à l'examen, le Procureur général n'a fourni d'assistance juridique à aucun État concernant des procédures pénales engagées dans cet État conformément à l'article 4 de la Convention. Le Ministère de la justice ne tient pas de fichier central des commissions rogatoires échangées avec d'autres pays (en outre, les "contacts directs" entre organes de justice sont de plus en plus utilisés), c'est pourquoi il ne peut être fourni de renseignements sur le nombre de commissions rogatoires portant sur des crimes qui relèvent de l'article 259a du Code pénal tchèque. La Convention n'est jamais invoquée dans le domaine de l'assistance juridique car les éventuelles commissions rogatoires sont envoyées et traitées eu égard aux instruments "généraux" que sont la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale et la Convention européenne d'extradition.

Article 10

23.     Étant donné qu'il n'est pas possible de séparer l'enseignement concernant l'interdiction de la torture ‑ selon la définition donnée à l'article premier ‑ qui est contraignant pour la République tchèque conformément à l'article 10, de l'enseignement concernant l'interdiction d'autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture telle qu'elle est définie à l'article premier (voir art. 16 de la Convention), les informations sur l'engagement pris par la République tchèque en vertu de l'article 16 de la Convention sont fournies ici.

24.     La formation professionnelle de base du personnel pénitentiaire, assurée par l'Institut de formation de l'administration pénitentiaire de la République tchèque, a été et continue d'être essentiellement axée sur des cours de formation initiale. La formation du personnel pénitentiaire s'est inscrite dans le cadre de la formation en pédagogie, en éthique et en morale chrétienne. Comparés à la formation dispensée dans d'autres pays, il s'est avéré que ces programmes de cours (qui durent sept semaines pour les membres du personnel et quatre semaines pour les employés extérieurs) étaient et sont toujours trop courts et devraient être plus longs. En outre, ils ne jetaient pas les bases nécessaires à l'acquisition de connaissances plus approfondies dans le domaine des droits de l'homme. Un tiers environ des membres de l'administration pénitentiaire n'avaient pas le niveau requis (certificat de fin de scolarité secondaire) même si une amélioration a été constatée (de 38 % en 1994, la proportion a diminué régulièrement jusqu'à 30 % en 1997). Des cours spécialisés de formation continue ont été organisés dans divers domaines en fonction de postes définis, essentiellement à l'intention des inspecteurs des prisons, des gardiens chefs, des formateurs, des psychologues et des éducateurs. Les participants ont tout d'abord reçu une formation sociopsychologique et suivi des cours de pédagogie sociale et de méthodologie du travail avec des condamnés – processus éducatifs spéciaux pour réduire le stress, stratégies de négociation et maîtrise de l'agressivité, interventions en situation de crise, traitement des prisonniers mineurs, des personnes souffrant de troubles mentaux et des personnes au comportement sexuel déviant ainsi que prévention de la toxicomanie. Durant la période à l'examen, un système de formation permanente des membres de l'administration pénitentiaire et des employés extérieurs a été progressivement instauré à l'intérieur duquel l'enseignement concernant l'interdiction de la torture et d'autres mauvais traitements occupe une place importante.

25.     L'enseignement concernant l'interdiction de la torture et d'autres mauvais traitements s'adresse également à la police. Avec l'administration pénitentiaire, la police est l'autorité qui se trouve le plus souvent confrontée à des situations dans lesquelles des actes de torture ou d'autres mauvais traitements risquent de se produire. Pour ce qui est de la torture telle qu'elle est définie à l'article premier, il faut souligner que les membres de la police, y compris les enquêteurs, sont habilités à accomplir les actes suivants en vertu du Code pénal et de la loi sur la police : arrestation de personnes, conduite au poste de personnes soupçonnées ou non d'avoir commis une infraction pénale, détention de suspects, interrogatoire de toutes personnes, notamment de témoins et de suspects avant et après inculpation, détention en vue de l'expulsion et exécution de l'ordre d'expulsion. Dans toutes leurs autres fonctions les policiers risquent aussi d'enfreindre l'interdiction des autres actes constitutifs de mauvais traitements visés à l'article 16 de la Convention. Comme il est signalé plus loin, leurs actions les plus controversées ont été les interventions qu'ils ont effectuées auprès de groupes de personnes.

26.     C'est dans les écoles secondaires de police du Ministère de l'intérieur que les policiers reçoivent l'essentiel de leur formation de base. Durant la période à l'examen, ces écoles ont dispensé une formation professionnelle de 15 mois aux policiers qui avaient terminé leur scolarité secondaire et étaient titulaires du certificat de fin de scolarité, ainsi qu'un enseignement sur deux ans aux policiers qui n'avaient pas terminé leur éducation secondaire et préparaient l'examen de fin de scolarité. Les droits de l'homme n'ont pas constitué un chapitre à part dans les programmes mais ont été intégrés aux volets consacrés à la sécurité et aux questions interdisciplinaires et principalement traitées dans le cadre des cours de droit. Les cours de droit constitutionnel ont mis l'accent de manière systématique sur la nécessité pour les policiers de connaître et d'appliquer la Charte des libertés et droits fondamentaux (qui fait partie du bloc de constitutionnalité) pendant le service et en dehors des heures de service. Les policiers ont été informés de l'évolution de la protection internationale des droits fondamentaux et de la teneur de chacun des traités et conventions internationales. De même, on a insisté sur la nécessité de connaître les dispositions applicables de droit pénal et de droit administratif et de pouvoir les appliquer, en particulier en respectant strictement les principes de légalité, de compétence et de déontologie dans l'exécution des actes de procédure et des actes administratifs. Les règles déontologiques de la police ont pris une place importante depuis 1993. Elles définissent les obligations légales, professionnelles et morales, les situations sociales et les règles de comportement des policiers entre eux et vis‑à‑vis des citoyens et énoncent leurs obligations en terme de comportement et d'actes, en service et en dehors du service. Cependant, à l'issue de leurs études secondaires, les policiers n'ont pas été formés ni mis à l'épreuve dans le domaine des droits de l'homme ou du respect de l'interdiction de la torture et d'autres formes de mauvais traitements.

27.     Le Comité voudra bien se reporter au paragraphe 77 du présent rapport, qui définit les attributions de la police municipale. Bien que les policiers municipaux ne soient pas habilités à procéder à des arrestations de personnes physiques, sauf cas de flagrant délit, les situations où ils risquent de commettre des actes de torture ou d'autres mauvais traitements sont relativement fréquentes. Conformément aux dispositions de l'article 13 de la loi No 553 (recueil de 1991) sur la police municipale, ils peuvent conduire une personne au poste et donc restreindre la liberté individuelle par la force. L'autorité municipale est chargée de la formation de la police municipale. Cependant, le policier municipal ne peut exercer les attributions et les pouvoirs conférés par la loi sur la police municipale que s'il est en possession d'un certificat d'aptitude professionnelle valable délivré par le Ministère de l'intérieur. Ce dernier a également défini par décret les conditions préalables à l'emploi et la méthode employée pour les vérifier (décret No 88/96 du Ministère de l'intérieur) : il s'agit d'un test passé devant une commission d'examinateurs du Ministère. Parmi les conditions préalables à l'emploi figure également la connaissance du système constitutionnel de la République tchèque, y compris de la Charte des libertés et droits fondamentaux. La durée de validé du certificat est de trois ans et son renouvellement est effectué selon la même procédure, ce qui équivaut à une formation continue de la police municipale.

28.     Durant la période à l'examen, l'enseignement concernant l'interdiction de la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a été assuré de la façon suivante dans l'armée de la République tchèque. Il a été dispensé dans le cadre du service militaire obligatoire ou du service civil de remplacement par les officiers et leurs services spécialisés ‑ service juridique, service humanitaire, service psychologique, etc. Pendant leur instruction élémentaire, les appelés se sont familiarisés avec les questions de droits de l'homme et de droit international humanitaire. C'est en général un policier militaire ou le conseiller juridique de l'officier qui était chargé de les informer des aspects juridiques des infractions militaires, en mettant l'accent sur les brutalités. Les futurs militaires de carrière sont sensibilisés à ces questions à l'école militaire dans les cours de sociologie, de psychologie, de pédagogie, de déontologie des cadres, d'initiation à la gestion du personnel et de droit, à raison de plusieurs dizaines de cours durant la durée totale des études.

29.     Un enseignement concernant l'interdiction de la torture et d'autres actes constitutifs de mauvais traitements a été dispensé au personnel médical, éducatif et social et aux autres catégories professionnelles appelées à être en contact avec des personnes en détention provisoire, des condamnés incarcérés et des personnes en attente d'extradition (Ministère de la justice), des suspects arrêtés par la police et placés en garde à vue et des personnes en attente d'expulsion (Ministère de l'intérieur), des malades mentaux placés en hôpital psychiatrique dans des pavillons fermés, des enfants de moins de 3 ans placés en institutions (Ministère de la santé), des enfants recevant, sur ordre d'un tribunal, une éducation en institution ou accueillis, à titre de mesure de protection, en foyers pour enfants et jeunes, des enfants placés en famille d'accueil (Ministère de l'éducation) et enfin, des pensionnaires de foyers sociaux et de foyers pour personnes âgées (Ministère du travail et des affaires sociales).

30.     L'enseignement concernant l'interdiction de la torture et d'autres mauvais traitements est naturellement dispensé aux juges et aux procureurs qui sont en contact avec des prisonniers ou des personnes soumises à une autre forme de restriction de liberté, dans le cadre de leurs études de droit. Durant la période à l'examen, les juges ou les procureurs n'ont pas reçu de formation systématique ou obligatoire de ce type. Il faut ajouter toutefois qu'il n'y a eu aucun cas de poursuites pénales engagées pour des délits relevant de l'article 259a du Code pénal et que la section disciplinaire du Procureur général n'a été saisie d'aucune demande de mesures disciplinaires contre un procureur soupçonné de comportement illégitime qui aurait pu être établi comme faute disciplinaire en vertu de l'article 27, tel que modifié, de la loi No 283 (recueil de 1993) sur les poursuites judiciaires.

31.     La question de l'interdiction de la torture et d'autres mauvais traitements a été intégrée au module de formation hebdomadaire prévu dans le cadre de deux programmes de formation permanente destinés aux directeurs de maisons pour personnes âgées et de logements protégés et organisés par le Ministère du travail et des affaires sociales en coopération avec l'Institut européen de service social (Keynes College) de l' Université de Canterbury, dans le Kent (Royaume-Uni).

Article 11

32.     Le système juridique de la République tchèque repose sur des principes selon lesquels les droits de l'homme ne peuvent être restreints que par une loi adoptée par le Parlement (et en aucun cas par un texte de rang inférieur). Les obligations ne peuvent être imposées que par la loi et dans les limites qu'elle fixe et le pouvoir de l'État ne peut être exercé que dans les cas, les limites légales et les conditions définies par la loi (et non par un texte de rang inférieur). Ainsi, la quasi‑totalité des formes d'emprisonnement et de privation de liberté obéissent à la loi, tant pour ce qui est de la décision de placement dans une prison ou de la réglementation des conditions d'emprisonnement ou de détention dans un autre établissement ‑ droits des détenus, obligations des gardiens et autres conditions relatives à l'établissement. La dérogation à certains droits de l'homme et à certaines libertés et l'interdiction de toute limitation de droits de l'homme spécifiques sont régies par la législation nationale mais, aussi et avant tout, par les obligations internationales acceptées par la République tchèque (par exemple la Convention européenne des droits de l'homme, art. 15); il en a été ainsi pendant la période à l'examen. Les exceptions seront exposées plus loin.

33.     Si le placement en prison ou dans un autre établissement obéit strictement à la loi, il n'en a pas toujours été de même pour les conditions d'emprisonnement, en particulier les droits des personnes privées totalement ou partiellement de liberté et des obligations des personnes physiques et morales responsables, comme il sera montré plus loin.

34.     Des cas d'emprisonnement ou de détention et aussi des situations dans lesquelles des actes de torture ou d'autres mauvais traitements risquent de se produire sont décrits dans les paragraphes suivants. Le contrôle des mesures d'emprisonnement et de détention, la suite donnée aux plaintes pour torture ou autres mauvais traitements et la réparation accordée aux victimes font l'objet des paragraphes consacrés à la mise en œuvre des articles 12, 13 et 14. Étant donné qu'il est impossible de séparer les questions qui ont trait par exemple à la police, les informations fournies au sujet des articles 12, 13 et 14 couvrent aussi celles requises au titre de l'article 16 (autres mauvais traitements) pour les situations visées par les articles 11 à 14.

Dispositions légales régissant l'exécution de la mesure de détention et de la peine d'emprisonnement : pratique

35.     L'exécution de la détention est régie par la loi No 293 (Recueil de 1993) sur la détention, entrée en vigueur le 1er janvier 1994, et par le décret No 109 (Recueil de 1994) du Ministère de la justice, définissant les règles d'application avec effet au 3 juin 1994.

36.     L'exécution des peines d'emprisonnement est régie par la loi No 59 (Recueil de 1965) sur l'exécution des peines d'emprisonnement, qui a été modifiée à de nombreuses reprises; durant la période à l'examen, elle a été modifiée par la loi No 294 (Recueil de 1993), entrée en vigueur le 1er janvier 1994 (en même temps que la nouvelle loi sur l'exécution de la détention), et par la loi No 152 (Recueil de 1995) qui ne représentait qu'une modification mineure. Comme la modification concernant la détention, l'amendement No 294 (Recueil de 1993), de portée plus vaste, a été suivi par le décret No 110 (Recueil de 1994) du Ministère de la justice, qui établissait les modalités d'exécution des peines d'emprisonnement.

37.     Conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l'article 12 de la loi No 59 (Recueil de 1965) sur l'exécution des peines d'emprisonnement, telle que modifiée, le condamné peut recevoir et envoyer de la correspondance à ses frais, sans la moindre restriction. La correspondance qu'entretient un condamné avec une organisation internationale habilitée à examiner des communications relatives à la protection des droits de l'homme en vertu de l'article 10 de la Constitution de la République tchèque ne fait l'objet d'aucun contrôle.

38.     Conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l'article 13 de la loi No 293 (Recueil de 1993) sur l'exécution de la détention, le prévenu peut recevoir et envoyer de la correspondance à ses frais, sans la moindre restriction. La correspondance entre le prévenu et son avocat et les autorités de la République tchèque ne peut être soumise à aucun contrôle.

39.     Le traitement de la correspondance des prévenus et des condamnés est régi par les règlements internes de l'administration pénitentiaire. Il est possible de retenir la correspondance des prévenus en application de la loi sur l'exécution de la détention, qui dispose que la correspondance est contrôlée, c'est-à-dire qu'il peut être pris connaissance de la teneur des communications écrites. Si la détention est motivée par la crainte que le prévenu ne fasse obstacle à la manifestation de la vérité dans le cadre de la procédure pénale, la correspondance est vérifiée par l'autorité chargée de l'instruction. Dans les autres cas, c'est l'administration pénitentiaire qui est habilitée à effectuer le contrôle. Le personnel pénitentiaire est tenu de ne pas remettre la correspondance aux prévenus et de la transmettre à l'autorité chargée de l'instruction si son contenu laisse soupçonner une activité criminelle ou si la remise de la correspondance risque de contrecarrer l'objectif de la détention. La correspondance non distribuée sera gardée dans le dossier du détenu et les parties non répréhensibles seront communiquées au destinataire.

40.     Les modifications ci‑après ont été apportées aux règles applicables à l'exécution de la détention (voir par. 34). Tout prévenu en détention doit être protégé contre les actes de violence injustifiés, toutes les formes d'atteintes à la dignité, les insultes ou les menaces. Le personnel pénitentiaire signale tous les cas de ce type qu'il constate aux autorités compétentes et prend des mesures immédiates pour prévenir de tels comportements. Dans le cas des condamnés, la protection contre les actes de violence non justifiés est garantie par les dispositions du paragraphe 2 de l'article 1 de la loi No 59 (Recueil de 1965) sur l'exécution des peines d'emprisonnement, telle que modifiée.

41.     La modification susmentionnée de la loi sur l'exécution des peines d'emprisonnement a abrogé les dispositions relatives au contrôle par les citoyens de l'exécution des peines d'emprisonnement, en vertu desquelles ce contrôle était effectué par des commissions de la Chambre des députés (composées à la fois de députés et de non députés) habilités à visiter les établissements pénitentiaires et à s'entretenir avec les prisonniers hors de la présence de tiers. Des commissions des collectivités locales avaient également le droit d'intervenir dans l'administration des prisons et de contrôler très largement les conditions d'exécution des peines d'emprisonnement; toutes ces dispositions ont été abrogées dès 1990. Le Comité voudra bien se reporter aux renseignements donnés à propos de l'article 12 de la Convention décrivant les inspections internes et faisant état des inspections externes totalement insuffisantes du système pénitentiaire.

42.     Conformément à la loi sur l'exécution de la détention, le prévenu a le droit de recevoir quatre visiteurs au plus, pendant 30 minutes une fois toutes les trois semaines. Le directeur de la prison peut autoriser des visites plus fréquentes ou plus longues à condition qu'elles soient justifiées. Pour recevoir des visiteurs, les prévenus en détention doivent obtenir l'accord préalable écrit du tribunal et du parquet pendant l'instruction pour éviter le risque de collusion qui peut entraver la manifestation de la vérité dans le cadre de la procédure pénale. Un représentant de l'autorité chargée de l'instruction peut également assister aux visites quand il s'agit de personnes pour lesquelles une autorisation écrite est exigée.

43.     En règle générale, la décision de placement en détention n'est que formelle. Le prévenu placé en détention provisoire ne peut que s'incliner devant la décision des autorités de poursuites en ce qui concerne les visites et la correspondance; il ne peut faire valoir aucun droit dans ce domaine et n'a aucune possibilité de recours, sauf devant la Cour constitutionnelle.

44.     D'après des chiffres du Ministère de la justice, quelque 7 000 inculpés ont été placés en détention provisoire chaque année durant la période considérée, pour une durée d'environ 140 jours. De l'avis des spécialistes, la détention est chez de nombreux accusés une épreuve dure à supporter; elle entraîne souvent la désintégration de la famille ou une détérioration de la situation sociale car le détenu en prévention ne peut pas travailler et ne peut de ce fait pas contribuer à l'entretien de sa famille. En outre, la famille est exposée aux pressions de l'entourage, notamment du fait que le grand public confond la détention provisoire et la culpabilité établie et ne comprend pas le principe de la présomption d'innocence. De nombreux avocats commis d'office n'accordent aux cas qui ne leur rapportent pas beaucoup financièrement que l'attention strictement exigée d'eux : le barreau tchèque a relu, en ce qui concerne les avocats commis d'office, 30 plaintes en 1994, 47 plaintes en 1995, et 36 plaintes en 1996 et en 1997. Le barreau a jugé qu'environ un sixième de ces plaintes était justifié.

45.     La superficie de 3,5 m2 fixée par la loi pour un détenu en détention provisoire condamné ‑ qui peut être réduite dans des cas exceptionnels et seulement pendant la durée rigoureusement nécessaire ‑ a diminué dans toutes les prisons tchèques de manière pratiquement constante depuis 1994. La superficie ne peut être accrue avec fonds d'équipement alloués à l'administration pénitentiaire du fait de l'augmentation régulière du nombre des prisonniers. Au 31 décembre 1997, le nombre total des personnes incarcérées s'élevait à 21 560 pour 18 907 places. Les conséquences néfastes ont été nombreuses. Non seulement ce surpeuplement est contraire aux conditions de détention fixées par la loi et les textes internationaux et aux conditions recommandées concernant la détention des prévenus et des condamnés, mais il rend aussi plus difficile la réalisation des activités de resocialisation, réduisant le niveau de sécurité et créant des tensions supplémentaires dans les centres de détention et les établissements pour peine. Il a fallu utiliser les prisons pour condamnés comme centres de détention provisoire et aménager des cellules et des chambres dans des locaux destinés à d'autres usages; des problèmes se posaient concernant les installations sanitaires, etc. Dans la pratique, dans les centres de détention et les prisons, les détenus passaient toute la journée dans des cellules et des chambres surpeuplées, faute de pouvoir travailler ou s'occuper utilement. Le plan d'investissement, qui prévoit la création de 23 518 places d'ici à la fin 2003, représente une progression de 4 611 par rapport à la situation du 31 décembre 1997. Ce plan répond aux recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants qui s'est rendu dans divers établissements pénitentiaires au cours de sa mission du 16 au 26 février 1997. Cependant, tant les spécialistes que le personnel pénitentiaire ont fait observer que pour réduire de manière durable le nombre des prévenus et des condamnés dans les centres de détention et dans les établissements pour peine, il fallait procéder à des réformes fondamentales dans les domaines de la répression, de ce que l'on appelle les peines de substitution, c'est-à-dire l'abandon  des poursuites pénales sous condition ‑ transaction et médiation ‑ et d'autres procédures rendues possibles par les modifications aux règles de procédure pénale et au Code pénal adoptées dans les années 90, dont les plus récents remontent à 1997 et sont entrés en vigueur le 1er janvier 1998.

46.     Le tableau ci‑après indique le nombre des prévenus et condamnés en détention en République tchèque pour 100 000 habitants.

 

1994

1995

1996

1997

Nombre de personnes en détention pour 100 000 habitants

187

195

208

215

47.     D'après le Procureur général, les peines de substitution se répartissaient comme suit : la suspension sous condition des poursuites pénales par le parquet a été accordée à 2 509 personnes en 1994, 3 400 personnes en 1995, 3 891 personnes en 1996 et 4 537 personnes en 1997. Sur le nombre total de personnes poursuivies, la proportion n'est pas très importante (2,9 % en 1994, 3,1 % en 1995, 3,6 % en 1996 et 4,2 % en 1997) mais elle indique manifestement une augmentation du nombre des personnes qui ont bénéficié de cette mesure. Quant à la transaction, il s'agit d'une formule totalement nouvelle. Le faible nombre de propositions de transaction au stade de la procédure préparatoire (64 propositions en 1996 et 51 propositions en 1997) tient également à l'insuffisance des textes qui ne permettent pas au parquet de régler une affaire dans sa totalité par voie de transaction, au stade de la procédure préparatoire. Les lacunes de la législation en vigueur se répercutent également sur le travail d'intérêt général qui a été institué assez hâtivement par la loi No 152 (Recueil de 1995) sans aucune réglementation touchant les questions financières, de travail et sociales qui en découlent.

48.     Le tableau ci‑après montre le nombre de peines d'emprisonnement ferme par rapport au nombre total des condamnés :

 

1994

1995

1996

1997

Nombre total de condamnés

51 931

54 957

57 974

59 777

Condamnés à des peines d'emprisonnement ferme

11 128

12 552

13 377

13 934


49.     L'administration pénitentiaire a accordé une attention toute particulière aux mineurs délinquants placés en détention (jeunes âgés de 15 à 18 ans). En cas de dépassement de la capacité des établissements pénitentiaires, la loi et les règles régissant la détention prévoient que la superficie minimale de 3,5 m2 doit être respectée pour les mineurs délinquants et pour les femmes prévenues en état de grossesse. La détention d'un mineur est une mesure exceptionnelle. Au 31 décembre 1997, 350 prévenus mineurs étaient détenus, dont 11 filles, soit 3,1 % du total.

50.     En 1994, la Commission de réforme de la Direction générale de l'administration pénitentiaire a attribué à tous les centres de détention des postes de gardiens et de spécialistes pour le traitement des mineurs délinquants. Les activités de formation, d'éducation et de loisirs menées avec les jeunes délinquants correspondent aux caractéristiques de leur développement et visent à limiter au minimum les conséquences de la privation de liberté. Grâce à un travail intensif avec les mineurs délinquants, on est parvenu à éliminer certains excès de comportement, tels que les conduites agressives, les actes d'automutilation et les tentatives de suicide.

51.     Par manque de personnel, de place et d'équipement suffisants, il n'a pas été possible de mener dans toutes les prisons et à l'échelle nécessaire les programmes de resocialisation qui devraient permettre d'atteindre les buts de la détention. Un travail a été mené avec les détenus soit dans le cadre de séances individuelles soit avec des groupes particuliers de prisonniers (personnes souffrant de déviances sexuelles, malades mentaux, etc.). Ce travail était alors mené par des spécialistes très qualifiés et a donné des résultats; en outre les détenus s'en sont déclarés satisfaits.

52.     Des curateurs sociaux (tuteurs dans le cas des délinquants juvéniles) ont également accès aux centres de détention et aux prisons et ont la possibilité de travailler avec les prévenus et les condamnés. L'utilité d'un travail social continu avec les délinquants réside tout particulièrement dans l'atténuation de ce que l'on appelle "la crise du premier jour" (c'est‑à‑dire après la libération) et dans la suppression des problèmes liés à la détention. Le maintien des contacts entre les détenus et leur famille est un aspect primordial de la tâche à accomplir. L'insuffisance des curateurs sociaux - qui sont depuis longtemps au nombre de 135 pour toute la République tchèque - pose des difficultés. Les curateurs sont affectés en fonction du lieu de résidence permanente du détenu, qui est parfois placé dans un établissement pénitentiaire éloigné de son domicile. Des relations avec tous les détenus sont donc tout à fait hors de question. Par le décret No 209 de 1997, le Gouvernement a prévu d'augmenter le nombre des curateurs sociaux mais aucune amélioration sensible n'a été observée.

53.     Les sanctions disciplinaires prises à l'encontre des détenus, qui impliquent une restriction supplémentaire de leur liberté - régime cellulaire et placement dans un quartier d'isolement - n'étaient pas (pendant la période considérée) décidées par un juge mais par un membre de l'administration pénitentiaire; les droits des détenus n'étaient donc pas réglementés de la même façon que dans le cadre des procédures pénales ou des procédures concernant des infractions de moindre importance[1].

54.     D'après le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, les soins de santé dispensés aux prévenus et aux condamnés dans les établissements pénitentiaires sont satisfaisants et tout à fait comparables au niveau des soins de santé dont bénéficie le reste de la société (rapport du Comité européen ‑ Strasbourg, 15 juillet 1997). Cependant, on peut supposer que, dans la pratique, l'attitude des agents de santé à l'égard des détenus se fonde sur un sentiment de méfiance réciproque. Même une grossesse avancée ou une maladie grave n'est pas considérée comme un motif légal suffisant pour obtenir la sortie de prison. En dehors des heures de consultation du médecin de la prison, ce sont les services d'urgence civils qui assurent les soins médicaux. Un membre du personnel n'appartenant pas au corps médical prend la décision d'appeler ou non le service d'urgence pour soigner un détenu. Il s'ensuit qu'une mauvaise évaluation de l'état de santé d'un détenu peut avoir des conséquences tragiques.

55.     Bien que les détenus de nationalité étrangère aient droit aux mêmes soins de santé que les prisonniers tchèques, ils ne bénéficient pas de l'assurance maladie car la loi ne garantit l'assurance maladie qu'aux résidents permanents. Cette situation peut compromettre le niveau des soins de santé dispensés ou grever indûment le budget de certains établissements pénitentiaires.

56.     Les soins de santé posent divers problèmes : les prisons ne sont pas équipées pour accueillir des handicapés de sorte qu'un inculpé paraplégique, qui dans des conditions normales pourrait mener une vie indépendante en fauteuil roulant, est placé dans un lit à l'hôpital de la prison. À Prague (Pankrác), les détenus hospitalisés n'ont pas droit à la promenade, même pendant l'heure quotidienne prescrite par la loi, car il n'y a pas assez de place.

57.     Une analyse critique des soins de santé dans les établissements pénitentiaires est donnée dans le rapport annuel sur la situation des droits de l'homme en 1995 établi par le Comité tchèque d'Helsinki, organisation non gouvernementale constituée en 1988, membre de la Fédération internationale d'Helsinki pour les droits de l'homme. On peut y lire :

Les détenus - par exemple à Ostrov nad Ohrí où il y a des personnes âgées et des malades - se plaignent de ne pas être soignés rapidement en cas d'affections aiguës. Les automutilations fréquentes sont presque toujours considérées par le personnel comme des actes délibérément accomplis par les détenus pour compliquer le travail des gardiens, alors qu'il s'agit en fait souvent de tentatives désespérées pour échapper à une situation insoutenable ou de la manifestation d'une psychose. Le Comité tchèque d'Helsinki a même noté qu'il était interdit de s'étendre ou de s'asseoir sur le lit (pour les détenus moins gravement malades). Les détenus ayant des problèmes particuliers, par exemple mal au dos, se plaignent du mauvais état des lits et de devoir rester assis sur des tabourets en métal dépourvus de dossier.

Pour ce qui est de la rapidité des interventions médicales en cas de problème de santé grave, il faut rappeler qu'en cas de blessure ou de problème de santé grave survenant après les heures de travail, pendant les jours fériés et, surtout, la nuit, la rapidité de l'examen et du traitement dépend de l'arrivée du médecin du service des urgences.

58.     Le Comité tchèque d'Helsinki relève ce qui suit dans son rapport annuel pour 1997 :

Il convient de noter que le niveau des soins de santé assurés en général aux détenus est comparable à celui de la moyenne de la population. Toutefois, les agents de santé ne peuvent résoudre à eux seuls les effets secondaires de l'incarcération que viennent aggraver le stress dans des prisons surpeuplées, les longues périodes de détention, les conditions de réclusion telles que l'entassement dans une cellule de plus de 10 détenus, même dans les établissements réservés aux condamnés à de longues peines (par exemple Mírov) et en permanence une promiscuité quasi‑totale. De nombreuses maladies ont donc un rapport avec l'état psychique des détenus, et les médecins - employés dans le système pénitentiaire depuis de nombreuses années - ne peuvent pas ou ne veulent pas les détecter. Ils préfèrent se contenter d'accuser les détenus de simulation, affirmant que leurs difficultés sont "uniquement" subjectives sans aucun rapport médical à l'appui. De plus les prisonniers eux‑mêmes et leurs familles disent que leur état de santé s'est dégradé en prison, pour des personnes souffrant déjà d'épilepsie, de maladies cardiaques, d'asthme, de dermatoses. (...) Évidemment, il y aussi des maladies caractéristiques des prisons qui se propagent rapidement lorsqu'elles touchent un établissement pénitentiaire (salmonelle, éruptions cutanées).

59.     Les coûts des soins médicaux à la suite de grèves de la faim et dans les cas d'automutilation figurent parmi les postes budgétaires des établissements pénitentiaires. L'administration pénitentiaire reconnaît aux prisonniers le droit d'observer une grève de la faim et la Direction estime en général que les détenus ne peuvent être obligés à y mettre fin ou à l'interrompre. En revanche, l'état du détenu en grève est surveillé, notamment par un psychiatre qui, s'il constate que le prisonnier n'est plus capable de décider, déclenche les mesures nécessaires pour le sauver.

60.     La généralisation des agressions et du bizutage est un problème constant non seulement dans les établissements pénitentiaires mais également dans l'armée et dans les écoles. Le phénomène a été constaté durant la période examinée. Le Comité tchèque d'Helsinki a fait dans son rapport pour 1996 les observations suivantes :

Les agressions restent un problème grave. Lorsque les gardiens ou les éducateurs découvrent des cas d'agression, ils peuvent imposer à l'auteur une sanction disciplinaire, le réprimander ou le transférer dans un autre quartier. La victime peut s'adresser au Service des plaintes et de la prévention, qui entreprend une enquête en bonne et due forme. S'il est confirmé qu'il y a eu agression, une sanction disciplinaire est proposée. Une sanction peut être prononcée par le directeur dans les cas les plus graves. Le coupable peut être mis en régime cellulaire pour une durée maximale de 20 jours. L'une des façons d'éviter les agressions est de repérer leurs victimes potentielles : les détenus physiquement faibles ou ceux qui sont incarcérés pour des crimes contre des femmes ou des enfants. Les gardiens vérifient que les détenus ne présentent pas de marques de violences corporelles. Il arrive que les prisonniers déclarent avoir glissé dans les escaliers, etc., pour expliquer leurs hématomes. Les récidivistes sont passibles d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans pour chantage et lésions corporelles.

Pour prévenir les agressions, l'administration pénitentiaire applique des mesures internes qui sont définies en particulier dans l'ordonnance No 32 de 1994 du Directeur général. Des mesures concernant le personnel et l'organisation générale ont été adoptées en vue d'éliminer les violences entre mineurs délinquants. Les effectifs des unités où sont détenus les mineurs ont été renforcés de manière à ce que des spécialistes - éducateurs, psychologues, travailleurs sociaux - puissent travailler avec eux pendant la journée.

61.     Le Comité tchèque d'Helsinki énonce également ce qui suit dans son rapport annuel pour 1995 :

En outre, de nombreuses plaintes sont difficiles à vérifier dans la pratique; néanmoins, on peut déduire de leur fréquence que les situations dénoncées existent effectivement. Les plaintes concernent le comportement des gardiens, les actes de violence perpétrés par des détenus pour voler les codétenus ou les obliger à exécuter toutes sortes de corvées pour eux, ainsi que les agressions physiques. Les victimes se plaignent de ce que le personnel responsable du maintien de l'ordre ne leur assure aucune protection.

D'après les informations émanant de l'administration pénitentiaire, tous les cas de vol, d'agression, etc., signalés par les détenus ou les membres du personnel font l'objet d'une enquête et sont éventuellement transmis à la police aux fins de poursuites pénales. Un problème récurrent est la réticence des victimes à témoigner, parfois même après leur transfert dans un autre établissement pénitentiaire.

62.     D'après des informations émanant du Ministère de la justice, l'administration pénitentiaire accorde une attention de plus en plus grande à la violence entre détenus et à sa prévention. Pour assurer une surveillance systématique des détenus à risque et des détenus dangereux, le Directeur général de l'administration pénitentiaire a émis en 1994 une ordonnance qui réglemente de manière détaillée l'identification des détenus susceptibles d'être victimes de violence et de ceux potentiellement violents. L'application de cette ordonnance est régulièrement contrôlée et évaluée. Au cours de la période à l'examen, il y a eu au total parmi les détenus 2 457 cas de violence, imputables à 2,5 % des prévenus et à 1,5 % des condamnés. Les comportements violents observés parmi les détenus font l'objet d'enquêtes auxquelles participent un médecin, un psychologue, un éducateur, un gardien et des agents des services de prévention. L'affaire est transmise à la police aux fins de poursuites pénales lorsque cela se justifie. L'administration pénitentiaire transfère si nécessaire les détenus dans d'autres établissements pénitentiaires.

63.     Toutefois, les statistiques données au paragraphe précédent ne tiennent pas compte des cas de violence cachée, où le personnel pénitentiaire n'a pu que faire des conjectures sur l'origine des blessures. L'administration pénitentiaire n'enregistre pas ces actes de violence même lorsqu'elle soupçonne qu'ils se sont produits. De tels actes peuvent être considérés comme le résultat du surpeuplement des établissements pénitentiaires.

64.     Le système sous‑tendant l'organisation du travail et la rémunération des personnes incarcérées est en contradiction avec l'objectif de la loi sur l'exécution des peines qui consiste à "éduquer en permanence le condamné pour qu'il puisse ensuite mener la vie d'un citoyen respectable". Les revenus du détenu ne sont pas suffisants pour couvrir les frais encourus pendant l'incarcération ou pour payer les pensions alimentaires, par exemple. Il faut ajouter l'absence totale de postes de travail pour les prisonniers, qui est en partie due à la situation de chômage général. Il en résulte des sentiments d'injustice et d'exclusion chez les détenus.

65.     La décision de placer ou non sous écrou extraditionnel l'auteur d'une infraction pénale pour laquelle un État étranger demande son extradition est régie par le Code de procédure pénale. Les conditions applicables sont énoncées dans la loi et les règlements sur la détention.

Dispositions législatives et pratiques en matière d'arrestation et de garde à vue

66.     La garde à vue (sans mandat d'arrêt) est une institution régie par les dispositions de la loi sur la procédure pénale judiciaire (Code de procédure pénale) qui s'applique à un suspect avant que des poursuites ne soient éventuellement engagées et que des charges soient retenues à son encontre et en attendant la décision du juge concernant le placement en détention provisoire. La garde à vue se décompose en deux phases – la première va de l'arrestation jusqu'au moment où l'individu à l'encontre duquel des charges ont été retenues, est déféré au juge, c'est‑à‑dire où son dossier est remis au juge; la seconde va du transfert du dossier jusqu'à la décision de placer le suspect en détention ou de le remettre en liberté. La première partie durait au maximum 24 heures pendant la période considérée (48 heures depuis le 1er janvier 1999), la seconde ne pouvant pas non plus dépasser 24 heures. Les règles applicables à la période de garde à vue (droits de la personne arrêtée et obligations de la police à son égard) sont énoncées dans la loi sur la police de la République tchèque au même titre que les dispositions applicables au placement des autres personnes en garde à vue – personnes arrêtées (en exécution d'un mandat) conformément au Code de procédure pénale, condamnés attendant leur transfert dans un établissement pénitentiaire, également en application du Code de procédure pénale, prévenus ou condamnés transférés par un policier pour l'exécution d'actes de procédure et enfin, personnes retenues conformément à la loi sur la police de la République tchèque pour une période pouvant aller jusqu'à 24 heures.

67.     La loi sur la police nationale définit dans quels cas et dans quelles conditions un individu peut être placé en garde à vue ainsi que les caractéristiques minimales que la cellule de garde à vue doit présenter. Si le suspect a quelque réserve que ce soit concernant la manière dont les policiers ont agi ou se sont comportés, il peut déposer une plainte qui fera l'objet d'une enquête par le corps d'inspection de la police.

68.     Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants note dans son rapport qu'en 1977 la République tchèque n'avait aucune disposition régissant les soins médicaux pour les personnes en garde à vue, à savoir le droit d'être examiné par un médecin choisi par la personne elle‑même, et le droit d'être examiné hors de la présence de policiers; cette procédure a également été recommandée pour l'exécution des peines d'emprisonnement. Le Comité a formulé de nombreuses recommandations concernant la garde à vue, tendant notamment à améliorer les contacts du détenu avec son avocat et avec le monde extérieur.

Dispositions législatives et pratique concernant la rétention avant l'expulsion

69.     Les dispositions régissant la rétention avant l'expulsion ont été incorporées en 1997 au Code de procédure pénale, avec effet au 1er janvier 1998. La loi sur la police réglementait les procédures d'expulsion administrative, prévoyant une période de rétention pouvant aller jusqu'à 30 jours. Toutefois, il n'y a toujours aucune réglementation concernant les droits des personnes faisant l'objet d'une procédure d'expulsion pendant cette période. En 1997, les mauvaises conditions de détention des étrangers avant leur expulsion ont suscité des critiques et des recommandations de la part du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, qui a estimé la situation si grave qu'il l'a fait savoir immédiatement et demandé une réponse dans les trois mois, c'est‑à‑dire avant la soumission de son rapport. Les critiques portaient sur l'étendue des droits des personnes en garde à vue, les soins médicaux, le système de rétention et ce que l'on appelle les cellules d'isolement dans les centres de rétention.

Dispositions législatives régissant les droits et les devoirs de la police en République tchèque

70.     Il a plusieurs fois été fait mention de la loi No 283 (Recueil de 1991) sur la police nationale telle que modifiée (il y a eu trois amendements en 1993), qui était en vigueur pendant toute la période couverte par le rapport. Pour l'application de la Convention, il est important de noter que cette loi régit les devoirs des forces de police. La disposition principale à ce sujet est la suivante :

          Lorsqu'ils interviennent ou agissent dans l'exercice de leurs fonctions, les policiers sont tenus de respecter l'honneur et la dignité d'autrui et d'eux‑mêmes et d'éviter à autrui tout préjudice injustifiable dû à leur intervention et toute atteinte à leurs droits et libertés allant au‑delà de ce qui est nécessaire à l'accomplissement de leur mission. Le policier est tenu d'informer les personnes en cause de leurs droits si la nature et les circonstances de son intervention ou de son acte le permettent; dans le cas contraire, elles en sont informées ultérieurement.

71.     Les membres de la police nationale sont autorisés à recourir aux moyens de coercition précisés par la loi, dans des conditions également déterminées par la loi. Ces moyens de coercition sont les suivants : prises d'autodéfense et autres, coups de poing et coups de pied, gaz lacrymogènes, coups de matraque, menottes, chiens policiers, dispersion par la police montée, moyens techniques pour empêcher un véhicule de démarrer, barrages routiers et autres manières d'obliger un véhicule à s'arrêter, canons à eau, grenades d'intimidation, coups de crosse, menace de recours à une arme à feu, tirs de semence. Un policier est autorisé à recourir à des mesures coercitives contre un individu, pour assurer la sécurité d'autrui et se protéger et protéger les biens et pour préserver l'ordre public. Avant d'utiliser la force, le policier est tenu de demander à l'intéressé de s'abstenir d'accomplir tout acte illégal et de le prévenir que des mesures coercitives seront utilisées (à l'exception des moyens techniques pour empêcher un véhicule de démarrer). Il ne peut se dispenser des sommations qu'en cas de risque pour sa santé ou pour la vie ou la santé d'autrui et si l'intervention de la police n'admet aucun retard. Le policier décide de la mesure coercitive la plus efficace en fonction de la situation. Il applique les mesures coercitives nécessaires pour venir à bout de la résistance de la personne en train de commettre l'acte illégal. Le policier est également tenu de veiller à ce que le recours à des mesures coercitives ne cause pas à l'individu un préjudice manifestement disproportionné par rapport à la nature et à la dangerosité de l'acte illégal.

72.     Conformément à la loi sur la police, les fonctionnaires de police doivent rendre compte sans tarder à leurs supérieurs de toute intervention au cours de laquelle ils ont fait usage de la force. Cette obligation a été expressément inscrite dans l'ordonnance du Ministère de l'intérieur de 1991 qui définissait la procédure de signalement du recours à des mesures coercitives ou à une arme. Le supérieur hiérarchique d'un membre des forces de police qui a utilisé des méthodes coercitives est tenu de s'assurer que ces méthodes ont été appliquées dans le respect de la loi dans les cas où leur nécessité ou leur adéquation à la situation est sujette à caution ou lorsqu'il en est résulté un décès, des atteintes à l'intégrité physique ou des dommages aux biens. Le supérieur hiérarchique est tenu de consigner par écrit ses conclusions.

73.     D'après des observateurs indépendants d'organisations non gouvernementales, il existe plusieurs sortes d'interventions policières injustifiées :

          a)       Recours à des méthodes coercitives en l'absence de nécessité (à l'égard de citoyens qui n'opposent aucune résistance ou qui ne s'opposent que verbalement à un contrôle d'identité gratuit ou à une interpellation non justifiée). La question des contrôles d'identité de routine et du droit de l'individu de connaître la raison pour laquelle on lui demande ses papiers d'identité n'a pas été réglée pendant la période à l'examen (et ne l'est toujours pas). La loi sur la police nationale précise certains cas dans lesquels la police peut procéder à un contrôle d'identité. Cependant, aucun texte ne précise dans quels cas le policier est tenu de justifier à l'avance auprès de la personne contrôlée la demande de présentation de ses pièces d'identité. Il est évident que dans certaines situations, la police n'est pas obligée de donner d'explication au citoyen (par exemple lorsqu'il est interpellé en flagrant délit). C'est en partie à cause des lacunes de la législation qu'il arrive que des contrôles soient effectués sans explication.

          b)      Utilisation de moyens coercitifs légaux mais totalement excessifs alors que d'autres méthodes auraient suffi (par exemple, l'utilisation d'une arme à feu pour arrêter une personne non armée soupçonnée d'avoir commis un délit mineur).

          c)       Recours à des actes de violence physique prohibés par le paragraphe 2 de l'article 7 de la Charte des libertés et droits fondamentaux (tirer par les cheveux, donner des coups de pied ou passer à tabac une personne à terre), ou actes de violence à l'égard de personnes arrêtées ou détenues ou menaces de recours à la violence.

74.     Le tableau ci‑après illustre l'activité répressive de la police et son évolution (données du Ministère de l'intérieur) .

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Nombre d'auteurs d'infractions identifiés

271

288

276

270

305

245

Évolution, en pourcentage

+ 17

+ 6

- 4

- 2,2

+ 13

- 20

Nombre d'infractions pénales

344

376

355

321

374

287

Évolution, en pourcentage

+ 19

+ 9

- 6

- 9,6

+ 16,5

- 23

Nombre d'infractions pénales pour 1 000 policiers

10,6

8,6

7,6

7,1

8,5

6,4

75.     La police aurait commis en mai 1996 des actes de violence dans un établissement pragois, le club Propast. Le Comité tchèque d'Helsinki a décrit comme suit cette intervention dans son rapport annuel pour 1996 :

          Le 4 mai 1996, une soixantaine de policiers masqués armés de pistolets mitrailleurs, appartenant à la brigade spéciale des stupéfiants, ont fait une descente dans le club de rock Propast situé rue Lipanská à Prague 3. Ils ont découvert trois cigarettes de marijuana, une seringue (dont certains ont prétendu qu'elle avait été placée là par la police), cinq personnes sans papiers d'identité et un homme recherché. L'opération n'a pas été enregistrée, car sur les trois caméras vidéo, l'une n'avait, paraît‑il plus de piles, la deuxième a enregistré la décoration intérieure du club et la troisième n'a pas fonctionné. La police visait des skinheads militants qu'elle voulait empêcher de distribuer et de prendre de la drogue.

          À la suite de l'intervention au club Propast, l'Inspection du Ministère de l'intérieur a reçu 11 plaintes et a noté que trois personnes avaient été blessées, alors que six personnes avaient dû recevoir des soins médicaux et que l'une d'elles avait été déclarée inapte au travail. Immédiatement après l'intervention, la police a nié avoir passé à tabac des clients. Le chef de la police et le Ministre de l'intérieur ont déclaré que l'opération avait été régulière et conforme à la loi avant même que l'enquête ne soit achevée, signe manifeste de leur partialité en faveur de la police anti émeutes.

          Après enquête, le corps d'inspection du Ministère de l'intérieur a conclu qu'il y avait eu violation de la loi lors de la descente de la police au club de rock Propast à Prague. Tout d'abord, la police s'était fondée sur des informations inexactes car elle ne savait pas précisément qui se réunissait dans ce local (..). L'ampleur et le déroulement de cette opération la rendaient irrégulière. L'affaire a été renvoyée à un magistrat instructeur qui a accusé le chef de la police anti émeutes d'avoir abusé de ses pouvoirs en tant qu'agent de l'autorité publique. L'intéressé a affirmé qu'à son avis la descente était justifiée et que la police avait saisi 113,9 grammes de marijuana, des couteaux à crans d'arrêt et une chaîne de 45 cm de long adaptée pour être utilisée comme arme de poing

          Le corps d'inspection du Ministère de l'intérieur a indiqué avoir soumis le 10 juin 1996 au parquet une demande de poursuites pénales à l'encontre de deux policiers (le responsable de l'intervention et le chef de l'équipe de la haute autorité de la police) pour négligence ayant entravé l'accomplissement de ses fonctions par un agent de l'État, infraction qualifiée au paragraphe 1 de l'article 159 du Code pénal.

          Le 20 juin 1996, le responsable de l'intervention a été inculpé d'abus d'autorité, en application de l'alinéa 1 a) de l'article 158 du Code pénal.

          Le 15 octobre 1996, le magistrat du parquet a terminé les investigations et demandé au Procureur du district à Prague 3, d'engager des poursuites; l'acte d'inculpation a été renvoyé au tribunal de district de Prague 3.

          D'après les renseignements fournis par le parquet, le jugement a été rendu en 1997. Le tribunal a statué que les actes du responsable de l'intervention policière avaient constitué une violation de la loi et a renvoyé l'affaire au corps d'inspection de la police de Prague. Toutefois, le Comité tchèque d'Helsinki n'était pas satisfait de l'issue de la procédure.

76.     Le Code de procédure pénale n'autorise pas la poursuite de mineurs de 15 ans soupçonnés d'avoir commis une infraction, ce qui est peut‑être en contradiction avec l'article 40 de la Convention relative aux droits de l'enfant. Lorsqu'il s'agit d'un mineur de moins de 15 ans, la police applique, en l'absence de dispositions législatives précises, les dispositions de l'article 102 du Code pénal, réglementant les conditions d'interrogatoire d'un enfant en qualité de témoin et les étend aux enfants soupçonnés d'avoir commis une infraction pénale[2]. La nature particulière du travail avec des mineurs délinquants a exigé une spécialisation des fonctionnaires de police s'occupant de la délinquance des mineurs et des infractions pénales qu'ils peuvent commettre. Cette spécialisation existe également au sein du parquet. Lorsque la police repère un délinquant de moins de 15 ans, elle en informe les services de protection de l'enfance. L'autorité qui décide des mesures à prendre à l'encontre de l'auteur de l'infraction est généralement une commission administrative indépendante à l'égard de la police. Les mesures sont ensuite prises conformément aux dispositions des articles 43 et 45 de la loi sur la famille. L'absence d'un système de justice distinct pour les enfants et les mineurs est un problème qui fait l'objet de débats au sein de la Commission de réforme du Code pénal.

Réglementation des droits et devoirs de la police municipale

77.     La police municipale a été créée en vertu de la loi No 553 (Recueil de 1991) sur la police municipale, qui a été modifiée à deux reprises au cours de la période considérée (en 1995). Ces modifications, pas plus que celles de 1995, n'ont porté sur le statut juridique de cette police. La police municipale est constituée par l'assemblée municipale. Outre les pouvoirs dont les policiers municipaux sont investis ‑ droit de demander des explications, de conduire une personne au poste de police, de saisir une arme, d'interdire l'accès à des lieux déterminés, de pénétrer à l'intérieur d'un logement ou de tout autre lieu et d'y saisir des biens ‑, la loi leur permet d'user de méthodes coercitives, encore que dans une moindre mesure que la police nationale. Ils peuvent notamment faire des prises de défense, frapper, notamment à coups de pied et de matraque ou avec toute autre arme de service, passer les menottes, lancer des gaz lacrymogènes, menacer d'utiliser une arme et tirer des coups de semonce. Dans ces conditions, les interventions de la police municipale risquent de donner lieu à des actes de torture ou à des mauvais traitements. Si un membre de la police municipale est soupçonné d'une infraction pénale, il est poursuivi comme tout autre citoyen. Il n'existe pas d'autorité spéciale chargée d'enquêter en cas d'infractions pénales commises par des membres de cette police. À la connaissance des auteurs du présent rapport l'action de la police municipale n'a pas été critiquée, exception faite des méthodes qu'elle emploie pour procéder aux contrôles d'identité, que le Comité tchèque d'Helsinki a qualifiées en 1996 de contestables.

Réglementation des droits et devoirs de la police militaire

78.     Les droits et devoirs de la police militaire sont énoncés dans la loi No 124 (Recueil de 1992) sur la police militaire, qui définit en son article premier le rôle de la police militaire en tant que service assurant une protection policière à l'armée tchèque et aux biens publics administrés ou utilisés par le Ministère de la défense. L'article 12 expose en détail l'étendue des pouvoirs et des responsabilités de cette police à l'égard des militaires d'active ou de "toute personne qui se trouve dans des bâtiments militaires ou dans des zones d'intervention militaire ainsi que des personnes qui se livrent à des actes criminels ou infractionnels en association avec des militaires ou qui portent atteinte aux biens de l'armée tchèque ou de l'État, administrés ou utilisés par le Ministère de la défense". En vertu de l'article 13, la police militaire a le droit d'arrêter un soldat dans les cas prévus par la loi et de le placer en détention, pour une durée maximale de 24 heures à partir de l'arrestation. L'article 15 autorise les policiers militaires à user de moyens de contrainte, par exemple à attacher le soldat à un objet fermement fixé, à l'aide de menottes, pour une durée n'excédant pas deux heures. La police militaire peut aussi recourir à des méthodes coercitives, dont la nature et les modalités d'application sont énoncées à l'article 22 de la loi susmentionnée.

Législation et pratique concernant les peines d'emprisonnement dans le cadre du service militaire et mesures visant à combattre les brimades et le bizutage

79.     Un soldat de première classe ou de grade inférieur effectuant son service militaire obligatoire ou le service de remplacement ou suivant instruction militaire peut faire l'objet d'une peine d'emprisonnement à caractère disciplinaire et être incarcéré, pour une durée n'excédant pas 14 jours, dans la prison de l'unité militaire dont il dépend. Au cours de la période considérée, les sanctions disciplinaires de ce type ont constitué une mesure éducative de dernier recours, appliquée en général lorsque toutes les autres mesures prises par les supérieurs hiérarchiques ont été inutiles. La décision est prise par un officier ayant au moins le rang de chef du corps du bataillon (peines d'emprisonnement de 7 jours au plus), de chef de corps du régiment ou de chef de corps hiérarchiquement supérieur (peines d'emprisonnement de 14 jours au plus). Les modalités d'imposition des peines disciplinaires d'emprisonnement sont régies d'une manière générale par la loi No 76 (Recueil de 1959) sur les conditions de service des soldats, telle qu'elle a été modifiée, et est exposée en détail dans les Règles de base applicables aux forces armées de la République tchèque (Zákl‑1), texte signé par le Président de la République[3].

80.     Ce texte réglemente aussi les droits et les devoirs des militaires ayant fait l'objet d'une peine d'emprisonnement à caractère disciplinaire. Les Règles de base applicables aux forces armées de la République tchèque (Zákl‑1) contiennent le règlement des prisons et énoncent les conditions matérielles des prisons des unités militaires.

81.     Le phénomène des brimades et du bizutage, qui relève de la compétence du Ministère de la défense, n'est pas propre au service militaire, obligatoire ou de remplacement. Il est courant à tous les échelons de l'armée tchèque, touchant les unités et les services les plus divers, y compris les unités d'élites. En République tchèque, cette pratique a la particularité de se manifester lors des temps libres, non pas lors des entraînements militaires, et d'être le fait de soldats entre eux plutôt que de la hiérarchie. Dans le cadre des activités militaires, elle se traduit par certains types de comportements agressifs de la part d'un soldat plus ancien (qui a commencé le service militaire plus tôt) envers une nouvelle recrue ou un groupe de jeunes soldats (celui-ci exerce généralement des pressions psychologiques ou physiques ou exige divers services personnels donnés, souvent de nature financière). Ce comportement est devenu partie intégrante du fonctionnement des unités militaires sous la forme de divers rituels.

82.     La pratique des brimades et du bizutage (qui sont une atteinte aux droits et aux intérêts des soldats) a été érigée en infraction militaire par de la loi pénale No 140 (Recueil de 1961), telle qu'elle a été modifiée (art. 279a et 279b). La police militaire, qui est l'autorité policière en cas de poursuites pénales, joue un rôle majeur pour repérer ces pratiques.

83.     Le tableau ci‑dessous indique le nombre de plaintes enregistrées par la police militaire au cours de la période considérée.

Nombre de plaintes pour brimades enregistrées par la police militaire de 1994 à 1997

1994

1995

1996

1997

199

280

348

263

84.     Le tableau ci-dessous indique la part représentée par les brimades et le bizutage dans les plaintes pénales impliquant des membres de l'armée  :

Année

Pourcentage

1994

3,9

1995

5,0

1996

5,0

1997

4,0

85.     Il convient de noter qu'au cours de la période considérée, les brimades et le bizutage ont fait des blessés légers autant que graves, comme le montre le tableau suivant :

Nombre de cas de blessures graves et légères dues à des brimades

 

1994

1995

1996

1997

Blessures graves

1

2

0

0

Blessures légères

23

22

22

23

86.     Il est fréquent que les brimades fassent l'objet seulement d’une procédure disciplinaire car elles ne replissent pas un des critères matériels de l'infraction pénale, c'est‑à‑dire qu'elles constituent un danger quasiment nul pour la société. C'est la raison pour laquelle les auteurs de ces actes n'ont pas fait l'objet de poursuites pénales.

87.     En 1993, le Conseil de la défense nationale n'a pas recommandé la création d'un poste d’inspecteur général des forces armées de la République tchèque. C'est pourquoi le Ministre de la défense a décidé d'élargir les pouvoirs du Corps d'inspection du Ministre de la défense à la surveillance du respect effectif des droits de l'homme, et de créer une section spéciale chargée de cette question au sein du Corps d'inspection du Ministre de la défense. En 1997 et 1998, cette section était dirigée par l'inspecteur principal chargé de la protection des droits de l'homme relevant du Ministère de la défense[4].

88.     La section chargée de la surveillance du respect effectif des droits de l'homme du Corps d'inspection du Ministre de la défense ou l'inspecteur principal chargé de la protection des droits de l'homme relevant du Ministère de la défense ont pour principales fonctions de s’assurer du respect effectif des droits de l'homme dans les unités militaires à l'occasion de visites, annoncées ou non, et d'enquêter sur les requêtes (demandes, suggestions et plaintes qui intéressent la société en général) ainsi que sur les plaintes individuelles. Ils vérifient également que l'interdiction de la torture et des autres peines ou traitements inhumains ou dégradants est bien respectée, en particulier dans les cas d'emprisonnement disciplinaire. Au cours de la période considérée, à l'exception des brimades et bizutage, aucun cas de torture, peines ou traitements inhumains ou dégradants au sens où on l'entend généralement et selon la définition de la Convention n'a été identifié par la section chargée de la surveillance du respect effectif des droits de l'homme du Corps d'inspection du Ministre de la défense ni par l'inspecteur principal chargé de la protection des droits de l'homme relevant du Ministère de la défense.

89.     Pour ce qui est des brimades, le Ministère de la défense a suggéré d'élire des "porte‑parole" au sein des unités militaires, notamment des compagnies, s'inspirant de l'expérience concluante acquise par l'armée fédérale et les forces armées de la République tchèque après novembre 1989 (qui ont procédé à des vérifications dans le IIe corps d'armée d'Olomouc) mais aussi et surtout de l'expérience d'autres pays (Suède, Pays‑Bas, Allemagne).

Réglementation relative aux institutions et centres de protection pour mineurs et aux établissements scolaires

90.     L'éducation des enfants dans les institutions, les foyers et les établissements scolaires, qui relève de la compétence du Ministère de l'éducation, de la jeunesse et des ports, semble être le domaine le plus sensible concernant la mise en œuvre de la Convention. Le Ministère n'a toutefois enregistré aucun cas de torture ou de mauvais traitements dans les établissements scolaires placés sous sa tutelle au cours de la période considérée.

91.     C'est aux tribunaux qu'appartient la décision de prendre des mesures de protection ou de placer un enfant en institution, conformément à la loi No 94 (Recueil de 1995) sur la famille, telle qu’elle a été modifiée ‑ notamment par le texte portant modification No 91 (Recueil de 1998) ‑ et Code de procédure civile. Par son Par son arrêt No 72 (Recueil de 1995) la Cour constitutionnelle a déclaré anticonstitutionnelle la disposition du droit de la famille en vertu de laquelle la décision de prendre une mesure préliminaire (ordonnance) de placement dans un établissement de protection de l’enfance, même contre la volonté des parents de l'enfant appartenait aux autorités de protection sociale et juridique (administration locale). Avec la modification apportée au Code de procédure civile (art. 76 a)) ce pouvoir est désormais conféré au juge.

92.     Conformément aux dispositions légales en vigueur, les tribunaux se fondent sur l'intérêt de l'enfant pour décider de son placement en foyer. Toutefois, le droit tchèque admet également le placement dans des établissements dits "de redressement". Le tribunal peut ordonner ce placement, à titre de mesure unique ou en sus de la peine, quand il condamne un mineur (âgé de 15 à 18 ans) pour une infraction pénale à l’issue d’une procédure ordinaire. Il peut aussi ordonner le placement d’un mineur (âgé de 12 à 15 ans) dans un établissement de redressement s’il apparaît dans le cadre de la procédure civile qu’il a commis une infraction qui emporte une sanction exceptionnelle en vertu du Code pénal. Le problème réside dans le fait qu'actuellement, les deux types de placement (placement en foyer ou en établissement de redressement) sont assurés par les mêmes établissements.

93.     En vertu de la loi, le juge peut ordonner à titre de mesure préliminaire (ordonnance) de confier un enfant à la garde d'une personne physique ou morale qu'il désigne dans sa décision. Au cours de la période considérée, même après l'adoption de l'arrêt de la Cour constitutionnelle et de la modification à la loi, il était courant qu'un enfant reste pour une période de courte durée dans le centre de diagnostic désigné dans la décision et soit ensuite transféré vers une autre institution par les autorités du Ministère de l'éducation, qui gère les foyers d'accueil.

94.     Le personnel du centre d’éducation surveillée de Moravský Krumlov a affirmé aux représentants du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, que les jeunes filles n'étaient placées dans la pièce d'isolement que quand elles manifestaient de l'agressivité,  alors que les pensionnaires elles‑mêmes ont dit qu'elles y étaient envoyées pour les punir en cas de non‑respect du règlement intérieur, si elles fumaient par exemple. Pendant la période considérée, l'exclusion temporaire d'un centre était régie par l'avis officiel No 64 (recueil de 1981). Toute exclusion doit être justifiée par des documents précis, dont des rapports réguliers de contrôle, et doit être approuvée par l'inspection scolaire de la République tchèque. Toute mesure d'exclusion temporaire abusive de la part de la direction du centre serait considérée comme un manquement grave aux devoirs de la fonction.

95.     D'après les informations fournies par le Ministère de l'éducation, de la jeunesse et des sports, les directeurs des centres de diagnostic qui se sont réunis le 23 avril 1997 ont recommandé de n'isoler un pensionnaire qu'à titre absolument exceptionnel, dans les cas où l’enfant présente un danger pour les autres ou est menacé par les autres; ils ont également recommandé le recours à d'autres méthodes éducatives. L'Inspection scolaire s'efforce de son côté de faire respecter cette recommandation. Le Ministère a souligné que, dans la plupart des établissements d'éducation surveillée, les enfants n'étaient jamais l'objet de cette méthode punitive qui ne devrait être utilisée en aucun cas.

96.     Si les décisions relatives au placement des enfants sont principalement prises par un tribunal ou par un juge, aucun texte ne régissait, pendant la période considérée, les relations entre les enfants et le personnel de ces établissements (ainsi que des foyers pour enfants relevant du même Ministère). Ainsi, les droits des enfants et les devoirs des personnes physiques ou morales qui en avaient la charge ne faisaient l’objet d’aucune réglementation.

97.     Il n'est pas apparu particulièrement urgent d'adopter une réglementation relative aux droits des jeunes enfants dans les crèches, à des enfants dans les foyers pour enfants et des pensionnaires d'établissements sociaux ou de maisons de retraite étant donné que la liberté personnelle n'y est quasiment jamais limitée.

98.     Dans les écoles et les internats, une attention accrue a été portée, à la prévention et à la répression immédiate de toute manifestation d'intimidation. Des services de conseil en pédagogie aident les enseignants et les éducateurs (conseil en pédagogie et en psychologie, formation destinés aux personnes s’occupant d’enfants et de jeunes, centres pédagogiques spécialisés et conseillers pédagogiques dans les établissements scolaires). Le Ministère de l'éducation a accordé des subventions aux établissements privés et publics pour aider les enfants en difficulté (permanences téléphoniques, centres de crises, centres d’urgence, etc.).

99.     En 1995, le Ministère de l'éducation a publié à l’intention des établissements d'enseignement une instruction sur l’éducation des enfants dans les institutions et dans les foyers, qui faisait suite aux recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, en particulier en ce qui concerne l’octroi d’une formation plus poussée au personnel actuel et aux futurs employés des établissements pour jeunes. L'aide technique et méthodologique dont bénéficiaient ces établissements a été accrue et les centres de diagnostic étaient seuls habilités à coordonner et à approuver les transferts d'enfants d'un centre de protection de l'enfance à un autre sur la base d’avis d'experts ‑ contrairement à la réglementation relative aux "mesures préliminaires" (art. 76 a) du Code de procédure civile).

Réglementation des droits et devoirs des autorités douanières

100.   En vertu de la loi sur les douanes (loi No 13 (Recueil de 1993)), les douaniers sont également habilités à retenir un individu pour une durée n'excédant pas 24 heures (art. 32), à restreindre la liberté de mouvement de personnes agressives en les attachant à l’aide de menottes à un objet adapté à cette fin pour une durée n'excédant pas deux heures (art. 33) et à recourir à des moyens techniques (art. 33 a)) pour immobiliser un véhicule.

Article 12

101.   Comme il a été mentionné dans le rapport initial, les autorités sont tenues d’engager des poursuites pour toute infraction pénale dont elles ont connaissance (principe de la légalité) dans l'exercice de leurs fonctions officielles (principe "d'officialité"), sauf disposition contraire de la loi.

102.   Les paragraphes 16, 56, 57 et 77 ci-dessus fournissent des données statistiques sur les infractions pénales visées dans la Convention. Aucune autre information sur le nombre de personnes inculpées ou condamnées pour torture ou autres mauvais traitements n'est disponible. Toutefois, le Ministère de la justice a communiqué des informations sur les poursuites engagées contre des membres de l'administration pénitentiaire. Au total, 17 personnes ont été poursuivies pour avoir infligé des mauvais traitements à des prévenus ou à des condamnés; deux d’entre elles ont été acquittées, 12 autres ont fait l'objet d'une sanction disciplinaire et une seule a été condamnée par la justice. La police tchèque ne tient pas de registre des cas de mauvais traitements imputables à des policiers.

103.   Le système de contrôle pénitentiaire des établissements est interne. En vertu de l'article 4, paragraphe 1, de la loi 555 (Recueil de 1992) sur l'administration pénitentiaire et le service d'ordre des tribunaux, l'administration pénitentiaire est placée sous la tutelle du Ministre de la justice en la personne du Directeur général de l'administration pénitentiaire. La supervision et le contrôle de l'application des mesures de détention et des peines d'emprisonnement sont à la charge de ce ministre, conformément à la loi. Il en a été ainsi pendant toute la période considérée. Une section responsable du système pénitentiaire a été créée au sein du Ministère de la justice pour assurer ces fonctions de contrôle. Les responsables de chaque département font rapport au Directeur général de l'administration pénitentiaire pour tout ce qui touche à l’inspection dans leur domaine de compétence, et les activités d’inspection dans les prisons et les centres de détention sont effectuées par tous les membres de l’administration pénitentiaire : le directeur de la prison et les chefs de département et de section. La Direction générale de l'administration pénitentiaire a créé un département chargé de l'inspection et de la prévention, qui veille à la mise en œuvre des instructions de la Direction générale chargée du contrôle interne des activités et du plan annuel des inspections.

104.   Le contrôle externe du système pénitentiaire n’était pas visé par la loi sur l'exécution des mesures de détention ni par la loi sur l'exécution des peines d'emprisonnement. Au contraire, les dispositions de la loi sur l'inspection publique ont été abrogées au cours de la période considérée et n'ont pas été remplacées (voir par. 38). En vertu du règlement de la Chambre des députés, les membres de la Sous-Commission chargée du système pénitentiaire au sein du Comité pour la défense et la sécurité de la Chambre peuvent procéder à des inspections dans les prisons. Mais cela suffit d’autant moins que les députés n'ont pas de pouvoirs précis et que leurs constatations ne sont consignées dans aucun document[5]. La vérification interne et externe des conditions dans les cellules de garde à vue ou dans les postes de police n’était régie par aucune réglementation. Le contrôle public (externe) était totalement inexistant dans les lieux susmentionnés, ainsi que dans les hôpitaux psychiatriques, les centres de protection de l'enfance, les structures de rétention avant expulsion et les prisons militaires. Même les organisations non gouvernementales telles que le Comité tchèque d'Helsinki n'ont le droit d'interroger les détenus en prison

Article 13

Système pénitentiaire

105.   D'après les informations communiquées par le Ministère de la justice, au cours de la période considérée, 5 279  plaintes au total ont été déposées par des détenus, 390 ont été jugées fondées; 223 ont aussi été jugées fondées mais elles ne mettaient pas en cause le personnel de l'administration pénitentiaire ou d’autres détenus car elles tenaient à des raisons objectives (manque de place et mauvaises conditions matérielles). Enfin, 4 666  plaintes ont été jugées sans fondement. Sur les 5 279 plaintes enregistrées, 1 359 concernaient des mauvais traitements infligés par l'administration pénitentiaire, dont 66 (4,8 %) étaient fondées. Ces 66 plaintes se décomposaient comme suit : 3 plaintes pour violences physiques, 11 pour insultes et 52 pour d'autres types de comportement répréhensible. Le système d'inspection utilisé dans les prisons est décrit dans les paragraphes 92 et 93 ci‑dessus.

106.   Les plaintes envoyées par les prisonniers au département central des plaintes de l'administration pénitentiaire ont toutes été transmises pour examen à la section interne des plaintes de chacune des prisons concernées. Les responsables des sections internes jouent le rôle d'autorité de contrôle des plaintes; ils soumettent au directeur de la prison les pièces nécessaires et proposent des décisions à prendre comme suite aux plaintes qui mettent en cause leurs collègues. De l'avis de certains membres du Groupe de travail contre la torture et les autres peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil des droits de l'homme créé récemment par la République tchèque, cette procédure de traitement des plaintes risque de dissuader les prisonniers de formuler des plaintes[6].

La police

107.   Le fonctionnement des mécanismes de contrôle revêt une importance toute particulière en cas d’intervention inappropriée de la police. Conformément au décret No 37/1995 du Ministère de l'intérieur relatif au contrôle interne spécialisé et à l'ordre No 2/1977 du Président de la police qui a édicté les règles applicables à l’inspection de la police nationale, les experts dont c'est la mission ont procédé à des contrôles et à des visites au cours de la période considérée. D'autres mécanismes de contrôle ont été mis en place, comme les inspections menées par des fonctionnaires du Ministère de l'intérieur du département chargé de la supervision ou du département chargé du contrôle et des plaintes de la haute autorité de la police. Ces contrôles ont révélé que des cas de manquement aux règles par la police se produisaient de temps en temps. On trouvera dans le tableau ci‑dessous des données sur la fréquence de ces cas, le nombre de plaintes émanant de particuliers pour ce motif ainsi que le nombre d’entre elles déclarées fondées.

Objet

1997

Plaintes fondées et non fondées

dont plaintes fondées

Part en %

Recours à la violence physique

111

10

9,0

Garde à vue et arrestation

127

18

14,2

Recours à des moyens coercitifs

31

6

19,4

Total

269

34

12,6

108.   Conformément à la loi, le Procureur supervise la procédure pénale. Les organes de la Chambre des députés et les tribunaux contrôlent également certaines activités spécifiques du travail de la police, tels que l'utilisation de moyens opérationnels (et de l’unité de renseignement du Ministère de l'intérieur). Le Ministère de l'intérieur procède à l’inspection générale des activités de la police nationale. Toutefois, la loi ne prévoyant aucun autre type de contrôle, les activités de la police nationale, sauf celles qui entrent dans le cadre des domaines spécifiques mentionnés ci‑dessus, ne font l'objet d'aucun contrôle spécial institutionnalisé. Bien qu'elle en ait la possibilité, la Chambre des députés n'a pas effectué de visites dans des lieux ou à des moments où il y a un risque de torture au sens de l'article premier et d’autres formes de mauvais traitements au sens de l'article 16. Les associations de citoyens et les journalistes n’ont pas de réelle possibilité de contrôler le travail de la police, qui trie soigneusement les informations qu’elle communique. Un grand nombre de policiers, et même de gradés, ont toutefois coopéré volontiers avec des organisations non gouvernementales (Comité tchèque d'Helsinki, Fondation pour la tolérance, Mouvement de solidarité civique, Centre de documentation pour les droits de l'homme et autres)[7].

109.   Les citoyens peuvent porter plainte pour dénoncer des agissements de la police. On trouvera dans le tableau ci-dessous un aperçu des plaintes déposées et la suite qui y a été donnée pour 1995, 1996 et 1997. Le nombre de plaintes déclarées fondées était plus élevé dans les cas de refus par la police d’enregistrer une plainte conformément au Code de procédure pénale (32, 2 % en 1995) ou dans les cas de décisions administratives (18, 6 %). En revanche, il était moins élevé dans le cas d’actes ou de comportements répréhensibles (18, 6 %), d’abus d'autorité (15, 3 %) et en particulier de recours à la violence physique (7, 2 %). Les autorités qui se prononcent sur le bien‑fondé des plaintes ne sont pas indépendantes à l'égard de la police : ce sont les autorités chargées du contrôle et des plaintes relevant de la police nationale ou les autorités de contrôle du Ministère de l'intérieur.

 

1995

 

1996

 

1997

 

Résultat de l'examen des plaintes

Total

%

Total

%

Total

%

Déclarées fondées

1 321

13,2

1 288

12,2

902

13,4

Déclarées non fondées

4 551

45,5

4 653

44,0

3 678

54,7

Renvoyées à un autre organe

3 925

39,2

4 340

41,0

1 989

29,5

Classées sans suite

208

2,1

302

8,8

160

2,4

Non communiquées

0

0

0

0

0

0

Total

10 005

100

10 583

100

6 729

100

110.   La grande faiblesse du système dans son ensemble tient au fait que la police elle‑même traite les plaintes déposées contre elle, ce qui la rend à la fois juge et partie. Le manque de transparence et le peu d'informations divulguées sur les opérations policières constituent un autre problème. La presse se fait parfois l'écho de certaines plaintes individuelles relatives aux manquements de la police mais les auteurs des plaintes ne sont jamais informés du résultat de leur démarche, même lorsque la plainte a été déclarée fondée; et souvent ils ne savent pas quelles mesures ont été adoptées[8].

111.   Le Corps d'inspection du Ministère de l'intérieur enquête sur les infractions à la loi pénale imputables aux membres de la police et, conformément au Code de procédure pénale, il est en position d'autorité concernant les mesures à prendre. Au cours de la période considérée, dans les milieux spécialistes, on s'est déclaré de plus en plus convaincu qu'il serait préférable de charger une autorité indépendante du Ministère de l'intérieur - de préférence les procureurs, selon la suggestion du Ministère de l'intérieur -  d'enquêter sur les infractions pénales commises par des membres de la police. Seules les décisions concernant l'inobservation du règlement intérieur appartiendraient au Corps d'inspection du Ministère de l'intérieur (voir aussi par. 107). Les enquêtes sur les infractions pénales commises par les policiers sont menées par des agents du bureau des enquêtes. Pour ce qui est de l'exercice d'un contrôle externe civil, le débat est toujours ouvert.

Système éducatif

112.   Dans le domaine de l'éducation, l'Inspection scolaire a recours à des psychologues pour surveiller les divers établissements et centres de protection, conformément à l'article 19, paragraphes 2 et 3 de la loi No 139 (Recueil de 1995) sur l'administration publique et l'indépendance du système éducatif. Les activités de base qu'ils mènent dans les établissements pour mineurs consistent entre autres à surveiller le respect effectif des droits fondamentaux et des droits des enfants et à vérifier si les mineurs ont la possibilité de porter plainte ou d'engager d'autres démarches auprès d'un organisme indépendant. Le Ministère de l'éducation, de la jeunesse et des sports reçoit environ 600 plaintes chaque année, dont 25 % à 30 % sont considérées comme fondées. Les plaintes relatives aux châtiments corporels ou à d'autres châtiments disproportionnés, aux brimades et au bizutage ou à des actes dégradants sont enregistrées à part. Selon le Ministère de l'éducation, sur l'ensemble de ces plaintes, une ou deux seulement sont jugées fondées chaque année. De tels comportements de la part d'un enseignant sont considérés comme un manquement grave à la déontologie et sont généralement suivis d'une action pénale et de la radiation de l'intéressé.

113.   L'Inspection scolaire est une autorité indépendante. Les membres du personnel qui portent plainte ont ainsi la garantie que leur plainte ne sera pas examinée par le supérieur hiérarchique contre qui ils l'ont déposée puisque l'Inspection n'intervient pas directement dans les établissements scolaires et éducatifs, à l'égard desquels il est entièrement indépendant. Les fonctions de l'Inspection, organe public de supervision dans le domaine de l'éducation, sont définies dans la loi No 564 (Recueil de 1990) sur l'administration publique et l'indépendance du système éducatif, telle qu'elle a été modifiée. D'après l'Inspection scolaires et le département du Ministère de l'éducation chargé de l'inspection, le nombre de plaintes pour brimades et bizutage ou autres attitudes, peines ou traitements dégradants dans les établissements scolaires et éducatifs n'est pas inquiétant. La grande majorité des plaintes portaient sur des griefs financiers ou concernaient les relations professionnelles (manquement au règlement par exemple). Sur le nombre total de plaintes, quelque 2 % concernaient des actes d'agression entre élèves. Environ 1,5 % des plaintes faisaient état de violence physique employée par un enseignant ou un chef d'établissement sur un élève.

114.   Un nouvel élément important, intégré au Code de procédure pénale en 1993, a consisté à assurer une plus grande protection et sécurité physique des témoins, de façon à prévenir tout acte d'intimidation ou toute autre intervention visant à les influencer, en ne révélant pas leur identité. L'arrêt No 214 (Recueil de 1994) de la Cour constitutionnelle a abrogé cette disposition du Code pénal. La Cour constitutionnelle a statué qu'il était nécessaire d'appliquer le principe d'une procédure régulière, même dans les cas où il fallait protéger les témoins menacés, et de ne restreindre légalement l'application de ce principe pour protéger l'intégrité physique de la personne du témoin que s'il n'existe aucun autre moyen. Il était également nécessaire de respecter l'obligation de ne pas abuser d'une telle possibilité. Comme suite à l'arrêt de la Cour constitutionnelle, le Parlement a adopté un amendement au Code de procédure pénale (loi No 152/Recueil de 1995), qui a pris effet au 1er septembre 1995, en vertu duquel la disposition relative au statut des témoins a été modifiée de manière novatrice. Les personnes qui ont le droit de consulter le dossier (art. 65, par. 1) n'y trouveront pas les renseignements personnels du témoin.

Article 14

115.   Comme il a été mentionné dans le rapport initial, la loi No 119 (Recueil de 1990) sur la réhabilitation judiciaire et la loi No 58 (Recueil de 1969) sur l'obligation de réparer les dommages causés par une décision d'un organe de l'État ou par l'application par ce dernier d'une procédure irrégulière sont applicables aux réparations et aux indemnisations en République tchèque.

116.   Selon le Ministère de la justice, le service d'indemnisation n'a été saisi d'aucune demande fondée d'indemnisation pour un préjudice constitué par des actes de torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants, raison pour laquelle aucune indemnisation n'a jamais été accordée à ce titre.

117.   En 1997, le Parlement a adopté la loi No 209 (Recueil de 1997) sur l'octroi d'une aide financière aux victimes d'infractions pénales, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1998. Ce texte prévoit le versement de dommages-intérêts aussi bien à la victime de l'infraction pénale qu'à ses ayants droit si la victime décède des suites de l'infraction et était un soutien de famille. L'indemnité forfaitaire a pour objectif d'aider la victime, ou ses ayants droit, à surmonter la situation difficile dans laquelle il se trouve.

118.   Jusqu'à la fin de 1993, la supervision générale de l'application des lois était confiée au service des poursuites de l'État de Tchécoslovaquie, puis de la République tchèque qui lui a succédé. Dans le cadre de ses fonctions, le service des poursuites pouvait formuler une plainte en son nom, intervenir dans la procédure civile, superviser la procédure pénale et exercer son droit spécial de réexamen et d'annulation des décisions des juridictions pénales et civiles; enfin il examinait les demandes de réparation et éventuellement d'indemnisation présentées par les victimes de tortures et d'autres mauvais traitements. Le Procureur général et les procureurs de l'État qui ont remplacé le service des poursuites en 1994 ne disposent pas de ces pouvoirs. Le procureur de l'État est seulement un accusateur public, c'est-à-dire qu'il représente l'État, en particulier dans les affaires pénales, et n'intervient dans les affaires civiles que dans certains cas précis (déchéance ou restriction de la capacité juridique, déclaration de décès). La disparition du service des poursuites de l'État, et avec lui de ses pouvoirs, a eu des effets néfastes sur la société dans son ensemble au cours de la période considérée (voir par. 101 du présent rapport). Contrairement à celles de l'ancien service des poursuites de l'État, les attributions des procureurs ne comprenaient pas, au cours de la période comprise entre 1994 et 1997, la supervision de l'application par les institutions des lois sur l'exécution de mesures de la détention et des peines d'emprisonnement ni des lois relatives aux centres de protection et aux institutions de remplacement comme c'était le cas auparavant. Dans sa déclaration de politique générale, le Gouvernement constitué au cours de l'été 98 à la suite des élections nationales a souligné la nécessité de rétablir certains des pouvoirs dont était doté le service des poursuites de l'État : dans cette déclaration, il est demandé que le pouvoir d'enquêter sur les infractions pénales des membres de la police revienne aux procureurs de l'État, qui seraient de nouveau habilités à exercer une supervision générale dans d'autres domaines que le domaine pénal, comme c'est le cas actuellement. Cette volonté du Gouvernement s'est traduite par l'élaboration de la loi sur le Procureur de l'État (voir note 8).

119.   Au cours des quatre années sur lesquelles porte le rapport, les efforts pourtant considérables visant à créer l'institution de défenseur du peuple (médiateur) n'ont pas abouti (voir par. 27 du rapport initial). Cette institution devrait être utile, en particulier pour traiter les cas individuels difficiles que sont la réparation des préjudices et dommages causés à autrui par la torture ou par des mauvais traitements. Dans sa déclaration de politique générale de 1998, le Gouvernement a préconisé une institution de ce type. Il a dû restreindre les pouvoirs qu'il comptait conférer au médiateur et a rédigé un projet de loi qui ne donnait plus au médiateur les pouvoirs constitutionnels qu'il envisageait initialement de lui attribuer par une loi constitutionnelle. Le Parlement a approuvé le 4 novembre 1999 le projet qui est actuellement en lecture au Sénat.

120.   La protection judiciaire des droits des personnes fait partie des principes de base de la législation tchèque. Toute personne est fondée à faire valoir ses droits devant un tribunal, indépendant du pouvoir exécutif et impartial. La Cour constitutionnelle est également saisie des affaires d'atteinte aux libertés et droits fondamentaux. Toutefois, au cours de la période considérée, on a observé de graves dysfonctionnements dans l'application de la loi, en partie en raison du manque d'efficacité de l'appareil judiciaire et de la lenteur avec laquelle les tribunaux examinent et tranchent les affaires. Le Gouvernement prépare actuellement une réforme du système judiciaire.

Article 15

121.   Comme il a été mentionné dans le rapport initial, le témoignage obtenu par une coercition illicite ou par la menace d'une telle coercition ne sera pas retenu en justice si ce n'est comme preuve contre la personne qui aura usé de tels moyens illicites.

Article 16

122.   Dans les paragraphes concernant l'application des articles 10, 11, 12 et 13, des informations ont déjà été données, simultanément ou séparément, sur la torture au sens de l'article premier de la Convention ainsi que sur les autres formes de mauvais traitements visés à l'article 16.

III.  RÉPONSE AUX CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS DU COMITÉ

123.   La seule recommandation formulée par le Comité dans ses conclusions du 11 novembre 1994 avait trait à la réserve émise au sujet de l'article 20 de la Convention. Suite à cette recommandation, la République tchèque a retiré la réserve à l'article 20 et a fait la déclaration par laquelle elle reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications en vertu de l'article 21, paragraphe 1 et de l'article 22, paragraphe 1, de la Convention. Aussi la République tchèque reconnaît‑elle désormais la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications dans lesquelles un État partie prétend qu'un autre État partie ne s'acquitte pas de ses obligations au titre de la Convention, en vertu de l'article 21, paragraphe 1, ainsi que la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d'une violation, par un État partie, des dispositions de la Convention, en vertu de l'article 22, paragraphe 1. L'instrument notifiant le retrait de la réserve et contenant la déclaration a été déposé auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies le 3 septembre 1996. La notification du Ministère des affaires étrangères sur le retrait de la réserve et sur la déclaration a été consignée dans le Recueil de lois (No 39/1997), le 7 mars 1997.

 

 


Note



* Le rapport initial présenté par le Gouvernement tchèque porte la cote CAT/C/21/Add.2. Pour son examen par le Comité, voir documents CAT/C/SR.197, 198 et Add.2 et Documents officiels de l'Assemblée générale, cinquantième session, Supplément No 44 (A/50/44), par. 86 à 94.



[1] La réglementation a été modifiée par la nouvelle loi sur l'exécution des peines, entrée en vigueur le 1er janvier 2000.

[2] La protection des enfants faisant l'objet de ce type de procédure a été renforcée en 1999 par la nouvelle loi sur la protection sociale et juridique des enfants.

[3] En 1999, la République tchèque a adopté une nouvelle réglementation, moderne, sur le service militaire.

[4] Le Ministère de la défense dirigeait le Département de l'inspection des activités juridiques au sein du Corps d'inspection du Ministre de la défense, et la section chargée de la surveillance du respect des droits de l'homme relève directement de lui.

[5] La nouvelle réglementation adoptée en 1999 a introduit une nouvelle forme de supervision pour les deux types de prisons, conférée au Procureur de l'État. De plus, le Sénat est saisi d'un projet de loi visant à créer la charge de défenseur du peuple (médiateur), qui aura de vastes pouvoirs en la matière.

[6] Voir note 5.

[7] La nouvelle loi sur la liberté de l'information est entrée en vigueur au 1er janvier 2000; elle mettra un terme aux problèmes rencontrés actuellement dans ce domaine.

[8] Le nouveau projet de loi relatif au Procureur de l'État constituera un changement radical par rapport au système actuel. La proposition tend à conférer au Procureur de l'État la responsabilité d'enquêter sur les infractions commises par la police.



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