University of Minnesota


Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Chili, U.N. Doc. CAT/C/39/Add.14 (2002).


Troisièmes rapports périodiques des États parties
devant être soumis en 1997
Additif
CHILI*
[18 février 2002]

*Pour le rapport initial soumis par le Chili, voir le document CAT/C/7/Add.2; pour son examen
par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.40 et 41 et Documents officiels de l’Assemblée
générale, quarante-cinquième session, Supplément n° 44 (A/45/44), par. 341 à 375. Un rapport
complémentaire (CAT/C/7/Add.9), a été soumis par le Gouvernement chilien et examiné par le
Comité. Voir les documents CAT/C/SR.77 et 78 et Documents officiels de l’Assemblée générale,
quarante-sixième session, Supplément n° 46 (A/46/46), par. 237 à 262.
Pour le deuxième rapport périodique, voir le document CAT/C/20/Add.3; pour son examen
par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.191 et 192 et Documents officiels de l’Assemblée
générale, cinquantième session, Supplément n° 44 (A/50/44), par. 52 à 61.
Les renseignements présentés par le Chili conformément aux directives unifiées
concernant la première partie des rapports des États parties figurent dans le document de base
HRI/CORE/1/Add.103.
Les annexes au présent rapport transmises par le Gouvernement chilien peuvent être
consultées aux archives du secrétariat.

TABLE DES MATIÈRES

                                                                                                      Paragraphes

I. INTRODUCTION .........................................................................1 - 26
Cadre juridique et politique................................................................. 2 - 7
Situation et fonctions des agents responsables de l'application
de la loi dans le cadre du droit en vigueur ............................................8 - 17
Nouvelles mesures prises pour prévenir et sanctionner la torture......... 18 - 26
II. PREMIÈRE PARTIE: RENSEIGNEMENTS SUR LES MESURES
ET LES FAITS CONCERNANT L’APPLICATION DES
ARTICLES 1 À 16 DE LA CONVENTION..................................... 27 - 117
Article premier ................................................................................... 27 - 28
Article 2.............................................................................................. 29 - 50
Article 3.............................................................................................. 51 - 53
Article 4.............................................................................................. 54 - 57
Article 5.............................................................................................. 58 - 64
Article 6.............................................................................................. 65
Article 7.............................................................................................. 66 - 68
Article 8.............................................................................................. 69 - 73
Article 9.............................................................................................. 74
Article 10............................................................................................ 75 - 94
Article 11............................................................................................ 95 - 96
Article 12............................................................................................ 97 - 109
Article 13............................................................................................ 110 - 112
Article 14............................................................................................ 113 - 114
Article 15............................................................................................ 115
Article 16............................................................................................ 116 - 117
III. DEUXIÈME PARTIE: COMPLÉMENT D’INFORMATION
DEMANDÉ PAR LE COMITÉ LORS DE L’EXAMEN DU
RAPPORT PRÉCÉDENT.................................................................. 118
IV. TROISIÈME PARTIE: SUITE DONNÉE AUX CONCLUSIONS
ET RECOMMANDATIONS DU COMITÉ...................................... 119


Annexes
I. Liste des infractions qui n'emportent plus la peine de mort et des infractions
prévues dans le Code de justice militaire pour lesquelles cette peine est maintenue
conformément à la réforme apportée par la loi no 19734, du 5 juin 2001.
II. Texte du nouveau Code de procédure pénale.
III. Texte des articles du Code de procédure pénale modifiés par la loi no 19567,
du 1er juillet 1998.
IV. Texte du règlement des établissements pénitentiaires.
V. «Doctrine et code d'éthique» applicable aux carabiniers.
VI. Texte du Code de déontologie de la Sûreté (Investigaciones).
VII. Texte des articles ajoutés ou modifiés par la loi no 19567, du 1er juillet 1998.
VIII. Texte de l'annexe 2 du Bulletin d'instructions du corps des carabiniers no 446.
IX. Texte du programme d'études (pour l'année scolaire 1999) de la Direction générale
de la Sûreté chilienne.
X. Texte du Code d'éthique médicale.
XI Affiche intitulée «Recommandations de l'ordre des médecins du Chili aux médecins
des services d'urgence amenés à constater des lésions corporelles».

 

I.   INTRODUCTION

1.          Le Chili a soumis son deuxième rapport périodique sur les mesures adoptées pour donner effet aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT/C/20/Add.3) en février 1994. Le Comité contre la torture l’a examiné en novembre de la même année (CAT/C/SR.191 et 192) et a suggéré l’adoption de certaines mesures. Comme suite aux recommandations du Comité, plusieurs initiatives visant à rendre le droit interne conforme aux obligations découlant de la Convention ont été prises. On trouvera dans le présent rapport un exposé des réformes législatives et d’autres mesures ainsi que des faits ayant trait à l’application de la Convention dans le pays de 1994 à 2001.

Cadre juridique et politique

2.          Le document de base (HRI/CORE/1/Add.103) contient des renseignements sur la structure politique du Chili et le cadre juridique général de la protection des droits de l’homme, notamment les droits que la Constitution confère à tous en son article 19, dont le paragraphe 1 garantit «le droit à la vie et à l’intégrité physique et psychique de la personne» et interdit explicitement «toute contrainte illégitime». Il est également indiqué que la Constitution et la loi protègent ces droits fondamentaux par la mise en place de recours judiciaires et administratifs et que les tribunaux de justice sont compétents pour enquêter sur les violations des droits de l’homme, que l’article premier, paragraphe 4, de la Constitution dispose que l’objectif de l’État est d’être «au service de l’être humain» et qu’il doit à cet effet «contribuer à créer les conditions sociales propres à permettre à chacun des membres de la collectivité nationale d’atteindre le plus haut niveau d’épanouissement spirituel et matériel possible, dans le plein respect des droits et garanties consacrés par la Constitution», et que, en vertu d’un mandat constitutionnel (art. 5, par. 1), «l’exercice de la souveraineté est limité par le respect des droits inhérents à la nature humaine».

3.          La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le Chili est partie ont rang législatif et font partie du droit interne, avec la valeur spéciale que leur donne la Constitution en son article 5, paragraphe 2: «Les organes de l’État sont tenus de respecter et de promouvoir ces droits, garantis par la présente Constitution ainsi que par les instruments internationaux ratifiés par le Chili et qui sont en vigueur». Les droits protégés par la Constitution sont donc plus nombreux et il faut bien voir que les garanties, droits et devoirs fondamentaux reconnus dans la Convention − en vigueur au Chili − ont la même valeur constitutionnelle que les droits fondamentaux consacrés à l’article 19 de la Constitution. Cependant, il n’existe pas de disposition juridique qui établit expressément qu’en cas de conflit c’est l’instrument de défense des droits de l’homme qui l’emporte. Le débat sur les violations des droits de l’homme commises pendant le régime militaire se poursuit dans le pays, ce qui fait obstacle à un consensus stable de la doctrine et la jurisprudence sur la valeur constitutionnelle de ces instruments. Il convient de noter toutefois que la Cour suprême, dans les arrêts qu’elle a rendus ces dernières années, a reconnu l’importance des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et au droit humanitaire, en appliquant leurs dispositions et dans certains cas en attirant l’attention sur leur autorité [1] .

4.          Comme il était indiqué dans le deuxième rapport du Chili, Patricio Aylwin Azócar, Président de la République du Chili élu démocratiquement pour un mandat de quatre ans, a pris ses fonctions le 11 mars 1990. Par la suite, il a été remplacé par les Présidents Eduardo Frei Ruiz‑Tagle et Ricardo Lagos Escobar, élus de la même manière pour des mandats constitutionnels de six ans; ce dernier a assumé la présidence en mars 2000. C’est également en mars 1990 que le Congrès national a été officiellement réinstitué et que le rétablissement progressif du système institutionnel démocratique, interrompu par le régime militaire, s’est amorcé. Les membres du Congrès national et les autorités municipales sont élus périodiquement au suffrage universel et, dans l’exercice de leurs fonctions, obéissent à la seule loi, le régime de légalité étant normalement en vigueur depuis mars 1990. Au cours des 10 dernières années, l’état d’exception constitutionnelle n’a pas été proclamé et les libertés et droits fondamentaux garantis par la Constitution n’ont subi aucune restriction.

5.             Toutefois, des dispositions constitutionnelles qui entravent le plein exercice de certains droits fondamentaux sont encore en vigueur. Il s’agit des éléments suivants: le système de scrutin binominal, qui ne permet pas une bonne représentation proportionnelle des majorités et des minorités, favorise la deuxième force électorale et élimine les groupes minoritaires de la représentation parlementaire s’ils ne participent pas aux accords électoraux; le fait que neuf sénateurs ne sont pas élus au suffrage universel mais sont désignés par les membres de la Cour suprême, les membres du Conseil de la sécurité nationale et le Président de la République; le fonctionnement et le pouvoir de décision du Conseil de la sécurité nationale, qui se prononce à la majorité absolue, où les commandants en chef des forces armées (quatre membres sur les huit qui composent cet organe) et le Directeur général des carabiniers ont une influence déterminante sur les décisions; l’inamovibilité des commandants en chef des forces armées (armée de terre, marine et forces aériennes) et du Directeur général des carabiniers, qui ne peuvent être relevés de leurs fonctions par le Président de la République − faculté prévue par la Constitution − que sur proposition du haut commandement de l’armée ou des carabiniers. Les Présidents Aylwin et Frei ont présenté au Congrès national des propositions de modifications constitutionnelles visant à remédier à cette situation, mais l’opposition politique leur a refusé à maintes reprises son soutien. Actuellement, sous la présidence de M. Lagos, les réformes constitutionnelles sont à nouveau examinées sur la base d’un projet de texte élaboré par la Commission de la Constitution, de la législation, de la justice et du règlement du Sénat.

6.             L’instauration de gouvernements démocratiques met définitivement un terme à la pratique systématique de la torture. Dans son rapport sur la visite qu’il a effectuée au Chili en 1995, présenté à la cinquante‑deuxième session de la Commission des droits de l’homme, le Rapporteur spécial sur la torture, M. Nigel S. Rodley, relevait: «[…] au Chili, la torture n’est pas pratiquée systématiquement ni à la suite d’une politique gouvernementale […]» et la période actuelle se différencie principalement de la période du régime militaire par «l’engagement réel des gouvernements civils à l’égard du respect des droits de l’homme et, en particulier, à l’égard de la nécessité d’éliminer la pratique de la torture et des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants par des agents de l’État […]» (E/CN.4/1996/35/Add.2, par. 10 et 71).

7.          Le Rapporteur spécial indiquait également que, en raison des cas de torture qui subsistent encore dans le pays, il était nécessaire que les autorités concrétisent leur condamnation de cette pratique par l’adoption de mesures spécifiques. Il concluait son rapport par un ensemble de recommandations, dont une grande partie ont déjà été appliquées grâce aux initiatives, notamment d’ordre législatif, menées à bien ces dernières années au Chili. Non seulement les mécanismes de prévention de la torture ont été grandement améliorés, mais des mesures concrètes ont été prises afin d’empêcher cette pratique, avec la réforme de la législation visant à la réprimer. C’est pourquoi, ayant reçu du Gouvernement chilien un compte rendu des progrès accomplis comme suite à ses conclusions et recommandations, dans son rapport à la cinquante‑troisième session de la Commission des droits de l’homme (E/CN.4/1997/7, par. 54) le Rapporteur spécial se déclare reconnaissant au Gouvernement chilien «d’avoir donné des réponses détaillées et d’amples informations, témoignant de sa ferme intention de continuer à coopérer de manière constructive avec le Rapporteur spécial et la Commission», «félicite le Gouvernement pour les efforts qu’il déploie en vue de modifier le Code pénal et le Code de procédure pénale» et «suggère que le Gouvernement et le Congrès s’attachent avec une diligence particulière à faire adopter les dispositions du projet de loi modifiant le Code de procédure pénale en vigueur et le Code pénal touchant à la détention et à introduire des règles propres à renforcer la protection des droits civils». Ces propositions ont été mises en œuvre au moyen des mesures décrites dans le présent rapport.

Situation et fonctions des agents responsables de l’application de la loi
dans le cadre du droit en vigueur

8.          La Constitution de 1980 consacre un chapitre spécial aux forces armées et aux forces de l’ordre et de la sécurité publique, établissant une nette distinction entre forces armées et forces de l’ordre et de la sécurité publique. Les secondes comprennent les carabiniers et la police de la Sûreté (police en uniforme et police en civil, respectivement) qui, ensemble, constituent la «force publique». Celle‑ci a pour mission particulière d’assurer l’ordre public et la sécurité publique intérieurs, ainsi que d’apporter son concours aux tribunaux dans l’exécution des décisions judiciaires, ceux‑ci ne disposant pas d’organismes propres pour faire appliquer leurs décisions; la Sûreté a en outre pour mission de surveiller l’entrée et la sortie de personnes du territoire national et de représenter le Chili à Interpol. À partir de 1974, avec la promulgation du décret‑loi n o  444 sous le régime militaire, les carabiniers et la police de la Sûreté, qui relevaient du Ministère de l’intérieur, ont été intégrés au Ministère de la défense en tant que sous‑secrétariat des carabiniers et sous‑secrétariat de la Sûreté, respectivement. Bien que les carabiniers disposent des pouvoirs judiciaires nécessaires pour agir dans la répression des délits, en matière d’ordre public (dans les faits et sans que cela implique des compétences de commandement), ils reçoivent leurs instructions et orientations du Ministère de l’intérieur, le Ministère de la défense n’ayant aucun pouvoir dans ce domaine. Cette relation entre le Ministère de l’intérieur et les carabiniers est aussi concrétisée par le fait que ce secrétariat d’État est chargé de la coordination entre les autres ministères en matière de sécurité publique. Bien qu’elles relèvent du même ministère, il existe des différences entre les deux polices. Alors que le Directeur général des carabiniers est inamovible, le Directeur général de la Sûreté est nommé et révoqué librement par le Président de la République. En outre, les carabiniers sont soumis à la justice militaire, tandis que les membres de la Sûreté, comme tout autre civil, relèvent des tribunaux ordinaires. Finalement, la Constitution confère le caractère de corps armés aux forces armées et aux carabiniers, mais non à la Sûreté, dont les membres sont pourtant habilités à utiliser des armes, conformément à la loi organique applicable.

9.          Soucieux de placer les forces de l’ordre et de la sécurité sous la tutelle d’un ministère unique, le Gouvernement a envoyé au Congrès, au début du mois de novembre 2001, un projet de réforme constitutionnelle en vertu duquel les carabiniers et la Sûreté relèveraient du Ministère de l’intérieur et non plus du Ministère de la défense.

10.        La Direction nationale de l’administration pénitentiaire, organe qui relève du Ministère de la justice, est composée des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire, responsable des personnes privées de liberté, prévenus et condamnés, ainsi que des actions nécessaires pour assurer la réinsertion des détenus.

11.        Dans le contexte de la démocratie retrouvée, on a commencé à prendre des mesures pour obtenir que les agents des forces de l’ordre agissent dans le respect de la légalité. Dans son rapport sur sa visite au Chili, le Rapporteur spécial indique que les gouvernements civils ont pris certaines mesures pour combattre la torture et qu’ils ont notamment «engagé un processus d’épuration et de changement des mentalités au sein des forces de police», qui «se déroule de façon assez satisfaisante à la Sûreté» (E/CN.4/1996/35/Add.2, par. 39).

12.          La police de la Sûreté ( Investigaciones ), les carabiniers et l’administration pénitentiaire ont tous des mécanismes de contrôle interne ou de surveillance des actes de leurs agents, mécanismes qui sont pleinement opérationnels et contribuent à prévenir la torture (voir plus loin par. 38 à 49, 89 à 92 et 97 à 104).

13.          En outre, le programme de formation et de perfectionnement dispensé aux agents des trois organes a été modifié et des cours de droits de l’homme ont été incorporés aux études (voir plus loin par. 75 à 86).

14.          Les mécanismes de contrôle externe ouverts aux victimes de torture ou de mauvais traitements, qui peuvent former le recours en amparo et porter plainte pour des délits commis par des membres du corps de police, sont pleinement en vigueur dans le pays, et ont été actionnés directement par les victimes ou à la suite d’enquêtes ouvertes d’office par les tribunaux compétents (voir plus loin par. 105 à 109).

15.        Depuis mars 1990, le contrôle de la légalité des détentions s’exerce sans difficulté, les tribunaux sont régulièrement saisis de recours en amparo ( habeas corpus ). L’attitude des tribunaux a changé, en ce sens qu’ils ont reconnu dans de nombreuses décisions les droits garantis aux personnes arrêtées par la Constitution et la loi et ont appliqué les dispositions conçues pour les protéger et prévenir la torture.

16.          Outre le contrôle du bon fonctionnement de la justice exercé par la Cour suprême, qui a le pouvoir d’ordonner des sanctions et de prendre des mesures afin de garantir que les personnels de justice respectent les normes régissant leur conduite, il existe des dispositions spécifiques qui permettent aux juges de contrôler l’action de la police à l’égard des personnes en état d’arrestation, telles que les articles 272  bis et 323 du Code de procédure pénale (voir par. 29).

17.          Les mesures citées et la protection du droit de ne pas être soumis à la torture, assurée par les réformes législatives exposées ci-après, ont contribué à la diminution progressive du nombre de cas de torture qui peuvent se produire au Chili, comme dans toute société démocratique.

Nouvelles mesures prises pour prévenir et sanctionner la torture

           A.         Réforme de la procédure pénale − Nouveau Code de procédure pénale

18.          En ce qui concerne spécifiquement le cadre juridique et les mesures de prévention et d’interdiction de la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la modernisation de la justice a été entreprise, en vue d’adapter l’ensemble des institutions intervenant dans son administration à l’évolution politique et économique que le pays a connue au cours des deux dernières décennies. Alors que le système d’administration de la justice a été conçu et mis en place pour l’essentiel au milieu du XIX e siècle, sans connaître la moindre modification depuis lors, la société chilienne a subi de profondes transformations. Depuis le retour à la vie démocratique, qui a mis fin aux violations systématiques et massives des droits de l’homme, c’est au cours de la procédure pénale que les plus graves abus de pouvoir restent susceptibles de se produire. Le Gouvernement a donc élaboré un projet de réforme visant à garantir plus efficacement le respect des droits fondamentaux dans la vie de tous les jours.

19.          La réforme de la procédure pénale constitue la première étape majeure vers la réforme du système pénal dans son ensemble. Le projet de loi portant réforme a été envoyé au Congrès le 9 juin 1995, puis promulgué en tant que loi de la République le 12 octobre 2000. Ses dispositions sont déjà appliquées dans deux régions du pays et le seront progressivement dans toutes les autres jusqu’à être en vigueur dans l’ensemble du territoire national en 2004. Cette réforme a fait l’objet d’un consensus politique suffisant pour pouvoir être menée à bien dans les délais prévus. La réforme de la procédure pénale est constituée par le nouveau Code de procédure pénale et par la mise en place des textes et institutions ci‑après:

              a)               La réforme constitutionnelle qui a porté création du ministère public, loi n o  19519, entrée en vigueur le 16 septembre 1997;

b)               La Loi constitutionnelle portant organisation du ministère public, n o  19640, entrée en vigueur le 15 octobre 1999;

c)               Les modifications apportées au Code organique des tribunaux, portant création des juges des garanties légales ou de contrôle de l’instruction, ainsi que de la procédure orale, loi n o  19665, entrée en vigueur le 9 mars 2000;

d)               Le service de défense publique au pénal, créé par la loi n o  19718 du 10 mars 2001;

e)               Le projet de loi sur les dispositions adaptant les textes législatifs en fonction du nouveau système de procédure pénale, actuellement en deuxième lecture au Sénat.

20.          L’un des principes généraux qui inspirent le système proposé réside, selon le texte de l’introduction du Président au projet de nouveau Code de procédure pénale, dans «l’application directe des normes constitutionnelles et internationales relatives aux droits de l’homme qui touchent à la réglementation de la procédure pénale» et que «les paramètres fondamentaux utilisés dans la conception du projet ont été la Constitution de la République et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui lient le pays, et parmi ces derniers il a été tenu particulièrement compte de la Convention américaine relative aux droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques». Cette position répond à la nécessité de renforcer la conception selon laquelle la procédure pénale s’organise en fonction du développement des principes généraux de l’ordre juridique qui régissent les rapports entre l’État et les citoyens et sont inscrits dans ces textes normatifs. En ce sens, il s’agit de marquer l’importance de ces principes au-delà des mécanismes processuels spécifiques consacrés par la loi. Les juges devront intégrer les règles de procédure aux normes constitutionnelles et internationales et interpréter et appliquer les premières de telle sorte qu’elles répondent aux prescriptions énoncées dans les deux autres. Ce projet de loi a introduit des changements importants propres à garantir la protection du détenu et tendant à prévenir la torture (voir par. 31 et 32).

B.      Qualification du délit de torture, abolition de l’arrestation sur simple soupçon et établissement des droits de la personne en état d’arrestation (loi n o  19567 du 1 er  juillet 1998)

21.          Une autre mesure importante pour la prévention et la répression de la torture a été la promulgation de la loi n o  19567, qui porte réforme de plusieurs textes en vue de qualifier le délit de torture, d’améliorer la protection des droits de la personne arrêtée, et d’abolir l’arrestation sur simple soupçon; à l’origine il s’agissait d’une motion déposée le 27 janvier 1993 à la Chambre des députés par un groupe de députés, qui visait à modifier les dispositions du Code de procédure pénale et du Code pénal relatives à l’arrestation et à la détention et à la protection des droits des citoyens. La motion a reçu l’appui du Gouvernement, qui l’a complétée de façon à prévoir le délit de torture et la suppression du délit de vagabondage et de mendicité. Le 10 avril 1996, le Gouvernement, commentant le projet de loi devant la Chambre des députés, a relevé que, dans le cadre de la modernisation du système d’administration de la justice au Chili, le Congrès était saisi d’un ensemble de réformes du système de procédure pénale qui tendait à accroître l’efficacité du système pénal tout en protégeant les droits de tout individu à qui est imputé un acte constitutif d’une infraction, donnant ainsi effet aux droits fondamentaux reconnus dans la Constitution et dans les instruments internationaux en vigueur pour le Chili, conformément à l’article 5 de la Constitution. Le projet à l’origine de la loi n o  19567 s’inscrit dans le processus de réforme et vise à renforcer davantage les garanties dont doit bénéficier tout individu en détention et qui sont également consacrées dans le nouveau Code de procédure pénale. L’utilité de cette loi pour éliminer la pratique de la torture tient au fait qu’elle qualifie le délit de torture, mais aussi qu’elle élargit les droits de la personne arrêtée, importante mesure de prévention des actes de torture. Pour ce qui est de la qualification de la torture en tant que délit, la réforme reprend la teneur de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et prévoit des peines appropriées par rapport à la gravité des faits.

C.         Abolition de la peine de mort

22.          La peine de mort a été abolie le 5 juin 2001 avec la promulgation de la loi n o  9734 (voir par. 28).

D.      Modernisation de la police de la Sûreté ( Investigaciones )

23.          Le deuxième rapport au Comité contre la torture contenait des renseignements sur la transformation de la Sûreté, qui a été poursuivie ces dernières années avec le processus de modernisation professionnelle; les ressources financières nécessaires ayant été dégagées, de nouvelles méthodes ont été adoptées pour renforcer la mission d’enquête scientifique et technique de la Sûreté, fondée sur une doctrine clairement définie des droits de l’homme et de la déontologie. Tout cela a nécessité un réaménagement des programmes d’études dans les différents établissements de formation de cette police, la création de mécanismes internes de contrôle de l’exercice de leurs fonctions par les agents, et la révision des procédures permettant d’assurer que les agents respectent toujours la déontologie et les droits de l’homme (voir par. 44 et 82 à 86).

E.         Retrait de la réserve

24.          Par le décret suprême n o  1562 du 22 septembre 1999, paru au Journal officiel du 23 décembre 1999, le Chili a retiré la réserve qu’il avait formulée à l’égard du paragraphe 1 de l’article 30 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, au moment de la ratification, en septembre 1988. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies en a été avisé par la note 114/99 de la Mission permanente du Chili auprès de l’Organisation des Nations Unies, datée du 3 septembre 1999.

F.      Contribution au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes
de la torture

25.          À partir d’avril 1997, le Chili a augmenté sa contribution volontaire au Fonds créé conformément à la résolution 36/151 de l’Assemblée générale en date du 16 décembre 1981, ce qui témoigne de la volonté des gouvernements démocratiques de coopérer à la protection des droits fondamentaux, et de l’attention spéciale accordée au Chili à la réparation due aux victimes [2] .

G.      Protocole additionnel à la Convention contre la torture

26.          Dans le domaine de la coopération internationale, il convient de souligner également la participation active du Chili à l’élaboration du Protocole additionnel à la Convention contre la torture.

 

II.   PREMIÈRE PARTIE: RENSEIGNEMENTS SUR LES MESURES
ET LES FAITS CONCERNANT L’APPLICATION DES
ARTICLES 1 À 16 DE LA CONVENTION

Article premier

27.          Depuis la récente réforme du Code pénal, le délit de torture est prévu et réprimé, conformément à la définition donnée à l’article premier de la Convention (voir par. 54 à 56).

28.          Au Chili, la peine physique n’existe pas. En ce qui concerne la peine de mort, le Gouvernement a présenté en 1990 au Congrès national un projet de loi visant à l’abolir définitivement. Le projet a été rejeté en partie par l’opposition politique, et la peine capitale est abolie pour 39 crimes, soit plus de la moitié. Elle n’a ensuite été maintenue que pour 37 crimes, dont la plupart ne peuvent être commis qu’en temps de guerre (27 qualifiés dans le Code de justice militaire, 2 dans la loi sur la sécurité de l’État, et 8 dans le Code pénal). Depuis 1990, la peine de mort n’a jamais été appliquée, puisque dans les trois cas où elle a été prononcée le Président de la République l’a commuée. Le 13 juillet 2000, le Gouvernement a envoyé au Sénat de la République un commentaire au projet de loi sur un nouveau Code de procédure pénale, indiquant qu’il fallait aller dans le sens de l’abolition de la peine de mort; après examen du projet par le Congrès national, la peine de mort a été abolie. Par la loi n o  19734, du 5 juin 2001, elle a été supprimée dans toute la législation pénale ordinaire. Elle reste en vigueur en tant que peine maximale pour certains crimes qualifiés dans le Code de justice militaire et qui ont tous en commun d’être commis en temps de guerre ou en présence de l’ennemi. Il n’est pas exclu que le Code de justice militaire fasse un jour l’objet d’une révision allant dans le sens d’une adaptation aux nouvelles réalités [3] .

Article 2

29.          Le deuxième rapport périodique du Chili énonçait les mesures d’ordre législatif prises en vue de prévenir les actes de torture après le rétablissement du régime démocratique. L’une des plus importantes est la réforme de la procédure pénale entreprise en février 1991; ainsi, la loi n o  19047 a modifié le Code de procédure pénale de façon à garantir expressément certains droits aux personnes en détention. Jusqu’alors les conditions d’arrestation et de détention favorisaient le risque de torture, étant donné que la législation en vigueur sous le régime militaire autorisait la détention au secret dans les locaux de la police, période pendant laquelle le détenu n’avait aucun droit et ne pouvait recevoir aucune visite, pas même de son avocat. La réforme a établi diverses mesures de protection de l’intégrité physique et psychique des individus par les moyens suivants: examen médical pendant les périodes de détention exceptionnelles (art. 272 bis ); obligation faite au juge de prendre des mesures pour s’assurer que des aveux éventuels n’ont pas été obtenus sous la torture ou sous la menace de tortures (art. 323); interdiction de prolonger la durée de la détention au secret au-delà des délais prescrits par la loi (art. 299); atténuation de la rigueur de la détention au secret en permettant la présence quotidienne d’un avocat, lorsque l’intéressé se trouve dans un établissement pénitentiaire ou dans les locaux de la police avant d’être mis à la disposition du juge ou lorsqu’il est déféré devant le juge; possibilité pour celui‑ci d’ordonner la cessation de la mise au secret (art. 293 et 303). Ces dispositions sont aujourd’hui pleinement en vigueur et dans les cas où elles ne sont pas respectées le recours en amparo est ouvert; il est formé auprès de la cour d’appel qui l’examine selon la procédure normale.

30.          Comme on l’a indiqué dans l’introduction, depuis que le deuxième rapport a été soumis un processus de modernisation de la justice a été engagé, tendant à réformer le système de procédure pénale dans son ensemble. En novembre 2001, le nouveau Code de procédure pénale était applicable dans les régions II, III, IV, VII et IX, et l’ancien était encore en vigueur dans le reste du pays. Le nouveau Code sera progressivement mis en vigueur dans les autres régions, la dernière étape devant être atteinte en 2004, avec son entrée en application dans la région métropolitaine. En outre, le 1 er  juillet 1998 est entrée en vigueur la loi n o  19567, qui vise à donner effet aux dispositions du nouveau Code régissant la détention et les droits des détenus.

Nouveau Code de procédure pénale [4]

31.          La principale modification apportée par la réforme consiste à remplacer la procédure de type inquisitoire, appliquée actuellement, par une procédure pénale orale, publique et contradictoire menée par une formation collégiale qui apprécie les éléments de preuve et rend le jugement, l’instruction étant menée par un magistrat du ministère public avec la collaboration de la police. Avec la séparation des fonctions d’enquête et des fonctions de jugement les enquêtes de police devraient être menées avec plus de diligence, de façon plus approfondie et plus technique, grâce à l’emploi de modes de preuves divers excluant le recours à la coercition pour obtenir de l’inculpé des aveux qui seraient utilisés pour engager un procès. D’après certaines études [5] , l’ancien Code de procédure pénale favorise cette situation du fait des pouvoirs étendus et de l’autonomie conférés à la police au cours de la première phase de l’enquête pénale. Avec le nouveau système, le juge, libéré de l’enquête, pourra s’attacher à en vérifier la régularité et veiller au respect des droits des personnes mises en cause. Le ministère public dispose de pouvoirs étendus pour mener l’instruction, dans la limite du respect des droits individuels de la personne, le prévenu pouvant s’adresser à la justice en cas de violation.

32.        Le nouveau Code comprend des modifications importantes devant garantir la protection de la personne en état d’arrestation et en détention, dont découle le droit de ne pas être torturé; on citera les suivantes:

              a)               La reconnaissance de divers droits du prévenu dès le premier acte de procédure: être informé du motif de sa détention et de ses droits, ne pas être obligé de faire une déclaration ou, s’il accepte, de ne pas le faire sous serment et assistance d’un avocat dès le début de l’enquête (art. 93, 94 et 135). Avec l’entrée en vigueur le 1 er juillet 1998 de la loi n o  19567 (voir par. 33), ces droits font désormais partie de l’arsenal législatif permettant de prévenir les actes de torture;

              b)               La réduction du délai de garde à vue, ramené à 24 heures (art. 131). En vertu de l’ancien Code, ce délai peut, sur décision motivée du juge, être porté à cinq jours et à dix dans le cadre des enquêtes sur des actes terroristes;

c)               Le transfert de l’interrogatoire et des autres mesures d’enquête au ministère public et à la police qui agira sous la direction du ministère public et selon ses instructions (art. 77, 79 et 80). L’ancien Code de procédure pénale conférait à la police, pendant la garde à vue, des pouvoirs d’enquête dans le cadre des détentions ordonnées par le juge, dont l’interrogation du prévenu et des témoins;

d)               Sur demande du magistrat et dans l’intérêt de l’enquête, la possibilité pour le tribunal d’interdire toute communication de la personne arrêtée ou détenue pendant au maximum dix jours, exception faite des contacts avec l’avocat, un médecin et le tribunal (art. 151).

Réformes apportées par la loi n o  19567 à l’ancien Code de procédure pénale [6]

              a)               Suppression de l’arrestation sur simple soupçon

33.               L’article 260 de l’ancien Code a été modifié et l’arrestation sur simple soupçon a été supprimée; la police était habilitée à arrêter «quiconque porte un travestissement ou dissimule d’une autre manière sa véritable identité ou empêche de la faire connaître et refuse de la dévoiler» ainsi que toute personne que les policiers rencontrent «à une heure indue ou dans des lieux ou dans des circonstances qui leur donnent des motifs sérieux de croire que l’intéressé est animé de mauvaises intentions, si les explications qu’il donne de son comportement ne dissipent pas les soupçons». L’imprécision de ce texte laissait à la police une grande marge d’interprétation et donnait lieu à des situations contraires à la Constitution et aux normes internationales. L’article 270, qui conférait à la police la faculté d’arrêter des personnes dans les circonstances prévues à l’article 260, a été également abrogé et l’article 260  bis a été ajouté; il donne à la police la faculté de procéder à des contrôles d’identité quand les circonstances le justifient. La personne interpellée peut présenter n’importe quel document pour prouver son identité, faute de quoi elle est conduite au poste de police. Le tribunal compétent est avisé, et après vérification du domicile ou versement d’une caution elle est laissée en liberté. L’article 266 a été remplacé par une autre disposition prévoyant que le responsable du poste de police où une personne arrêtée en flagrant délit pour des faits punis d’une peine mineure est conduite, doit, après notification au tribunal, la remettre en liberté à l’issue de la première comparution, si elle prouve l’existence d’un domicile ou verse une caution.

              b)               Droits de la personne en état d’arrestation ou en détention

34.          Une autre disposition de la loi révisée représente un progrès important pour la prévention de la torture et des autres actes apparentés; il s’agit de la disposition obligeant l’agent qui procède à l’arrestation d’informer l’intéressé de ses droits et du motif de l’arrestation sur le moment même ou dès son arrivée au poste de police. Auparavant, celui qui procédait à l’arrestation était simplement tenu de produire le mandat d’arrestation et d’en remettre une copie à l’intéressé. La réforme a ajouté les prescriptions suivantes, par l’article 284: l’agent qui procède à l’arrestation est tenu d’informer verbalement l’intéressé du motif de la mesure et de ses droits, droits qui devront être affichés dans tous les postes de police; le responsable du premier lieu de détention est tenu de faire de même; dans tous lieux de détention, il est obligatoire d’apposer en un endroit bien visible une affiche énumérant les droits du détenu; le texte et la présentation de l’affiche ont été fixés par décret suprême du Ministère de la justice et énoncent les droits ci‑après:

1)        Être informé de ses droits et du motif de l’arrestation.
2)        Garder le silence, afin de ne pas se déclarer coupable.
3)        Être conduit immédiatement dans un établissement de détention public.
4)        Obligation d’aviser, en la présence de l’intéressé, un membre de sa famille ou toute personne qu’il indique, de la situation du détenu (motif et lieu).
5)         Ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
6)        Faire venir un avocat pour s’entretenir avec lui.
7)        Recevoir des visites s’il ne fait pas l’objet d’une mesure de mise au secret prise par une autorité judiciaire.
8)        Être représenté en justice par un avocat.
9)        Être mis à la disposition du tribunal.
10)        Obtenir, moyennant paiement, certaines commodités compatibles avec le règlement.

35.          La réforme énonce également les conséquences de l’inobservation de leurs obligations par les agents de l’État responsables de toute détention et pour la procédure judiciaire qui s’ensuivra étant donné que le juge considérera comme nulles les déclarations faites dans des conditions contraires à la loi et en référera aux autorités de police compétentes pour faire appliquer les sanctions disciplinaires voulues.

36.               L’application de toutes ces dispositions permettra de prévenir efficacement la torture. En effet, si le fonctionnaire de police respecte l’obligation d’informer la personne en état d’arrestation de son droit de garder le silence, il ne pourrait pas en même temps exercer quelque pression que ce soit pour obtenir une déclaration. De plus, le seul fait de ne pas informer la personne en état d’arrestation de ce droit annule toute déclaration extrajudiciaire et il serait donc absurde que le policier cherche à obtenir par la coercition une déclaration qui serait totalement dénuée de valeur.

37.          La réforme a modifié l’article 293 de façon à garantir le droit du détenu, même au secret, de faire aviser de sa situation les personnes qu’il indique, d’une façon beaucoup plus rapide et impérative qu’avant la réforme; tout manquement entraîne des sanctions.

Administration pénitentiaire

38.          En ce qui concerne la politique pénitentiaire, c’est le règlement des établissements pénitentiaires [7] , adopté en 1998 (décret suprême n o  518 du Ministère de la justice) qui s’applique; il a remplacé pour remplacer le règlement de décembre 1992 (décret suprême n o  1771 du Ministère de la justice) et a été conçu de façon à être conforme aux principes des instruments internationaux et à faire reposer la politique pénitentiaire sur le respect des droits fondamentaux du condamné. Des sanctions sont donc prévues à l’encontre des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire qui feraient usage de torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants, commettraient des agressions verbales ou feraient preuve d’une sévérité injustifiée à l’encontre du détenu. Le texte garantit au détenu la liberté de pensée et de religion, le respect de l’honneur, le droit d’être appelé par son propre nom, le droit à une certaine intimité, le droit à l’information, à l’éducation et à l’accès à la culture, l’objectif étant d’obtenir le développement intégral de sa personnalité; est également garanti le droit de plainte et, conformément aux principes internationaux dans le domaine pénitentiaire, l’État est tenu de préserver la vie, l’intégrité et la santé du détenu. Le nouveau règlement reconnaît en outre en tant que principe fondamental que les relations du détenu avec l’État sont de droit public de sorte que, hormis les droits dont l’exercice est suspendu ou limité par la garde à vue, la détention provisoire ou la condamnation, sa situation juridique est la même que celle des citoyens libres. Le principe de la présomption d’innocence est également garanti, ce qui fait que la législation chilienne est conforme aux tendances actuelles en matière de procédure criminelle et de politique pénitentiaire et reprend les principes des instruments internationaux. Les dispositions du titre III du règlement, intitulé «Droits et obligations des détenus», reconnaissent le droit aux soins médicaux, à l’information, aux visites, à l’éducation, à la formation et au travail, le droit de plainte et le droit de bénéficier de conditions de vie minimales. L’Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus, adopté par le Conseil économique et social de l’ONU, ainsi que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention contre la torture et la Déclaration universelle des droits de l’homme ont servi de cadre pour orienter l’élaboration du règlement.

39.               L’administration pénitentiaire et une organisation non gouvernementale nationale, la Commission chilienne des droits de l’homme, ont travaillé à l’élaboration d’un manuel de formation aux droits de l’homme à l’intention des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire qui a été publié en 1997 et qui a été distribué à tous les établissements pénitentiaires du pays.

40.          Le 23 novembre 2000, le Ministère de la justice a conclu avec le British Council un accord de coopération en vue de concevoir un modèle de planification stratégique pour permettre à l’administration pénitentiaire chilienne de se doter des moyens de répondre aux exigences dans le domaine des droits de l’homme, de la politique pénitentiaire et de la réforme de la procédure pénale engagée dans le pays. Pour ce faire, des équipes de fonctionnaires de l’administration pénitentiaire se sont rendues au Royaume‑Uni et ont visité le service pénitentiaire, le service de la liberté surveillée et l’école de formation pénitentiaire. Des autorités de ces services sont aussi venues au Chili pour assurer la formation du personnel pénitentiaire, en particulier dans la région V du pays, région pilote aux fins de l’accord.

Carabiniers

41.          En janvier 1989 est entré en vigueur un texte intitulé «Doctrine et code d’éthique» [8] qui contient les principes et règles que les carabiniers doivent observer dans l’exercice de leur fonction. On retiendra notamment l’article 14, qui dispose que les carabiniers «exercent leur fonction de gardien de l’ordre public en s’acquittant rationnellement des prérogatives légales que leur confèrent la Constitution et la loi, en évitant tout abus de pouvoir, tout excès de zèle et d’une manière générale tout comportement arbitraire dans l’exécution de leur mission». Tout manquement aux règles de ce code peut entraîner des sanctions internes qui vont du blâme à la radiation.

42.               L’instruction générale n o  1052 du 11 mars 1995, intitulée «Droits fondamentaux inhérents à l’être humain», vise à faire connaître à tous les membres du corps des carabiniers la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois adopté par l’Assemblée générale dans sa résolution 34/169 en date du 17 décembre 1979. Il est prévu que les dispositions de ces instruments doivent faire partie du programme de formation et de perfectionnement des personnels et doivent faire l’objet d’une épreuve des examens de promotion.

43.          Les instructions concernant les réformes apportées au Code pénal et au Code de procédure pénale par la loi n o  19567 − par laquelle l’arrestation sur simple soupçon a été supprimée, de nouveaux droits pour assurer la protection des détenus ont été reconnus et le délit de torture a été qualifié − sont constituées par les textes suivants:

              a)               Directive n o  445 du 26 juin 1998 de la Direction de l’ordre et de la sécurité qui contient des instructions spécifiquement consacrées aux droits des détenus; projet de loi relatif aux droits du détenu et autres textes;

              b)               Note n o  473 du 30 juin 1998 de la Direction de l’ordre et de la sécurité qui réitère les instructions relatives aux modifications légales apportées à la détention et protection des droits des citoyens;

              c)               Message officiel n o  216 du 1 er  juillet 1998 de la Direction de l’ordre et de la sécurité, qui donne des instructions concernant la publication au Journal officiel de la loi n o  19567;

              d)               Circulaire n o  1513 du 3 juillet 1998 de la Direction du personnel des carabiniers, qui donne des instructions relatives aux normes de protection des droits des citoyens et aux modifications de la loi relative à la détention;

              e)               Circulaire n o  1521 du 30 octobre 1998 de la Direction générale des carabiniers, qui réitère les instructions concernant le comportement des carabiniers dans l’exercice de leurs fonctions de police.

Police de la Sûreté ( Investigaciones )

44.          En 1992, un plan de modernisation de la Sûreté a été engagé et a été développé depuis; il consiste à réviser et modifier les règlements et l’organisation de la Sûreté. Dans le cadre de ce processus, diverses mesures ont été prises et notamment les suivantes, qui contribuent effectivement à la prévention de la torture:

              a)               Instructions données au Département V des affaires internes, déjà en place: à partir de la date fixée, il collaborera activement aux enquêtes judiciaires sur les cas de violation des droits fondamentaux et recevra les plaintes de particuliers, victimes ou tiers, dénonçant une violation des droits commise par des agents de la Sûreté;

              b)               Violation, en mai 1993, du Conseil supérieur d’éthique de la police, formation collégiale chargée de conseiller le Directeur général de la Sûreté, qui analyse les comportements des fonctionnaires et les structures de l’institution et propose des décisions concrètes qui peuvent entraîner la révocation des fonctionnaires ayant manqué à leurs obligations dans l’exercice de leurs fonctions; des cas se sont effectivement produits;

              c)               Création en décembre 1993 du Département VIII de contrôle des procédures judiciaires, relevant de l’Inspection générale, chargé d’analyser de façon critique le comportement des fonctionnaires et d’améliorer ainsi le travail de la police. En cas de nécessité il examine aussi les procédures qui ont été menées dans des cas précis afin de déceler d’éventuelles irrégularités ou d’établir la responsabilité des agents de la Sûreté dans les procédures contestées, ce qui peut donner lieu à des mesures administratives ou judiciaires;

              d)               Parution en septembre 1995 du Code de déontologie [9] adopté par une décision interne d’application générale de la Sûreté. Il s’agit d’un ensemble normatif considéré comme l’expression la plus aboutie de ce que la Sûreté attend de ses agents. La Déclaration universelle des droits de l’homme, les instruments internationaux de défense des droits de l’homme et le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois ont servi de base à son élaboration. Les dispositions du Code ont un caractère obligatoire et tout manquement entraîne des sanctions qui peuvent aller jusqu’à la révocation. Le texte du Code est affiché, bien en vue, dans tous les locaux de la Sûreté;

              e)               Parution le 17 octobre 2000 de l’instruction générale n o  1762 demandant que les principes contenus dans la résolution de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies 2000/43, intitulée «Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants», soient considérés comme devant régir le comportement de la Sûreté, aux fins de leur mission. La disposition n o  2 est ainsi conçue: «Les fonctionnaires de la Sûreté du Chili et en particulier les chefs des unités et des services, l’Inspection générale, le Département V (affaires internes), le Département VII (contrôle des procédures), les responsables des enquêtes administratives, les directeurs de l’École de la Sûreté, de l’Académie supérieure de police et du Centre de formation professionnelle ainsi que les professeurs chargés de l’enseignement relatif aux droits de l’homme ou aux questions apparentées devront être guidés, dans leurs domaines de compétence, par les principes cités.». L’élaboration en octobre 2000 de l’instruction générale n o  1762 constitue la réponse immédiate donnée par la Direction générale de la Sûreté à la résolution 2000/43 de la Commission des droits de l’homme, que la Direction des droits de l’homme du Ministère des relations extérieures lui a communiquée en septembre 2000. En intégrant cette résolution à sa réglementation interne, la Sûreté montre son souci permanent de chercher à prévenir la torture.

45.          On a vu dans l’introduction du présent rapport qu’en 1990 le recours en amparo , réel moyen de protection de la liberté individuelle et de contrôle de la légalité de la détention, avait été remis en vigueur.

46.          Un autre recours consacré dans la Constitution, le recours en protection, vise à préserver la majorité des droits fondamentaux garantis dans la Constitution, notamment le droit à la vie et à l’intégrité physique et psychique des individus.

47.          Les tribunaux ont jugé et condamné des auteurs d’actes de torture à la suite d’enquêtes menées d’office ou sur plainte des victimes ou de leur famille [10] .

48.          Depuis mars 1990, l’état d’exception n’a plus été proclamé dans le pays et l’exercice des droits fondamentaux garantis par la Constitution n’a plus été suspendu ni restreint.

49.          La législation relative aux états d’exception a été révisée en 1989. En vertu de l’une des modifications opérées par la réforme constitutionnelle le recours en amparo ( habeas corpus ), qui assure la protection de toute personne en état d’arrestation, ainsi que le recours en protection qui préserve le droit à l’intégrité physique et psychique de la personne seront ouverts pendant l’état d’alerte générale (proclamé en cas de guerre extérieure) et pendant l’état de siège (proclamé en cas de conflit interne ou de trouble intérieur).

50.          En ratifiant la Convention, le Gouvernement militaire avait formulé des réserves dont une rendait inapplicables les dispositions de l’article 2. Comme il était indiqué dans le deuxième rapport périodique du Chili, l’instrument de retrait a été déposé le 7 septembre 1990 auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Il subsiste toutefois dans le Code de justice militaire un article − l’article 334 − qui prévoit que le droit, accordé par les lois ou les règlements, de contester les actes ordonnés par un supérieur ne dispense pas du devoir d’obéissance. L’article 335 du même texte dispose que dans des cas déterminés, le subordonné peut suspendre ou modifier un ordre mais qu’il est tenu de l’exécuter si le supérieur insiste.

Article 3

51.          Les articles 644 et suivants du Code de procédure pénale régissent l’extradition passive. En vertu de ces dispositions, lorsqu’un gouvernement étranger demande au Gouvernement chilien d’extrader un individu qui se trouve sur le territoire national, le Ministère des relations extérieures transmet la demande et le dossier à la Cour suprême. Le Président de la Cour suprême examine la demande d’extradition en première instance et une chambre de la même Cour l’examine en deuxième instance. La décision de la Cour suprême, qu’elle fasse droit ou non à la demande d’extradition, tient compte des instruments internationaux applicables, ainsi que des principes du droit international. Toutefois aucune disposition en vigueur au Chili n’interdit expressément l’extradition d’une personne lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture dans le pays qui demande son extradition. De même, aucune disposition en vigueur au Chili n’interdit de refouler ou d’expulser un individu dans l’hypothèse susmentionnée.

52.          En ce qui concerne l’expulsion, la législation chilienne en matière d’immigration détermine précisément les raisons susceptibles de motiver une telle mesure, les autorités habilitées à y recourir et les procédures qui doivent être suivies en la matière. L’adoption d’une mesure d’expulsion peut être obligatoire ou facultative pour l’autorité concernée et doit, dans tous les cas, être strictement motivée par les raisons expressément établies par la loi. De même, des mécanismes administratifs et judiciaires sont prévus pour permettre à la personne concernée par cette mesure d’introduire un recours. En tout état de cause, lorsque la mesure d’expulsion est appliquée, l’intéressé n’est pas nécessairement renvoyé dans son pays d’origine, puisqu’il a la possibilité de choisir tout autre pays qui accepte de l’accueillir. Il importe de rappeler que, en ce qui concerne l’asile, les dispositions en vigueur au Chili consacrent et respectent en tout point le principe qui veut qu’une personne à laquelle a été reconnu le statut de réfugié ne peut pas être refoulée.

53.          Aucune disposition en vigueur au Chili ne prévoit la possibilité de tenir compte de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives pour ne pas procéder à l’expulsion, au refoulement ou à l’extradition d’un individu.

Article 4

54.          Le délit de torture défini selon les critères figurant à l’article premier de la Convention et assorti de peines proportionnelles à la gravité des faits n’était pas prévu par la législation pénale en vigueur jusqu’à la réforme réalisée en vertu de la loi n o  19567, du 1 er  juillet 1998 [11] . Avant cette réforme, la notion de torture n’était pas prise en compte dans la typologie des infractions pénales du pays. Pour réprimer ce type de conduite, on recourait à l’article 150 du Code pénal qui sanctionnait toute personne qui «ordonnait ou prolongeait indûment la détention au secret d’un prévenu, lui infligeait des souffrances ou faisait usage envers lui d’une sévérité injustifiée», ainsi que toute personne qui ordonnait arbitrairement l’arrestation ou la détention d’un individu dans d’autres lieux que ceux prévus par la loi. Ces définitions ne prennent en compte que les atteintes physiques et ne couvrent pas la possibilité que ces actes soient à l’origine de dommages psychiques.

55.          Les modifications apportées par la loi n o  19567 sont les suivantes:

a)               L’article 150 du Code pénal est maintenu et prévoit que toute personne qui ordonne ou prolonge indûment la détention au secret d’une personne privée de liberté, fait usage envers elle d’une sévérité injustifiée ou la fait détenir arbitrairement en d’autres lieux que ceux prévus par la loi encourt une peine de 61 jours à 5 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle;

b)               À cette disposition vient s’ajouter l’article 150 A, qui réprime de manière spécifique le délit de torture et qui prévoit pour tout agent de l’État qui commet des actes de torture physique ou psychique les peines suivantes:

i)          Tout agent de l’État qui fait subir, qui ordonne de faire subir ou qui consent à faire subir des souffrances ou des contraintes physiques ou psychiques illégitimes à une personne privée de liberté est passible d’une peine de 541 jours à 5 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle (par. 1);
ii)          Tout agent de l’État qui, ayant connaissance de faits visés au paragraphe précédent, ne prend aucune mesure pour les empêcher ou les faire cesser, alors qu’il en a la capacité ou l’autorité, est passible de la même peine atténuée d’un degré (par. 2);
iii)         Tout agent de l’État qui, par l’un des moyens décrits ci-dessus, oblige la victime ou un tiers à faire des aveux, à faire une déclaration de quelque nature que ce soit ou à donner des renseignements, est passible d’une peine aggravée, allant de 3 à 10 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle (par. 3);
iv)         Tout agent de l’État qui provoque des lésions graves ou le décès d’une personne privée de liberté après lui avoir fait subir l’un des actes susmentionnés, si ces lésions ou le décès peuvent être imputés à sa négligence ou à son imprudence, est passible d’une peine aggravée allant de 5 à 15 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle (par. 4);

c)               Un nouvel article 150 B est également ajouté au Code pénal; en vertu de cette disposition, toute personne qui, sans être un agent de l’État, se rend coupable de l’une des infractions visées aux articles 150 et 150 A (par. 1) est passible d’une peine de 61 jours à 3 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle; toute personne qui, sans être un agent de l’État, se rend coupable de l’infraction visée à l’article 150 A (par. 2) est passible d’une peine de 541 jours à 5 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle; toute personne qui, sans être un agent de l’État, se rend coupable de l’infraction visée à l’article 150 A (dernier paragraphe) est passible d’une peine de 3 ans et 1 jour à 10 ans de travaux forcés ou de réclusion.

56.          Toutes les peines mentionnées sont applicables aux auteurs de chacune des infractions visées effectivement consommées. Conformément aux dispositions générales du Code pénal, la tentative de délit de torture, ainsi que la complicité et le recel de tentative de délit de torture, peuvent également être réprimés. En pareil cas, en règle générale, la peine est atténuée d’un degré (art. 50 à 54 du Code pénal).

57.          En outre, l’article 330 du Code de justice militaire, applicable aux membres des forces armées et aux carabiniers, prévoit que tout membre de l’une de ces institutions qui «... dans l’exécution d’un ordre émanant d’un supérieur hiérarchique ou dans l’exercice de ses fonctions militaires, use ou fait user, sans raison valable, de violences inutiles aux fins de l’exécution des actes dont il est chargé...» est passible d’une peine de 41 jours d’emprisonnement de police à 540 jours d’emprisonnement correctionnel, si ces actes n’ont pas causé de lésions ou n’ont causé que des lésions légères, et d’une peine de 5 ans et 1 jour à 15 ans d’emprisonnement correctionnel si ces actes ont entraîné le décès de la victime.

Article 5

Compétence du Chili aux fins de connaître des infractions de torture

              Infractions commises sur le territoire relevant de la juridiction du Chili

58.          Le Chili applique le principe de la territorialité de la loi à quelques exceptions près. Ainsi, le Code pénal dispose: «La loi pénale chilienne s’impose à tous les habitants de la République, y compris aux étrangers» (art. 5). Aux fins de l’application de la loi pénale, le territoire chilien s’entend:

a)               Des terres comprises à l’intérieur des frontières naturelles et politiques;

b)               Des eaux territoriales situées à l’intérieur de la bande des 12 milles marins;

c)               De l’espace aérien correspondant au territoire terrestre et maritime;

d)               Du sous‑sol du territoire terrestre et maritime.

59.          De plus, la loi pénale s’applique:

a)               Aux navires (autres que les navires de guerre de puissances étrangères) qui se trouvent dans les eaux territoriales chiliennes ou qui mouillent dans les ports du littoral chilien; à tous les navires battant pavillon chilien qui se trouvent en haute mer et aux navires de guerre chiliens qui mouillent dans les eaux territoriales d’une puissance étrangère. Les tribunaux chiliens ont compétence pour exercer une action subsidiaire en responsabilité pénale lorsque des infractions pénales commises à bord de navires battant pavillon chilien qui se trouvent dans des eaux relevant d’une autre juridiction restent impunies (art. 3 de la loi sur la navigation);

b)               Aux aéronefs chiliens ou étrangers qui se trouvent sur le territoire ou dans l’espace aérien chilien, aux aéronefs militaires chiliens en quelque lieu qu’ils se trouvent et aux aéronefs civils et nationaux chiliens lorsqu’ils se déplacent dans l’espace aérien international. Les infractions commises à bord de ces aéronefs lorsqu’ils se trouvent dans l’espace aérien d’une autre puissance relèvent de la juridiction de cette dernière; toutefois si ladite puissance n’exerce aucune action pénale pour les infractions commises à bord desdits aéronefs, la compétence des tribunaux chiliens peut s’exercer (art. 2 à 5 du Code de l’aviation);

c)               Aux territoires occupés par les forces armées chiliennes au cours ou à la suite d’une guerre (art. 3, par. 1 du Code de justice militaire).

              Délits commis à l’étranger par des nationaux chiliens

60.          La législation chilienne prévoit d’autres exceptions au principe de la territorialité, énoncée notamment dans le Code de l’organisation judiciaire, le Code pénal et le Code de justice militaire. Parmi les exceptions susceptibles d’avoir un effet en ce qui concerne l’application de l’article 5 de la Convention, il convient de mentionner les cas suivants:

a)               Lorsque l’auteur présumé d’une infraction commise à l’étranger contre un ressortissant chilien est lui-même de nationalité chilienne, il relève de la compétence des tribunaux chiliens s’il revient au Chili sans avoir été jugé par les tribunaux du pays dans lequel l’infraction a été commise (art. 6, par. 6 du Code de l’organisation judiciaire);

b)               De même, conformément à l’article 345 du Code Bustamante, le Chili est tenu de juger tout ressortissant chilien auteur d’une infraction à l’étranger s’il refuse de faire droit à la demande d’extradition de l’intéressé déposée par l’État dans lequel l’infraction a été commise [12] .

              Délits commis à l’étranger et dont la victime est de nationalité chilienne

61.               L’article 6, paragraphe 6 susmentionné du Code de l’organisation judiciaire est applicable à cette situation, lorsque l’auteur présumé de l’infraction est de nationalité chilienne et qu’il revient au Chili sans avoir été jugé dans le pays où l’infraction a été commise.

Compétence pour connaître des infractions internationales

62.          Enfin, il convient de signaler que les tribunaux chiliens sont également compétents pour connaître des infractions internationales, visées dans des instruments internationaux, tels que, par exemple, la Convention internationale relative à la répression de la traite des blanches, et la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes.

63.               Lorsque l’extradition n’est pas accordée, les dispositions nationales en vigueur ne comportent aucune obligation correspondant aux prescriptions du paragraphe 2 de l’article 5 de la Convention. En conséquence, à l’heure actuelle, pour donner effet à cette disposition il faudrait que les tribunaux chiliens appliquent directement la Convention, sans préjudice de l’incorporation de cette obligation dans l’ordre juridique interne.

64.          En droit chilien, il n’existe pas de disposition spéciale relative à l’exercice de la compétence pénale pour les infractions prévues dans la Convention. En conséquence, pour déterminer si l’un de ces délits relève de la compétence des tribunaux chiliens, il conviendrait d’appliquer les dispositions de la législation nationale citées, le Code Bustamante le cas échéant, ainsi que les dispositions pertinentes de la Convention elle-même. Il n’existe aucun précédent judiciaire d’application de ces dispositions.

 

Article 6

65.          Aucun texte en vigueur ne régit expressément l’application des dispositions des paragraphes 1 et 2 de l’article 6. Toutefois, elles peuvent être appliquées en vertu des règles de procédure qui régissent la détention et qui garantissent les droits des détenus. Cette procédure relève des juridictions pénales. S’agissant des obligations mentionnées aux paragraphes 3 et 4 de cet article, il convient de signaler que les instruments internationaux ratifiés par le Chili ont force obligatoire sur son territoire; c’est le cas notamment de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, dont les alinéas b) et c) du paragraphe 1 de l’article 36 ont trait au droit des personnes arrêtées, incarcérées ou mises en détention provisoire de communiquer avec les fonctionnaires consulaires de leur pays d’origine, et à l’obligation d’informer ces fonctionnaires consulaires de toute situation du type décrit ci-dessus.

Article 7

66.          Les dispositions de la législation nationale qui régissent l’extradition passive ne comportent aucune obligation correspondant aux prescriptions du paragraphe 1 de l’article 7 de la Convention. Au contraire, le paragraphe 2 de l’article 655 du Code de procédure pénale prévoit que si la Cour suprême rejette une demande d’extradition elle prononce la remise en liberté du prévenu. En conséquence, à l’heure actuelle, pour donner effet à cette disposition de l’article 7 il faudrait que les tribunaux chiliens appliquent directement la Convention, sans préjudice de l’incorporation expresse de cette obligation dans l’ordre juridique interne.

67.          Toutes les personnes qui comparaissent devant les tribunaux chiliens, qu’elles soient de nationalité chilienne ou étrangère, se voient appliquer les mêmes règles de procédure, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 19 de la Constitution (Égalité devant la loi) et de l’article premier du Code de procédure pénale («Les tribunaux chiliens ont compétence sur les nationaux chiliens et les ressortissants étrangers à l’effet de juger les infractions commises sur le territoire du Chili»).

68.          Toute personne jugée par les tribunaux chiliens bénéficie des garanties d’une procédure régulière, conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l’article 19 de la Constitution (Égale protection de la loi dans l’exercice des droits), ainsi qu’à diverses dispositions du Code de procédure pénale, du Code pénal et du Code de l’organisation judiciaire.

Article 8

Inclusion des infractions visées à l’article 4 de la Convention dans les traités d’extradition conclus entre États parties

69.          Afin de s’acquitter de cette obligation, le Chili a inclus dans les traités bilatéraux d’extradition conclus ou entrés en vigueur après 1994 des clauses prévoyant que les infractions liées à des actes de torture justifient l’extradition. Ces traités sont les suivants:

a)               Traité d’extradition entre la République du Chili et la République orientale de l’Uruguay, conclu le 19 août 1996 (non encore entré en vigueur). L’article 5 du traité exclut l’extradition pour délits politiques, dont sont exclus «le génocide, les crimes de guerre, ainsi que les crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, commis en violation des normes du droit international».

b)               Traité d’extradition et de coopération judiciaire en matière pénale entre la République du Chili et le Royaume d’Espagne, conclu le 14 avril 1992 et entré en vigueur en janvier 1995. L’article 5 du traité exclut l’extradition pour délits politiques ou apparentés à des délits de cette nature, dont sont exclus les «crimes de guerre, ainsi que les crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, conformément au droit international».

c)               Traité d’extradition entre la République du Chili et l’Australie, conclu le 6 octobre 1993 et entré en vigueur en janvier 1996. L’article IV du traité, qui porte sur les exceptions à l’extradition, exclut l’extradition pour délits politiques, dont sont exclus les «crimes de guerre, ainsi que les crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, conformément au droit international».

70.          Tous les traités comportent de plus une clause de nature générale, en vertu de laquelle «les infractions visées dans les instruments multilatéraux auxquels les deux pays sont parties», parmi lesquels figurent la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, donnent lieu à extradition.

Possibilité pour les États qui subordonnent l’extradition à l’existence d’un traité de considérer la Convention comme constituant la base juridique de l’extradition en ce qui concerne les infractions liées à des actes de torture

71.          Cette disposition n’a pas été incorporée au droit interne et aucun cas concret ne s’est présenté en la matière.

Reconnaissance des infractions visées dans la Convention comme donnant lieu à extradition entre les États qui ne subordonnent pas l’extradition à l’existence d’un traité

72.          Cette disposition n’a pas été incorporée au droit interne et aucun cas concret ne s’est présenté en la matière.

Les infractions sont considérées aux fins d’extradition comme ayant été commises tant au lieu de leur perpétration que sur le territoire sous la juridiction des États tenus d’établir leur compétence en vertu du paragraphe 1 de l’article 5

73.          Cette disposition n’a pas été incorporée au droit interne et aucun cas concret ne s’est présenté en la matière.

Article 9

74.          Le Chili est partie à divers traités multilatéraux et bilatéraux sur l’entraide judiciaire. Parmi les premiers, il convient de mentionner la Convention de droit international privé de 1928, à laquelle est annexé le «Code Bustamante», dont les titres V et VII du Livre IV ont trait respectivement aux requêtes et commissions rogatoires et à la preuve; la Convention interaméricaine sur l’admission des éléments de preuve de 1975; et la Convention interaméricaine sur les commissions rogatoires de 1975. La Convention interaméricaine sur l’entraide en matière pénale de 1992 est en cours d’approbation. S’agissant des traités bilatéraux, le Chili a conclu des accords avec la Colombie, l’Uruguay, l’Espagne et le Mexique. Les divers accords bilatéraux sur l’extradition auxquels le Chili est partie comportent également des dispositions relatives à l’entraide judiciaire.

Article 10

Administration pénitentiaire

75.          La formation des personnels de cette institution est assurée par l’École d’administration pénitentiaire. Dans le domaine du respect des droits de l’homme et de l’interdiction des mauvais traitements à l’encontre des personnes privées de liberté, les programmes d’étude proposés aux futurs personnels de surveillance et de direction portent notamment sur les matières suivantes:

a)               Traitement des détenus; cette matière comporte notamment un module consacré à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus et à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948;

b)               Éthique et morale; cette matière comporte notamment des modules sur la peine de mort, la torture, la justice, l’ordre public et les droits de l’homme;

c)               Droit; cette matière comporte deux modules dont l’un (Droit constitutionnel) renvoie notamment aux droits fondamentaux consacrés par la Constitution, et l’autre (Réglementation institutionnelle) porte notamment sur les règles régissant les établissements pénitentiaires.

76.          De plus, les questions relatives au respect des droits de l’homme et à l’interdiction des mauvais traitements sont traitées tout au long du programme d’études, dans la quasi-totalité des matières enseignées, qu’il s’agisse de la procédure pénitentiaire, de l’atelier de développement pénitentiaire, des cours d’autodéfense ou de l’instruction pénitentiaire.

77.          Depuis 1998, l’École d’administration pénitentiaire a inclus les droits de l’homme dans les programmes de formation et de recyclage du personnel, ainsi que dans les cours destinés aux futurs surveillants et directeurs. Ces cours portent notamment sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, sur les principes fondamentaux et sur les recommandations de l’ONU à l’intention des responsables du maintien de l’ordre.

Corps des carabiniers

78.          Les carabiniers se répartissent en deux catégories: les officiers et le personnel recruté et nommé par l’institution elle-même. La formation du personnel de chacune de ces catégories relève d’organes différents. La formation des officiers est assurée par l’École des carabiniers et l’Académie des sciences policières. La formation des autres personnels relève quant à elle de l’École de formation policière et de l’École des sous-officiers.

a)               L’École des carabiniers assure aux personnes qui ont achevé les deux cycles d’enseignement scolaire préuniversitaire une formation de trois ans leur permettant d’intégrer le corps des carabiniers en tant qu’officiers de l’ordre et de la sécurité et officiers d’intendance. Le programme d’études propose une matière intitulée «Éthique professionnelle», enseignée au cours du troisième semestre, ainsi qu’une matière relative aux droits de l’homme, enseignée pendant deux semestres, où sont traitées des questions ayant trait à la Convention contre la torture.

b)               L’Académie de police propose deux années de perfectionnement aux officiers ayant 16 années de service, qui sont tenus de suivre cette formation pour prétendre à un grade supérieur. Pendant un semestre, ils suivent un cours sur les droits fondamentaux de la personne, qui porte notamment sur les droits consacrés par la Convention contre la torture.

c)               L’École de formation policière des carabiniers, qui forme chaque année un contingent de 1 500 carabiniers dans ses 10 établissements répartis dans le pays, propose un cours d’éducation civique, qui dure un semestre et notamment un volet Droits de l’homme.

d)               L’École des sous-officiers propose un cours d’éthique professionnelle. Au début de 2001, le programme d’études du cours de perfectionnement des sous-officiers diplômés a été modifié de façon à comporter un module consacré aux droits fondamentaux de la personne, qui dure deux semestres.

79.          Outre les programmes d’études permanents mentionnés ci-dessus, on a mis au point une stratégie visant à organiser un enseignement à distance destiné à couvrir l’ensemble du pays et fondé sur le principe du perfectionnement de chaque carabinier tout au long de sa carrière. En 1997, cette notion de formation permanente s’est concrétisée avec le cours de perfectionnement devant faciliter l’avancement des sous-lieutenants au grade de capitaine, qui a été suivi par 1 386 officiers. Les droits de l’homme sont enseignés dans le cadre des cours de droit. Dans le même contexte, le programme de perfectionnement à l’intention des sergents et des caporaux chefs de l’ordre et de la sécurité a été lancé en juillet 2001 et devait bénéficier au départ à 486 fonctionnaires; il sera étendu, au cours des prochaines années, à la totalité du personnel subalterne réparti sur l’ensemble du territoire national. Il comporte des cours sur les droits de l’homme.

80.          La formation professionnelle de l’ensemble du personnel du corps des carabiniers relève de la Direction de l’éducation de l’institution qui, par l’intermédiaire de son Département universitaire, est chargée de revoir tous les cinq ans les programmes d’études des différents établissements d’enseignement mentionnés.

81.          Dans le numéro 446 de février 1995 du Bulletin d’instructions interne, qui est distribué à tous les carabiniers, on peut lire à l’annexe 2 qu’il a été décidé, en vertu du décret n o  1052 du 11 mars 1995, de diffuser la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois, adopté par les Nations Unies en 1979, ainsi que d’inclure ces instruments dans les programmes d’études des établissements de formation et de perfectionnement et dans les programmes des épreuves auxquelles est soumis l’avancement [13] .

Sûreté ( Investigaciones )

82.          Cette institution est dotée de trois établissements de formation: l’École de la police de la Sûreté, responsable de la formation des futurs fonctionnaires et qui décerne le titre «d’enquêteur», l’Académie supérieure de police, établissement chargé de la formation des futurs personnels de direction et du perfectionnement des officiers, et le Centre de formation professionnelle, chargé de mettre à jour les programmes d’enseignement et d’assurer la formation permanente des différentes catégories de personnel policier grâce à des programmes de spécialisation.

83.          À l’heure actuelle, l’École de la police propose des cours de formation ayant trait à la prévention de la torture. On mentionnera notamment les cours d’éthique policière I et II (Droits de l’homme), figurant respectivement au programme de la deuxième et de la troisième année de cours. L’Académie supérieure de police propose pour sa part des cours sur les droits de l’homme, l’éthique policière et l’éthique du pouvoir policier [14] .

84.          Dans le cadre de la modernisation de la Sûreté, un processus d’analyse et d’évaluation en profondeur de l’instruction, de la formation et du perfectionnement du personnel a commencé en 1992, afin de permettre la mise en place effective d’une police scientifique et technique professionnelle. À la suite de ce processus, les programmes d’études de tous les établissements de formation ont été revus. En juin 1993, la Direction générale de la Sûreté a décidé de rendre obligatoire le cours d’éthique policière dans tous les programmes proposés par l’institution.

85.          Le Conseil de déontologie des formateurs a été créé en avril 1996, présidé par le directeur général et composé entre autres des professeurs d’éthique; il a notamment pour fonctions de réactualiser les objectifs, le contenu, la méthodologie et la bibliographie des programmes d’éthique, d’étudier les comportements des élèves qui sont susceptibles de porter atteinte aux principes de l’institution ainsi que les problèmes d’éthique dans l’enseignement.

86.               Compte tenu de l’amélioration constatée dans le niveau d’enseignement des établissements de formation de la Sûreté, grâce à la nouvelle orientation définie dans ce domaine la loi organique de l’enseignement, telle qu’elle a été modifiée en 1998, reconnaît à ce corps de police la capacité de décerner, à travers son école, des titres professionnels de niveau universitaire reconnus par l’État et habilite l’Académie supérieure de police à décerner des licences, des maîtrises et des doctorats, dans son domaine de compétences spécialisé.

[1] À ce sujet, on peut citer l’arrêt du 9 septembre 1998 rendu par la Cour suprême sur le pourvoi en cassation n o 469-98 (disparition de Pedro Enrique Poblete Córdova): «Dans de telles circonstances, omettre d’appliquer ces dispositions [des Conventions de Genève de 1949 et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques] entraîne une erreur de droit qui doit être corrigée au moyen de ce pourvoi, en particulier si l’on tient compte du fait que, conformément aux principes du droit international, les instruments internationaux doivent être interprétés et appliqués de bonne foi par les États; il en découle que le droit interne doit s’adapter à ces instruments et que le législateur devra concilier les nouvelles normes qu’il élaborera avec ces instruments internationaux, et il faudra éviter de transgresser leurs principes si les instruments n’ont pas été dénoncés.».

[2] Le Chili est à jour dans le paiement de sa contribution annuelle avec le versement de 10 000 dollars des États-Unis effectué en mars 2000.

[3] On trouvera à l’annexe I la liste des infractions pour lesquelles la peine de mort a été abolie et des infractions prévues dans le Code de justice militaire pour lesquelles elle est maintenue, conformément à la réforme apportée par la loi n o  19734 du 5 juin 2001.

[4] On trouvera à l’annexe II le texte du nouveau Code de procédure pénale.

[5] Voir F. González Morales, «Rol y Control de la Policía en el Proceso Penal Chileno», Premier Congrès national sur la réforme de la procédure pénale − Universidad Diego Portales, Cuaderno de Análisis Jurídico n o  39, Santiago, 1998.

[6] On trouvera à l’annexe III le texte des articles du Code de procédure pénale modifiés par la loi n o  19567, du 1 er juillet 1998.

[7] On trouvera à l’annexe IV le texte du règlement des établissements pénitentiaires.

[8] On trouvera le texte à l’annexe V.

[9] On trouvera à l’annexe VI le texte du Code de déontologie de la Sûreté.

[10] À la suite de la mort, le 12 janvier 1998, du chauffeur de taxi Raúl Osvaldo Palma Salgado des suites des coups qu’il avait reçus pendant la garde à vue dans les locaux de la section des enquêtes policières des carabiniers (SIP), les autorités supérieures des carabiniers ont immédiatement réagi et dans les neuf jours qu’a duré l’enquête administrative interne elles ont révoqué les quatre responsables présumés des faits. Le jour même de la mort du chauffeur de taxi, la juridiction militaire compétente a ouvert d’office une instruction judiciaire qui a abouti à l’inculpation des quatre responsables présumés, lesquels ont été condamnés en première instance à 10 ans et 1 jour de réclusion pour le délit de violences injustifiées ayant entraîné la mort, délit réprimé dans le Code de justice militaire.

[11] On trouvera à l’annexe VII le texte de l’article modifié et des articles ajoutés au Code pénal en vertu de la loi n o  19 567 du 1 er  juillet 1998.

[12] Le «Code Bustamante» correspond au Code de droit international privé, annexé à la Convention de droit international privé, que le Chili a signée le 20 février 1928 et ratifiée le 14 juin 1933. La Convention est en vigueur pour le Chili depuis avril 1934. La Convention et son code annexe ont été ratifiés aussi par les pays suivants: Bolivie, Brésil, Costa Rica, Cuba, El Salvador, Équateur, Haïti, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama, Pérou, République dominicaine et Venezuela.

[13] On trouvera à l’annexe VIII le texte de l’annexe 2 du Bulletin d’instructions du corps des carabiniers n o 446.

[14] On trouvera à l’annexe IX le Programme d’études pour l’année scolaire 1999 (décret n o  1652 du 21 janvier 1999 de la Direction générale de la sûreté, qui définit les programmes d’études pour l’année 1999, ainsi que l’organisation des cours jusqu’en 2003 au sein de cette institution).

 

Médecins

87.          De 1973 à 1981, les responsables de l’ordre des médecins du Chili − qui est l’association professionnelle des médecins − étaient nommés par le régime militaire. En 1981, celui-ci a pris le décret‑loi sur les associations professionnelles, qui a entraîné la suppression d’importantes attributions de ces associations, telles que l’affiliation obligatoire, le contrôle du respect de la déontologie par les membres, et le droit de participer à la définition de la politique nationale de santé. Toutefois, ce décret-loi a permis l’organisation d’élections au sein de ces associations, à la suite desquelles une nouvelle direction a été élue à la tête de l’ordre par des médecins de l’opposition au régime militaire. Dès lors, l’ordre des médecins a décidé de faire de la défense des droits de l’homme un élément intrinsèque de sa mission, et a pris fermement position contre la torture, ce qui s’est traduit, notamment, par des enquêtes internes visant à déterminer dans quelle mesure certains médecins avaient participé à des actes de torture sous le régime militaire. À la suite de ces investigations, un médecin a été sanctionné et suspendu pour une durée d’un an en 1984; deux médecins ont été radiés et un troisième a été suspendu pour une durée de six mois en 1986; un médecin a été radié et un autre suspendu pour une durée de six mois en 1987. Le Département des droits de l’homme, organisme collaborant avec le Conseil général de l’ordre des médecins, a été créé en avril 1987; il a expressément pour objectif de veiller à l’application sur les plans médical, individuel et social des droits fondamentaux dans l’exercice de cette profession. Il a pris une série d’initiatives et a notamment organisé en 1997 une consultation dans les facultés de médecine sur l’enseignement des droits de l’homme dans ces établissements d’enseignement supérieur. L’enquête a permis de constater, grâce aux réponses communiquées par les autorités universitaires consultées, que le cours d’éthique médicale était obligatoire dans six des sept facultés existantes. Le thème des droits de l’homme est, quant à lui, traité occasionnellement dans deux de ces facultés.

Administration pénitentiaire

88.          Le Règlement des établissements pénitentiaires dispose: «Il est interdit de soumettre les détenus à des tortures, à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, en paroles ou en actes, et il ne sera pas fait usage d’une sévérité injustifiée dans l’application des dispositions du présent règlement»; «l’administration pénitentiaire veille au respect de la vie, de l’intégrité et de la santé des détenus et permet l’exercice de leurs droits compte tenu de leur statut de détenus» (art. 6). Les statuts du personnel de l’administration pénitentiaire du Chili (décret ayant force de loi n o  1791 de 1979) précisent que le personnel est tenu «d’appliquer aux personnes dont il a la charge, qu’elles soient privées de liberté ou que leur liberté soit limitée, un traitement digne». La direction nationale et les directions régionales de l’administration pénitentiaire, ainsi que les directeurs des établissements pénitentiaires, adressent en permanence au personnel pénitentiaire en contact direct avec la population carcérale des instructions relatives au strict respect des droits des détenus, particulièrement en ce qui concerne leur intégrité physique et psychique.

Corps des carabiniers

89.          Les attributions des carabiniers sont encadrées par un code d’éthique. En vertu de l’article 14 de ce code, ils «exercent leurs fonctions de gardiens de l’ordre public en s’acquittant rationnellement des prérogatives légales que leur confèrent la Constitution et la loi, en évitant tout abus de pouvoir, tout excès de zèle, et d’une manière générale tout comportement arbitraire dans l’exécution de leur mission». Sur le plan juridique, ce corps de police est régi non seulement par les dispositions constitutionnelles et législatives applicables, mais également par les trois règlements suivants:

a)               Règlement disciplinaire n o  11, approuvé en vertu du décret suprême n o  900 de 1967, dont l’article 22, paragraphe 5), prévoit qu’il y a faute «chaque fois que les attributions statutaires ont été outrepassées, à l’égard de subordonnés ou à l’égard du public, et chaque fois qu’est perpétré un acte susceptible d’être qualifié d’abus de fonction, à condition qu’il ne soit pas constitutif d’un délit».

b)              Règlement de service n o  7 à l’intention des chefs et officiers de l’ordre et de la sécurité, approuvé en vertu du décret suprême n o  639 de 1968, dont l’article 57, paragraphes 1) et 5), fait notamment obligation à l’officier de garde responsable de détenus «d’inspecter aussi souvent que possible les cellules dans lesquelles se trouvent des détenus et de rendre compte de ses observations éventuelles» et «de n’autoriser en aucun cas qu’un détenu soit maltraité ou brimé, de prendre sans délai les mesures préventives nécessaires et, le cas échéant, de rendre compte par écrit de tout abus au chef de l’unité».

c)               Règlement de service n o  10 à l’intention du personnel recruté et nommé par l’institution, approuvé en vertu du décret suprême n o  1818 de 1967, dont diverses dispositions ont trait au traitement des détenus:

i)          L’article 4, paragraphe 10.2), fait obligation au sous-officier ou au caporal de garde d’accorder une attention particulière «à toute personne qui se présente au poste pour demander des informations ou des nouvelles au sujet d’un détenu»;
ii)          L’article 15 dispose que ces fonctionnaires doivent d’une manière générale «traiter les détenus avec bienveillance, tact et prudence et doivent empêcher le personnel d’user de moyens ou de procédés violents ou vexatoires à l’encontre des détenus, quel que soit leur statut social»;
iii)         L’article 16, paragraphe 2), fait obligation au personnel de garde «de ne pas maltraiter ni autoriser que soit maltraitée une personne en état d’arrestation qui a été conduite au poste ou qui s’y trouve détenue»;
iv)         L’article 18, paragraphe 4), dispose que le gardien de cellule est tenu «de répondre aux demandes des détenus et de ne pas permettre qu’ils soient maltraités ou brimés alors qu’ils sont sous sa garde. De même, il lui incombe d’empêcher toute rixe entre détenus et tout désordre».

Sûreté ( Investigaciones )

90.          L’article 19 de la loi organique de la police de la Sûreté interdit à ses fonctionnaires «de se livrer à des actes de violence afin d’obtenir d’un détenu qu’il fasse des déclarations». Le non‑respect de cette disposition est sanctionné par une peine privative de liberté qui, comme l’infraction de violence inutile sanctionnée par le Code de justice militaire, va de 41 jours − lorsque l’infraction n’a pas causé de lésions ou est dénuée de caractère de gravité − à 15 ans, lorsque l’infraction a entraîné le décès de la victime.

91.          Comme il était indiqué plus haut (par. 44.b) du présent rapport), le Code de déontologie, en vigueur depuis 1995, a un caractère obligatoire pour les fonctionnaires de cette institution. Selon l’article 3 de ce code, «dans l’exercice de leurs fonctions, les fonctionnaires de la Sûreté respectent et protègent la dignité des personnes et les droits fondamentaux. En aucun cas un enquêteur ne pourra infliger, faire infliger ou tolérer que soit infligée quelque pression physique ou psychologique que ce soit à une personne en vue d’obtenir des informations ou des aveux visant à élucider une infraction. Les pressions illégitimes, inhumaines ou dégradantes et les actes de torture ne seront tolérés en aucune circonstance. Nul ne pourra être reconnu coupable d’un délit si sa responsabilité n’est pas établie conformément à la loi».

92.          On trouvera dans les paragraphes relatifs à l’article 12 de la Convention (97 à 110) des informations sur les enquêtes réalisées au sein de l’administration pénitentiaire, du corps des carabiniers et de la Sûreté, en vertu des dispositions réglementaires susmentionnées.

Médecins

93.          Une des mesures prises par la direction de l’ordre des médecins élue en 1981, soucieuse de la promotion et de la défense des droits de l’homme, a été de réviser et d’améliorer le Code d’éthique médicale et d’incorporer à ce texte les déclarations internationales relatives à la défense et à la protection des personnes et au perfectionnement de l’exercice de la profession, émanant de l’ONU, de l’Association médicale mondiale et d’autres organisations; ce faisant, elle a mis l’accent principalement sur la Déclaration de Tokyo adoptée en 1975 par l’Association médicale mondiale, qui a trait à la lutte contre la torture et qui sert de base à l’article 25 du Code, expressément consacré à cette question. En mars 1985, le texte a été complété par les normes éthiques applicables aux soins médicaux destinés aux personnes détenues [1] .

94.          À la demande de son Département des droits de l’homme, cette association professionnelle a également pris l’initiative d’éditer une affiche intitulée «Recommandations de l’ordre des médecins du Chili aux médecins des services d’urgence amenés à constater des lésions corporelles» qui porte sur les éventuelles situations de violences policières indues ainsi qu’aux cas de violence familiale; cette affiche a été adressée aux établissements hospitaliers en décembre 1997 [2] .

Article 11

95.          En vertu de l’article 567 du Code de l’organisation judiciaire, tel qu’il a été modifié [3] , tout juge pénal a pour obligation d’inspecter, accompagné de son secrétaire, l’établissement pénitentiaire qui se trouve dans le ressort de son tribunal, afin de déterminer si les personnes en détention (condamnés ou prévenus) sont indûment soumises à des brimades. S’agissant de celles qui se trouvent dans des établissements pénitentiaires en dehors de localités du ressort de ces tribunaux, la Cour d’appel établit un tour de rôle entre les magistrats concernés par ces inspections, afin qu’ils rendent visite aux détenus et qu’ils informent automatiquement le magistrat compétent des plaintes reçues. Sans préjudice de ces dispositions, tout juge doit visiter au moins une fois par trimestre l’établissement pénitentiaire dans lequel se trouvent des détenus. Les avocats des prévenus, leurs parents ou tuteurs s’ils sont mineurs (art. 568 du Code), ainsi que les membres du parquet concernés ont le droit d’assister à ces inspections. Toutes les personnes emprisonnées ou détenues doivent être présentées au juge lors de son inspection (art. 569 du Code).

96.          En ce qui concerne la Sûreté, les normes relatives aux procédures d’interrogatoire et de détention sont contenues dans des dispositions internes intitulées «Ordres généraux». Le Département VII, responsable de la surveillance des procédures policières, est chargé de revoir et d’évaluer en permanence les procédures appliquées afin d’améliorer et de redéfinir les méthodes ou pratiques inadaptées.

Article 12

Administration pénitentiaire

97.      Toute personne privée de liberté dans un établissement pénitentiaire, qu’elle soit en état d’arrestation, inculpée ou condamnée, peut de sa propre initiative ou à la demande d’un tiers porter plainte pour torture, traitements ou propos cruels, inhumains ou dégradants, ou pour avoir fait l’objet d’une sévérité injustifiée, ce qui peut donner lieu à enquête. Ainsi, les enquêtes internes sont menées par un agent pénitentiaire, qui doit être de grade plus élevé que le fonctionnaire mis en cause et réunir les conditions voulues d’impartialité tant à l’égard de l’éventuelle victime que du responsable présumé. Si la gravité des faits le justifie, l’administration pénitentiaire ordonne l’ouverture d’une information ou d’une enquête administrative, conformément aux dispositions de ses Statuts administratifs (art. 120, 122 et suivants, loi n o  18834 de 1989). Le responsable de l’enquête administrative peut, en cours de procédure, ordonner la suspension temporaire du fonctionnaire. Le chef de la Direction nationale de l’administration pénitentiaire est habilité à décider la suspension temporaire de l’intéressé (décret ayant force de loi n o  2 de 1968). Le cas échéant, l’administration pénitentiaire applique les sanctions administratives voulues, qui peuvent aller jusqu’à la révocation de l’auteur des faits, sans préjudice des sanctions pénales susceptibles d’être prononcées par les tribunaux. Si les mauvais traitements sont constitutifs d’un délit, les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire qui en ont connaissance sont tenus d’en aviser le juge au plus tard dans les 24 heures (art. 84, n o  2, du Code de procédure pénale). Ils ont l’obligation de faire donner dans les plus brefs délais aux victimes potentielles d’actes de torture ou de mauvais traitements similaires les soins médicaux requis par leur état, de prendre les mesures de protection nécessaires − comme leur hospitalisation dans un centre de l’administration pénitentiaire ou un établissement extérieur − et de prendre toute mesure nécessaire pour préserver la vie et l’intégrité physique et psychique des détenus.

Enquêtes administratives menées par l’administration pénitentiaire suite à des plaintes pour mauvais traitements imputés à des membres du personnel pénitentiaire sur la personne de détenus

98.          On trouvera ci-après le détail des enquêtes menées depuis 1995.

              − Années 1995 à 1997

a.  Au total, 39 enquêtes administratives ont été ordonnées par les autorités compétentes pour des actes potentiellement constitutifs de mauvais traitements infligés à des détenus.

b.  Deux de ces procédures administratives ont été ordonnées par la Direction nationale de l’administration pénitentiaire, neuf par la Direction régionale métropolitaine, six par la Direction régionale de Tarapacá, cinq par la Direction régionale d’Antofagasta, quatre par la Direction régionale de Valparaíso, trois par la Direction régionale de la région VI − Libertador Bernardo O’Higgins −, trois par la Direction régionale du Maule, une par la Direction régionale de l’Araucanía, trois par la Direction régionale de Los Lagos, deux par la Direction régionale d’Aysén del General Carlos Ibáñez del Campo, et une par la Direction régionale de la région VIII − Magallanes y Antártica Chilena.

c.  Dans quelques cas la responsabilité de l’administration a été établie et des mesures disciplinaires ont été prises; dans les autres il y a eu soit le non‑lieu soit l’acquittement.

d.  En termes statistiques, la situation au mois de février 1998 était la suivante: sur les 39 dossiers instruits au cours de la période, 4 étaient toujours en cours. Dans les 35 affaires closes à la date mentionnée, 59 fonctionnaires ont été mis en cause ou cités, et les mesures suivantes ont été décidées:

[1] On trouvera à l’annexe X le texte du Code d’éthique médicale.

[2] On trouvera un exemplaire de cette affiche en annexe (cote XI).

[3] En vertu de la loi 19535 du 24 novembre 1997.

Mesures adoptées

 

Révocation:

5 fonctionnaires

Amende:

20 fonctionnaires

Blâme:

5 fonctionnaires

Non-lieu:

24 fonctionnaires

Acquittement:

5 fonctionnaires.

 

e.  La plupart des enquêtes administratives portaient sur des faits de mauvais traitements physiques sur la personne de détenus, dont un cas de plainte pour viol et sévices sexuels sur une femme incarcérée dans l’établissement pour peine d’Iquique (l’une des affaires en cours au mois de février 1998).

Année 1998

a.  En 1998, un total de 20 enquêtes administratives ont été ouvertes pour des faits constitutifs d’abus de pourvoir de la part d’agents pénitentiaires envers des personnes placées sous leur garde (affaires de mauvais traitements physiques et psychiques, d’agression verbale et de harcèlement sexuel).

b.  Au mois de novembre 1999, 3 enquêtes étaient toujours en cours; les 17 autres, closes, avaient abouti à l’application des mesures suivantes:

Mesures appliquées

 

Amende:

6 fonctionnaires

Blâme:

2 fonctionnaires

Non-lieu:

9 fonctionnaires

Acquittement:

3 fonctionnaires.

Date de la décision

Région

Motif

Mesure disciplinaire

Date de la décision

État

02.02.98

I

Agression physique

Amende (5%)

14.05.99

Close

06.07.98

I

Agression physique

Non‑lieu

10.11.98

Close

22.10.98

I

Mauvais traitements physiques

 

 

En cours

07.04.98

V

Violence illégitime

Non‑lieu

08.06.98

Close

20.04.98

V

Agression physique

Acquittement

20.10.98

Close

21.04.98

V

Agression physique

Non‑lieu

10.08.98

Close

23.03.98

VI

Agression physique

Non‑lieu

05.05.98

Close

26.02.98

VIII

Irrégularités en matière de liberté conditionnelle

Non‑lieu

10.07.98

Close

06.04.98

VIII

Interruption d’une intervention chirurgicale

Amende (20%)

31.03.99

Close

17.07.98

VIII

Confiscation de la carte d’identité

Non‑lieu

01.07.99

Close

11.08.98

VIII

Agression verbale

Non‑lieu

15.03.99

Close

02.02.98

IX

Mauvais traitements psychiques

Amende (10%)

22.06.99

Close

14.02.98

R.M.

Mauvais traitements et brimades

 

 

En cours

09.04.98

R.M.

Pratiques lesbiennes

 

 

En cours

14.04.98

R.M.

Remise en liberté à mauvais escient

Blâme

08.07.98

Close

14.05.98

R.M.

Racket ( 325 dollars)

Amende (5%), amende (20%) et acquittement

01.04.99

Close

12.06.98

R.M.

Agression physique

Non‑lieu et acquittement

14.06.99

Close

04.08.98

R.M.

Racket (100 francs)

Blâme

17.12.98

Close

01.09.98

R.M.

Agressions physiques

Non‑lieu

22.01.99

Close

23.09.98

R.M.

Harcèlement sexuel

Amende (15%)

25.02.99

Close

 

Année 1999

a)               En 1999, un total de 21 enquêtes administratives ont été instruites pour des faits constitutifs d’abus de pouvoir de la part d’agents pénitentiaires envers des personnes placées sous leur garde (affaires d’agression et de mauvais traitements physiques et psychiques, de contraintes illégales, d’agression verbale et de harcèlement sexuel).

b)              Au mois de novembre 1999, 17 enquêtes étaient toujours en cours; les 4 autres, closes, avaient abouti à l’application des mesures suivantes:

Mesures appliquées

 

Amende:

1 fonctionnaire

Blâme:

2 fonctionnaires

Non-lieu:

1 fonctionnaire.

Date de la décision

Région

Motif

Mesure disciplinaire

Date de la décision

État

18.01.99

I

Agression physique

 

 

En cours

22.02.99

V

Tir de coups de feu avec arme de service

 

 

En cours

23.03.99

V

Agression physique

 

 

En cours

27.04.99

VIII

Mauvais traitements physiques

 

 

En cours

02.06.99

VIII

Décès d’un détenu

 

 

En cours

14.06.99

VIII

Agression verbale

 

 

En cours

14.07.99

VIII

Mauvais traitements, contraintes illégales

 

 

En cours

13.08.99

VIII

Contraintes illégales

 

 

En cours

06.07.99

IX

Décès d’un détenu mineur

 

 

En cours

01.03.99

X

Actes de sodomie

Non‑lieu

28.04.99

Close

07.05.99

X

Agression physique

Amende (15%)

18.08.99

Close

12.01.99

R.M.

Remise en liberté à mauvais escient

Blâme

08.06.99

Close

24.02.99

R.M.

Harcèlement sexuel

Blâme

16.07.99

En cours

18.03.99

R.M.

Agression physique

 

 

En cours

22.03.99

R.M.

Agression physique

 

 

En cours

21.04.99

R.M.

Refus d’autoriser le détenu à aller au centre de soins

 

 

En cours

25.05.99

R.M.

Peine éteinte depuis 11 mois

 

 

En cours

16.07.99

R.M.

Brimades et mauvais traitements psychiques

 

 

En cours

22.07.99

R.M.

Décès d’un détenu

 

 

En cours

24.08.99

R.M.

Agression physique

 

 

En cours

26.03.99

D.N.

Décès d’un détenu

 

 

En cours

26.03.99

D.N.

Décès d’un détenu

 

 

En cours

Carabiniers

99.          Le corps de police des carabiniers chiliens emploie environ 34 000 fonctionnaires qui, dans l’exercice de leurs fonctions, traitent plus de 75 000 affaires par mois en moyenne. Étant donné la nature de la fonction policière, leur intervention implique parfois l’usage de la force, et il arrive que leurs actes fassent l’objet de plaintes. Il est intéressant de relever qu’en l’an 2000 les carabiniers ont procédé, pour divers délits et infractions, à un total de 703 133 arrestations, qui ont donné lieu à 1 410 058 plaintes devant les tribunaux de justice. Il existe deux mécanismes d’enquête pour les abus de pouvoir ou les actes de violence imputés aux carabiniers, un externe et un interne. Ainsi, quiconque s’estime victime d’exactions policières peut porter plainte contre le corps des carabiniers, et la Direction des carabiniers elle‑même peut engager d’office une enquête sur tout comportement excessif ou violent dans l’exercice de leurs fonctions.

100.        Le Règlement du corps des carabiniers n o  15 relatif aux enquêtes administratives fixe les règles applicables et dispose en son article 2 que les parties à la procédure sont le personnel concerné et les personnes qui, en général sont à l’origine de l’enquête, qu’elle ait été déclenchée sur plainte ou de toute autre manière; il peut s’agir d’un rapport de police, de lettres de dénonciation, de procès‑verbaux de déposition, etc. (art. 22). L’article 3 du règlement énumère les officiers habilités à ordonner une information administrative; l’article 4 dispose que ceux qui n’ont pas cette faculté doivent, lorsqu’ils ont connaissance de faits susceptibles de donner lieu à une enquête, en référer dans les plus brefs délais à l’autorité hiérarchique. Parmi les motifs pouvant justifier une enquête figurent: la détermination du degré de responsabilité dans les fautes disciplinaires graves imputées au personnel, et «l’appréciation du point de vue administratif de la responsabilité des fonctionnaires de l’institution accusés d’actes délictueux, qu’elle relève de la compétence de la justice militaire ou ordinaire (art. 5, al.  c et  d ). Un procureur du corps des carabiniers mène l’instruction préparatoire, conformément à ce qui est indiqué dans différents articles du règlement.

101.        En outre, le Règlement disciplinaire n o  11 du corps des carabiniers dispose que les officiers de l’ordre et de la sécurité (art. 9) doivent, du fait de leurs fonctions et de leur mission, connaître des fautes commises par leurs subordonnés et prendre une décision suite à la constatation de la faute. Il y a faute disciplinaire «chaque fois que les attributions statutaires ont été outrepassées, à l’égard de subordonnés ou à l’égard du public, et chaque fois qu’est perpétré un acte susceptible d’être qualifié d’abus de fonction, à condition qu’il ne soit pas constitutif d’un délit» (art. 22, par. 5). Les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux membres du corps des carabiniers vont de l’avertissement à la révocation s’il s’agit d’officiers, et de l’avertissement à la rétrogradation pour mauvaise conduite s’il s’agit de personnel recruté par l’institution.

Procédures administratives ouvertes pour usage abusif de la force ou violences injustifiées à l’issue desquelles un certain degré de responsabilité administrative de la part de carabiniers a été établi

 

1998

1999

2000

2001 *

Enquêtes

69

111

132

91

Informations

10

12

9

1

* Premier semestre.

102.        Après avoir établi la responsabilité administrative d’un fonctionnaire dans des faits constituant un usage abusif de la force ou des violences injustifiées, la Direction des carabiniers adopte les mesures disciplinaires voulues conformément au Règlement disciplinaire n o  11.

Mesures disciplinaires imposées à des carabiniers pour usage abusif de la force ou violences injustifiées

 

1998

1999

2000

2001 *

Sanctions disciplinaires

99

97

55

42

Rétrogradation ou révocation

24

26

22

9

* Premier semestre.

Sûreté

103.        Toute personne en garde à vue ayant subi des mauvais traitements de la part d’agents de ce corps de police peut faire consigner une plainte à ce sujet dans la déclaration que la Sûreté elle‑même recueille. Le Département V (Affaires internes) procède à une enquête; il est en effet chargé de traiter les plaintes que les personnes en état d’arrestation ou la collectivité peuvent porter pour vices de procédure, manquements à l’éthique ou à la probité et atteintes aux droits de la personne imputés à des membres des services de police. Les plaintes peuvent déboucher sur une enquête administrative et, le cas échéant, sur une plainte pénale. En outre, lorsqu’il enquête sur ces affaires et apprécie les faits, le Département VII (Contrôle des procédures policières) a la possibilité d’ordonner l’ouverture d’une enquête administrative ou une procédure judiciaire s’il estime qu’un fonctionnaire a eu un comportement répréhensible.

Enquêtes administratives menées contre des fonctionnaires de la Sûreté pour violations présumées du droit à l’intégrité de la personne

              − Années 1995 à 1999

104.        Depuis 1995, l’organe d’enquête de la Sûreté a mené 20 enquêtes administratives dans tout le pays, comme suit:

              a)            En 1995, six enquêtes administratives ont été effectuées. Trois ont abouti à des sanctions contre six policiers, qui ont été mis aux arrêts pendant des durées variables: quatre jours pour un, trois jours pour deux, deux jours pour deux, et trois jours pour trois. Dans les trois dernières affaires, les inculpés ont bénéficié d’un non‑lieu car leur responsabilité administrative dans les faits qui leur étaient reprochés n’avait pas pu être établie.

              b)            En 1996, six enquêtes administratives ont été effectuées et se sont soldées par les mêmes chiffres que l’année précédente; trois des enquêtes ont abouti à la condamnation de six fonctionnaires qui ont été mis aux arrêts pendant dix jours pour l’un, huit jours pour un autre, trois jours pour un autre encore, deux jours pour deux d’entre eux, et un jour pour le dernier. Un fonctionnaire a été révoqué pour avoir enfreint la Loi organique et le Code de déontologie. Dans les trois autres affaires, les inculpés ont bénéficié d’un non‑lieu car leur responsabilité administrative dans les faits qui leur étaient reprochés n’avait pas pu être établie.

              c)            En 1997, une enquête administrative a été réalisée, au terme de laquelle quatre fonctionnaires se sont vu signifier un avertissement simple.

              d)            En 1998, une enquête administrative a été réalisée, au terme de laquelle quatre fonctionnaires ont été contraints, par le Conseil supérieur d’éthique de la police, de prendre leur retraite.

              e)            Les deux enquêtes ouvertes en 1999 suivent leur cours. Toutefois, l’un des quatre fonctionnaires mis en cause a quitté volontairement l’institution pour prendre sa retraite.

Année 2000

Aucune enquête administrative n’a été effectuée.

105.     En ce qui concerne les actes de torture, les autorités judiciaires compétentes pour instruire les plaintes sont:

              a)            Les juridictions criminelles ordinaires dans le cas des délits de torture, de contraintes illégales ou de coups et blessures volontaires (art. 150, 150-A, 150-B et 255 du Code pénal) (voir par. 55 et 56 et par. 116) commis par des agents de l’administration pénitentiaire ou de la Sûreté. Les décisions de ces tribunaux sont réexaminées en deuxième instance par les cours d’appel;

              b)            Les tribunaux militaires pour les violences injustifiées sanctionnées par l’article 330 du Code de justice militaire, commises par des membres du corps des carabiniers (voir par. 57). Les recours contre les jugements de ces tribunaux sont portés devant la Cour martiale.

Administration pénitentiaire

Poursuites judiciaires engagées contre des agents de l’administration pénitentiaire pour des délits de contraintes illégitimes ou de coups et blessures volontaires commis sur la personne de détenus (situation en octobre 2000)

106.        Entre 1995 et 2000, 11 procédures judiciaires ont été engagées dans différentes régions du pays contre des membres du personnel pénitentiaire, comme il est indiqué ci-après:

Région

Délit

Issue de la procédure

I

−      Mauvais traitements physiques sur la personne d’un détenu
−      Mauvais traitements physiques sur la personne d’un mineur
−      Viol d’une détenue
−      Agression d’un détenu
−      Non-lieu
−      Condamnation à 61 jours d’emprisonnement de police avec sursis
−      Non-lieu
−      Non-lieu

II

Contraintes illégales

−      Condamnation d’une surveillante à 61 jours d’exclusion temporaire de fonctions et à une amende de 5 unités fiscales mensuelles *

III

Coups et blessures volontaires

−      Affaire en cours

IV

Néant

 

V

Néant

 

VI

Contraintes illégales

−      Affaire en cours

VII

−      Coups et blessures volontaires
−      Coups et blessures volontaires
−      Acquittement
−      Classement sans suite

VIII

Homicide et coups et blessures volontaires (au cours d’une tentative de fuite)

−      Affaire en cours. Six inculpations

IX

Néant

 

X

Coups et blessures volontaires

−      Condamnation en première instance à 541 jours d’emprisonnement de police avec sursis. Actuellement en appel

XI

Néant

 

XII

Néant

 

Métro-politaine

Néant

 

* Unité de compte indexée.

107.        Deux de ces affaires se sont soldées par une condamnation: 61 jours d’emprisonnement de police avec sursis contre un agent pénitentiaire pour mauvais traitements physiques sur la personne d’un mineur (région I) et 61 jours d’exclusion temporaire de fonctions et une amende infligés à une agent pénitentiaire pour contraintes illégales (région II). Dans deux affaires de coups et blessures volontaires les inculpés ont été acquittés (région VII). Dans trois affaires concernant des mauvais traitements physiques sur la personne d’un détenu, des mauvais traitements physiques sur la personne d’un mineur et l’agression d’un détenu un non‑lieu a été prononcé (région I). Quatre affaires étaient toujours en cours au mois d’octobre de l’année 2000, pour des délits de coups et blessures volontaires (région III), de contraintes illégales (région VI), d’homicide et de coups et blessures volontaires au cours d’une tentative de fuite (région VIII) (six inculpations) et de coups et blessures volontaires (région X). Dans le dernier cas, les auteurs de ces actes ont déjà été condamnés en première instance à 541 jours d’emprisonnement de police avec sursis.

Carabiniers

108.        Au sein de la juridiction militaire, c’est aux représentants des parquets militaires (armée de terre, carabiniers, marine et armée de l’air) qu’il appartient d’exercer en première instance l’action publique en menant l’instruction (art. 25 du Code de justice militaire). Aux fins de l’application du Code de justice militaire, on entend par militaires «les personnes visées par les lois relatives aux effectifs militaires (armée de terre, marine, armée de l’air et carabiniers)». Les jugements définitifs rendus en première instance sont prononcés par les juges de chaque corps d’armée (juges de l’armée de terre, de la marine et de l’armée de l’air) et réexaminés − comme il a déjà été indiqué − par les cours martiales, siégeant en tant que tribunaux de deuxième instance, par la procédure d’appel ou la procédure de réexamen automatique.

Poursuites judiciaires engagées par les parquets militaires de la région métropolitaine contre des agents du corps des carabiniers pour le délit de violences injustifiées commis sur des personnes en état d’arrestation (situation au mois de septembre 2000)

Région métropolitaine

1 er parquet militaire

Année

Nombre d’affaires

Instruction

Jugement rendu

Non-lieu

Inculpation

Condamnation

1998

12

2

4

5

7

1

1999

1

0

0

1

4

0

2000

14

13

1

0

0

0

    Total

27

15

5

6

11

1

2 ème parquet militaire

1998

19

11

5

3

6

0

1999

26

24

2

0

2

0

2000

15

14

1

0

0

0

    Total

60

49

8

3

8

0

4 ème parquet militaire

1997

20

10

5

5

3

0

1998

27

20

5

2

2

0

1999

32

29

3

0

2

0

2000

6

6

0

0

0

0

    Total

85

65

13

7

7

0

6 ème parquet militaire

1998

27

7

18

2

0

0

1999

26

18

6

0

0

2

2000

14

14

0

0

0

0

    Total

61

39

24

2

0

2

Sûreté (Investigaciones)

Poursuites judiciaires engagées contre des agents de la police de la Sûreté ( Investigaciones ) pour contraintes illégales infligées à des personnes en état d’arrestation (situation au mois de décembre 2001)

109.        On trouvera ci-après la liste des poursuites judiciaires engagées dans tout le pays depuis 1996:

Années 1996-1997

a.  Juridiction criminelle de Maipo-Buin (région métropolitaine). Procédure engagée contre deux agents pour contraintes illégales. Instruction en cours, avec inculpation. Les inculpés sont à la retraite.

b.  Juridiction criminelle de La Ligua (région V). Procédure engagée contre un agent pour contraintes illégales. Par une ordonnance rendue en septembre 1999, le juge a décidé de ne pas renvoyer l’intéressé devant la juridiction de jugement. Un non-lieu a été prononcé, conformément à l’article 409 n o  1 du Code de procédure pénale, ce qui a mis fin à l’affaire.

c.  Troisième juridiction pénale de Coquimbo (région IV). Une procédure pour contraintes illégales avait été engagée contre quatre agents mais le non‑lieu a été prononcé, ce qui a mis fin à l’affaire.

d.  Huitième juridiction criminelle de San Miguel (région métropolitaine). Procédure engagée contre un agent de police pour contraintes illégales. Le prévenu a été condamné en première instance à une peine de 540 jours d’emprisonnement avec sursis conditionnel à l’exécution de la peine. Le condamné a fait appel, et la cour d’appel de San Miguel se trouve actuellement saisie.

e.  Quinzième juridiction criminelle de Santiago (région métropolitaine). La procédure pour contraintes illégales engagée contre 11 agents a été classée sans suite.

f.  Neuvième juridiction criminelle de San Miguel (région métropolitaine). Une procédure pour contraintes illégales a été engagée contre un agent, qui n’a pas été inculpé.

Années 1998-1999

              Des agents de la Sûreté étaient soupçonnés pour violation du droit à l’intégrité physique des personnes en état d’arrestation dans trois affaires. L’instruction n’a abouti à aucune inculpation

Article 13

110.        Les tribunaux sont l’autorité compétente pour recevoir les plaintes pour violation des droits de l’individu. Au cours des années couvertes par le présent rapport, les tribunaux de justice ont engagé, d’office ou sur dénonciation ou plainte 18 , les procédures relatives à des actes présumés de torture, conformément aux dispositions régissant la qualification et la peine. Dans les paragraphes 97 à 110 figurent des statistiques sur les poursuites judiciaires engagées contre des agents de l’administration pénitentiaire, de la Sûreté et du corps des carabiniers pour contraintes illégales et violences injustifiées.

111.        Les paragraphes 105 à 109 ci-dessus indiquent quelles sont les autorités compétentes pour mener des enquêtes internes de nature administrative au sein de la Sûreté, des carabiniers et de l’administration pénitentiaire, et pour tenir des statistiques sur le sujet.

Mesures prises pour assurer la protection de la victime et des témoins contre tout mauvais traitement ou tout acte d’intimidation

112.        Ce sont les dispositions générales du Code de procédure pénale qui s’appliquent; elles prévoient, en faveur des victimes d’un délit, que la liberté provisoire de l’auteur présumé de l’infraction pourra être refusée, entre autres raisons s’il présente un danger pour la «sécurité de la victime». Pour protéger les témoins, la réforme du Code de procédure pénale 19 de 1991 permet de préserver leur anonymat pendant toute la période couverte par le secret de l’instruction ou, en cas d’infraction grave et qualifiée, d’ordonner, pour une durée raisonnable fixée par le juge, des mesures spéciales propres à assurer leur sécurité, celles-ci pouvant être renouvelées autant de fois que nécessaire. Dans le même but le recours constitutionnel en protection est ouvert et la cour d’appel saisie est tenue d’ordonner les mesures qu’elle estime nécessaires pour assurer la protection de l’intéressé.

Article 14

113.        Comme il était indiqué dans le deuxième rapport , le Ministère de la santé a mis en place en 1991 le Programme de prise en charge médicale complète des victimes des violations des droits de l’homme perpétrées sous le régime militaire. Le Programme, créé comme suite aux recommandations formulées dans son rapport par la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, offre, par le biais des services publics de santé, une prise en charge physique et psychologique des parents de détenus-disparus et de personnes exécutées, ainsi que des victimes de torture et des exilés. Le nombre d’équipes travaillant dans le cadre de ce Programme est passé de 7 lors de sa création à 12, sans compter l’équipe d’accueil de Punta Arenas. Actuellement, ces équipes fonctionnent dans tout le pays, intégrées pour la plupart aux unités de santé mentale des services de santé. En 1997 s’est créée la «Corporation métropolitaine des bénéficiaires du Programme» qui regroupe les bénéficiaires de la capitale voulant faire valoir leurs préoccupations et leurs intérêts auprès des autorités et leur démontrer la nécessité de maintenir le Programme. Le Sous-Secrétaire à la santé a répondu qu’il convenait «de procéder à une évaluation de la mise en œuvre du Programme dans les 13 services de santé concernés» et «de prolonger la validité de ses dispositions pour une durée indéterminée», affirmant «la volonté politique du Ministère de le voir se poursuivre» 20 . Selon les chiffres fournis par le Programme de prise en charge, le nombre de bénéficiaires inscrits au niveau national au 31 mai 1999 s’élevait à 31 102, dont 12 630 personnes directement lésées ou parents directs de la victime de ces violations des droits de l’homme. En 2000 ont été établies les règles de la «Prise en charge des bénéficiaires», document qui a permis de renforcer les équipes existantes et d’encourager les services de santé à dispenser des soins de santé mentale aux bénéficiaires inscrits et de doter les équipes d’accueil de deux responsables chargés de l’inscription et de la prise en charge des bénéficiaires.

18 Dénonce un délit celui qui porte à la connaissance de la justice ou de ses agents non seulement l’acte qui le constitue mais aussi, généralement, le nom de l’auteur de l’infraction et les renseignements permettant de l’identifier, non pas pour être partie au procès, mais pour informer le tribunal afin que ce dernier ouvre la procédure voulue (art. 82 du Code de procédure pénale). En portant plainte, la personne apte à comparaître elle-même devant la justice met en mouvement l’action publique, devient partie au procès pénal et peut intervenir en tant que telle à tous les stades de la procédure (art. 93 du Code).

19 Loi n o  19077 de 1991.

20 Note ministérielle n o 4/C n o 6072, du 22 décembre 1998.

 

Nombre de bénéficiaires inscrits et acceptés dans tout le pays au titre
du Programme de prise en charge pour les années 2000 et 2001

Équipes

Population 2000

Population 2001

Iquique

1 015

1 102

Antofogasta

1 696

2 508

Coquimbo

2 953

3 441

Valparaíso

3 223

3 349

Région métropolitaine (sud‑est)

4 036

5 572

Région métropolitaine (ouest)

4 487

4 919

Région métropolitaine (sud)

10 710

12 492

Maule

5 092

6 756

Concepción

6 980

8 444

Araucanía Sur

2 764

3 310

Osorno

724

1 008

Llanchipall

1 052

1 605

              Total

44 732

54 506

 

Tableau comparatif 1999/2000 du nombre de nouvelles entrées dans
le Programme de prise en charge à travers le pays

Équipes

Nouvelles admissions 1999

Nouvelles admissions 2000

Pourcentage d’augmentation

Iquique

11

32

191 %

Antofogasta

23

468

1 935 %

Coquimbo

108

158

46 %

Valparaíso

74

207

180 %

Région métropolitaine (sud‑est)

315

591

88 %

Région métropolitaine (ouest)

577

2 834

391 %

Région métropolitaine (sud)

295

783

165 %

Maule

365

255

-30 %

Concepción

331

661

100 %

Araucanía Sur

419

843

101 %

Osorno

51

136

167 %

Llanchipal

223

210

-6 %

              Total

2 781

7 146

157 %

 

Nombre de prises en charges en santé mentale spécialisée au cours
des premiers trimestres 2000 et 2001

Équipes

Nombre de prises en charge, premier trimestre 2000

Nombre de prises en charge, premier trimestre 2001

Pourcentage d’augmentation

Iquique

109

324

197 %

Antofogasta

122

104

-15 %

Coquimbo

278

174

-37 %

Valparaíso

201

345

72%

Région métropolitaine (sud‑est)

492

825

68 %

Région métropolitaine (ouest)

1 091

1 213

11 %

Région métropolitaine (sud)

1 259

1 259

0 %

Maule

416

909

119 %

Concepción

497

700

41 %

Araucanía Sur

686

913

33 %

Osorno

459

415

-10 %

Llanchipal

352

448

27 %

              Total

5 962

7 629

28 %

 

114.        Le système juridique chilien garantit, dans ses règles et principes généraux, le droit des victimes de la torture à être indemnisées équitablement et de manière adéquate. Toute infraction donne lieu à une action pénale, qui vise à enquêter sur les actes répréhensibles et à punir leurs auteurs, et à une action civile en réparation des effets civils de l’infraction. L’action civile peut avoir notamment pour objet l’indemnisation des préjudices causés. Selon l’article 10 du Code de procédure pénale, elle peut s’inscrire dans la procédure pénale. Conformément aux règles générales du droit chilien, toute victime de torture, ainsi que certains parents et héritiers d’une personne décédée des suites de tortures, peut exercer l’action civile et demander l’indemnisation des préjudices correspondante 21 .

Article 15

115.        Conformément à la réforme apportée par la loi n o  19567, du 1 er juillet 1998, au Code de procédure pénale il est désormais prévu (art. 284) que les déclarations faites par un détenu dans des circonstances violant les obligations des agents responsables de la détention sont nulles. Parmi ces obligations figure notamment celle de ne pas soumettre la personne arrêtée à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. D’autres dispositions de ce texte portent également sur ce point. L’article 481, relatif à la valeur de l’aveu en tant qu’élément de preuve, dispose que les aveux doivent être faits en toute liberté et en toute conscience. L’article 483 établit la possibilité pour l’inculpé de se rétracter s’il démontre sans équivoque qu’il s’est trompé ou que ses aveux ont été obtenus sous la contrainte ou dans des circonstances où il ne disposait pas de toutes ses facultés mentales. Le deuxième paragraphe de l’article 323, ajouté par la loi n o  19047 de février 1991, fait au juge obligation de procéder à des vérifications afin d’établir que les aveux n’ont pas été obtenus sous la torture ou sous la menace, ce qui est conforme aux dispositions du premier paragraphe, qui interdit de manière absolue le recours à la contrainte ou à la menace aux fins de la manifestation de la vérité. Toute négligence du juge, qui faillit à son obligation de protection, est considérée comme un «manquement grave» et est donc passible de la peine prévue à l’article 324 du Code de l’organisation judiciaire 22 .

Article 16

•  La réforme apportée par la loi n o  19567 [voir par. 55 a)] n’a pas modifié le texte de l’article 150 du Code pénal, qui punit de peines allant de 61 jours à 5 ans d’emprisonnement ou de réclusion criminelle quiconque ordonne ou prolonge indûment la détention au secret d’une personne privée de liberté, fait usage envers elle d’une sévérité injustifiée, ou la fait détenir arbitrairement en d’autres lieux que ceux prévus par la loi. Ainsi, certaines formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas constitutifs de torture sont prévues et réprimées par l’ancien article 150 du Code pénal. Outre le nouvel article 150‑A, qui punit de façon spécifique le délit de torture, cette réforme a ajouté au Code pénal un article (150‑B), qui applicable aux particuliers − non agents de l’État − auteurs des infractions visées à l’article 150 [voir par. 55b)]. Enfin, en vertu de l’article 255 du Code pénal, l’agent de l’État qui, en service, se livre à des brimades ou à des contraintes illégitimes ou injustifiées est passible de révocation et d’amende.

117.        Le Chili est partie à d’autres instruments internationaux interdisant les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants: le Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques (art. 7), la Convention américaine de 1969 relative aux droits de l’homme («Pacte de San José de Costa Rica») (art. 5) et la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture de 1985 (art. 6) dont l’article 13 contient des dispositions ayant trait à l’extradition et à l’expulsion.

III.   DEUXIÈME PARTIE: COMPLÉMENT D’INFORMATION
DEMANDÉ PAR LE COMITÉ LORS DE L’EXAMEN
DU RAPPORT PRÉCÉDENT

118.        Lors de l’examen du deuxième rapport périodique du Chili, le 8 novembre 1994 (voir CAT/C/SR.191), les membres du Comité ont traité diverses questions concernant la pratique de la torture au Chili. Le présent rapport répond en grande partie aux préoccupations exprimées, en particulier pour ce qui est des éléments suivants:

•  Les réformes législatives apportées depuis 1989 à la Constitution et à la législation notamment au Code de procédure pénale, dans le but de prévenir la torture. Il existe désormais des règles qui ont renforcé les garanties offertes pendant les premières heures de détention, supprimé l’arrestation sur simple soupçon et réduit le délai de garde à vue. L’entrée en vigueur du nouveau Code de procédure pénale, qui transforme entièrement la procédure d’enquête sur le délit de sorte que les droits de la personne sont garantis (par. 27 à 32), a définitivement consacré cette évolution;
•  La place de la Convention dans l’ordre juridique interne et la jurisprudence (par. 3);
•  Le changement du ministère de tutelle pour la police civile et la police en uniforme (par. 8 et 9);
•  La qualification du délit de torture conformément à la définition figurant dans la Convention (par. 50 et 51);
•  Le maintien dans le Code de justice militaire des dispositions relatives au «devoir d’obéissance» (par. 46);
•  L’abolition de la peine de mort (par. 28);
•  La formation aux droits de l’homme dispensée aux agents de l’État ayant la charge de personnes arrêtées et détenues (par. 70 à 80);
•  La prise en charge médicale des détenus (par. 29 et 32);
•  Les garanties offertes durant les premières heures de la détention (par. 34 à 37);
•  L’établissement de la responsabilité des médecins en cas d’actes de torture (par. 81).

IV.   TROISIÈME PARTIE: SUITE DONNÉE AUX CONCLUSIONS
ET RECOMMANDATIONS DU COMITÉ

119.        Les changements intervenus avec l’entrée en vigueur du nouveau Code de procédure pénale, au mois d’octobre 2000, et de la loi n o  19567 du 11 juillet 1998 (voir par. 16, 20 et 21, 30 à 37, 54 et 55) répondent à la première et à la quatrième recommandation formulées par le Comité contre la torture, à l’issue de l’examen du deuxième rapport périodique du Chili sur la mise en œuvre de la Convention (CAT/C/20/Add.3), auquel il a procédé à ses 191 e et 192 e  séances, le 8 novembre 1994 (CAT/C/SR.191 et SR.192).

21 On citera par exemple: a) l’indemnisation de 215 millions de pesos chiliens que l’État devra verser, par décision de justice, à M me  Carmen Gloria Quintana pour les brûlures que lui a infligées le capitaine de l’Armée de terre Fernández Dittus le 2 juillet 1986; b) l’indemnisation de 264 millions de pesos chiliens que l’État a versée, par décision de justice, aux cinq enfants de M. Mario Gilberto Fernández López, décédé des suites des tortures qui lui ont été infligées par des agents de l’État, le 18 octobre 1984.

22 Statuant sur un appel formé contre un jugement prononcé par une juridiction pénale, la cour d’appel de Santiago a décidé, le 11 avril 1995, de considérer comme irrecevable une déclaration extrajudiciaire de l’inculpé confirmant sa participation à l’infraction qui avait vraisemblablement été obtenue dans le cadre de contraintes illégitimes. Dans son arrêt, la cour relève que l’interdiction de pareille pratique est prévue dans les instruments internationaux, tels que la Convention américaine relative aux droits de l’homme («Pacte de San José de Costa Rica») et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques − qui s’appliquent en droit chilien en vertu de l’article 5, par. 2, de la Constitution et sont contraignants pour les juges − et est un élément du droit à une procédure pénale juste et équitable.



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