University of Minnesota


Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Chili, CAT/C/20/Add.3 (1994).


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Deuxièmes rapports périodiques devant être soumis en 1993

Additif

/ Pour le rapport initial présenté par le Chili, voir le document CAT/C/7/Add.2; pour son examen par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.40 et 41 et les Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-cinquième session, Supplément No 44 (A/45/44), par. 341 à 375. Pour les renseignements complémentaires communiqués par le Gouvernement chilien, voir le document CAT/C/7/Add.9; pour son examen par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.77 et 78 et les Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-sixième session, Supplément No 46 (A/46/46), par. 237 à 262./

[16 février 1994]

INTRODUCTION

1. Le premier rapport du Gouvernement chilien a été soumis au Comité contre la torture par le régime militaire, en 1989 (CAT/C/7/Add.2). Estimant qu'il souffrait de graves lacunes, le Comité a demandé aux autorités chiliennes de lui soumettre l'année suivante un rapport complémentaire (par. 375 du rapport annuel du Comité, Supplément No 44 (A/45/44)). C'est donc au gouvernement actuel qu'il revient de soumettre le rapport complémentaire (CAT/C/7/Add.9).

2. Après la présentation de son rapport complémentaire, le Gouvernement chilien a adopté des lois d'une importance considérable qui ont apporté aux procédures d'arrestation des réformes très efficaces pour empêcher et sanctionner la pratique de la torture, raison pour laquelle un additif au rapport complémentaire susmentionné a été présenté. A la sixième session du Comité contre la torture, en avril 1991, le représentant de l'actuel Gouvernement chilien a fait un exposé oral résumant la teneur du rapport complémentaire et de son additif (CAT/C/SR.77 et 78).

3. D'après les directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les Etats parties doivent présenter en application du paragraphe 1 de l'article 19 de la Convention (CAT/C/14), les rapports doivent comporter deux parties, la deuxième apportant le complément d'information demandé par le Comité lors de l'examen du rapport précédent de l'Etat partie. Le Chili s'est acquitté de cette obligation avec la présentation du rapport complémentaire et de l'additif, et avec l'exposé oral du représentant, cités au paragraphe précédent.

4. Compte tenu de ce qui précède, le présent rapport complémentaire donne les renseignements qui doivent faire l'objet de la première partie, c'est-à-dire tous les renseignements concernant les nouvelles mesures et les faits nouveaux liés à l'application de la Convention au Chili depuis 1991.


I. CADRE JURIDIQUE ET POLITIQUE

5. Après avoir été élu par la voie démocratique en décembre 1989, le président Aylwin a assumé la direction du pays le 11 mars 1990 et a institué officiellement le Parlement, ce qui a permis de renouer avec la tradition institutionnelle démocratique chilienne, interrompue par le régime militaire. A partir de cette date, le Chili a connu une période de fonctionnement normal de l'Etat de droit, tous les organes de l'Etat, les forces armées, la police, les partis politiques, les organisations syndicales et sociales agissant dans le cadre des attributions qui leur sont propres, conformément à la loi et à la Constitution. Il faut souligner que le gouvernement n'a proclamé aucun état d'exception et que, par conséquent, les droits et libertés garantis à tous par la Constitution n'ont subi aucune restriction.

6. L' habeas corpus est à nouveau parfaitement appliqué. La cessation d'un régime d'états d'exception permanents, cadre institutionnel qui avait permis la torture sous le gouvernement précédent, a conduit à un changement d'attitude de la part des tribunaux de justice qui s'acquittent bien désormais de leur obligation de surveiller la légalité des arrestations en appliquant la procédure d' habeas corpus . Il en est pour preuve, par exemple, des arrêts de la Cour martiale faisant droit à de tels recours pour rectifier des

irrégularités commises lors d'arrestations / Recours en amparo No 215-92, du 1er avril 1992, formé devant la Cour martiale au nom de Mirentchu Vivanco Figueroa : la Cour a ordonné à la police de permettre à la détenue de communiquer avec son avocat, comme elle en a le droit en application de l'article 293 du Code de procédure pénale./ et pour ordonner aux fonctionnaires de police et aux juridictions militaires de rectifier les erreurs de procédure commises lors des arrestations / Recours en amparo No 465-92, du 15 juillet 1992, formé devant la Cour martiale au nom d'Alejandro Rodríguez Escobar et de Cristián Gonzalez López; la Cour a ordonné au tribunal militaire et à la police des carabiniers de ne pas prolonger la durée de la détention au-delà du délai prescrit à l'article 272 bis du Code de procédure pénale./.

7. Ce retour à la normale de la situation politique et juridique a transformé la situation des droits et des libertés fondamentaux dans le pays par rapport à la période allant de 1973 à 1990. Le gouvernement démocratique a mis fin à ce que la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, ayant achevé son enquête, a qualifié de situation de violation systématique des droits de l'homme de la part du régime militaire / La Commission nationale pour la vérité et la réconciliation a été créée par décret suprême du Ministère de l'intérieur le 25 avril 1990, afin de faire toute la lumière sur la situation des détenus disparus, exécutés et torturés à mort, dans les cas où la responsabilité de l'Etat semblait engagée du fait d'actes de ses agents ou commettants, ainsi que d'établir la vérité sur les enlèvements et les atteintes à la vie commis par des particuliers sous des prétextes politiques, pendant le régime militaire. Elle a rendu son rapport en février 1991./. Pour reprendre les termes de la Commission dans son rapport, pendant cette période, "... les actes de torture ont été quotidiens ... dans des lieux de détention secrets de la DINA et d'autres services du renseignement, les mauvais traitements et les tortures ont été pratiqués systématiquement ..." et "... étant donné le nombre incalculable de cas et leur similitude, il existait une réalité de la torture incontestable ..." / Rapport de la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, vol. 1, troisième partie, chap. I, A, d) et chap. II, A, g)./.


II. APPLICATION DE LA CONVENTION DANS LE DROIT INTERNE

8. La Convention a été incorporée officiellement au droit interne chilien sous le régime militaire, mais avec un certain nombre de réserves qui allaient à l'encontre de ses buts et objectifs. C'est pourquoi, dès qu'il est entré en fonction, le gouvernement constitutionnel les a retirées. Actuellement, la Convention est pleinement en vigueur au Chili.

9. En cas de conflit entre les dispositions de la législation intérieure et celles de la Convention, c'est cette dernière qui prévaut, conformément à la réforme constitutionnelle adoptée le 30 juillet 1989, qui a porté modification de la hiérarchie des lois pour ce qui est des instruments relatifs aux droits de l'homme, lesquels ont désormais rang constitutionnel; ainsi, l'article 5 de la Charte fondamentale stipule : "Les organes de l'Etat ont l'obligation de respecter et de promouvoir les droits consacrés dans la présente Constitution, ainsi que dans les traités internationaux ratifiés par le Chili et en vigueur".

10. Eu égard à la place occupée par les dispositions de la Convention depuis qu'elles ont été incorporées au droit interne, des règles comme celles du paragraphe 2 de son article 5 auraient un caractère exécutoire et il serait possible de juger au Chili les auteurs présumés d'actes de torture commis à l'étranger sans qu'il soit nécessaire de disposer d'une disposition expresse dans la législation nationale.


III. DEFINITION ET REPRESSION DE LA TORTURE DANS LE DROIT INTERNE

11. Comme on l'a signalé dans les rapports précédents, l'interdiction de toute contrainte illégale est consacrée au paragraphe 1, alinéa 4 de l'article 19 de la Constitution politique de l'Etat. La torture est définie à l'article 150 du Code pénal qui, dans le chapitre intitulé "Des crimes et simples délits qui portent atteinte aux droits garantis par la Constitution", se réfère aux fonctionnaires qui "font subir des souffrances ou appliquent un traitement inutilement sévère" et prévoit à leur encontre des peines d'emprisonnement allant de 61 jours à cinq ans.

12. Par ailleurs, l'article 330 du Code de justice militaire prévoit des peines allant de 41 jours, si la victime n'a pas subi de blessures ou si les blessures sont légères, à 15 ans en cas de décès de la victime, à l'encontre du militaire qui emploie ou fait employer des violences inutiles.

13. La loi portant organisation de la Sûreté chilienne (D.L. No 2 460) interdit (chap. IV, art. 19) "aux agents de la Sûreté chilienne d'accomplir tout acte de violence en vue d'obtenir des déclarations de la part de la personne arrêtée". Les peines encourues varient selon la même échelle que celles qui sont fixées à l'article du Code de justice militaire cité plus haut.


IV. MESURES QUI CONCERNENT L'APPLICATION DE LA CONVENTION
À PARTIR DE L'ANNEE 1991


A. Mesures d'ordre législatif

14. Dans le domaine des droits de l'homme, le gouvernement actuel a lancé un certain nombre d'initiatives visant à résoudre les problèmes hérités du régime militaire, et a pris des mesures visant à garantir le plein respect des droits fondamentaux et à empêcher leur violation, par le biais de réformes législatives.

1. Retrait des réserves (par. 3 de l'article 2 et art. 3 et 20 de la Convention)

15. Dans le souci évident d'en finir avec la torture, le gouvernement a déposé en septembre 1991, auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, l'instrument de retrait des réserves formulées à la Convention. En août 1990, il avait déposé un instrument équivalent auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Etats américains en vue de retirer les réserves émises à la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture. Les réserves avaient été formulées par le gouvernement militaire au moment de la ratification de la Convention dont elles dénaturaient l'application. Le gouvernement actuel a retiré : a) la réserve relative au paragraphe 3 de l'article 2 de la Convention, qui rendait inapplicable le principe de l'obéissance réfléchie en exonérant de sa responsabilité pénale le subordonné ayant commis un acte de torture sur ordre de son supérieur, lequel maintenait ledit ordre malgré ses objections; b) la réserve selon laquelle l'article 3 de la Convention n'était pas applicable.

16. En même temps, le gouvernement a déposé auprès du Secrétaire général l'instrument par lequel le Chili reconnaissait la compétence du Comité contre la torture, conformément à l'article 20 de la Convention.

17. Le Gouvernement chilien n'a maintenu que les réserves portant sur l'article 30 de la Convention et la réserve selon laquelle la Convention interaméricaine prime la Convention des Nations Unies en cas d'incompatibilité entre les deux, dans les relations du Chili avec les pays américains.

2. Réformes de procédure (par. 1 de l'article 2 de la Convention)

Loi No 19 047 du 14 février 1991, portant modification des articles 272 bis, 293, 299, 303 et 323 du Code de procédure pénale

18. Le Comité a été informé en détail des réformes de nature à favoriser la prévention de la torture avec l'additif au rapport complémentaire et l'exposé oral du représentant du gouvernement. Il faut souligner en particulier les réformes de procédure visant à protéger l'intégrité physique et psychique des individus par les moyens suivants : examen médical obligatoire de la personne arrêtée pendant les périodes de détention exceptionnelles (art. 272 bis ); interdiction de prolonger la durée de la détention au secret au-delà des délais fixés par la loi (art. 299); atténuation de la rigueur de la détention au secret en permettant la présence d'un avocat quand la personne arrêtée se trouve à la disposition de la police ou du juge (art. 293 et 303); obligation faite au juge de prendre des mesures pour s'assurer que des aveux éventuels n'ont pas été obtenus sous la torture ou sous la menace de tortures (art. 323).

19. Des dispositions transitoires de la loi No 19 047 ont réglé le transfert aux tribunaux civils de nombreuses affaires qui étaient de la compétence de la justice militaire. Comme il était probable que les procès de civils avaient été fondés sur des aveux obtenus sous la contrainte, en dehors de toute procédure judiciaire, le législateur a établi le droit pour le condamné de retirer les aveux qu'il avait faits devant le tribunal militaire, le juge civil étant tenu de considérer la rétractation comme s'il s'agissait de la première déclaration de l'inculpé au sujet de sa participation dans les faits sur lesquels portait l'enquête judiciaire (Convention, art. 15).

3. Adoption du Règlement des établissements pénitentiaires (art. 2 et par. 2 de l'article 10 de la Convention)

Décret du Ministre de la justice No 1771, du 30 décembre 1992

20. Ce règlement reprend dans un même texte différentes dispositions qui avaient été adoptées de façon isolée pour améliorer le système pénitentiaire. Il établit les principes et les règles que les gardiens de prison du Chili doivent respecter dans l'administration des établissements pénitentiaires, le mode de fonctionnement de ces établissements, les droits et les obligations des détenus, les méthodes de réinsertion sociale qui doivent être appliquées aux condamnés.

21. Dans ses considérants, le règlement indique expressément que "la politique du gouvernement est d'obtenir de façon efficace la réinsertion du condamné en respectant ses droits fondamentaux, afin de prévenir la récidive" et que "le gouvernement actuel a pour objectif de mettre en oeuvre une politique conforme aux orientations modernes de l'administration pénitentiaire et aux traités internationaux que le Chili a ratifiés".

22. Il est stipulé à l'article 5 : "Les règles fixées dans le présent Règlement doivent être appliquées de façon impartiale sans qu'il puisse exister de différences de traitement fondées sur la naissance, la race, l'opinion politique, la croyance religieuse, le statut social ou toute autre situation. L'administration pénitentiaire s'efforcera de garantir le plein respect du plus grand nombre possible de droits fondamentaux, compte tenu du statut de détenu".

23. Ce règlement dispose en son article 6 : "Il est interdit de soumettre les détenus à des tortures, à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, en paroles ou en actes et il ne sera pas fait usage d'une sévérité injustifiée dans l'application des dispositions du présent règlement". En vertu des articles 69 et 70, les fautes disciplinaires commises par les gardiens de prison, susceptibles de constituer des infractions, ainsi que l'imposition "de châtiments autres que ceux qui sont prévus dans la loi ou de la part d'autres agents que ceux qui sont habilités par le présent règlement à les appliquer" sont punies d'une peine administrative, sans préjudice de la responsabilité pénale qui peut être encourue.

24. Pour compléter la récente réforme de la loi No 19 047 qui a consacré le droit du détenu de communiquer avec son avocat en présence du juge alors qu'il se trouve au secret, le règlement stipule en son article 41 : "Les communications avec l'avocat de la défense ne peuvent être suspendues en aucune circonstance. En cas de mise au secret sur décision judiciaire, les communications avec l'avocat auront lieu conformément aux dispositions de l'article 303 du Code de procédure pénale.

4. Le délit de torture dans les traités d'extradition (art. 8, par. 1 de la Convention)

25. Dans les traités d'extradition qu'il conclut avec d'autres Etats, le Chili fait toujours figurer une disposition générale indiquant que l'extradition pourrait être demandée dans les cas d'actes "qualifiés de délits dans les conventions multilatérales auxquelles les deux pays sont parties" / Citons par exemple l'article 3 (par. 1) de l'accord d'extradition signé le 28 décembre 1993 avec le Nicaragua et l'accord d'extradition avec l'Espagne qui est soumis au Parlement chilien pour approbation./. La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants figure parmi ces traités.


B. Changements institutionnels

Sûreté chilienne

26. Le gouvernement actuel s'est donné pour objectif d'éliminer les pratiques de tolérance à l'égard des abus commis par des membres de la police civile à l'encontre de détenus et de promouvoir et de garantir le respect des droits de l'homme de tous par des mesures éducatives et par un contrôle disciplinaire efficace de ses fonctionnaires.

a) Mesures éducatives (art. 10, par. 1, et art. 11 de la Convention)

27. Il s'agit d'assurer la rééducation des effectifs en activité et de donner une formation différente à ceux qui s'apprêtent à embrasser la carrière de policier en revoyant les programmes de formation de l'Ecole de police.

28. A l'Ecole de police, qui assure la formation des nouveaux venus dans cette fonction, l'enseignement de toutes les disciplines a été revu de façon à inculquer les principes du respect des droits de l'homme et à assurer un professionnalisme scientifique dans la façon de conduire l'enquête de police en réunissant le maximum de preuves avant de procéder à l'interrogatoire de l'auteur présumé d'une infraction. Tout le corps enseignant de cette école a été renouvelé et les méthodes pédagogiques qui avaient pris un caractère fortement militaire sous le régime précédent (par exemple port d'uniformes dans certaines occasions) ont été modifiées.

29. La rééducation des fonctionnaires en activité est assurée par des cours de spécialisation et de formation supérieure dispensés à l'Institut supérieur de la Sûreté; cette formation est exigée pour obtenir de l'avancement. Le corps enseignant de cet institut a été renouvelé et les programmes d'études ont été revus de façon à renforcer chez les membres de la hiérarchie le sens de l'image de marque de l'institution policière en veillant à ce que les membres de la police observent dans l'exercice de leurs fonctions un comportement propre à venir à bout de toutes les pratiques de corruption et de toutes les pratiques attentatoires à l'intégrité des individus en état d'arrestation. Un enseignement concernant les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme a été prévu, une chaire d'éthique policière a été créée et la chaire de sociologie policière a été augmentée d'un volet "droits de l'homme".

30. De plus, on a lancé un vaste programme de formation supérieure qui est mis en oeuvre à l'étranger avec des organismes gouvernementaux d'autres pays, en particulier de ceux dont la police fait partie d'INTERPOL, et avec des organisations internationales comme l'ONU et l'OEA.

31. Dans le cadre du programme de l'Institut interaméricain des droits de l'homme, s'est tenu entre le mois d'août et le mois de septembre 1993 à l'Ecole de formation de la police nationale de la ville de Panama un "Atelier professionnel et policier sur les droits de l'homme", préparé par des membres de la Sûreté chilienne.

32. Une délégation chilienne, composée du Chef de la brigade des homicides, du Chef de la brigade des agressions, du Chef des affaires intérieures et du Conseiller en psychologie et en sociologie du Directeur général de la Sûreté, a participé à cet atelier aux côtés des délégations représentant la police des pays d'Amérique centrale et du Mexique.

33. L'atelier, qui portait sur les aspects théoriques et pratiques de la fonction policière à la lumière de l'étude de cas concrets, était divisé en quatre sections consacrées à des thèmes divers, par exemple : le principe de la proportionnalité des délits et peines et les droits de l'homme; le commandement en tant que pédagogie policière; le droit à la justice; le principe de la présomption d'innocence et le droit à la défense dans la formation policière; la relation entre les droits de l'homme, la sécurité personnelle et collective dans le travail de la police; la revalorisation de la fonction policière dans le contexte du développement social et de la création des conditions favorables au respect des droits de l'homme.

b) Mesures de contrôle (art. 12 et 13 de la Convention)

34. Quand l'actuel gouvernement est entré en fonction, la Direction de la Sûreté a créé une commission de coordination et d'analyse relevant du Département des affaires intérieures, qui planifie, coordonne et oriente l'information sur les violations des droits de l'homme commises sous le régime militaire et l'étude de ces cas. Cette commission entretient également des relations harmonieuses et permanentes avec les organisations non gouvernementales de défense des droits de l'homme existant dans le pays, qui transmettent les plaintes dénonçant les violations des droits de l'homme commises actuellement par des fonctionnaires de la police. Ces plaintes sont présentées par ces organisations ou par des particuliers et, à plusieurs reprises, elles ont donné lieu à des enquêtes internes sur des cas d'application illégale de la contrainte à des personnes arrêtées.

c) Mesures disciplinaires (art. 12 et 13 de la Convention)

35. Dès l'entrée en fonction du gouvernement démocratique, d'importantes restructurations ont eu lieu parmi le personnel de la police. Près de 500 fonctionnaires - soit près de 20 % des effectifs - ont été mis à la retraite pour des motifs divers, notamment à la suite des conclusions d'enquêtes administratives.

36. Ainsi, en 1992, la Sûreté a mis trois de ses fonctionnaires à la disposition des tribunaux à la suite d'une affaire où une personne arrêtée du nom de Marcos Villanueva Vinet avait subi des mauvais traitements physiques. La troisième juridiction pénale de Santiago est saisie de l'affaire inscrite au rôle sous le numéro 16 2919-2. Des poursuites sont engagées contre trois inspecteurs, lesquels se trouvent en liberté sous caution. Cet incident a donné lieu à la dissolution de la brigade des agressions ( Prefectura Investigadora de Asaltos - PRIA), dont le chef a été destitué. La police mène également une enquête interne sur cette affaire.


C. Procès engagés contre des responsables d'actes de torture

37. Entre le mois de mars 1990 et le mois d'octobre 1993, les tribunaux civils et militaires chiliens ont été saisis d'une cinquantaine de plaintes pour contraintes illégales infligées par la police civile et la police en uniforme sur des personnes en état d'arrestation. Les procès sont menés par les tribunaux chiliens compétents conformément aux règles d'une procédure régulière et la majorité sont pendants.

38. Afin de contribuer à l'ouverture d'enquêtes rapides et impartiales sur les actes présumés de torture, le Gouvernement chilien a, de son côté, la faculté de demander directement l'intervention de la justice dans de telles affaires. C'est ce qu'il a fait dans le cas de la citoyenne brésilienne Tania Cordeiro Vaz, qui avait déposé une plainte pénale pour des actes de torture et de viol imputés à des fonctionnaires de la Sûreté. A la demande du Gouvernement chilien, la Cour suprême a désigné, le 18 août 1993, un juge enquêteur de la Cour d'appel de Santiago pour connaître de cette affaire / On appelle juge enquêteur de la cour d'appel ( Ministro en Visita ) un juge spécial, occupant un rang élevé dans la hiérarchie judiciaire, chargé de connaître des causes qui peuvent avoir des conséquences sur les relations internationales de la République du Chili ou d'enquêter sur des délits particulièrement alarmants pour la population. /


D. Réparation due aux victimes d'actes de torture

39. Pour donner suite aux recommandations formulées par la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation en ce qui concerne la réparation due aux victimes de violations des droits de l'homme sous le régime militaire, l'Etat, à titre de contribution, a créé en 1991, pour assurer sous une forme concrète une réparation visant à reconnaître les épreuves vécues par un secteur important de la population, le programme de réparation et de soins complets en matière de santé pour les victimes des violations des droits de l'homme. Il existe actuellement sept équipes travaillant dans le cadre de ce programme dans différentes zones du pays; elles sont rattachées aux services publics de santé et sont financées par les contributions de ces services et au titre de la coopération internationale. Outre les victimes de la torture, le programme s'adresse également aux familles des détenus disparus, des opposants politiques exécutés et des exilés.

40. Depuis son lancement jusqu'au premier trimestre de 1993, 8 029 personnes avaient bénéficé de ce programme, au nombre desquelles les victimes de tortures représentaient les pourcentages ci-après :

Premier trimestre de 1992 : 7,3

Deuxième trimestre de 1992 : 6,9

Troisième trimestre de 1992 : 14,4

Quatrième trimestre de 1992 : 14,6

Premier trimestre de 1993 : 14,5

41. Le programme consiste en priorité à apporter des soins de santé complets, physiques et psychologiques, aux victimes de violations des droits fondamentaux; il est donc possible d'apporter une aide non seulement aux victimes des violations commises pendant la période répressive passée mais aussi aux victimes de mauvais traitements infligés illégalement après 1990. Certains cas ponctuels se sont produits mais n'ont pas fait l'objet de statistiques.



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