University of Minnesota



Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Canada, U.N. Doc. CAT/C/55/Add.8 (2004).


Quatrièmes rapports périodiques que les États parties devaient présenter en 2000

Additif

CANADA*

[30 août 2002]


TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes    

Liste d’acronymes                                                                         

Introduction                       ............................................................................................ 1 − 7            

PREMIÈRE PARTIE − APERÇU............................................................................      8 − 13            

DEUXIÈME PARTIE − MESURES ADOPTÉES PAR LE
GOUVERNEMENT DU CANADA*....................................................................  14 − 209        

TROISIÈME PARTIE − MESURES ADOPTÉES PAR LES
GOUVERNEMENTS DES PROVINCES*..........................................................       210 − 412       

          Terre-Neuve................................................................................................       210 − 215       

          Île-du-Prince-Édouard.................................................................................       216 − 239      

          Nouvelle-Écosse..........................................................................................       240 − 254       

          Nouveau-Brunswick....................................................................................       255 − 282       

          Québec........................................................................................................       283 − 300       

          Ontario........................................................................................................       301 − 325       

          Manitoba.....................................................................................................       326 − 347       

          Saskatchewan..............................................................................................       348 − 360       

          Alberta........................................................................................................       361 − 376       

          Colombie britannique...................................................................................       377 − 412       

QUATRIÈME PARTIE − MESURES ADOPTÉES PAR LES
GOUVERNEMENTS DES TERRITOIRES*........................................................       413 − 428      

          Nunavut.......................................................................................................       413 − 416      

          Territoires du Nord-Ouest............................................................................       417 − 420      

          Yukon.........................................................................................................       421 − 428     

 


Liste d’acronymes

APEC                  Coopération économique Asie‑Pacifique

BEC                     Bureau de l’enquêteur correctionnel

CAPRA               Clients, acquisition et analyse de renseignements, partenariats, réponses, auto‑évaluation

CCVT                  Centre canadien pour les victimes de torture

CIC                      Citoyenneté et immigration Canada

CISR                    Commission de l’immigration et du statut de réfugié

DCA                    Droit des conflits armés aux niveaux opérationnel et technique

DNRSRC             Demandeurs non reconnus du statut de réfugié du Canada

ERPR                   Évaluation du risque préalable au renvoi

FC                       Forces canadiennes

GRC                    Gendarmerie royale du Canada

Î‑P‑É                    Île‑du‑Prince‑Édouard

LSCMLC             Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition

ONG                    Organisation non gouvernementale     

PIC                      Programme d’instruction des cadets

USD                     Unité spéciale de détention

TPIY                    Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie

TPIR                    Tribunal pénal international pour le Rwanda


Introduction

1.       La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (la Convention ou la Convention contre la torture) des Nations Unies a été ratifiée par le Canada le 24 juin 1987. Ce quatrième rapport présenté par le Canada aux termes de la Convention englobe la période du 1er avril 1996 au 1er avril 2000 (à certains endroits il est fait mention de développements récents qui revêtent un intérêt spécial). La Partie I du document contient des renseignements généraux sur la structure constitutionnelle du Canada dans la mesure où elle touche la Convention. La Partie II contient une mise à jour, à partir du troisième rapport, des mesures engagées au niveau fédéral pour faire appliquer les dispositions de la Convention et expose la réponse du Canada aux observations finales formulées par le Comité après la présentation de son troisième rapport en novembre 2000. Les parties III et IV constituent les mises à jour aux échelons provinciaux et territoriaux.

2.       Le présent rapport traduit les principaux changements qui ont été apportés aux politiques, aux lois et aux programmes fédéraux, provinciaux et territoriaux depuis la présentation du troisième rapport du Canada aux termes de la Convention. À moins d’être nécessaire, l’information que renfermaient les rapports précédents du Canada n’est pas reprise ici et seuls les changements importants sont mentionnés. Pour connaître toutes les mesures visant à mettre en œuvre la Convention, il est recommandé de consulter les rapports précédents ainsi que les rapports présentés aux termes d’autres traités, notamment le rapport soumis au Comité des droits de l’homme.

Consultations d’organisations non gouvernementales

3.       Le Gouvernement du Canada a écrit à de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) pour les inviter à présenter leurs vues sur les points examinés dans le volet fédéral du rapport. Ces organisations ont également été priées d’identifier d’autres organisations que ce processus pouvait intéresser ou d’envoyer à celles‑ci copie de la lettre du Gouvernement.

4.       Nous avons reçu des réponses du Conseil canadien pour les réfugiés et du Centre canadien pour victimes de torture. La plupart des observations faites par ces ONG portent sur des questions inhérentes aux réfugiés et à la loi sur l’immigration qui a été rédigée pour remplacer la loi sur l’immigration, soit la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (le projet de loi C‑31). Ces consultations ont été faites avant la dissolution du Parlement en octobre 2000 et le projet de loi n’a pas été adopté. La Chambre des communes a adopté un nouveau projet de loi (le projet de loi C‑11, loi sur l’immigration et la protection des réfugiés) en juin 2001. Il est entré en vigueur en juin 2002. Les dispositions du projet de loi C‑11 reprennent, à bien des égards, celles du projet de loi C‑31. Les modifications seront décrites dans le cinquième rapport du Canada.

5.       Le Conseil canadien pour les réfugiés a fait observer que, contrairement à la loi sur l’immigration, le projet de loi C‑31 mentionne explicitement la Convention contre la torture. Bien qu’il s’agisse d’une étape en vue de la reconnaissance des obligations prévues par la Convention, le projet de loi ne respecte pas pleinement, selon le Conseil, l’article 3 de la Convention, parce que l’interdiction d’extrader une personne vers un État où elle risque d’être soumise à la torture ne s’applique pas aux personnes inadmissibles parce qu’elles ont commis des crimes graves ou pour des raisons de sécurité. Le Conseil déplore qu’on n’ait pas intenté de poursuites contre des tortionnaires au Canada et que rien n’indique que des efforts aient été déployés pour faire enquête sur les allégations de torture commise par des personnes au Canada. Il a également des réserves quant à la mise en application de l’article 10 de la Convention relativement aux agents d’immigration et aux gardes des établissements de détention. Il continue de préconiser l’élaboration et l’adoption de lignes directrices au sujet des survivants de la torture à l’intention de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR). Il dit s’inquiéter puisqu’en vertu de la nouvelle loi sur l’extradition, c’est le Ministre de la justice, en consultation avec le Ministre de la citoyenneté et de l’immigration, et non pas la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, qui, à la suite d’une procédure quasi judiciaire, prendra la décision à l’égard de la demande de statut de réfugié d’une personne visée par une demande d’extradition.

6.       Le Centre canadien pour victimes de torture (CCVT) affirme quant à lui que, dans son application de l’article 1 de la Convention, le Canada est allé au-delà de la définition de la torture donnée dans la Convention en considérant la persécution fondée sur le sexe comme un type de torture. Le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié a été cité en exemple auprès de la communauté internationale. Ce système, utilisé par la Section du statut de réfugié de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour examiner les revendications du statut de réfugié, notamment celles de prétendues victimes de torture, n’est pas accusatoire. Le CCVT a, toutefois, formulé des inquiétudes au sujet des cas où des audiences se sont transformées, selon lui, en procédure accusatoire à cause de l’intervention de membres du tribunal, d’agents d’audience et de représentants du Ministère de la citoyenneté et de l’immigration qui peuvent, avec l’accord du Président de la CISR, assister à certaines audiences. Selon lui, le Canada s’est partiellement conformé à l’article 2 de la Convention. L’article 269.1 du Code criminel rend la torture illégale, mais il existe toujours un besoin urgent pour le Canada d’intégrer la Convention à la loi sur l’immigration. Le CCVT a de sérieuses réserves quant au respect, par le Canada, de l’article 3 de la Convention étant donné qu’une personne reconnue comme un réfugié au sens de la Convention mais constituant un danger pour la sécurité publique ou la sécurité nationale pourrait être déportée vers un État où elle serait susceptible d’être soumise à la torture ou d’être tuée. Le CCVT souligne toutefois qu’au Canada, la torture n’est pas utilisée dans le cadre d’une stratégie systématique de répression. En ce qui concerne l’article 6 de la Convention, le CCVT déplore le fait qu’il n’y a eu que quelques poursuites intentées contre des tortionnaires étrangers établis au Canada. Il ajoute que le Canada a opéré un virage et délaissé les poursuites au criminel en faveur de la révocation de la citoyenneté et de la déportation. Le CCVT privilégie les poursuites plutôt que la déportation. En ce qui a trait à l’article 10 de la Convention, le CCVT a assuré une formation aux agents de la CISR et aux agents de l’immigration chargés de prendre des décisions au sujet de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada. Pour ce qui est de l’article 11 de la Convention, le CCVT exprime des réserves en ce qui a trait à la garde des demandeurs du statut de réfugié. Certaines personnes ont été mises sous garde pendant longtemps. Une autre source de préoccupation est l’atteinte à la dignité et l’humiliation de certains demandeurs du statut de réfugié mis sous garde. Au sujet de l’article 12, le CCVT affirme que le Canada a montré sa volonté et sa capacité d’effectuer des enquêtes à l’égard d’allégations de torture. En ce qui concerne l’article 14, il signale la nécessité de sensibiliser les personnes qui ont été torturées à l’étranger et qui vivent maintenant au Canada. Quant à l’article 15, le Centre mentionne le fait que le Canada doit s’assurer que les confessions et les condamnations relatives à des crimes qui n’ont pas été commis ne servent jamais à l’encontre d’immigrants et de réfugiés de bonne foi. Enfin, le CCVT signale la nécessité de définir ce qui constitue un traitement ou des peines cruels, inhumains ou dégradants et d’élaborer des mécanismes visant à garantir que les agents qui commettent ces infractions seront imputables et pourront être poursuivis.

7.       Les commentaires reçus de ces organisations ont été pris en compte dans la rédaction de la partie fédérale du présent rapport. Toutes les contributions reçues seront acheminées aux Nations Unies sous pli séparé. Elles ont également été envoyées aux ministères et organismes fédéraux assumant les responsabilités premières en ce qui a trait à la mise en œuvre de la Convention.


 

 

 

 

 

 

PARTIE I

APERÇU


La structure constitutionnelle du Canada

8.       Le Canada est un État fédéral formé de 10 provinces et de trois territoires. Le troisième territoire, le Nunavut, a été créé le 1er avril 1999.

9.       En vertu de la Loi constitutionnelle de 1867 et des modifications qui y ont été apportées, les pouvoirs législatifs sont partagés entre le gouvernement fédéral et les 10 gouvernements provinciaux. Par exemple, la Constitution du Canada donne à chaque province, sur son territoire, compétence en matière d’administration de la justice, de propriété et de droits civils, ainsi que d’hôpitaux. On peut citer comme relevant de la compétence fédérale le droit pénal et la procédure en matière criminelle, la naturalisation et les étrangers. De plus, le gouvernement fédéral détient un pouvoir général résiduel de légiférer pour la paix, l’ordre et le bon Gouvernement du Canada.

10.     Au Canada, la protection des droits de la personne incombe aux pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Les lois pertinentes sont adoptées par le Parlement et les assemblées législatives provinciales et territoriales conformément au partage des pouvoirs prévu dans la Constitution canadienne. En raison de ce partage des pouvoirs législatifs, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux interviennent tous dans la mise en œuvre des dispositions de la Convention contre la torture. La ratification de la Convention a été précédée de consultations exhaustives entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Ces derniers se sont alors engagés à assurer le respect des dispositions de la Convention qui relèvent de leurs compétences exclusives. Au Canada, on présume que le législateur respecte les valeurs et les principes garantis en droit international, qu’il s’agisse du droit coutumier ou conventionnel. Le droit international en matière de droits de la personne sert, de manière importante, à aider à interpréter le droit interne. Il a aussi une influence considérable sur l’interprétation de la portée des droits inclus dans la Charte canadienne des droits et libertés.

11.     Au Canada, la responsabilité constitutionnelle en matière de poursuites est partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

12.     En droit pénal, il existe un certain chevauchement. En effet, le gouvernement fédéral est chargé de promulguer les lois et la procédure criminelles qui s’appliquent partout au Canada et qui sont exposées dans le Code criminel, tandis que l’application de ce Code criminel, la poursuite des infractions qui y sont prévues et l’administration de la justice dans une province sont généralement des matières de responsabilité provinciale. Toutefois, les poursuites prévues par des lois fédérales précises, comme la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, relèvent généralement de la compétence fédérale.

13.     Le Gouvernement du Canada a déposé un Document de base formant partie intégrante des rapports des États parties. Le Document de base examine en détail la structure constitutionnelle du Canada, sa structure politique et le cadre juridique général de la protection des droits de la personne, notamment les garanties constitutionnelles et législatives, les recours en cas de violation des droits de la personne et le lien entre les instruments internationaux en matière des droits de la personne et le droit canadien. Ce quatrième rapport présenté aux termes de la Convention doit donc être lu conjointement avec le Document de base.


 

 

 

 

 

 

PARTIE II

MESURES ADOPTÉES PAR LE GOUVERNEMENT DU CANADA

 


Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

14.     Les rapports précédents du Canada énuméraient une série de mesures constitutionnelles, législatives, réglementaires et administratives visant à prévenir la torture et à punir les tortionnaires. Ces mesures incluaient les suivantes:

·               La Charte canadienne des droits et libertés, qui reconnaît en particulier à chacun le droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités (art. 12), le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne (art. 7) et le droit à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires (art. 9). L’article 32 de la Charte garantit les droits des particuliers contre toute action des législatures et des gouvernements fédéraux et provinciaux. Selon les tribunaux cet article s’applique à toutes les activités gouvernementales, y compris aux pratiques administratives et aux actes du pouvoir exécutif du gouvernement, ainsi qu’aux décrets du Parlement ou des législatures;

·               L’article 269.1 du Code criminel renferme une définition de la torture semblable à celle que renferme l’article 1 de la Convention. D’après cet article, la torture consiste en tout acte, commis par action ou omission, par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne afin notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou une déclaration, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider une tierce personne ou de faire pression sur celle‑ci, ou pour tout autre motif fondé sur quelque forme de discrimination que ce soit. La torture ne s’entend toutefois pas d’actes qui résultent uniquement de sanctions légitimes, qui sont inhérents à celles‑ci ou occasionnées par elles;

·               L’alinéa 269.1(3) du Code criminel établit que ne constituent pas un moyen de défense contre une accusation fondée sur le présent article ni le fait que l’accusé obéit aux ordres d’un supérieur ou d’une autorité publique en commettant les actes qui lui sont reprochés ni le fait que ces actes auraient été justifiés dans des circonstances exceptionnelles, notamment un état de guerre, une menace de guerre, l’instabilité politique intérieure ou toute autre situation d’urgence;

·               Les autres infractions définies dans le Code criminel qui se rapportent à l’interdiction de la torture et de toute peine ou de tout traitement cruel, inhumain ou dégradant, telles que les voies de fait, le fait de causer des lésions corporelles ou l’intention de blesser une personne ou de mettre sa vie en danger, le meurtre, le fait d’administrer une substance délétère, l’extorsion et l’intimidation;

·               Les dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant le recours à la force par la police et les organismes correctionnels, tels le Code de déontologie de la GRC, les articles 68 et 69 de la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et le Règlement sur le service des pénitenciers.

15.     Des faits importants se sont produits depuis que le Canada a présenté son dernier rapport. La loi concernant le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre et visant la mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, et modifiant certaines lois en conséquence (loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, L.C. 2000, chap. 24) est entrée en vigueur le 23 octobre 2000. Elle met en œuvre le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (Statut de Rome) adopté à Rome le 17 juillet 1998 et remplace les dispositions sur les crimes de guerre du Code criminel. La loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre apporte également des modifications corrélatives aux dispositions législatives du Canada sur l’extradition et l’entraide juridique pour permettre au Canada de respecter ses obligations envers la Cour pénale internationale. La loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre affirme que toute immunité en vigueur en vertu du droit fédéral n’empêchera pas l’extradition vers la Cour pénale internationale ou vers tout autre tribunal pénal international établi aux termes d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Le Canada a d’ailleurs été un élément moteur de la création de la Cour pénale internationale. Le Canada a ratifié le Statut de Rome le 7 juillet 2000. L’article 4 de la loi porte sur le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis au Canada et l’article 6, sur le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis à l’étranger. L’un et l’autre articles définissent le crime contre l’humanité, qui inclut la torture. Celle‑ci est définie dans l’annexe de la loi, qui reproduit l’alinéa 7(2) e) du Statut de Rome.

16.     En règle générale, les motifs, excuses ou moyens de défense existant en vertu des lois du Canada ou du droit international au moment de la perpétration de l’infraction ou des poursuites peuvent être invoqués par les personnes accusées de génocide, de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre ou par un chef militaire ou un supérieur accusé de manquement à la responsabilité (art. 11 de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre). Il y a toutefois des exceptions. Ne constituerait pas un moyen de défense le fait qu’une infraction de génocide, un crime contre l’humanité, un crime de guerre ou une infraction aux responsabilités de commandement d’un chef militaire ou d’un autre supérieur a été commise pour respecter la loi en vigueur au moment ou à l’endroit de sa perpétration (art. 13 de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre). En règle générale, la loi reprend l’approche adoptée dans le Statut de Rome en ce qui a trait au moyen de défense fondé sur les ordres d’un supérieur. Il ne pourrait pas être utilisé dans le cas d’un génocide ou d’un crime contre l’humanité parce que ces infractions sont en soi manifestement illégales. Il s’appliquerait uniquement aux crimes de guerre si les ordres n’étaient manifestement pas illégaux. Toutefois, la loi a encore limité ce moyen de défense. Selon la loi, ne constitue pas un moyen de défense le fait que l’accusé croyait que l’ordre était légal en raison de renseignements qui portaient sur une population civile ou un groupe identifiable de personnes et qui incitaient ou étaient susceptibles d’inciter à la perpétration, ou tentaient de la justifier, d’omissions ou actes inhumains contre cette population ou ce groupe (art. 14 de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre).

17.     Les Forces canadiennes obligent leurs membres à obéir aux ordres légitimes des supérieurs. En revanche, le fait de refuser d’obéir à un ordre illégal ne constitue pas une infraction. D’après l’article 83 de la loi sur la défense nationale, constitue un élément de l’infraction de désobéissance à un ordre légitime le fait que celui‑ci a été prouvé légitime. Les membres des Forces canadiennes sont assujettis au Code criminel et pourraient être poursuivis pour tout acte de torture ou toute autre violation des dispositions du Code criminel visant un traitement cruel ou inhumain. L’ordre de faire subir une torture à un détenu constitue un crime aux termes de l’article 269.1 du Code criminel et est punissable en application de l’article 130 de la loi sur la défense nationale. Le refus d’obéir à un ordre de commettre un acte de torture ne peut par conséquent pas entraîner une poursuite permettant d’obtenir gain de cause pour désobéissance à un ordre légitime.

18.     En 1997, les Forces canadiennes ont adopté leur Code de déontologie qui fournit des instructions précises au sujet du respect de la Convention contre la torture, l’interdiction de la torture et d’un traitement inhumain. La règle 6 oblige à traiter toutes les personnes détenues avec humanité conformément aux normes établies par la troisième Convention de Genève. Toute forme d’abus, dont la torture, est interdite. Ce code explique également que toute forme de violence physique ou psychologique est interdite.

19.     Le Code de déontologie stipule également qu’il faut rapporter sans délai toute infraction au Code de conduite ou aux lois humanitaires internationales, et que «toute tentative visant à camoufler une infraction à la loi ou au Code de déontologie constitue une infraction au Code de discipline militaire». Le Code reconnaît qu’il peut être difficile de signaler une infraction, par exemple dans le cas où un militaire moins gradé croit qu’un militaire plus haut gradé a commis une infraction. Par conséquent, le Code prévoit un certain nombre de mécanismes de déclaration − que ce soit à des supérieurs dans la chaîne de commandement, à la police militaire, à un avocat militaire ou au directeur des poursuites militaires indépendant dont le bureau a été établi en 1999.

Article 3.  Expulsion et extradition

Immigration: Évaluation du risque de renvoyer une personne dans son pays d’origine avant son extradition du Canada

20.     Le processus de reconnaissance du statut de réfugié a été expliqué en détail dans le troisième rapport du Canada et n’a pas changé au cours de la période visée. Un tribunal indépendant et impartial est chargé de déterminer si le demandeur a établi qu’il répondait à la définition de «réfugié» de la Convention relative au statut des réfugiés. Outre le processus de détermination du statut de réfugié, la loi sur l’immigration et son règlement d’application permettent au Ministre de faciliter l’admission d’une personne, par exemple parce que celle-ci pourrait risquer la torture si elle était renvoyée dans son pays. Il existe sous ce rapport deux recours.

a)       Catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada

21.     Les personnes qui, tout en n’ayant pas été reconnues comme des réfugiés au sens de la Convention, pourraient courir des risques personnels si elles sont renvoyées dans leur pays d’origine peuvent se réclamer de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (DNRSRC). Le Règlement prévoit des exceptions à l’accès à la catégorie des DNRSRC. L’examen mené à cette fin comprend une évaluation du risque de décès, de traitement inhumain ou de peines extrêmes. La personne qui se trouve au Canada et à qui n’a pas été reconnu le statut de réfugié au sens de la Convention relative au statut des réfugiés peut, s’il est reconnu qu’elle appartient à la catégorie des DNRSRC, demander le statut d’immigrant reçu à partir du Canada. Les décisions en matière de DNRSRC sont prises par les agents chargés de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié, qui ont reçu une formation spéciale sur l’évaluation du risque et qui ont accès à des informations sur l’état des droits de la personne à l’échelle mondiale.

22.     Le processus d’évaluation des risques des DNRSRC a été considéré comme un recours interne valable et efficace tant par le Comité sur la torture (KKH c. Canada; VV c. Canada[1]) que par le Comité des droits de l’homme (Adu, Badu et Nartey[2]).

b)      Examen basé sur des raisons d’ordre humanitaire

23.     Il s’agit d’un examen administratif dans le cadre duquel un agent d’immigration a le devoir d’examiner toute représentation faite par le demandeur et pour lequel il jouit d’un pouvoir discrétionnaire illimité de faire appel à son jugement pour attribuer un poids relatif aux éléments du dossier du cas et décider si la demande doit être approuvée ou rejetée. L’approbation signifierait que l’agent est convaincu que le demandeur devrait être exempté de toute réglementation ou que son admission devrait être facilitée à cause de circonstances humanitaires.

24.     Les facteurs humanitaires examinés peuvent inclure les relations familiales, la présence d’un conjoint au Canada, l’intégration générale au sein de la société canadienne et le risque personnel auquel la personne serait exposée si elle était retirée du Canada.

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (projet de loi C‑31)

25.     Après la tenue de vastes consultations publiques, une nouvelle loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (projet de loi C‑31) a été déposée au Parlement le 6 avril 2000. Avec le projet de loi C‑31, mort au Feuilleton lorsque l’élection du 27 novembre 2000 a été déclenchée, le Gouvernement avait manifesté son engagement à préserver la tradition humanitaire du Canada en continuant à offrir une audience équitable aux personnes qui se disent persécutées. Le projet de loi C‑31 proposait de raffermir en même temps les dispositions visant la préservation de l’intégrité du système de reconnaissance du statut de réfugié de manière à limiter la protection offerte uniquement aux personnes qui en ont vraiment besoin. Le projet de loi C‑31 a été remplacé par le projet de loi C‑11. Le nouveau projet de loi intègre plusieurs propositions récentes formulées par les Canadiens tout en maintenant les principes et les dispositions fondamentales du projet de loi C‑31.

26.     Le projet de loi C‑31 proposait de nombreuses modifications au processus de reconnaissance du statut de réfugié afin d’accroître l’efficacité et l’intégrité de celui-ci. Un des principaux éléments du processus réformé est le regroupement du pouvoir décisionnel. Les critères d’octroi de la protection aux réfugiés incluaient les motifs énumérés dans la Convention relative au statut des réfugiés et dans la Convention contre la torture ainsi que le risque de décès ou le risque de traitements ou de peines cruels ou inusités. Cela regroupe les motifs de protection qui sont évalués au moyen de trois procédures distinctes (la reconnaissance du statut de réfugié, l’examen du risque pour les demandeurs non reconnus du statut de réfugié et l’examen visant à déterminer l’existence de raisons d’ordre humanitaire) en une procédure à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR). Les instruments internationaux qui ont été intégrés à la définition de la protection des réfugiés et dont la CISR devra tenir compte comprennent la Convention relative au statut des réfugiés et l’article 1 de la Convention contre la torture. Le projet de loi C‑31 incluait également une disposition qui permettrait au Ministre de faire appliquer par voie de règlement des instruments internationaux à la Section du statut de réfugié en vue de la prise en compte des modifications potentielles.

27.     Le projet de loi C‑31 proposait que Citoyenneté et immigration Canada (CIC) effectue une évaluation du risque préalable au renvoi (ERPR) afin de déterminer le risque auquel une personne pourrait être exposée si elle était renvoyée dans son pays, y compris le risque de torture. Ce projet de loi prévoyait que, à certaines exceptions près, toute personne visée par un ordre de renvoi exécutoire pouvait présenter une demande de protection au Ministre de la citoyenneté et de l’immigration. Cela incluait la personne dont la revendication du statut de réfugié avait été rejetée, mais qui n’avait pas encore quitté le Canada.

Jurisprudence

28.     Le 11 janvier  2002, la Cour suprême du Canada a prononcé sa décision dans les affaires Suresh c. M.C.I. (CSC no 27790) et Ahani c. M.C.I. (CSC no 27792)[3].

29.     M. Suresh, un citoyen du Sri Lanka, avait obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention en 1991. Il serait un important solliciteur de fonds pour le groupe des Tigres tamoul appelé les Tigres de libération de l’Eelam tamoul. En vertu de l’article 40.1 de la loi sur l’immigration, le Solliciteur général du Canada et le Ministre de la citoyenneté et de l’immigration ont délivré un certificat de sécurité alléguant que M. Suresh se livrait à des actes de terrorisme et qu’il faisait partie d’une organisation terroriste. Le certificat a été maintenu par la Cour fédérale. La déportation de M. Suresh a été ordonnée en 1997 en raison de son appartenance à une organisation terroriste. En 1998, la Ministre de la citoyenneté et de l’immigration a examiné son cas et signé un avis déclarant que l’intéressé mettait en danger la sécurité du Canada, conformément à l’article 53(1) b) de la loi. La Ministre a conclu que la menace que M. Suresh présentait pour la sécurité du Canada l’emportait sur le risque de torture auquel il était exposé à son retour dans son pays, en ajoutant que le risque de torture n’était pas considérable.

30.     L’article 53(1) b) de la loi, qui traduit l’article 33 de la Convention relative au statut des réfugiés, permet de renvoyer un réfugié au sens de la Convention dans un pays où sa vie et sa liberté sont menacées si cette personne constitue un danger pour le public ou la sécurité du Canada.

31.     Devant les tribunaux canadiens, M. Suresh a soutenu que son renvoi au Sri Lanka violerait l’article 3 de la Convention contre la torture et la Charte canadienne des droits et libertés.

32.     La Cour suprême du Canada a examiné la question de savoir si le Gouvernement peut, en conformité avec les principes de justice fondamentale (l’article 7 de la Charte garantit de ne pas être privé du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne sauf en conformité avec les principes de justice fondamentale), expulser un présumé terroriste vers un pays où il risque la torture.

33.     La Cour a conclu que la démarche qu’il convient d’appliquer est essentiellement un processus de pondération «dont l’issue dépend non seulement de considérations inhérentes au contexte général, mais également de facteurs liés aux circonstances et à la situation de la personne que l’État veut expulser. D’un côté, il y a l’intérêt légitime qu’a le Canada à combattre le terrorisme, à empêcher que notre pays devienne un refuge pour les terroristes et à protéger la sécurité publique. De l’autre côté, il y a l’engagement constitutionnel du Canada envers la liberté et l’équité procédurale. Cela dit, la jurisprudence indique que le résultat de cette mise en balance s’opposera généralement à l’expulsion de la personne visée vers un pays où elle risque la torture».

34.     La Cour n’a pas exclu la possibilité que, dans des circonstances exceptionnelles, une expulsion impliquant un risque de torture puisse être justifiée, soit au terme du processus de pondération requis par l’article 7 de la Charte soit au regard de l’article premier de celle‑ci. (Une violation de l’article 7 est justifiée au regard de l’article premier «seulement dans les circonstances qui résultent de conditions exceptionnelles comme les désastres naturels, le déclenchement d’hostilités, les épidémies et ainsi de suite».) Toutefois, règle générale, lorsqu’il existe des motifs de croire que l’expulsion d’un réfugié lui fera courir un risque sérieux de torture, son expulsion est inconstitutionnelle parce qu’elle porte atteinte à la Charte.

35.     La Cour a émis les commentaires suivants sur les normes internationales qui, comme nous l’avons expliqué précédemment, sont à la base de l’article 7:

«À notre avis, la prohibition de l’expulsion d’un réfugié dans un pays où il risque la torture que prévoient le Pacte et la CCT reflète la norme internationale généralement admise. L’article 33 de la Convention relative au statut des réfugiés protège de façon limitée les réfugiés contre les menaces pour leur vie et leur sécurité, quelle qu’en soit la source. Par contraste, la CCT protège chacun, sans dérogation, contre la torture sanctionnée par l’État [...]»

«La reconnaissance de la préséance de la CCT en droit international est compatible avec la position adoptée par le Comité contre la torture des Nations Unies, lequel a accordé le bénéfice de l’application du paragraphe 3(1) même à des personnes ayant des liens avec des organisations terroristes [...] De façon plus particulière, le Comité contre la torture a indiqué au Canada qu’il devait [TRADUCTION] “[observer sans réserve le paragraphe 3(1) […] que la personne visée soit ou non un criminel dangereux ou constitue ou non un risque pour la sécurité”: voir Comité contre la torture, Conclusions et recommandations, Canada, CAT/C/XXV/Concl. 4, à l’alinéa 6 a).».

36.     La Cour a conclu que l’appelant Suresh avait établi prima facie qu’il risque d’être torturé à son retour s’il est expulsé au Sri Lanka. Par conséquent, il devrait bénéficier des garanties procédurales requises pour protéger son droit de ne pas être expulsé vers un pays où il risque la torture. Les garanties minimales requises sont que le ou la Ministre doit communiquer au réfugié tous les renseignements et conseils pertinents qui doivent être pris en compte, lui donner la possibilité de présenter des observations écrites pour les réfuter et exposer des motifs écrits répondant à ces observations.

37.     Simultanément à l’affaire Suresh, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l’affaire Ahani et a adopté les mêmes motifs. Dans cette affaire, le Solliciteur général du Canada et la Ministre de la citoyenneté et de l’immigration ont déposé l’attestation prévue à l’article 40.1 de la loi sur l’immigration, dans laquelle ils alléguaient que M. Ahani appartenait à une organisation qui se livrait à des activités terroristes. Le certificat a été accueilli par la Cour fédérale. M. Ahani est membre d’un ministère iranien de la sécurité et du renseignement qui commet des actes de terrorisme à l’échelle mondiale. Il a soutenu que son renvoi contreviendrait à l’article 3 de la Convention contre la torture et à la Charte canadienne des droits et libertés.

38.     La Cour a conclu que la Ministre avait appliqué les bons principes et avait tenu compte des facteurs pertinents en décidant que M. Ahani ne s’exposait qu’à un risque minime s’il était expulsé et qu’il représentait un danger pour le public. Elle a estimé que rien ne justifiait de modifier la décision de la Ministre. Elle était convaincue que M. Ahani avait été pleinement informé de la preuve dont disposait la Ministre contre lui et qu’il avait eu la possibilité réelle d’y répondre. La Cour a conclu que le traitement dont a bénéficié M. Ahani était compatible avec les principes de justice fondamentale.

Demande de mesures provisoires du Comité contre la torture dans les cas d’une communication basée sur une présumée violation de l’article 3 de la Convention (Monsieur TPS − Communication no 99/1997)

39.     En septembre 1997, TPS a déposé auprès du Comité une communication dans laquelle il alléguait que son renvoi en Inde violerait l’article 3 de la Convention contre la torture.

40.     Le 18 décembre 1997, le Comité a demandé que le Canada ne renvoie pas TPS en Inde pendant qu’il examinait sa communication. Le Canada a étudié la demande et déterminé qu’il ne s’y conformerait pas étant donné les circonstances exceptionnelles du cas; il a renvoyé TPS en Inde le 23 décembre 1997.

41.     La décision d’expulser cette personne n’a pas été prise à la légère. La Ministre de la citoyenneté et de l’immigration a étudié attentivement le risque possible que la présence de TPS au Canada faisait peser sur la sécurité publique par rapport à celui auquel il s’exposait s’il était renvoyé en Inde. Au contraire, la Ministre a conclu que cette personne ne s’exposait pas à un risque important de torture si elle était retournée dans son pays d’origine. En outre, un juge de la Section de la première instance de la Cour fédérale a déterminé que le risque couru par TPS ne justifiait pas un sursis du renvoi. Bien que les fonctionnaires canadiens aient offert de surveiller la situation de la personne concernée et ont averti l’État en question de leur intention, l’intéressé a décliné cette offre.

42.     Dans ses vues finales, adoptées le 16 mai 2000, le Comité contre la torture a conclu que le Canada ne violait pas ses obligations aux termes de l’article 3 en renvoyant l’individu du Canada.

43.     Le Canada prend au sérieux ses obligations aux termes des instruments internationaux. Il estime cependant qu’une demande de mesures provisoires constitue une recommandation et non pas un ordre. Néanmoins, indépendamment de leur statut juridique, les demandes de mesures provisoires reçues du Comité sont examinées avec soin. Le Canada reconnaît l’importance des demandes de mesures provisoires, mais serait en faveur de l’adoption de règles de procédure propres à assurer que seules les personnes qui s’exposent à un risque plausible de torture peuvent présenter de telles demandes et seulement pendant un certain temps. Cela est particulièrement important dans les cas où la personne en question peut poser un risque pour la sécurité publique. De plus, le Canada s’inquiète de ce que les règles de procédure du Comité ne permettent pas aux États parties de soumettre des observations suffisantes avant que les demandes de mesures provisoires soient faites et ces retards dans l’examen des communications peuvent mettre en danger d’importants intérêts de l’État dans la protection de la sécurité publique.

44.     Lors de sa comparution devant le Comité en novembre 2000, le Canada a bien accueilli la suggestion que le Comité lui a faite de lui présenter, dans les situations où il est difficile de se conformer à une demande de mesures provisoires, des arguments faisant valoir pourquoi une demande ne devrait pas être présentée ou de demander un examen rapide de l’affaire. Le Canada estime que ces suggestions répondent en grande partie aux préoccupations qui ont conduit à l’expulsion de TPS. Ces suggestions concordent aussi avec les recommandations formulées par le Canada dans le contexte de la révision des organes de surveillance des traités, notamment celle voulant que le Comité sur la torture et le Comité des droits de l’homme devraient envisager de compléter leurs règles de procédure de manière à inclure un critère explicite régissant la délivrance et la révocation des demandes de protection provisoire.

Extradition

45.     Le 17 juin 1999, la nouvelle loi sur l’extradition est entrée en vigueur. Elle prévoit une procédure explicite pour le processus d’extradition et des exigences plus souples en matière de preuve. La loi permet l’extradition de personnes recherchées vers des États et des entités comme les tribunaux criminels internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.

46.     Le processus d’extradition prévu par la nouvelle loi comporte toujours une phase judiciaire et une phase exécutive. Au cours de la phase judiciaire, un juge détermine si la conduite constitue une infraction au Canada et, dans le cas d’une personne recherchée pour subir son procès, s’il y a suffisamment de preuves pour établir que, si l’infraction avait été commise au Canada, l’intéressé serait cité à procès. Au cours de la phase exécutive, le Ministre de la justice doit décider s’il y a lieu d’extrader l’intéressé, en tenant compte de toutes les circonstances et de tout motif de refus applicable.

47.     La loi prévoit que le Ministre de la justice refuse l’extradition d’une personne recherchée s’il est convaincu que:

·               Soit l’extradition serait injuste ou tyrannique compte tenu de toutes les circonstances;

·               Soit la demande d’extradition est présentée dans le but de poursuivre ou de punir l’intéressé pour des motifs fondés sur la race, la religion, la nationalité, l’origine ethnique, la langue, la couleur, les convictions politiques, le sexe, l’orientation sexuelle, l’âge, la déficience physique ou mentale ou le statut de l’intéressé, ou il pourrait être porté atteinte à sa situation pour l’un de ces motifs.

48.     La Convention relative au statut des réfugiés exclut de la protection qu’elle accorde, les personnes qui ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil. L’audience devant la Section du statut de réfugié de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié d’un revendicateur qui fait l’objet d’une demande d’extradition pour une infraction qui serait punissable de 10 ans ou plus au Canada (si elle y avait été commise) en vertu d’une loi fédérale sera suspendue jusqu’à ce qu’il soit statué sur la demande d’extradition.

49.     Le Ministre de la justice ne peut ordonner l’extradition que si le juge, suite à une audition, est satisfait de la preuve soumise. La loi sur l’extradition prévoit que le Ministre de la justice consulte avant de décider de l’extradition le Ministre de la citoyenneté et de l’immigration lorsque la personne dont l’extradition est demandée revendique le statut de réfugié. La personne peut faire des représentations au Ministre de la justice contre son extradition et présenter les faits, arguments et documents qu’elle désire à cette fin. Les motifs de refus de l’extradition prévus à la loi sur l’extradition et décrits ci‑dessus ou au traité applicable trouveront application. En outre, le Ministre de la justice peut assujettir l’extradition à des assurances et conditions.

50.     Comme il était signalé dans le deuxième rapport du Canada, l’exercice par le Ministre du pouvoir discrétionnaire d’extrader est assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés et, notamment, à l’article 7 de la Charte, selon lequel chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne et il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. Une personne recherchée peut en appeler de l’ordre d’extradition auprès des cours d’appel provinciales ou de la Cour suprême du Canada, à condition d’avoir obtenu l’autorisation d’interjeter appel et s’il est possible d’obtenir une révision judiciaire d’une décision ministérielle d’extrader.

Jurisprudence

51.     La Cour suprême du Canada s’est récemment prononcée sur la constitutionnalité de la décision du Ministre de la justice d’extrader aux États‑Unis deux citoyens canadiens (Burns et Rafay) qui étaient recherchés dans l’État de Washington pour meurtre qualifié au premier degré et qui, s’ils sont reconnus coupables, sont passibles de la peine capitale[4].

52.     La Cour suprême a décidé que le fait d’ordonner l’extradition de Burns et de Rafay sans obtenir la garantie que la peine de mort ne leur sera pas infligée violerait les principes de la justice fondamentale. En l’absence de circonstances exceptionnelles, que la Cour n’a pas définies, la Constitution exige les assurances prévues et ce dans tous les cas où la peine de mort risque d’être infligée.

53.     La Cour n’a pas écarté la possibilité qu’il survienne des situations où, du fait que les objectifs du Ministre sont tellement urgents et qu’il n’y a pas d’autre moyen de les réaliser qu’en extradant l’intéressé sans obtenir les assurances prévues, une telle violation puisse être justifiée. Dans ces cas, la Ministre doit démontrer que le refus de solliciter les assurances prévues sert un objectif urgent et réel, que ce refus permettra vraisemblablement de réaliser cet objectif et ne va pas au‑delà de ce qui est nécessaire et que l’effet de l’extradition sans condition ne l’emporte pas sur l’importance de l’objectif.

Article 4.  Criminalisation de la torture

Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre

54.     La loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre abrogera les anciens articles 7(3.71 à 3.77) du Code criminel. L’article 4 de la loi prévoit que le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis au Canada constituent des actes criminels. La définition d’un crime contre l’humanité inclut la torture et les autres actes pouvant constituer des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants. Elle est libellée en ces termes:

«Crime contre l’humanité: Meurtre, extermination, réduction en esclavage, déportation, emprisonnement, torture, violence sexuelle, persécution ou autre fait − acte ou omission − inhumain, d’une part, commis contre une population civile ou un groupe identifiable de personnes et, d’autre part, qui constitue, au moment et au lieu d’une perpétration, un crime contre l’humanité selon le droit international coutumier ou le droit international conventionnel, ou en raison de son caractère criminel d’après les principes généraux de droit reconnus par l’ensemble des nations, qu’il constitue ou non une transgression du droit en vigueur à ce moment et dans ce lieu.».

55.     L’article 4(1.1) de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre prévoit également que quiconque complote ou tente de commettre un génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre, est complice après le fait ou conseille de commettre de tels actes se rend coupable d’un acte criminel. Le Code criminel renferme aussi des dispositions précises au sujet des parties aux infractions, des tentatives de commettre ces crimes, des complots et des complices (art. 20 à 24, 463, 464, 660).

56.     L’article 4(2) de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre précise également la peine applicable à quiconque est trouvé coupable d’avoir commis un acte de génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre ou à quiconque conspire ou tente de commettre un de ces actes, est complice après le fait ou conseille la perpétration de tels actes. Cette personne est condamnée à l’emprisonnement à perpétuité si le fait de tuer quelqu’un intentionnellement est à la base de l’infraction et est passible d’emprisonnement à perpétuité dans tout autre cas.

57.     L’article 6 de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre prévoit que le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis à l’étranger constituent des actes criminels. La définition du crime contre l’humanité inclut la torture et les autres actes qui peuvent constituer des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants. Elle est semblable à celle énoncée à l’article 4 de la loi. Comme l’article 4(1.1), l’article 6(1.1) prévoit que quiconque conspire en vue de commettre un acte de génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre ou tente de commettre un de ces actes, est complice après le fait ou conseille la perpétration de tels actes se rend coupable d’un acte criminel. L’article 6(2) énonce les peines applicables qui sont identiques à celles prévues à l’article 4(2) de la loi.

Loi sur la défense nationale

58.     Selon l’article 77 f) de la loi sur la défense nationale, commet une infraction tout membre des Forces canadiennes qui attente aux biens ou à la personne d’un habitant ou résident d’un pays où un membre des Forces canadiennes est en service. Si cette infraction est commise pendant une période de service actif, le membre des Forces canadiennes est passible de l’emprisonnement à perpétuité ou d’une peine moindre. Dans tout autre cas, il est passible de destitution ignominieuse ou d’une peine moindre (y compris une peine moindre d’après l’échelle des peines comme l’emprisonnement d’une durée de moins de deux ans). D’après l’article 129 de la loi sur la défense nationale, constitue une infraction le fait de contrevenir à toute disposition de la loi sur la défense nationale, un règlement, un ordre ou des instructions destinées à l’information générale et à l’orientation des Forces canadiennes ou à un élément de celles‑ci ou à tout ordre général, de garnison, d’unité, de station, permanent, local ou autre. Le membre reconnu coupable de l’infraction est passible de destitution ignominieuse ou d’une peine moindre. L’article 130 de la loi sur la défense nationale assujettit les membres des Forces canadiennes aux dispositions du Code criminel et de toutes les autres lois fédérales et étrangères et les rend passibles de toutes les peines prévues par ces lois. Cela inclut les peines minimales prescrites à l’article 235 du Code criminel pour meurtre et à l’article 269.1 au sujet de la torture.

Article 5.  Établissement de la compétence

59.     L’article 7(3.7) du Code criminel établit la compétence du Canada à l’égard de l’infraction de torture dans toutes les situations mentionnées à l’article 5 de la Convention. Il stipule en effet que, nonobstant les autres dispositions du Code criminel ou de toute autre loi, quiconque, à l’étranger, commet une action ou omission qui, si elle était commise au Canada, constituerait une infraction, un conseil à une autre personne de commettre une infraction, un cas de complicité après le fait, une tentative ou un complot à l’égard d’une infraction à l’article 269.1, est réputé avoir commis cet acte au Canada si:

·               L’action ou l’omission est commise à bord d’un navire qui est immatriculé en conformité avec une loi fédérale ou à l’égard duquel un permis ou un numéro d’identification a été délivré en conformité avec une telle loi;

·               L’action ou l’omission est commise à bord d’un aéronef, soit immatriculé au Canada en vertu des règlements d’application de la loi sur l’aéronautique, soit loué sans équipage et mis en service par une personne remplissant, aux termes des règlements d’application de la loi sur l’aéronautique, les conditions d’inscription comme propriétaire d’un aéronef au Canada en vertu de ces règlements;

·               L’auteur de l’action ou de l’omission a la citoyenneté canadienne;

·               Le plaignant a la citoyenneté canadienne;

·               L’auteur de l’action ou de l’omission se trouve au Canada après la perpétration de celle‑ci.

60.     L’article 8 de la loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre établit les fondements de la compétence du Canada quand il s’agit d’intenter des poursuites à l’égard des infractions de génocide, de crime contre l’humanité, de crime de guerre et de manquement à la responsabilité commises à l’étranger. L’article 8 précise également que quiconque est réputé être l’auteur d’un acte de génocide, d’un crime contre l’humanité, d’un crime de guerre ou d’un manquement à la responsabilité à l’étranger peut être poursuivi pour l’infraction si l’une des conditions suivantes est remplie:

          «a)     À l’époque:

·               Soit lui-même est citoyen canadien ou employé au service du Canada à titre civil ou militaire;

·               Soit lui-même est citoyen d’un État participant à un conflit armé contre le Canada ou est employé au service d’un tel État à titre civil ou militaire;

·               Soit la victime est citoyen canadien;

·               Soit la victime est ressortissant d’un État allié du Canada dans un conflit armé;

·               Soit après la commission présumée de l’infraction, l’auteur se trouve au Canada.».

61.     Cette disposition permet l’exercice de la compétence universelle lorsque, après la commission présumée de l’infraction, la personne qui en est accusée se trouve au Canada.

Article 6.  Détention et autres mesures légales

62.     Le premier rapport du Canada précise qu’un agent de la paix ayant des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte criminel, comme la torture, peut arrêter cette personne sans mandat en vue d’une poursuite au criminel.

63.     Tous les traités d’extradition dont le Canada est signataire et la loi sur l’extradition prévoient qu’un mandat d’arrestation provisoire peut être obtenu en vue de la détention d’un fugitif. Toutefois, une personne qui est arrêtée aux fins d’extradition doit être remise en liberté si les documents justificatifs voulus n’ont pas été reçus dans le délai prévu par la loi sur l’extradition ou le traité pertinent ou encore si le Ministre ne donne pas l’autorisation de faire appliquer la loi sur l’extradition.

Article 7.  Poursuites judiciaires

64.     Depuis plusieurs années, le Gouvernement du Canada s’emploie à faire en sorte que notre pays ne devienne pas un refuge pour les criminels de guerre. Sa position est sans équivoque. Quiconque a commis un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou tout autre acte répréhensible durant un conflit, sans égard au lieu ni au moment où ces crimes ont été commis, n’est pas le bienvenu au Canada.

65.     En tant que membre responsable de la communauté internationale, le Gouvernement du Canada privilégie son programme des crimes de guerre. Il tient à ce que ce programme lui permette de prendre des mesures à l’encontre des personnes soupçonnées de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité grâce au plus opportun des six outils complémentaires: l’extradition, le transfèrement à des tribunaux internationaux, le refus de la protection accordée aux réfugiés, l’expulsion et la perte de la citoyenneté, le refus d’accès au Canada et des poursuites criminelles intérieures.

66.     Le Groupe interministériel des opérations, créé en 1998, permet au Gouvernement du Canada de coordonner toutes les mesures prises par le Gouvernement du Canada relativement aux politiques de guerre. L’un de ses objets est de s’assurer que le Canada respecte ses obligations internationales. Ces obligations incluent les enquêtes, les poursuites, l’extradition et le renvoi de criminels de guerre, ainsi que la collaboration avec les tribunaux internationaux mis sur pied à cette fin, soit le Tribunal pénal international pour l’ex‑Yougoslavie (TPIY) et le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).

67.     Le Groupe interministériel des opérations s’assure que le Gouvernement du Canada traite de façon adéquate les allégations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité concernant des citoyens canadiens ou des personnes qui se trouvent au Canada. Afin de respecter cet objectif, la Gendarmerie royale du Canada et le Ministère de la justice enquêtent sur les allégations concernant les actes répréhensibles qui pourraient mener à des poursuites criminelles ou à une révocation de la citoyenneté, tandis que CIC applique les recours que prévoit la loi sur l’immigration.

68.     Dès décembre 1999, des responsables ont commencé à examiner toutes les allégations relatives aux personnes soupçonnées d’actes de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Plus de 800 dossiers ont été étudiés, dont la plupart étaient des dossiers actifs de Citoyenneté et Immigration. À l’issue de cet examen, la Section des crimes de guerre du Ministère de la justice a ouvert des dossiers au sujet de toutes les allégations de génocide et de crimes de guerre dans le contexte de conflits armés internationaux, la plupart découlant des conflits ayant fait rage dans l’ex‑Yougoslavie et au Rwanda, ainsi que des allégations les plus graves de crimes contre l’humanité. Environ 10 % des dossiers examinés appartenaient à ces catégories et font l’objet d’enquêtes. Il est rare qu’on trouve au Canada suffisamment d’éléments de preuve pour intenter des poursuites. Les enquêteurs doivent en effet presque toujours se rendre à l’étranger pour mener des entrevues et examiner des documents. Si les preuves de torture laissent entrevoir une probabilité raisonnable de condamnation par les tribunaux canadiens, des accusations seront portées.

Article 8.  Ententes d’extraditions

69.     D’après la nouvelle loi sur l’extradition, les traités d’extradition, y compris les traités multilatéraux comme la Convention contre la torture, qui sont en vigueur, dont le Canada est signataire et qui renferment une disposition sur l’extradition, sont considérés comme des «traités d’extradition» aux fins de la loi. La Convention peut être utilisée pour justifier l’extradition vers un autre État signataire.

Article 9.  Entraide judiciaire

70.     Comme il était signalé dans le deuxième rapport du Canada, la loi sur l’entraide juridique en matière criminelle énonce le cadre juridique applicable à la mise en œuvre des traités conclus entre le Canada et d’autres États en vue de la promotion de la coopération dans les enquêtes menées à l’égard des crimes et les poursuites lancées à ce sujet. La loi prévoit cinq formes d’entraide de base: 1) la collecte d’éléments de preuve, y compris la prise de déclarations et de témoignages; 2) l’exécution de mandats de perquisition; 3) le transfèrement provisoire de prisonniers afin que ces derniers puissent témoigner ou d’autres types d’aide; 4) le prêt d’éléments de preuve; 5) la prestation d’une aide aux fins des produits de la criminalité.

71.     Entre avril 1996 et avril 2000, le Canada a conclu des traités d’entraide juridique avec divers pays, dont l’Autriche, la Grèce, la Hongrie, Israël, la Norvège, le Pérou, la Pologne, le Portugal, la Roumanie et l’Ukraine. Dans l’éventualité d’un cas présumé de torture et en l’absence d’un traité d’entraide juridique, les pays visés pourraient quand même collaborer en vertu d’ententes administratives ponctuelles ou d’autres dispositions.

Article 10.  Éducation et formation

Gendarmerie royale du Canada

72.     Le Programme d’entraînement de base destiné aux nouvelles recrues de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est offert à toutes les recrues qui ont le statut d’agent de la paix. Les agents de la paix de la GRC sont investis du pouvoir d’effectuer des perquisitions et des saisies et de détenir et/ou d’arrêter des personnes, conformément aux conditions énoncées dans le Code criminel.

73.     Depuis la parution du troisième rapport du Canada, la GRC a perfectionné et mis en œuvre le programme de police communautaire. Il s’agit d’un type de programme qui suppose notamment le recours, dans quelque situation que ce soit, à un modèle de résolution de problèmes appelé CAPRA. Cet acronyme regroupe cinq notions qui sont à la base de la méthode de résolution de problèmes privilégiée par la GRC: clients, analyse de renseignements, partenariats, réponses, autoévaluation.

74.     Le Programme d’instruction des cadets (PIC) repose sur les principes de la police communautaire et sur le CAPRA. Il fait appel à l’apprentissage par problèmes, c’est‑à‑dire que les cadets ne suivent pas de cours magistraux, mais assument la responsabilité de leur propre apprentissage, sous la direction d’un animateur qualifié.

75.     Le modèle CAPRA et la méthode d’apprentissage fondé sur des mises en situation obligent le cadet à se renseigner sur les différentes cultures parce que cela fait partie de l’élément d’acquisition et d’analyse du modèle de résolution de problèmes. L’approche pédagogique de la GRC, y compris son volet de sensibilisation aux cultures, vise la formation d’adeptes de l’acquisition continue du savoir afin de pouvoir compter sur un service de police représentatif, respectueux et sensible aux besoins particuliers de toutes les collectivités. Il s’agit donc d’un «processus» axé sur la découverte et la volonté d’apprendre, qui favorise l’ouverture d’esprit, l’appréciation et le respect des diverses cultures. Cet aspect de la formation de la GRC est perçu comme limitant tout comportement susceptible d’être assimilé à la torture.

76.     La GRC donne une formation sur les articles du Code criminel qui concernent la protection des personnes investies de pouvoirs et ce qui entre dans les définitions de «force excessive» et de «recours à la force». Les cadets voient donc la notion de torture, au sens de l’article 269 du Code criminel, dans des mises en situation et doivent mener des recherches plus poussées.

77.     La GRC s’affaire aussi à expliquer et à renforcer continuellement l’application de la Charte canadienne des droits et libertés dans les situations d’entrevue, de détention, d’arrestation et d’emprisonnement. Elle voit à ce que les changements qui sont apportés aux politiques à la suite de décisions judiciaires (jurisprudence) ou de textes législatifs soient communiqués à tout son personnel au moyen de manuels sous forme électronique.

78.     Les droits garantis par la Charte sont abordés pendant les cours de formation continue, comme le cours de base pour enquêteurs, le cours avancé sur l’entrevue et l’interrogatoire et tous les cours de la GRC qui portent sur les enquêtes menées au sujet de personnes et d’activités criminelles. La GRC a élaboré une politique opérationnelle explicite sur les entrevues et/ou interrogatoires qui renvoie à la Convention contre la torture et qui précise: «Un membre ne doit pas employer une tactique qui comprend l’administration de traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants à l’égard d’une personne ou le consentement à ces traitements ou peines.».

79.     Le site d’apprentissage continu de la GRC se trouve à l’adresse électronique suivante: www.rcmp‑learning.org/french/fr_bien.htm.

Service correctionnel

80.     Tous les membres du personnel du Service correctionnel doivent connaître le cadre constitutionnel, législatif, réglementaire et stratégique régissant les conditions de détention, le soin, le traitement et la garde des délinquants sous responsabilité fédérale. Ils reçoivent des cours de formation initiale et de perfectionnement sur l’interprétation et l’application des articles du Code criminel qui les autorisent à recourir à la force dans le contexte correctionnel. Au cours de leur programme de formation initiale obligatoire de 12 semaines, les nouveaux agents de correction prennent connaissance du Modèle de gestion du recours à la force du Service correctionnel du Canada, lequel permet les interventions verbales, la résolution de conflits et la négociation, selon les circonstances. Le Service correctionnel du Canada sait par expérience que des techniques efficaces de communication, de négociation et d’évaluation peuvent éviter, dans la plupart des cas, le recours à la force. Au besoin, les cours de perfectionnement comprennent l’octroi ou le renouvellement des permis d’usage des armes à feu, des substances chimiques, des entraves et du contrôle physique des détenus. Une conférence nationale des agents de formation sur le recours à la force a eu lieu en septembre 1999.

81.     Pendant la formation initiale, les recrues appliquent des critères basés sur le droit jurisprudentiel afin de déterminer si des mesures administratives prises par les autorités correctionnelles constituent une peine cruelle et inusitée au sens de l’article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Forces canadiennes

82.     Les Forces canadiennes (FC) ont tiré un grand nombre de précieuses leçons de la mission en Somalie, notamment la nécessité de s’assurer que tous les membres des FC déployés au cours d’une mission comprennent et appliquent davantage le droit international humanitaire et les règles d’engagement. En 1997, les FC ont adopté un code de déontologie, qui donne des instructions précises au sujet de la Convention contre la torture (règle 6), de l’interdiction de la torture et des traitements inhumains. Les membres des FC sont assujettis au Code criminel et pourraient être poursuivis pour tout acte de torture ou toute violation du Code criminel visant un traitement cruel ou inhumain. Les FC ont adapté le libellé de leur code de déontologie du personnel afin de le rendre plus convivial et elles ont mis au point un cédérom interactif pour faciliter l’enseignement de son contenu.

83.     Les FC ont élaboré et publié un guide intitulé Droit des conflits armés aux niveaux opérationnel et technique (DCA) qui donne des instructions précises sur le traitement des prisonniers de guerre, des malades et des blessés ainsi que des civils. Les normes relatives aux droits de la personne ont été intégrées au programme d’études des FC en matière de droit des conflits armés. La formation en DCA des FC se compose de conférences et de cours donnés à tous les niveaux, de l’école des recrues ou de la formation de base des officiers au commandement des FC. Des scénarios du DCA ont aussi été incorporés aux exercices virtuels qui sont effectués du niveau de la sous‑unité au niveau de la formation (brigade). Bien que le DCA ne s’applique en droit que pendant les conflits armés, les FC ont adopté une politique obligeant tous les militaires canadiens à appliquer, au moins, l’esprit et les principes du DCA dans toutes les opérations de paix qui ne sont pas des conflits armés.

84.     Les FC examinent comment elles pourraient accroître l’accessibilité à la formation en DCA. Les possibilités envisagées comprennent l’élaboration de cours intermédiaires et avancés en DCA ainsi que la prestation d’un enseignement de base en DCA au moyen d’une formation assistée par ordinateur.

85.     En 1997, en réponse aux recommandations formulées dans le Rapport de la Commission d’enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie et dans cinq autres rapports portant sur des questions comme la justice militaire, le Ministre de la défense nationale a mis sur pied un «Comité de surveillance des changements». Le mandat de ce comité de surveillance prévoyait, entre autres, qu’il devait recevoir des rapports sur la mise en œuvre des recommandations contenues dans le Rapport au Premier Ministre sur le leadership et l’administration dans les Forces canadiennes, daté du 25 mars 1997; le Rapport du Groupe consultatif spécial sur la justice militaire et sur les services d’enquête de la police militaire; le Rapport de la Commission d’enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie; et d’autres initiatives de changement dans les FC et au Ministère de la défense nationale. Les recommandations visaient notamment l’obligation de rendre compte (par exemple la discipline militaire, le leadership militaire du point de vue de l’obligation de rendre compte) et les questions opérationnelles (la chaîne de commandement, les règles d’engagement, la préparation opérationnelle, la planification des missions, et la planification militaire en général, les aspects pratiques et éthiques de l’instruction militaire, de façon générale et pour certaines missions particulières).

86.     Le Comité de surveillance des changements a déposé, en février 2000, son rapport sur l’état d’avancement de la mise en application des recommandations contenues dans les divers rapports. Son rapport comprend un chapitre portant sur les questions de reddition de compte qui indique l’état d’avancement de la mise en application des recommandations formulées dans le rapport sur la Somalie, et recommande que «des critères officiels (soient adoptés) en ce qui concerne l’obligation de rendre compte des personnes qui occupent des postes de chefs au sein des FC» et que les valeurs, principes et méthodes relatifs à l’obligation de rendre compte soient intégrés aux programmes d’éducation et de formation. On peut consulter le rapport à l’adresse suivante: http://www.forces.ca/menu/press/Reports/monitor_com_final/fr/cover_f.htm.

Agents d’exécution de l’immigration

87.     Citoyenneté et immigration Canada (CIC) a adopté une politique intitulée Lieux de travail respectueux et a incorporé un volet «valeurs et éthique» au programme de formation qu’il dispense à son personnel d’exécution. Tous les agents d’exécution reçoivent également une formation sur la politique relative à l’usage de la force, dans laquelle sont abordées les questions touchant les exigences de la loi, l’exercice du jugement, la sécurité, les théories sur l’usage de la force et la compétence pratique d’une norme approuvée. En outre, le Ministère introduira bientôt un examen destiné à vérifier les qualités personnelles des agents d’exécution. Toutes ces mesures stratégiques et pédagogiques s’inscrivent dans l’engagement permanent du Ministère de veiller à la sûreté et à la sécurité du public canadien, des clients et des employés de CIC en améliorant le professionnalisme du personnel d’exécution.

Financement pour les victimes d’actes de torture

88.     Les gouvernements du Canada, à l’échelle fédérale et provinciale, contribuent financièrement de diverses façons au traitement des victimes d’actes de torture. Le Gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les administrations municipales apportent une aide financière directe aux centres canadiens pour victimes de torture de Calgary, Edmonton, Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver. De plus, le Gouvernement fédéral verse 60 000 dollars au Fonds volontaire des Nations Unies pour les victimes de la torture, lequel vient en aide à plusieurs de ces centres.

89.     Au Canada, tout un réseau d’organisations fournit une formation connexe aux intervenants de première ligne, aux travailleurs sociaux et au personnel médical. Le Réseau d’intervention auprès des personnes ayant subi la violence organisée et le Network of Counsellors & Network Committee to Assist Survivors of War and Torture sont deux de ces organismes. Certains organismes membres reçoivent une aide financière de la part de CIC ainsi que d’autres sources gouvernementales ou bénévoles.

90.     Le Centre canadien pour les victimes de torture (CCVT), un de ces organismes, fournit des services directs et indirects aux immigrants et aux réfugiés qui ont été torturés. Ces services comprennent de la formation linguistique, de l’aide à la recherche d’emploi, des représentations aux employeurs, de la traduction et du counselling. Au cours des exercices de 1999‑2000 et de 2000‑2001, le CCVT a reçu plus de 400 000 dollars de Citoyenneté et immigration Canada afin d’offrir ces services. Le gouvernement de l’Ontario verse aussi quelque 30 000 dollars par année au centre de Toronto.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

Service correctionnel

91.     Le traitement des délinquants condamnés par les tribunaux à une peine d’emprisonnement d’au moins deux ans est régi par la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC). Promulguée en 1992, la LSCMLC a remplacé la loi sur les pénitenciers et la loi sur la libération conditionnelle, qui ont été abrogées. Elle fait présentement l’objet d’un examen par le sous‑comité parlementaire compétent, à l’issue d’un vaste examen public et législatif. En vertu de l’article 3 de la LSCMLC, le système correctionnel fédéral vise à:

          «contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité,

·               Assurer l’exécution des peines par des mesures de garde et de surveillance sécuritaires et humaines,

·               Aider au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois.».

92.     Le Service correctionnel du Canada est chargé d’assurer le contrôle et la garde sécuritaires et humanitaires des délinquants sous responsabilité fédérale. En juin 2000, le Service correctionnel avait 23 400 détenus sous sa surveillance. Quelque 58 % de tous les délinquants sont incarcérés tandis que les autres sont sous surveillance dans la collectivité. Les délinquantes correspondent à environ 2,75 % de la population carcérale totale et les délinquants autochtones, à 17 %.

93.     L’article 4 de la LSCMLC énonce les principes législatifs sur lesquels est fondée l’administration des peines d’emprisonnement. Basés sur la primauté du droit, ces principes affirment le pouvoir d’agir équitablement et traduisent les droits et libertés protégés par la Charte. L’alinéa 4 e) de la LSCMLC précise que «le délinquant continue à jouir des droits et privilèges reconnus à tout citoyen, sauf ceux dont la suppression ou restriction est une conséquence nécessaire de la peine qui lui est infligée». Enfin, l’alinéa 4 g) exige que les décisions soient claires et équitables et que les délinquants aient accès à des mécanismes de règlement des griefs.

Recours à la force

94.     Les membres du personnel correctionnel ne doivent utiliser que la force qui est considérée, de bonne foi et suivant des motifs raisonnables, comme étant nécessaire à l’exercice des fonctions que leur confère la loi. Selon l’alinéa 4 d) de la LSCMLC, le Service correctionnel est tenu de ne recourir qu’aux mesures «les moins restrictives possibles» pour maîtriser les délinquants, compte tenu de la nécessité de protéger le public, le personnel et les délinquants. Tout est mis en œuvre afin d’examiner et d’évaluer des solutions de rechange au recours à la force ou à l’augmentation graduelle de celle‑ci. L’usage de la force doit être proportionné aux risques et aux circonstances. Les agents de correction peuvent recourir à la force «raisonnable» et «nécessaire» pour prévenir ou combattre la perpétration d’une infraction par un détenu, pour se protéger contre des attaques non provoquées, pour faire échec aux émeutes et pour empêcher les évasions de pénitenciers à sécurité moyenne ou maximale.

95.     Tous les cas de recours à la force sont signalés au directeur du pénitencier aux fins d’examen. Si celui‑ci a des raisons de croire que la force utilisée pourrait avoir été excessive, il doit alors réclamer la tenue d’une enquête.

96.     La politique correctionnelle exige la production de rapports sur le recours à la force décrivant et justifiant le type et la quantité de force employée dans tel et tel contextes. Dans toute situation où il y a eu recours à la force, les détenus doivent être examinés par des professionnels de la santé. L’agent des services de santé signe alors le formulaire sur le «Recours à la force» pour indiquer que les détenus visés ont subi un examen médical et reçu les soins nécessaires.

97.     La pratique relative à l’enregistrement sur bande magnétoscopique des incidents dans lesquels on a eu recours à la force a été adoptée à l’échelle nationale en février 1997, comme suite à une recommandation de la Commission d’enquête sur certains événements survenus à la prison des femmes (Rapport Arbour, 1996). En mai 2000, d’autres directives ont été publiées pour préciser les responsabilités et les obligations en matière de reddition des comptes à l’intérieur du Service correctionnel et ce, de sorte que les incidents dans lesquels on a fait usage de la force fassent l’objet d’un examen exhaustif et objectif. En vertu de la politique en vigueur, toutes les situations supposant l’usage de la force, comme les extractions de cellules, le déploiement de l’Équipe pénitentiaire d’intervention en cas d’urgence, les incidents de sécurité majeurs, les fouilles à nu et autres incidents dans le cadre desquels l’on est censé ou obligé de recourir à la force, doivent être enregistrées sur bande magnétoscopique et ce, afin que l’on détermine si le recours à la force était justifié et respectait les politiques et dispositions législatives pertinentes. Des responsables de l’établissement carcéral et d’instances régionales et nationales visionneront alors la bande vidéo montrant l’incident en question et, si nécessaire, ordonneront la prise de mesures correctives dans le but d’assurer le respect des politiques et des marches à suivre en vigueur. Copie de la bande magnétoscopique doit également être envoyée au Bureau de l’Enquêteur correctionnel (BEC)[5] dans les 20 jours suivant l’incident.

Commission d’enquête sur certains événements survenus à la prison des femmes

98.     Dans son troisième rapport, le Canada avait présenté un résumé détaillé des constatations et des recommandations faites par la juge Arbour dans le rapport de la Commission d’enquête sur certains événements survenus à la prison des femmes de Kingston (la Commission d’enquête), qui a été présenté au Solliciteur général du Canada en avril 1996. La Commission d’enquête devait examiner les circonstances des événements survenus en avril 1994 à la prison des femmes de Kingston. Les constatations de la Commission portaient notamment sur les cellules d’isolement de la Prison des femmes, les fouilles à nu, l’examen des cavités corporelles, les transfèrements non sollicités ainsi que la procédure de règlement des plaintes et des griefs. Le rapport de la juge Arbour renfermait un certain nombre de recommandations relatives aux préoccupations systémiques générales touchant le respect de la primauté du droit dans la gestion de l’isolement de détenues, l’obligation de rendre compte des opérations, la mixité du personnel, les détenues autochtones et l’avenir des services correctionnels pour les femmes au Canada.

99.     Le rapport de la juge Arbour a eu de vastes répercussions sur le Service correctionnel en ce sens qu’il a donné lieu à une culture organisationnelle plus respectueuse des droits des détenues. Comme il était signalé dans le troisième rapport du Canada, la majorité des recommandations de la juge Arbour ont été acceptées par le Service et ont depuis été mises en œuvre. Parmi les mesures les plus importantes qui aient été prises jusqu’ici, mentionnons:

·               L’interdiction aux membres masculins du personnel de prendre part à la fouille à nu d’une détenue ou d’y assister, même dans les situations d’urgence;

·               La nomination de la première Sous‑Commissaire pour les femmes, en juin 1996;

·               L’obligation d’inclure dans toutes les commissions d’enquête nationales un membre de la collectivité indépendant du Service correctionnel et de mentionner dans les ordres de convocation des commissions d’enquête les dispositions législatives qui s’appliquent;

·               L’interdiction d’utiliser, comme première mesure d’intervention dans les établissements pour femmes, des équipes pénitentiaires d’intervention en cas d’urgence composées d’hommes;

·               La nomination d’une vérificatrice chargée de faire un rapport sur la mise en œuvre de la politique relative à la mixité du personnel;

·               La négociation et le versement de dommages‑intérêts pour les détenues en cause dans les incidents survenus à la prison des femmes.

Faits nouveaux concernant les établissements correctionnels pour femmes

100.   En septembre 1996, entre 45 et 50 femmes avaient reçu la cote «sécurité maximale». Depuis lors, le nombre de délinquantes sous responsabilité fédérale classées au niveau de «sécurité maximale» a beaucoup diminué. La majorité des délinquantes (93 %) sont maintenant classées au niveau de sécurité moyenne ou minimale. Au cours des deux dernières années, le nombre moyen des femmes classées au niveau de sécurité maximale a été de 25 ou 30.

101.   Les délinquantes classées au niveau de sécurité maximale représentent environ 7 % de l’ensemble des délinquantes, tandis que chez les hommes cette proportion est de 12 %. Le risque généralement plus faible que représentent les délinquantes se reflète aussi dans le fait qu’en proportion plus de délinquantes purgent leur peine dans la collectivité plutôt qu’en prison. En effet, 60 % des délinquantes environ purgent leur peine dans la collectivité, comparativement à 40 % des délinquants.

102.   Entre août 1995 et janvier 1997, le Service correctionnel du Canada a ouvert cinq nouveaux établissements régionaux pour femmes, y compris le pavillon de guérison autochtone Okimaw Ohci, situé dans la réserve Nekaneet, près de Maple Creek, en Saskatchewan. Avant 1995, il n’y avait qu’un établissement fédéral pour détenues au Canada, soit la prison des femmes de Kingston, en Ontario (qui a fait l’objet de l’enquête de la juge Arbour). Toutes les femmes condamnées à une peine d’emprisonnement sous responsabilité fédérale étaient transférées à la prison des femmes, indépendamment de leur lieu de résidence ou de l’endroit où elles avaient commis l’infraction. Elles étaient aussi toutes incarcérées dans un établissement à sécurité maximale, indépendamment de leur cote de sécurité.

103.   En 1996, peu après le transfèrement aux établissements régionaux de la plupart des femmes incarcérées à la prison des femmes, on s’est aperçu qu’une faible part de la population (environ 15 %) était incapable de fonctionner dans le cadre de vie communautaire des nouvelles installations. Ces femmes avaient besoin d’un encadrement, d’interventions et d’un contrôle plus poussés. À titre provisoire, le Service correctionnel a incarcéré les femmes classées au niveau de sécurité maximale dans trois unités situées dans des établissements pour hommes en Saskatchewan, au Québec et en Nouvelle‑Écosse. Les unités colocalisées dans les établissements pour hommes sont séparées du reste de ceux‑ci pour ce qui est des cellules, des divers programmes et des aires d’activité physique. Les contacts sont interdits entre les hommes et les femmes.

104.   Au moment du transfèrement, le Service correctionnel du Canada s’était engagé à élaborer une stratégie nationale pour les détenues à risques et à besoins élevés. Le 3 septembre 1999, le Solliciteur général du Canada rendait publique une stratégie nationale pour les détenues présentant des besoins élevés. Au cours des deux années qui suivent, les femmes dites «à besoins élevés» devaient être transférées de la prison des femmes et des unités colocalisées dans les établissements pour hommes dans des unités spéciales à encadrement renforcé et dans des habitations à environnement structuré situées dans le périmètre des établissements régionaux pour femmes. Les habitations à encadrement renforcé permettent l’exercice d’une intervention et d’une surveillance maximales auprès d’une trentaine de femmes considérées comme nécessitant une sécurité maximale et ce, partout au Canada. Trente‑cinq autres détenues ayant des besoins spéciaux ou des problèmes de santé mentale seront placées dans les habitations à environnement structuré.

105.   La stratégie nationale comportait un engagement visant la fermeture de la prison des femmes et des unités colocalisées dans les établissements pour hommes au plus tard à l’automne 2001. Toutefois, bien des mois avant la date prévue, soit le 6 juillet 2000, le Solliciteur général annonçait officiellement la fermeture de la prison des femmes. La fermeture de cet établissement infamant, après 66 années d’existence, illustre la volonté du Gouvernement d’adopter une approche plus humaine, plus équitable, plus sûre et plus efficace dans la gestion des services correctionnels pour femmes. À l’heure actuelle, la presque totalité des 350 détenues sous responsabilité fédérale peuplent les cinq nouveaux établissements.

La surveillance des détenues du sexe opposé

106.   Comme suite à une recommandation de la Commission d’enquête, une vérificatrice indépendante a été nommée et chargée de mener enquête, au cours d’une période de trois ans commençant en janvier 1998, sur l’incidence de la mixité du personnel dans les unités résidentielles des nouveaux établissements pour femmes et de faire un rapport sur le sujet à la Sous‑Commissaire pour les femmes. Le Service s’occupe activement à répondre à tous les problèmes relevés dans les rapports de la vérificatrice indépendante. Dans son deuxième rapport annuel, qui a été publié en janvier 2000, la vérificatrice a présenté aux fins de consultation et de discussion plusieurs recommandations provisoires permettant à des hommes de continuer à occuper des postes de première ligne moyennant le respect de certaines conditions et restrictions, dont: 1) que soient maintenues les politiques et les pratiques en vigueur concernant le recrutement, la présélection et la formation; 2) que les employés de sexe masculin assument des fonctions appropriées; 3) que les employés de sexe masculin représentent au plus 20 % des intervenants de première ligne.

107.   Depuis l’instauration de la mixité du personnel dans les établissements régionaux, le Service correctionnel n’a été informé d’aucun incident de harcèlement, d’agression ou d’exploitation à caractère sexuel de détenues par des intervenants de première ligne masculins. Le troisième et dernier rapport sera publié en l’an 2001.

Protections applicables aux fouilles à nu et à l’examen des cavités corporelles des détenues

108.   Pour faire suite aux observations ou recommandations de la Commission d’enquête, les politiques relatives aux fouilles et à la saisie d’objets interdits ont été modifiées à trois égards. Ainsi, l’adoption d’une norme nationale explicite prévoit que l’on procède systématiquement à la fouille à nu des détenues envoyées en isolement préventif ou dès que les circonstances le permettent, ce qui a pour effet de faire correspondre la directive à la pratique générale. Il est également interdit pour un employé du sexe masculin de participer ou d’assister à la fouille à nu d’une détenue dans quelque circonstance que ce soit, y compris les situations d’urgence.

109.   En vertu de la nouvelle politique, les membres du personnel doivent maintenant donner aux détenues une chance raisonnable de consulter un avocat avant de demander leur consentement écrit à un examen des cavités corporelles. Cet examen doit également être effectué par des professionnels de la santé, dans un contexte approprié.

Faits nouveaux touchant les conditions dans les établissements correctionnels pour autochtones

110.   Le Canada reconnaît que la surreprésentation des autochtones en milieu correctionnel est l’un des problèmes les plus pressants que doivent régler des mesures correctionnelles efficaces aujourd’hui.

111.   Le Service correctionnel a élaboré une stratégie nationale sur les services correctionnels pour autochtones qui est axée sur une approche correctionnelle tenant compte de la culture autochtone. L’instauration de programmes adaptés aux particularités culturelles et l’attribution à la collectivité autochtone d’une plus grande place dans la prestation des services correctionnels devraient grandement accroître le potentiel de réinsertion sociale des délinquants autochtones et améliorer les chances de ces derniers de réintégrer en toute sécurité leur collectivité.

112.   Dès 1992, les articles 81 et 84 de la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition visaient à accroître la participation des collectivités autochtones à la prestation des services correctionnels aux autochtones.

113.   Une stratégie globale concernant les programmes autochtones a été définie en 1997‑1998. Elle comprend les éléments suivants: 1)  le renforcement des programmes mis en œuvre dans les établissements; 2) la prestation de services correctionnels communautaires destinés aux autochtones; 3) le ressourcement; 4) la promotion des communications et de l’information; 5) les initiatives intersectorielles et les partenariats; 6) l’emploi des autochtones. En mars 1999, le Service correctionnel du Canada a approuvé le Cadre sur la participation accrue des collectivités autochtones aux services correctionnels. Le 27 juillet 2000, les fonds destinés à ces programmes étaient approuvés.

114.   Les établissements fédéraux ont commencé à adopter des programmes de guérison et des programmes d’études axés sur les autochtones, et des pavillons de guérison ont également été établis dans différentes régions du pays. L’on compte cinq pavillons de guérison déjà établis, et deux autres sont en construction. Le Ministre a approuvé la construction de pavillons additionnelles afin d’offrir 120 lits supplémentaires dans le cadre de l’initiative élargie, laquelle traduit l’importance que le Service accorde aux besoins en programmes et en espace des autochtones. Trois établissements fédéraux sont également en voie d’être convertis en pavillons de guérison.

115.   Le Service correctionnel est conscient que les pavillons de guérison permettent de répondre aux besoins des détenus sous responsabilité fédérale grâce aux enseignements et aux cérémonies autochtones, aux contacts avec les aînés et les enfants et à une communion avec la nature. L’exécution des programmes repose sur des plans personnels, une approche holistique, une interaction avec la collectivité et l’accent sur la préparation à la remise en liberté.

116.   Le Service correctionnel continue de consulter les dirigeants autochtones, le Gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ainsi que les fournisseurs de services, afin de corriger le taux disproportionné d’incarcérations de contrevenants autochtones et de mettre au point les interventions nécessaires. En outre, le Service correctionnel collabore avec d’autres ministères du Gouvernement, des organismes provinciaux et des relations internationales dans sa démarche et la poursuite de ces objectifs.

Discipline des détenus

117.   La discipline exercée auprès des détenus se veut de nature corrective et vise à favoriser la responsabilité et l’habilitation. Les sanctions sont imposées en fonction de la gravité de l’infraction et du degré de responsabilité assumé par le détenu dans la perpétration. Dans le cas d’un détenu trouvé coupable d’une infraction disciplinaire mineure, elles vont de l’avertissement ou de la réprimande verbale à la perte de privilèges[6] pendant au plus sept jours, à la mise à l’amende ou l’exécution de travaux supplémentaires. Pour des infractions plus graves, un détenu peut être privé de privilèges pendant une période maximale de 30 jours ou être placé en isolement.

118.   Un président indépendant préside l’audience menée à l’égard d’une infraction disciplinaire grave, tandis que le directeur de l’établissement est chargé de celles qui portent sur des infractions mineures. Sur appel de la partie lésée, la section de première instance de la Cour fédérale peut revoir la décision du président indépendant.

119.   L’isolement disciplinaire est une peine imposée aux délinquants accusés et reconnus coupables d’une infraction disciplinaire grave; il ne peut pas dépasser 30 jours dans le cas d’une seule infraction ou 40 jours pour des infractions multiples. Les détenus placés en isolement jouissent des mêmes droits, privilèges et conditions que les détenus faisant partie de la population carcérale générale, sauf ceux qui supposent des rapports avec d’autres détenus ou qui ne peuvent raisonnablement pas être accordés en raison des restrictions propres au secteur de l’isolement préventif ou des exigences de sécurité.

Isolement préventif

120.   L’isolement préventif est considéré comme une mesure d’exception, qui ne doit être prise que pour des raisons de sécurité et qu’en l’absence de solutions de rechange. Bien que la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ne précise pas sa durée maximale, elle prévoit que les détenus placés en isolement réintègrent la population carcérale de l’établissement ou d’un autre établissement le plus tôt possible.

121.   Durant l’isolement préventif d’un détenu, des examens et audiences doivent être menés à différents intervalles. Le détenu qui est placé contre son gré en isolement préventif reçoit une explication écrite des motifs de son isolement dans les 24 heures ouvrables de son placement. Un comité d’examen des cas d’isolement, qui est composé de membres du personnel du Service correctionnel, tient des audiences visant l’examen des cas de détenus placés en isolement contre leur gré cinq jours ouvrables après le placement, le trentième jour civil après celui‑ci, puis au moins tous les 30 jours, tant que le détenu demeure en isolement.

122.   Afin que les détenus placés en isolement comprennent leurs droits en matière de procédure, ils sont informés par écrit de la date des examens, de leur droit d’y assister et de la recommandation du comité d’examen dans les 48 heures suivant la décision.

123.   Il convient de tenir compte de l’état de santé et des besoins médicaux du détenu dans toutes les décisions relatives à l’isolement préventif. Une évaluation psychologique ou psychiatrique écrite doit être produite au moins à tous les 30 jours d’isolement au sujet du bien‑fondé de poursuivre la détention en isolement. Des responsables de l’établissement et des professionnels de la santé doivent visiter les aires d’isolement tous les jours.

124.   En juillet 1996, après le dépôt du rapport de la juge Arbour, le Service correctionnel a mis sur pied un groupe de travail sur l’isolement. En janvier 1997, une nouvelle directive du Commissaire sur l’isolement préventif a été publiée, afin de reconnaître explicitement le droit des détenus à consulter un avocat et à retenir les services de celui‑ci dès leur placement en isolement. En 1998, cette disposition a été clarifiée de façon à ce que le délai pour contacter un conseiller juridique ne devrait pas dépasser 24 heures. On a aussi donné suite au souhait exprimé par la juge Arbour pour que les détenues aient droit à une heure d’exercices par jour. Le Groupe de travail, composé de représentants du Service correctionnel et de personnes de l’extérieur, a présenté ses conclusions en mars 1997.

125.   Comme suite aux préoccupations particulières exprimées par la Commission d’enquête et conformément aux conseils du Groupe de travail, un certain nombre d’initiatives ont été entreprises afin d’améliorer le respect des exigences de la loi en matière procédurale, y compris la conduite de vérifications nationales des aires d’isolement, l’établissement de normes de formation et l’instauration d’un modèle amélioré d’examen des cas d’isolement. Le Service correctionnel a mis en application ce modèle dès 1997, lequel comprend la désignation d’un gestionnaire régional de la surveillance de l’isolement, qui est chargé d’examiner aux 60 jours le cas de tout détenu en isolement préventif. Le gestionnaire surveille tous les aspects des cas d’isolement préventif, de sorte que l’isolement soit une mesure de dernier recours et mené en conformité avec la loi.

126.   En octobre 2000, le Gouvernement du Canada a répondu à un sous‑comité sur la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et a proposé un processus amélioré d’examen des cas d’isolement qui comprendrait des représentants de l’extérieur. Cette mesure devrait assurer un juste équilibre entre, d’une part, l’arbitrage indépendant et, d’autre part, la promotion d’une responsabilité opérationnelle appropriée de la part du Service correctionnel du Canada. Ce modèle sera mis en œuvre dans le cadre d’un projet pilote dans toutes les régions, et une évaluation indépendante détaillée sera effectuée. Un comité directeur composé de membres du Service et de l’extérieur pourrait orienter l’élaboration du projet pilote.

127.   Selon le Service correctionnel, en 1999‑2000, 2 305 détenus ont été envoyés en isolement préventif sollicité et 5 588, en isolement préventif non sollicité. Dans 10,8 % des cas (603) d’isolement préventif non sollicité, la mesure a duré plus de 60 jours.

Unité spéciale de détention

128.   En tant qu’établissement le plus sûr du Service correctionnel du Canada, l’Unité spéciale de détention (USD) est réservée aux détenus qui se sont révélés trop dangereux pour la sécurité du personnel et les autres détenus pour pouvoir demeurer dans un établissement à sécurité maximale. Depuis la fermeture de l’USD des Prairies en octobre 1997, le Service correctionnel exploite une unité au Centre régional de réception situé à Sainte‑Anne‑des‑Plaines. La portée de cette unité est nationale, mais elle est exploitée par la région de Québec pour le compte du Service correctionnel. Lorsqu’un détenu est transféré à l’USD pour évaluation, au moyen d’un transfèrement involontaire décidé par le sous‑commissaire régional concerné, le Comité national de révision (CNR) se prononce sur son admission et son transfèrement officiels après une période d’évaluation en profondeur destinée à vérifier s’il satisfait aux critères applicables ou si le risque qu’il présente est mieux géré dans un établissement à sécurité maximale.

129.   En mai 2000, le CNR a déposé son rapport annuel. On y retrouve les bases sur lesquelles se fonde le Comité pour prendre une décision, les délais dans lesquels ces décisions ont été exécutées, le profil de la population et des précisions concernant la durée d’incarcération à l’USD. Il fournit aussi un répertoire général des programmes offerts qui répondent aux besoins spécifiques de cette population carcérale, avec la poursuite de son mandat qui consiste à aider les détenus de l’USD à agir de façon responsable afin de faciliter leur intégration dans un établissement à sécurité maximale.

130.   Au 31 mars 2000, la population de l’USD comptait 77 détenus représentant 0,6 de 1 % de l’ensemble de la population délinquante masculine relevant du Service correctionnel, une augmentation de 10 par rapport à l’année précédente.

131.   Les détenus qui sont transférés à l’USD pour évaluation et dont l’admission est rejetée par le CNR passent en moyenne moins de quatre mois à l’USD avant d’être retournés ailleurs. On constate donc une amélioration continuelle dans ce secteur étant donné qu’en 1996‑1997, on signalait un séjour moyen de 9,43 mois.

132.   Le CNR revoit le cas de tous les détenus incarcérés à l’USD tous les quatre mois afin de vérifier le maintien de leur statut ou en vue d’effectuer le transfèrement vers un établissement à sécurité maximale.

133.   Dans l’ensemble, l’USD a connu une baisse importante des délais pour le transfèrement des délinquants à la suite d’une décision du CNR. Ce dernier continue de surveiller ces délais de près dans ses rapports provisoires trimestriels.

Groupe de travail sur les droits de la personne

134.   En mai 1997, le Service correctionnel du Canada a mis sur pied un groupe de travail sur les droits de la personne sous la présidence de Maxwell Yalden, ancien Président de la Commission canadienne des droits de la personne et membre du Comité des droits de l’homme des Nations Unies. Le Groupe de travail a examiné les obligations nationales et internationales que doit respecter le Service correctionnel en matière de droits de la personne et a fait des recommandations visant à assurer le respect des engagements en la matière. Il a présenté ses conclusions et recommandations en décembre 1997. Une étude de suivi, portant sur les aspects «droits de la personne» des services correctionnels communautaires, a été parachevée en mai 1999. Les deux rapports confirment que le système correctionnel du Canada traduit bien la primauté du droit en matière de droits de la personne et que le Service correctionnel doit rester très vigilant dans la surveillance et le respect des droits des personnes qui sont sous sa responsabilité.

Relations internationales

135.   Le Service correctionnel du Canada a mis sur pied un programme de travail, sur la scène internationale, en vue de la réforme et de la promotion des services correctionnels et de la justice pénale, lesquels sont jugés très favorablement. Ainsi, il a mené des initiatives de réforme correctionnelle en Lituanie et a participé activement aux démarches d’instauration de la paix et d’aide humanitaire (par exemple expédition de chaussures destinées aux agents de correction) menées au Kosovo. De concert avec d’autres pays, il s’est employé à réformer ces appareils judiciaires par la prestation d’une expertise technique et de connaissances et de pratiques idéales en matière correctionnelle. Bien des pays font désormais appel au Canada pour obtenir de l’assistance technique et des conseils spécialisés en vue d’édifier leurs services correctionnels et systèmes de justice pénale. Au cours des dernières années, le Service correctionnel a apporté une assistance technique à des pays comme Haïti, la Namibie, le Ghana, les Bahamas, les Bermudes, le Cameroun, le Bénin et le Mozambique.

Immigration

136.   Pour le Gouvernement du Canada, la décision de priver une personne de sa liberté est lourde de conséquences. Ainsi, si la loi sur l’immigration renferme des dispositions permettant la mise sous garde de personnes, elle en prévoit d’autres assurant l’examen régulier de cette décision. Les lieux de détention sont accessibles et ouverts au public, et l’examen des cas en vue du maintien sous garde s’effectue dans le cadre d’audiences publiques.

137.   Le 28 octobre 1998, Citoyenneté et immigration Canada (CIC) a publié de nouvelles lignes directrices en matière de mise sous garde afin d’accroître l’uniformité des décisions prises à ce sujet par ses fonctionnaires. Ces lignes directrices ont été élaborées à la lumière des obligations intérieures et internationales en matière de droits de la personne, et les employés de CIC reçoivent une formation en vue de leur application.

138.   Le Président de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a publié des Lignes directrices sur la détention qui sont entrées en vigueur le 12 mars 1998. Ces lignes directrices ont été élaborées à la lumière des obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne et doivent être appliquées par les arbitres de l’immigration et les membres de la Division de l’arbitrage de la Commission.

139.   Lorsqu’une personne n’a pas 18 ans, et surtout lorsqu’il s’agit de mineurs non accompagnés, la décision de la détenir est toujours guidée par l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant qui prévoit que, dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. Le Gouvernement reconnaît que, dans la plupart des cas, l’intérêt supérieur de l’enfant est mieux servi par l’absence de détention. La détention de mineurs est une solution de dernier recours. Il est préférable de les confier aux soins des services provinciaux de protection de l’enfance. Lorsque des mineurs sont détenus, CIC s’efforce le plus possible de faire en sorte que les mineurs non accompagnés soient isolés de la population adulte, aient accès à une surveillance en matière de soins de santé et à des programmes appropriés, notamment l’accès à l’instruction. Les enfants qui sont détenus font l’objet d’une étroite surveillance et ont accès à des aires communes où ils peuvent trouver des jouets, des jeux, une télévision, des livres et s’adonner à des activités extérieures. Un groupe de travail a été formé au sein du Ministère afin d’examiner les programmes et pratiques visant les mineurs et pour relever les cas où il y aurait lieu de mettre au point d’autres lignes directrices, programmes et pratiques. Une fois que l’évaluation initiale sera faite, les intervenants seront appelés à participer au processus.

140.   Les installations de Citoyenneté et immigration Canada ont reçu la visite de plusieurs organisations comme le Haut‑Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme des migrants (en septembre 2000) et le Conseil canadien pour les réfugiés. La Commission interaméricaine des droits de l’homme s’est rendue au Canada à l’automne 1997, à la demande du Gouvernement du Canada. Elle a pu rencontrer des détenus en privé dans les centres de détention situés à Toronto et à Montréal et elle a pu aussi observer des procédures de révision des motifs de la détention. Elle a conclu que les centres de détention de l’immigration semblaient respecter des normes minimales généralement applicables en matière de détention. CIC a engagé des discussions avec la Croix‑Rouge canadienne sur la possibilité d’établir un programme de surveillance structuré et officiel.

141.   Les fonctionnaires de l’immigration cherchent et évaluent activement des options en vue de l’utilisation d’installations améliorées pour remplacer le centre actuel de détention de Toronto, en Ontario. De même, CIC examine une proposition de rénovation et de construction en vue d’améliorer son centre de détention situé à Laval, au Québec, en ce qui concerne l’hébergement des femmes et des enfants. Les nouvelles installations, de même que les rénovations apportées aux installations existantes, seront conformes aux normes applicables aux centres de détention de l’immigration.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate, et
Article 13.  Allégations de torture

Service correctionnel

142.   Le Service correctionnel est chargé de protéger les délinquants sous responsabilité fédérale qui lui sont confiés contre la torture. En principe, on sépare le ou les délinquant(s) d’un agresseur présumé en transférant une partie ou plus, ou en se servant de l’isolement comme mesure de protection d’un plaignant. Le Service correctionnel surveille aussi les incompatibilités réelles ou éventuelles dans sa base de données de gestion des délinquants.

143.   Entre avril 1999 et mars 2000, le Service correctionnel a enregistré 75 incidents de violence graves, dont 2 meurtres de détenus, 2 voies de fait graves contre des membres du personnel, 43 voies de fait graves contre des détenus, 6 bagarres entre détenus, 5 prises d’otages et 11 suicides. Les enquêtes menées à l’égard de ces incidents comportent l’instauration d’un mécanisme de diffusion d’informations et de directives mieux ciblé et la prise de mesures correctives.

144.   Le Service correctionnel a récemment mis sur pied un comité d’examen des suicides, qu’il a chargé d’examiner les constatations et recommandations découlant des enquêtes sur les suicides et de présenter des recommandations sommaires à la Haute Direction.

145.   Le Service correctionnel administre une procédure de règlement des plaintes et des griefs à trois paliers, laquelle permet une résolution sans formalités à l’étape initiale et l’accès à des responsables de plus haut niveau aux paliers suivants. Lorsque la plainte n’a pas pu être réglée par des discussions avec les employés, ou que le détenu opte pour une autre voie, il est possible de déposer un grief écrit auprès du directeur de l’établissement ou du directeur du district. Si le détenu est mécontent de la décision rendue ou qu’il a l’impression que l’on n’a pas donné suite à celle‑ci, il peut faire un grief écrit auprès du coordonnateur régional adjoint. Le grief peut ensuite être transmis au commissaire adjoint, Développement de l’organisme, à l’administration centrale, qui représente le troisième et dernier palier de la procédure. Il est également possible de faire appel de la décision rendue à ce palier devant un tribunal, et le détenu peut aussi opter pour la médiation à tous les paliers ou toutes les étapes de la procédure.

146.   La procédure de règlement des griefs traduit les principes d’équité, de confidentialité et d’accessibilité qui s’appliquent à tous les détenus, et ceux‑ci n’ont pas à craindre les représailles. L’on accorde la priorité aux plaintes relatives aux droits et aux libertés des détenus dans la tenue des enquêtes, la résolution et la production de la réponse écrite. La Sous‑Commissaire pour les femmes instruit tous les griefs présentés par des détenues.

147.   D’avril 1975 à mars 2000, 79 560 plaintes et 31 362 griefs ont été inscrits. Quelque 94 607 plaintes et griefs ont été réglés au niveau de l’établissement, 5 316 plaintes ont été transmises au niveau national pour enquête et réponse, dont 11 concernant l’usage de la force. Neuf des 11 plaintes ont été rejetées après enquête et les 2 plaintes qui restent ont été accueillies en partie pour des motifs sans lien avec l’usage de la force.

Bureau de l’Enquêteur correctionnel

148.   Les détenus peuvent également transmettre leurs plaintes à titre confidentiel à l’Enquêteur correctionnel, qui est indépendant du Service correctionnel et fait office de protecteur des détenus sous responsabilité fédérale. L’Enquêteur peut lancer des enquêtes à sa propre initiative, à la demande du Solliciteur général du Canada ou dès la réception d’une plainte présentée par un détenu ou au nom de celui‑ci. Il rend compte au Parlement par l’intermédiaire du Solliciteur général du Canada. Les enquêteurs qui travaillent au Bureau de l’Enquêteur correctionnel ont pleinement accès aux pénitenciers fédéraux et aux bureaux de libération conditionnelle ainsi qu’à toute information détenue par le Service correctionnel. Chaque année, l’Enquêteur correctionnel traite environ 5 000 plaintes. Il est également chargé d’examiner les rapports d’enquête du Service correctionnel sur les incidents au cours desquels un détenu a perdu la vie ou a subi des lésions corporelles graves.

Accès des détenus à l’aide juridique et à des correspondants privilégiés

149.   Les détenus ont accès à un avocat, aux tribunaux et à leurs mandataires, ainsi qu’aux documents juridiques et réglementaires requis, dans des limites raisonnables. Ils sont informés de leur droit à un avocat et ont des possibilités raisonnables de consulter un avocat et de retenir les services de celui‑ci:

·               Au moment de l’arrestation;

·               Avant une audience disciplinaire relative à une infraction grave;

·               Avant de consentir à un examen des cavités corporelles;

·               Après avoir été informés d’un transfèrement non sollicité ou après un transfèrement d’urgence;

·               Dans tout cas, au plus 24 heures après leur placement en isolement préventif.

150.   Les détenus peuvent écrire sous pli cacheté à un certain nombre de correspondants privilégiés. Ces correspondants comprennent notamment les députés fédéraux, les députés provinciaux et les sénateurs; la Commission canadienne des droits de la personne; le Commissaire aux langues officielles, le Commissaire à l’information et le Commissaire à la protection de la vie privée; un avocat, les membres de la magistrature et les ombudsmans provinciaux. Les détenus peuvent aussi faire appel au Tribunal fédéral.

Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada

151.   La Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a été créée en 1988 en tant qu’organisme civil indépendant (extérieur à la GRC) dont le mandat consiste à surveiller le Service de police national du Canada. La Commission reçoit les plaintes de membres du public au sujet de la conduite des membres de la GRC, qu’elle doit renvoyer, conformément à la loi, à la GRC aux fins d’enquête et de décision. Si l’auteur de la plainte (le plaignant) n’est pas satisfait de la façon dont la GRC a traité celle‑ci, il peut demander un examen indépendant. La Commission peut également lancer des enquêtes et convoquer des audiences publiques et des audiences sur des questions d’intérêt public.

152.   Le mandat de la Commission est énoncé aux parties VI et VII de la loi sur la Gendarmerie royale du Canada. La Commission a notamment mission de:

·               Recevoir les plaintes du public;

·               Revoir la décision rendue par la GRC dans l’instruction de la plainte, à la demande des membres du public qui ne sont pas satisfaits de la décision;

·               Mener des enquêtes et tenir des audiences.

153.   Les plaintes sont déposées par:

·               Des membres du public, directement auprès de la GRC;

·               Des membres du public, auprès de la Commission ou des autorités policières provinciales;

·               La Présidente de la Commission.

154.   La Commission n’est pas un organisme décisionnel; elle présente au Commissaire de la GRC des rapports qui peuvent inclure des recommandations après enquête ou examen des plaintes émanant de membres du public. Ces rapports sont envoyés au Solliciteur général, qui est le Ministre responsable de la GRC. Les recommandations peuvent porter sur des questions précises de conduite ou traiter de questions générales ayant trait aux politiques ou aux pratiques de la GRC. La Commission exerce ses fonctions avec la plus grande objectivité possible. Lorsqu’elle évalue une plainte, elle n’est le défenseur ni du plaignant ni des membres de la GRC. Elle a plutôt mission de mener un examen indépendant et de tirer des conclusions objectives en fonction de l’information disponible.

155.   Chaque année, environ 2 500 plaintes sont déposées par des membres du public contre des membres de la GRC. Près de la moitié d’entre elles vont directement à la Commission, qui les renvoie à la GRC. La plupart de ces plaintes sont réglées par la GRC à la satisfaction des plaignants sans qu’il soit nécessaire de faire appel à la Commission. La Commission est saisie de quelque 250 demandes d’examen par année. La plupart des décisions rendues après examen de la Commission vont dans le même sens que le règlement intervenu dans l’instruction des plaintes par la GRC. Dans environ le quart d’entre elles, la Commission ne souscrit pas au règlement de la plainte par la GRC et peut faire des recommandations pour remédier aux lacunes des politiques et des procédures. Ces recommandations peuvent donner lieu à un éventail de mesures de redressement relatives à des situations particulières ainsi qu’à des changements d’orientation généraux à l’échelle de la GRC.

Examens

156.   Chaque plainte est traitée de la manière suivante. D’abord, la GRC mène une enquête. Ensuite le Commissaire de la GRC communique au plaignant les résultats de l’enquête. Si le plaignant n’est pas satisfait de la façon dont la GRC a donné suite à sa plainte et qu’il a demandé à la Commission de faire un examen, la Présidente de la Commission peut demander à la GRC ou à la Commission d’approfondir l’enquête si cette première enquête est jugée inadéquate ou si la Présidente estime qu’il faut enquêter davantage. La Présidente de la Commission peut également entamer sa propre enquête dans l’intérêt public; ou la Présidente de la Commission peut tenir une audience publique.

157.   Si la Présidente de la Commission est satisfaite de la décision rendue par la GRC à l’égard d’une plainte, elle le signale par écrit au plaignant, aux membres de la GRC mis en cause, au Commissaire de la GRC et au Solliciteur général.

158.   Si elle n’est pas satisfaite, elle envoie un rapport provisoire au Commissaire de la GRC et au Solliciteur général. Ce rapport est traité comme suit: premièrement, le Commissaire de la GRC informe la Présidente et le Solliciteur général par écrit de toute mesure prise comme suite aux conclusions et recommandations de la Présidente, en précisant ses raisons de ne pas donner suite; deuxièmement, la Présidente produit un rapport final qui comprend le texte de la réponse du Commissaire et ses propres recommandations finales et envoie le tout au plaignant, aux membres de la GRC mis en cause, au Commissaire de la GRC et au Solliciteur général.

Audiences

159.   Si elle le désire, la Présidente de la Commission peut convoquer en tout temps une audience publique ou faire enquête sur une plainte. Toutefois, elle ne le fait ordinairement qu’après avoir évalué l’information obtenue au cours d’une enquête de la GRC ou de la Commission. Lorsqu’elle juge qu’il en va de l’intérêt public, elle peut également exercer son pouvoir discrétionnaire de faire enquête sur une plainte relative à certains comportements, même en l’absence d’une enquête préalable par la GRC − c’est ce que l’on entend par une audience d’intérêt public. Un comité composé d’au moins un membre de la Commission est établi et chargé de mener l’audience.

160.   Dans un rapport provisoire, le comité énonce ses conclusions et fait des recommandations en vue d’améliorer les opérations de la GRC ou de combler les lacunes qui peuvent avoir donné lieu à la plainte. Le comité d’audience envoie ce rapport au Commissaire de la GRC, au Solliciteur général, au plaignant, au(x) membre(s) de la GRC mis en cause et aux membres du public qui en ont fait la demande.

161.   Le Commissaire de la GRC est tenu de répondre au rapport pour indiquer si la GRC donnera suite aux conclusions et recommandations du rapport. S’il décide de ne pas donner suite aux recommandations, il doit indiquer les motifs sur lesquels il fonde sa décision. Après avoir tenu compte de la réponse du Commissaire, la Présidente de la Commission produit un rapport final.

162.   Entre avril 1999 et mars 2000, 1 289 plaintes ont été envoyées à la GRC aux fins d’enquête; 63 ont donné lieu à des examens, 66 ont été réglées sans formalités par la GRC, 10 ont été retirées, tandis que 2 ont été jugées comme ne relevant pas de la compétence de la Commission.

Forces canadiennes

163.   À l’issue du rapport de l’enquête publique sur le déploiement des Forces canadiennes (FC) en Somalie en 1993, qui a été présenté au Gouverneur en conseil en juin 1997, et d’autres études sur le système de justice militaire, le Parlement du Canada a édicté des modifications importantes de la loi sur la défense nationale, qui sont entrées en vigueur le 1er septembre 1999. Une de ces réformes a consisté en la nomination d’un directeur des poursuites militaires indépendant chargé de présenter des actes d’accusation et de mener les poursuites devant toutes les cours martiales. Un service d’enquête national a également été créé et chargé de faire enquête sur toutes les infractions graves. Ce service réunit des enquêteurs de la police militaire ayant reçu la formation requise et il peut porter des accusations en application du Code de discipline militaire, indépendamment des commandants des opérations.

164.   Une commission des plaintes sur la police militaire a été établie; elle a mission de faire enquête et de livrer un rapport au sujet de toute plainte sur la conduite d’un membre de la police militaire. En outre, cette dernière peut présenter des plaintes à la Commission au sujet de toute ingérence apparente dans une enquête policière, ce qui garantit l’indépendance et l’impartialité des enquêtes menées à l’égard des infractions.

165.   Il a été question, dans le troisième rapport du Canada, des procès en Cour martiale des membres des FC relativement aux incidents survenus en Somalie en 1993. Dans une motion préliminaire à sa passation en Cour martiale, le caporal chef Matchee a été jugé inapte à subir un procès pour cause de maladie mentale, plus précisément de lésions cérébrales organiques permanentes. Si son état s’améliore suffisamment, le caporal chef Matchee pourrait subir son procès, relatif au meurtre au second degré et de torture de Shidane Arone. En vertu du droit canadien, l’affaire doit faire l’objet d’un examen judiciaire tous les deux ans en vue de déterminer si la poursuite est toujours en mesure de présenter suffisamment de preuves pour justifier la tenue d’un procès contre l’accusé. D’après le dernier examen, le 20 juin 2000, la poursuite a suffisamment de preuves. La Cour demeure donc saisie des accusations.

Immigration

166.   En ce qui concerne les personnes dans les centres de détention de l’immigration, toutes leurs plaintes sont inscrites et font l’objet d’une enquête et les résultats sont communiqués aux personnes détenues. Tous les détenus peuvent consulter de la documentation qui explique la procédure relative aux plaintes.

Article 14.  Réparation et indemnisation

167.   Toute victime de tortures peut intenter une action en dommages‑intérêts contre le Gouvernement en Cour fédérale ou auprès des cours provinciales. Si la revendication est basée en tout ou en partie sur l’article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés (protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités), une cour peut accorder réparation en application de l’article 24(1) de la Charte.

168.   La loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre reconnaît la nécessité de dédommager les victimes de la torture. Les articles 30 et 32 de cette loi prévoient l’institution du Fonds pour les crimes contre l’humanité. Les sommes recueillies par suite de l’exécution au Canada, à la suite de réparations, de confiscations ou de sanctions, des ordonnances de la Cour pénale internationale seront versées au Fonds. Y seront également versés les dons reçus et les produits de l’aliénation de biens saisis ou conservés dans le cadre de la perpétration d’une infraction de blanchiment d’argent ou de produits visés par cette loi et confisqués par Sa Majesté la Reine. Les sommes versées ou recouvrées en tant qu’amendes imposées en rapport avec les poursuites relatives aux produits de la criminalité visées par la loi seront également versées au Fonds pour les crimes contre l’humanité. Le Procureur général du Canada sera autorisé à effectuer des paiements tirés sur le Fonds à la demande de la Cour pénale internationale ou encore aux bénéficiaires appropriés, y compris les victimes et leur famille.

169.   L’alinéa 672.5(14) du Code criminel prévoit la présentation d’une déclaration de la victime. Il précise que la victime d’une infraction peut produire et déposer auprès de la Cour ou de la Commission d’examen une déclaration écrite décrivant les dommages ou pertes causés par la perpétration de l’infraction.

170.   Le 1er décembre 1999 marquait la date d’entrée en vigueur de la loi modifiant le Code criminel (victimes d’actes criminels) et une autre loi en conséquence visant à améliorer la sécurité et la protection de la vie privée des victimes d’actes criminels dans le système de justice pénale. Elle reconnaissait le fait que les victimes d’actes criminels ont droit à un système de justice pénale qui les traite avec courtoisie, compassion et respect et qui est attentif à leurs besoins. Les principales modifications apportées au Code criminel étaient les suivantes:

·               Veiller à ce que les victimes soient informées des possibilités de préparer une déclaration et leur permettre de lire la déclaration à haute voix en cour si elles le veulent;

·               Obliger la police et les juges à tenir compte de la sécurité des victimes dans toutes les décisions relatives au cautionnement;

·               Faciliter la participation des victimes et des témoins aux procès en élargissant les mesures de protection des victimes et des témoins de jeune âge contre un contre‑interrogatoire les visant personnellement et mené par les accusés qui assurent eux‑mêmes leur défense; accroître les possibilités pour les victimes et les témoins de donner leur témoignage en présence d’une personne qui les appuie; permettre à un juge d’interdire la publication de l’identité des victimes et témoins s’il y a lieu;

·               Obliger tous les contrevenants à payer automatiquement une surcharge de victimes (peine monétaire additionnelle) destinée à accroître les recettes revenant aux provinces et territoires afin d’accroître et d’améliorer les services aux victimes.

171.   La procédure de règlement des griefs prévue à l’article 74 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ne prévoit pas expressément une indemnisation si le grief est accueilli. Avant qu’il soit possible d’examiner la question de l’indemnisation, le détenu devrait établir qu’il a subi un dommage quantifiable. Dans cette éventualité, il peut être décidé de lui verser une indemnisation que ce soit à titre de règlement d’une plainte, si le Service correctionnel est responsable, ou de paiement à titre gracieux.

Article 15.  Déclaration faite sous la torture comme un élément de preuve dans une procédure

172.   D’après l’article 269.1 du Code criminel, dans toute procédure qui relève de la compétence du Parlement, une déclaration obtenue par la perpétration d’une infraction à cet article est inadmissible en preuve, sauf à titre de preuve de cette infraction.

173.   Dans l’arrêt India c. Singh (1996), 108 Canadian Criminal Cases (3d) 274, le Gouvernement de l’Inde a demandé l’extradition du présumé fugitif Singh, pour l’instruction d’une accusation de complot en vue de commettre un meurtre. Le fugitif a soutenu que la plupart des éléments de preuve utilisés par l’État requérant étaient inadmissibles et que, de toute façon, il n’y avait pas de preuves suffisantes pour appuyer un ordre d’extradition. Le juge Oliver de la Cour suprême de la Colombie britannique a déclaré que son rôle, en tant que juge en matière d’extradition, consistait à déterminer s’il y avait suffisamment de preuve pour ordonner le renvoi du fugitif. Dans son examen de la preuve, le juge Oliver a affirmé que le fardeau de prouver que la confession avait été obtenue par la perpétration d’actes de torture reposait sur le fugitif qui faisait cette allégation. Il a ajouté que les auteurs présumés des actes de torture, d’après la défense, étaient sans aucun doute des personnes investies de pouvoirs au sens de l’alinéa 269.1(2) d) du Code criminel. En ce qui concerne les affirmations de M. Singh, il a déclaré que, vu l’absence de toute dénégation de la part des présumés tortionnaires, la preuve était faite, selon toute probabilité, que ce dernier avait été torturé et que, d’après l’alinéa 269.1(4) du Code criminel, la déclaration obtenue par confession était inadmissible. Le juge Oliver a finalement rejeté la demande d’un mandat de dépôt en conformité avec l’article 18 de la loi sur l’extradition.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Châtiment corporel

174.   L’article 43 du Code criminel prévoit que tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer une force raisonnable pour corriger un élève ou un enfant.

175.   Le Gouvernement du Canada a une politique à deux volets au sujet du châtiment corporel. Premièrement, par l’entremise de Santé Canada et du Ministère de la justice, il appuie des mesures d’éducation parentale prônant de s’abstenir d’utiliser le châtiment corporel et il favorise le recours à d’autres méthodes pour corriger un enfant. Deuxièmement, le droit pénal continue d’interdire les mauvais traitements infligés aux enfants. À cet égard, il faudrait noter que les enfants canadiens sont protégés non seulement par le droit pénal, mais aussi par les lois provinciales et territoriales de protection de l’enfance qui garantissent le bien‑être des enfants.

176.   En 1999, la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law a contesté, en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, la constitutionnalité de l’article 43 du Code criminel. Elle a soutenu que l’article 43 du Code criminel violait les droits des enfants garantis par les articles suivants de la Charte: article 7 (droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne auquel il ne peut être porté atteinte qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale), article 12 (droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités) et article 15 (droits à l’égalité). Elle a également fait valoir que cet article du Code criminel était contraire à la Convention relative aux droits de l’enfant.

177.   Le Gouvernement du Canada a quant à lui expressément affirmé, dans ses arguments qu’il ne prônait ni n’appuyait l’utilisation du châtiment corporel comme moyen de discipline à l’égard d’un enfant et a renvoyé à ses documents et activités d’information à l’appui. Il a toutefois soutenu l’approche adoptée dans le droit pénal actuel à l’égard de cette question, à savoir le fait de criminaliser le recours à des mesures de correction non raisonnables par les pères et les mères, les enseignants et d’autres personnes qui jouent le rôle de père et mère sans imposer de sanctions pénales pour le recours à une discipline normative qui est appliquée d’une manière raisonnable et qui tient compte des besoins et de l’intérêt de l’enfant.

178.   La Cour a souscrit aux arguments du Gouvernement du Canada et déclaré que l’article 43 du Code criminel était constitutionnel. La cour d’appel de l’Ontario (Canadian Foundation for Children, Youth and the Law v. Canada (Attorney General), [2002] O.J. No. 61) a reconnu la constitutionnalité de l’article 43 du Code criminel et a indiqué qu’il reflétait un juste équilibre entre les intérêts des enfants, des parents, des enseignants et de la société canadienne en conformité avec la Charte canadienne des droits et libertés. La cour d’appel a statué que l’article 43 ne peut fonder l’existence d’un châtiment de l’enfant imposé par l’État et n’assujettit pas l’enfant à un traitement de la part de l’État. Elle a aussi conclut:

[TRADUCTION] L’article permet à une catégorie limitée de personnes d’appliquer un châtiment physique limité à l’enfant sans que ce châtiment soit qualifié de voies de fait criminelles. [...]

Pour l’exemption de l’application du droit pénal, cet article exige que la force soit appliquée à un enfant par un père ou une mère, une personne qui remplace le père ou la mère ou un enseignant. La force doit être raisonnable dans les circonstances, ce qui comprend inéluctablement d’examiner l’âge et le caractère de l’enfant, les circonstances du châtiment, sa gravité, l’inconduite de l’enfant qui a entraîné le châtiment, l’effet probable de celui-ci sur le comportement de l’enfant et le fait que l’enfant ait ou non subi des blessures. Finalement, la personne qui applique la force doit le faire dans l’intention de corriger l’enfant et l’enfant qui a été corrigé doit pouvoir tirer des leçons de la correction.

[...] l’intérêt de l’État est d’éviter le préjudice causé à la vie de famille par le fait de criminaliser cette conduite.

179.   La Canadian Foundation for Children, Youth and the Law interjette appel de la décision prononcée par la cour d’appel de l’Ontario devant la Cour suprême du Canada.

180.   La loi modifiant le Code criminel (prostitution chez les enfants, tourisme sexuel impliquant des enfants, harcèlement criminel et mutilation d’organes génitaux féminins) (L.C. 1997, chap. 16) est entrée en vigueur le 26 mai 1997. Elle protège davantage les femmes et les enfants contre la violence et l’exploitation. Ces réformes renforcent la réponse du système de justice pénale à la prostitution chez les enfants, au Canada ou ailleurs, en imposant des peines plus sévères à ceux qui se servent de la violence pour forcer les enfants à se prostituer pour un profit et en prévoyant des mesures pour faciliter le témoignage des jeunes victimes contre ceux qui les exploitent.

181.   Le Code criminel a aussi été modifié pour déclarer expressément illégale la pratique de mutilation des organes génitaux féminins au Canada. Cette modification servira d’outil précieux dans nos efforts destinés à sensibiliser les Canadiennes et les Canadiens aux risques que cette pratique présente pour la santé. Outre les modifications au Code criminel, le Gouvernement participe activement à un programme de sensibilisation offert aux communautés où cette pratique est la plus courante.

Réponse aux préoccupations soulevées et aux recommandations faites par le Comité contre la torture en novembre 2000

Utilisation du gaz poivré − Audience sur le Forum de coopération économique Asie‑Pacifique (APEC) (al. 58 a))

182.   À la suite de l’intervention de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) lors des manifestations qui ont eu lieu à l’université de la Colombie britannique durant la Conférence de la coopération économique Asie-Pacifique (APEC) en novembre 1997, la Commission des plaintes du public contre la GRC (dont le mandat est expliqué ci-dessus dans le présent rapport) a reçu un nombre considérable de plaintes au sujet de la conduite de certains membres de la GRC durant ces incidents. Par conséquent, la Présidente a convoqué une audience d’intérêt public sur cette affaire. Au cours de l’audience, les membres de la Commission devaient examiner, entre autres, les plaintes concernant le recours à la force (gaz poivré, chiens policiers et recours à la force physique), la limitation de la liberté d’expression et le traitement des personnes détenues dans les détachements.

183.   Durant l’audience, diverses parties ont soumis des contestations judiciaires à la Cour fédérale du Canada. Au départ, on s’attendait à ce que tous les témoins soient entendus avant la fin de 1999. Cependant, en raison du nombre élevé de témoins et du nombre sans précédent de questions d’ordre juridique et autres soulevées, il a fallu attendre le 31 mars 2000 pour que tous les témoignages soient recueillis. Entre mars 1999 et avril 2000, le Président, le juge Ted Hughes, a entendu les dépositions de 156 témoins. Les observations finales des avocats ont pris fin en juin 2000. Le rapport final de la Commission des plaintes du public contre la GRC sur l’audience d’intérêt public relative aux événements entourant la Conférence de l’APEC, contenant notamment la réponse écrite du Commissaire de la GRC, sera bientôt mis à la disposition du Solliciteur général, de toutes les parties à l’audience et du grand public. On le trouvera sur le site de la Commission à l’adresse suivante: http://www.cpc‑cpp.gc.ca/fCommunique.asp.

Mise en œuvre du rapport de la juge Arbour

184.   Le rapport de la juge Arbour a été présenté au Solliciteur général du Canada en avril 1996. Le Service correctionnel du Canada a ensuite mis sur pied un plan d’action complet pour répondre aux recommandations de ce rapport.

185.   La plupart des recommandations formulées dans le rapport de la juge Arbour ont été mises en œuvre notamment:

·               La nomination de la première Sous‑Commissaire pour les femmes, Nancy Stableforth en juin 1996;

·               La modification de la politique pour garantir que les membres masculins du personnel ne prennent jamais part à la fouille à nu d’une détenue ou n’y assistent;

·               L’interdiction d’utiliser, comme première mesure d’intervention dans les établissements pour femmes, des équipes pénitentiaires d’intervention en cas d’urgence composées d’hommes. Si des équipes ainsi constituées devaient intervenir comme solution de réserve, leur rôle se limiterait à maîtriser la situation;

·               L’obligation d’inclure dans toutes les commissions d’enquête nationales un membre de la collectivité indépendant du Service correctionnel et de mentionner dans les ordres de convocation des commissions d’enquête les dispositions législatives qui s’appliquent;

·               La nomination d’une vérificatrice chargée de faire un rapport sur la mise en œuvre de la politique relative à la mixité du personnel;

·               La négociation et le versement de dommages‑intérêts pour les détenues en cause dans les incidents survenus à la prison des femmes.

186.   Plusieurs des recommandations portent sur des questions que le Service correctionnel considère comme des questions opérationnelles courantes, par exemple, la simplification du processus d’élaboration des politiques, la recherche sur diverses questions qui concernent les délinquantes et la collaboration avec les services correctionnels provinciaux et territoriaux sur des questions concernant les délinquantes et des questions de gestion.

187.   À la recommandation de la juge Arbour, un poste de sous‑commissaire pour les femmes a été créé. On a décidé que le titulaire de ce poste exercerait un pouvoir fonctionnel plutôt qu’une autorité hiérarchique. On a estimé que le fait de placer hors du pouvoir régional de tous les autres établissements et programmes le pouvoir exercé sur les délinquantes sous responsabilité fédérale nuirait à l’intégration des programmes pour les femmes dans toute la structure correctionnelle. On a aussi estimé que la séparation du pouvoir hiérarchique pour les délinquantes et pour les délinquants nuirait à la structure régionale et aurait tendance à marginaliser les établissements pour délinquantes. Bien que la Sous‑Commissaire pour les femmes n’exerce pas réellement un pouvoir hiérarchique sur les établissements pour femmes, en tant que pouvoir fonctionnel, elle participe activement aux opérations à ces établissements et doit être consultée pour toutes les décisions importantes touchant les délinquantes.

188.   En 1998, la Sous‑Commissaire pour les femmes a adopté le Protocole opérationnel national – Dotation des postes de première ligne. Cette politique décrit le rôle que le personnel opérationnel masculin est autorisé à jouer et réitère l’engagement qu’aucun membre masculin du personnel ne participe à des fouilles à nu. Le bureau de la Sous-Commissaire pour les femmes examine les bandes vidéos enregistrées dans les cas d’usage de la force et fait rapport sur l’usage de la force relativement à toutes les délinquantes pour vérifier l’observation du Protocole national. Jusqu’à présent, cet examen n’a révélé aucun cas où des membres masculins du personnel auraient participé ou assisté à des fouilles à nu pratiquées sur des délinquantes. Le secteur des délinquantes du Service correctionnel du Canada continuera de revoir les vidéos portant sur l’usage de la force, et toute allégation de manquement au Protocole national sera examinée.

189.   Une des recommandations voulait que la décision en matière d’isolement soit prise de manière indépendante. En octobre 2000, le Gouvernement du Canada a répondu à un sous‑comité sur la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et a proposé un processus amélioré d’examen des cas d’isolement qui comprendrait des représentants de l’extérieur. Nous croyons que cette mesure assure un juste équilibre entre, d’une part, l’arbitrage indépendant et, d’autre part, la promotion d’une responsabilité opérationnelle appropriée de la part du Service correctionnel du Canada. Ce modèle sera mis en œuvre dans le cadre d’un projet pilote dans toutes les régions, et une évaluation indépendante détaillée sera effectuée. Un comité directeur composé de membres du Service et de l’extérieur pourrait orienter l’élaboration du projet pilote.

190.   Une autre recommandation dont la mise en application est en cours concerne la question de la réalisation du projet triennal de vérification indépendante de la politique de dotation mixte dans les établissements pour femmes. Le premier rapport annuel du projet de vérification de la dotation mixte a été rendu public le 9 octobre 1998, le deuxième a paru le 2 février 2000 et le troisième en janvier 2001. Le Service correctionnel s’occupe de toutes les questions que soulèvent les rapports de la vérificatrice indépendante.

191.   En résumé, la plus grande partie des recommandations formulées dans le rapport de la juge Arbour ont été mises en application ou constituent des sujets sur lesquels le Service travaille très activement. Ce rapport a joué un grand rôle dans l’amélioration des politiques et programmes correctionnels, tant pour les délinquantes que pour les délinquants.

Usage de la force et administration involontaire de substances sédatives au cours de l’application des mesures de renvoi (al. 58 c))

192.   La politique du Gouvernement prévoit que l’exécution des mesures de renvoi d’individus du Canada doit se faire d’une manière ordonnée et humaine, propre à garantir la sécurité de la personne qui en fait l’objet, des agents d’escorte, du personnel navigant et des autres passagers.

193.   À titre d’exemple du genre de situations auxquelles font face les agents d’escorte, mentionnons que certaines personnes qui n’acceptent pas leur renvoi du Canada vont réagir en faisant du désordre au moment d’embarquer ou pendant le vol. Cette réaction peut prendre la forme de violence physique exercée contre elles-mêmes ou autrui, de cris, de hurlements, de crachats ou de morsures.

194.   Des normes ont été fixées dans les situations d’exécution de la loi pour la contention des personnes sous garde. Ces normes s’appliquent aussi au renvoi de personnes du Canada. Le recours à des dispositifs de contrainte est acceptable lorsqu’il n’existe pas d’autre moyen réaliste de permettre aux agents d’escorte d’effectuer le renvoi d’une manière sûre et sans danger.

195.   Avant de pouvoir utiliser des mesures de contrainte, l’agent d’escorte doit avoir des motifs raisonnables de croire qu’une personne présente un risque pour la sûreté et la sécurité. De tels motifs ressortent habituellement d’un examen en profondeur du dossier et de tous les renseignements disponibles concernant les antécédents et le tempérament de la personne. Si, pour appliquer les mesures de contrainte, il faut employer la force, celle‑ci ne doit pas outrepasser la force nécessaire pour maîtriser la personne de manière à pouvoir exécuter le renvoi. Dans les cas où le recours à la force s’avère nécessaire, l’agent doit se conformer aux obligations de rapport fixées par le ministère dans sa politique sur le recours à la force et le repli. Outre les mesures de contrainte, le recours au casque protecteur est permis si cette mesure s’avère nécessaire pour empêcher la personne de se blesser.

196.   En ce qui concerne l’administration de substances sédatives, la politique et la pratique dans ce domaine font l’objet d’un examen. À l’heure actuelle, cette mesure est une procédure exceptionnelle, rarement utilisée et qui ne peut l’être qu’avec l’autorisation des tribunaux. Dans de tels cas, elle est pratiquée par un médecin qui doit accompagner la personne et les agents d’escorte pendant le renvoi.

Évaluation avant renvoi des risques que présentent des criminels dangereux ou des personnes considérées comme une menace pour la sécurité (al. 59 b))

197.   Une évaluation du risque est faite dans tous les cas où il est allégué qu’une personne peut être victime de torture après l’exécution d’une mesure de renvoi tel que précisée à l’article 3 du présent rapport. Des garanties procédurales minimales sont montrées dans le cas Canadian Suresh. Chaque projet de loi qui devient une loi est accompagné de séances de formation à l’intention des agents de l’immigration, y compris de ceux qui sont chargés de l’évaluation des risques.

Poursuites et moyens de défense opposables aux poursuites (al. 58 g), 58 h), 59 c) et d))

198.   Le Comité contre la torture a recommandé d’«engager des poursuites à l’encontre de tout individu accusé d’avoir commis des actes de torture dans un territoire placé sous sa juridiction lorsqu’il n’extrade pas cet individu et lorsque des éléments de preuve les justifient, et avant toute expulsion». La plupart des allégations selon lesquelles une personne qui se trouve au Canada aurait commis des actes de torture découlent des décisions de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qui statuent qu’une personne n’a pas droit à la protection du statut de réfugié parce qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’elle a commis des actes de torture. La norme de preuve que doit appliquer la Commission avant d’en arriver à cette conclusion est plus faible que celle qui est requise pour déclarer une personne coupable devant un tribunal canadien de juridiction criminelle. En outre, les conclusions de la Commission se fondent habituellement sur le témoignage même du prétendu tortionnaire devant la Commission. La Charte canadienne des droits et libertés interdit d’utiliser un tel témoignage dans d’autres procédures criminelles. Le droit canadien permet aussi à l’accusé de garder le silence pendant les enquêtes et les poursuites criminelles. Par conséquent, la preuve recueillie dans de tels cas ne permet pas d’intenter des poursuites criminelles au Canada. Lorsqu’il existe une possibilité valable d’obtenir des éléments de preuve suffisants à l’étranger, il est possible de procéder à une enquête criminelle.

199.   Le Gouvernement du Canada a examiné soigneusement la préoccupation exprimée à l’alinéa 58 h) des Observations finales au sujet des moyens de défense que peut invoquer une personne accusée de torture.

200.   En ce qui concerne les moyens de défense d’autrefois acquit et d’autrefois convict dans le contexte de poursuites menées à l’étranger dans le but de permettre qu’un accusé puisse échapper à toute responsabilité pénale, le Gouvernement du Canada voudrait faire le commentaire suivant.

201.   La règle générale contre la double incrimination existe en droit canadien en tant que moyen de défense spécial opposable à une accusation criminelle. Une personne qui a déjà été incriminée peut invoquer les moyens de défense d’autrefois acquit et d’autrefois convict. L’alinéa 11 h) de la Charte canadienne des droits et libertés établit que tout inculpé a le droit d’une part de ne pas être jugé de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement acquitté, d’autre part de ne pas être jugé ni puni de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement déclaré coupable et puni. Compte tenu de la généralité de son libellé, l’alinéa 11 h) s’applique au moins prima facie aux acquittements obtenus dans des pays étrangers, pourvu que l’administration de la justice étrangère puisse être respectée sur le plan international et que l’accusé mérite qu’on lui accorde l’application de l’alinéa 11 h) parce qu’il est réellement exposé à un danger.

202.   L’article 7(6) du Code criminel intègre dans une loi la garantie constitutionnelle prévue à l’article 11 h) de la Charte. Il prévoit qu’une personne qui a subi son procès et a été traitée à l’étranger à l’égard d’une infraction de manière que, si elle avait subi son procès ou avait été traitée au Canada, elle aurait pu invoquer les moyens de défense d’autrefois acquit, d’autrefois convict ou de pardon, pourrait invoquer l’un ou l’autre de ces moyens de défense spéciaux et qu’elle peut les invoquer au Canada dans toute poursuite engagée relativement à la même infraction. Cette disposition écarte plus clairement la possibilité d’un simulacre de procès qui permettrait d’invoquer des moyens de défense spéciaux. Le procès étranger doit avoir été mené de telle manière que, s’il avait s’agit d’un procès tenu au Canada, le moyen de défense aurait pu être invoqué. Un simulacre de procès ne satisferait pas à ce critère.

203.   Par conséquent, la protection offerte par l’article 11 h) de la Charte et l’article 7(6) du Code criminel ne s’étendrait pas à un simulacre de procédure. Si un acquittement est frauduleux, l’accusé n’a jamais été exposé et n’aurait donc pas à être protégé contre une deuxième poursuite. Il faut que la décision ait un fondement juridique réel et, dans le cas d’un simulacre de procès, la décision originale est dépourvue d’un fondement juridique approprié. Ainsi, le moyen de défense d’autrefois acquit ne peut être invoqué. De plus, lorsque la détermination de la peine a été faite d’une manière manifestement injuste et déraisonnable, c’est comme s’il n’y avait pas vraiment eu de peine. L’article 11h) ne s’appliquerait donc pas.

204.   Le Comité contre la torture a aussi suggéré de supprimer du droit canadien actuel le moyen de défense selon lequel l’infraction aurait été commise afin d’obéir à une loi en vigueur. Le législateur a précisément adopté l’article 269.1 du Code criminel pour se conformer entièrement aux exigences la Convention contre la torture, et celui-ci inclut tous les éléments énoncés à l’article 2 de la Convention. Toutefois, le Gouvernement du Canada est à examiner s’il serait souhaitable de rédiger d’autres dispositions législatives tenant compte de tous les facteurs pertinents.

205.   Enfin, le Comité contre la torture recommande de retirer de la loi canadienne le moyen de défense selon lequel la personne accusée a obéi à des motivations autres qu’une intention inhumaine. Une intention inhumaine n’est pas un élément essentiel du crime de torture créé par l’article 269.1 du Code criminel.

Organe d’enquête (al. 59 e))

206.   L’article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit que chacun a droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels ou inusités. Cet article n’emploie pas précisément le mot «torture», mais comme la torture est une forme grave de mauvais traitements, l’article 12 de la Charte interdit donc aussi la torture. L’article 24 de la Charte permet à toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la Charte, de s’adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste. Par conséquent, les tribunaux canadiens peuvent connaître des plaintes relatives à des allégations de torture ou de traitement ou peine cruel ou inusité et les victimes peuvent obtenir une réparation et une indemnisation suffisante.

Formation du personnel militaire (al. 59 f))

207.   Outre le Code de conduite des Forces canadiennes, les FC ont adopté des mesures de formation destinées à garantir que leurs membres s’abstiennent de commettre des actes de torture, d’infliger des traitements inhumains ou d’employer une force excessive, et pour qu’ils soient en mesure de reconnaître quand c’est le cas. La formation des militaires canadiens et du personnel international de maintien de la paix – tant militaire que civil – en matière de droit international humanitaire et de droits de la personne est fournie par le Centre canadien international Lester B. Pearson pour la formation en maintien de la paix et par le Centre de formation des Forces canadiennes pour le soutien de la paix. Un guide traitant plus particulièrement de l’usage de la force donne des instructions précises sur la force qu’il est permis d’employer et sur le respect des règles d’engagement par les missions de maintien de la paix: Droit des conflits armés aux niveaux opérationnel et technique (DCA). En 2000, le Canada a publié un guide sur les femmes et le maintien de la paix qui doit servir au cours de la formation des Casques bleus sur la perspective des femmes en matière de droit international humanitaire et de maintien de la paix.

208.   La rubrique qui figure à l’article 10 du présent rapport fournit d’autres renseignements sur le Code de conduite des Forces canadiennes et le manuel relatif au DCA.

Documentation

209.   Les documents suivants sont remis au Comité en même temps que le présent rapport:

·               Charte canadienne des droits et libertés;

·               Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

·               Loi sur l’extradition;

·               Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle;

·               Code de conduite du personnel des FC;

·               Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.


 

 

 

 

 

 

PARTIE III

MESURES ADOPTÉES PAR LES GOUVERNEMENTS DES PROVINCES

 


TERRE‑NEUVE

Introduction

210.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements à Terre‑Neuve d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

211.   Depuis le mois de mars 1996, le Ministère de la justice et le Ministère de la santé et des services communautaires se partagent la responsabilité de la prestation des services correctionnels pour les jeunes. La Division des services correctionnels et communautaires du Ministère de la justice offre aux jeunes de 12 à 17 ans des services de garde en milieu fermé et de détention préventive. Les conseils régionaux de la santé et des services communautaires administrent maintenant les autres services correctionnels à l’intention des jeunes, notamment la garde en milieu ouvert (les foyers de groupe, les familles d’accueil), la surveillance communautaire (la probation), les mesures de rechange (la déjudiciarisation) et la préparation des rapports présentenciels.

212.   Le gouvernement provincial avait demandé à un organisme indépendant de préparer un important rapport sur la garde des adolescents en milieu fermé. Ce rapport a été présenté le 1er avril 1996 et ses 57 recommandations ont été mises en œuvre ou sont en voie de l’être. Elles visent notamment:

·               La tenue d’entrevues avec les jeunes qui sont remis en liberté au sujet de leur traitement en établissement;

·               Le remplacement d’un vieil établissement de détention pour les jeunes à St. John’s;

·               Les moyens envisagés pour permettre aux adolescents sous garde de maintenir la communication avec les travailleurs sociaux et avec leurs proches dans la collectivité.

Article 10.  Éducation et formation

213.   La Division des services correctionnels et communautaires a examiné ses politiques et procédures concernant le recours progressif à la force et se prépare à offrir une formation en ce sens au personnel des services correctionnels.

214.   Le personnel médical, soit les psychiatres et les autres personnes qui œuvrent dans le domaine de la santé mentale, a reçu la formation requise pour procéder au diagnostic et au traitement du syndrome de stress post‑traumatique.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

215.   La Division des services correctionnels cherche à embaucher un professionnel qualifié qui sera chargé d’examiner en profondeur toutes les politiques et les procédures de la Division, notamment celles qui traitent de la sûreté et de la sécurité, des services médicaux, des programmes destinés aux délinquants et de la gestion des délinquants. Ceci aidera à garantir que les politiques sont à jour et qu’elles respectent les normes canadiennes et internationales, de même que les conventions internationales.


ÎLE‑DU‑PRINCE‑ÉDOUARD

Introduction

216.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements à l’Île‑du‑Prince‑Édouard entre avril 1996 et avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

217.   Les textes suivants interdisent la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans la province de l’Île‑du‑Prince‑Édouard (Î‑P‑É):

          a)       La Charte canadienne des droits et libertés est appliquée à l’Île‑du‑Prince‑Édouard comme dans les autres provinces, c’est‑à‑dire par le biais du processus du droit criminel. Une personne accusée d’une infraction peut présenter à la Cour une requête en vertu des articles 7, 9 ou 12 de la Charte à titre de défense ou d’autres facteurs atténuants l’accusation;

          b)      La loi sur les services à l’enfance et à la famille (Child and Family Services Act) et la loi sur la protection des adultes (Adult Protection Act) ont la même fonction que celle dont il a été fait état dans le premier rapport du Canada, c’est‑à‑dire qu’elles protègent les enfants contre la négligence et les mauvais traitements et les adultes incapables de se protéger eux‑mêmes;

          c)       La loi sur les écoles (Schools Act) protège les élèves contre les punitions sévères de la part des enseignants et autres administrateurs scolaires. Les articles 6 à 15 du Règlement sur les élèves et les parents (Students and Parents Regulations) de la loi sur les écoles permettent à un directeur d’école et à une commission scolaire de suspendre ou d’expulser un élève dans des circonstances limitées. Ces dispositions prévoient des limites aux suspensions et aux expulsions, dont l’obligation que celles-ci reposent sur un motif valable tel que défini dans le Règlement, la nécessité de signaler la suspension à la commission scolaire et le recours possible à une procédure d’appel pour l’élève et les parents. Les enseignants sont également assujettis au Code criminel et des tribunaux criminels ont instruit deux affaires relatives à des plaintes d’abus sexuels déposées par des élèves contre leurs enseignants. Des accusations ont été portées dans les deux cas, mais il n’y a pas eu de condamnation. À titre de condition d’emploi, les enseignants de l’Île‑du‑Prince‑Édouard doivent respecter les politiques et lignes directrices disciplinaires établies par les commissions scolaires. Les châtiments corporels sont interdits dans les écoles publiques. Chaque école doit distribuer un guide de l’élève énonçant les règles à suivre par les élèves et les sanctions prévues en cas d’infractions;

          d)      La loi sur les services correctionnels (Correctional Services Act) a été promulguée en 1992, en remplacement de la loi sur les prisons (Jails Act) et de la loi sur les mesures correctionnelles (Corrections Act). La nouvelle loi régit la gestion et le traitement des détenus par le personnel des établissements correctionnels de la province en favorisant une norme axée sur la compassion par l’emploi de la force minimale nécessaire pour venir à bout des situations extrêmes. La loi impose également des limites quant aux sanctions infligées aux prisonniers qui contreviennent aux règles. L’article 24 du règlement d’application de la loi sur les services correctionnels énonce les sanctions que peut imposer un directeur de centre de détention (autrefois gardien de prison), dont le retrait de privilèges, l’exercice de tâches supplémentaires, le paiement des dommages causés par le détenu, l’isolement pendant au plus quatre jours et la suppression des réductions de peine. L’isolement peut être imposé pendant au plus quatre jours, mais seulement avec l’autorisation du directeur des services correctionnels. L’alinéa 15 f) du règlement prévoit des conditions applicables à l’isolement, dont la communication au détenu des motifs de la sanction et le fait d’informer le directeur du centre de détention de la situation au plus 48 heures après le début de la sanction. L’article 18 énonce la marche à suivre régissant les fouilles des détenus, et l’article 15 oblige les agents des services correctionnels à s’assurer que les détenus reçoivent des repas suffisants ainsi que des soins médicaux, si nécessaire.

Article 3.  Expulsion et extradition

Le contexte de l’immigration

218.   Citoyenneté et immigration Canada (CIC) gère un bureau à Charlottetown qui s’occupe du traitement des réfugiés qui débarquent à l’Île‑du‑Prince‑Édouard. Cependant, CIC n’accumule des statistiques que sur les réfugiés parrainés par le Gouvernement et non sur ceux parrainés par des particuliers. La présence des réfugiés admis à l’Î‑P‑É tient surtout aux conflits armés et aux déplacements forcés dont ils sont victimes dans leur patrie d’origine.

219.   CIC finance un certain nombre de programmes d’établissement destinés aux réfugiés de l’Î‑P‑É, y compris un programme d’apprentissage de la langue dispensé par un collège communautaire local, un programme d’aide au réétablissement, un programme de soutien du revenu et un programme d’établissement et d’adaptation des immigrants qui s’applique à tous les immigrants, et non pas seulement aux réfugiés. Le programme d’établissement et d’adaptation prévoit l’aiguillage des réfugiés vers les organismes compétents pour l’obtention de services de counselling individuel, de formation en vue d’un emploi, etc.

220.   Le programme d’aide au réétablissement est dispensé par l’Association de l’Î‑P‑É pour les nouveaux arrivants au Canada (PEI Association for Newcomers to Canada), un organisme local sans but lucratif financé par CIC, Développement des ressources humaines Canada et Patrimoine canadien. Le programme fournit un logis temporaire, des denrées alimentaires, de l’argent de poche, une introduction à la communauté, à la devise, etc. de même qu’une aide pour trouver un logement permanent. L’Association parraine également un programme en vertu duquel des bénévoles sont jumelés à des nouveaux arrivants en vue de les aider à découvrir la collectivité et à se constituer un réseau d’appui général. Le programme de soutien du revenu de CIC consent pour sa part une aide financière générale aux réfugiés pendant un an.

221.   En 1999, 105 réfugiés sont arrivés à l’Î‑P‑É en provenance du Kosovo, et 62 sont restés après un an. De plus, 55 réfugiés sont venus d’autres pays, comme la Yougoslavie, la Birmanie, l’Afghanistan et l’Éthiopie. En 1998, on a dénombré 38 nouveaux arrivants du Salvador et de la Yougoslavie. En 1997, 59 réfugiés sont venus notamment de l’Éthiopie, du Guatemala, de la Yougoslavie et du Soudan. En 1996, les 54 arrivants venaient essentiellement du Guatemala et du Mexique.

222.   La plupart des réfugiés qui arrivent à l’Î‑P‑É ont été choisis par les responsables de l’immigration en fonction de leur potentiel d’intégration dans la société. En vertu d’une nouvelle procédure de sélection, les réfugiés seront désormais admis en fonction du niveau de danger auquel ils sont exposés dans leur pays d’origine. Ainsi, un grand nombre de réfugiés du Kosovo ont été accueillis à l’Î‑P‑É en vertu d’un permis ministériel ou dans le cadre d’un programme pilote de protection d’urgence.

223.   Outre les réfugiés accueillis ponctuellement dans un souci de protection d’urgence ou humanitaire, le Gouvernement de l’Î‑P‑É s’entend avec CIC quant au nombre de réfugiés qui seront admis dans la province chaque année. En l’an 2000, la province avait accepté d’accueillir plus de 60 réfugiés. Au 20 août 2000, toutefois, seulement 20 % de ce nombre étaient arrivés, mais les nouvelles arrivées se font généralement à l’automne.

224.   À titre de résidents de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, les réfugiés et les immigrants reçus peuvent être admissibles aux prestations de la loi sur l’aide au titre des médicaments (Drug Cost Assistance Act) et de la loi sur les soins de santé et les services communautaires (Health and Community Services Act). Si les réfugiés et les immigrants sont admissibles aux soins de santé de base, on est conscient de la nécessité de rendre plus accessibles à ce groupe les services de médecins de famille. En raison d’une pénurie de médecins, il n’est guère facile pour les réfugiés et les immigrants d’accéder à des services de santé ponctuels.

225.   L’Association souhaiterait que l’on soit plus conscient du bien‑fondé de fournir aux réfugiés qui ont subi des traumatismes extrêmes dans leur pays d’origine, comme la torture et d’autres violations des droits humains, des services de counselling et soutien professionnels. L’Association canadienne pour la santé mentale distribue un répertoire de groupes d’entraide à l’Î‑P‑É, mais ce dernier ne contient pas de renseignements sur les groupes d’aide aux réfugiés.

226.   Le Centre canadien pour victimes de torture établi à Toronto a proposé de tenir des séances de formation à l’intention des préposés d’établissements à l’Î‑P‑É, particulièrement les personnes qui œuvrent auprès des demandeurs du statut de réfugié. Cependant, en raison de changements au niveau du personnel du Centre, aucune formation n’avait été dispensée au moment de publier le présent rapport.

Article 7.  Poursuites judiciaires

227.   L’Île‑du‑Prince‑Édouard se conforme à cet article puisque la province doit faire appliquer l’interdiction de la torture prévue dans le Code criminel (art. 245.4) et l’interdiction des peines et des traitements cruels, inhumains ou dégradants prévue dans la Charte canadienne des droits et libertés (art. 12).

Article 10.  Éducation et formation

228.   L’Institut de la justice (Justice Institute), basé à l’Île‑du‑Prince‑Édouard, assure la formation des agents de police, des agents des services correctionnels, des agents de conservation, des préposés à la sécurité et d’autres agents provinciaux et privés responsables de l’application de la loi dans le Canada atlantique. La formation relative à l’usage de la force est dispensée pendant tout le programme de sorte que les agents sauront réagir comme il se doit dans toutes sortes de situations, ce qui assurera un nombre limité de cas d’allégations d’usage abusif de la force à l’Île‑du‑Prince‑Édouard. La formation repose sur la formule énoncée à l’article 25 du Code criminel du Canada, soit l’application de la «force nécessaire», et est conforme à la formation dispensée ailleurs en matière d’application de la loi. Elle va de l’utilisation de stratégies verbales, comme l’intervention dans les situations d’urgence et la médiation, à la négociation, dans les situations moins extrêmes, jusqu’à l’utilisation d’armes intermédiaires et au recours à la force susceptible de causer la mort, pour les personnes opposant une forte résistance. On fait appel aux cours magistraux, aux mises en situation, aux simulations sur ordinateur et à la formation sur le terrain pour dispenser l’information et les connaissances.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

229.   Cet article, qui vise à prévenir la torture des personnes en état d’arrestation, détenues ou emprisonnées, correspond à la loi sur les services correctionnels de la province, tel que décrite aux articles 2 et 13.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate

230.   Les incidents de torture soupçonnés feraient l’objet d’enquêtes policières, conformément à l’article 245.4 du Code criminel. Aucune procédure n’a été intentée en vertu de la disposition.

231.   De plus, deux lois provinciales, la loi sur les coroners (Coroners Act), R.S.P.E.I. 1957, chap. 10, et la loi sur les statistiques de l’état civil (Vital Statistics Act), R.S.P.E.I. 1974, chap. V‑6, exigent la tenue d’enquêtes spéciales lorsqu’il semble qu’une personne a perdu la vie à la suite d’un acte ou d’actes de violence, d’une mésaventure, de moyens illégitimes, d’une inconduite ou de circonstances douteuses ou soudaines. La loi sur les statistiques de l’état civil exige la tenue d’une enquête avant que ne soit émis le permis d’inhumer.

232.   En vertu de la loi sur les coroners, quiconque a des motifs de croire qu’une personne a perdu la vie dans l’une des circonstances énoncées plus haut doit immédiatement signaler la chose au coroner. Les gardiens ou superviseurs de prison doivent également informer le coroner du décès d’un détenu dans un établissement carcéral, une maison de correction ou un lieu de détention.

Article 13.  Allégations de torture

233.   La Commission des plaintes du public contre la GRC est un organisme fédéral indépendant auprès duquel les membres du public peuvent porter plainte à l’égard de la conduite d’agents de la GRC en devoir. À l’Île‑du‑Prince‑Édouard, la procédure s’amorce par le dépôt d’une plainte, par un membre du public, auprès du détachement de police visé. Le dossier est alors confié à un enquêteur, qui fait enquête et remet son rapport au sergent en chef. Celui‑ci recommande alors des mesures internes, y compris une procédure de suivi. Si le plaignant n’est pas satisfait de l’issue de l’enquête, il peut en appeler auprès de la Commission des plaintes du public contre la GRC. La Commission revoit alors tout le dossier, puis décide si l’enquête a été menée comme il se doit et si les conclusions qui ont été tirées sont justifiées. Elle peut alors demander au détachement visé de donner suite à l’affaire ou mener sa propre enquête.

234.   Entre 1992 et 1996, quelque 88 plaintes ont été déposées auprès de détachements provinciaux de l’Î‑P‑É, et 29 plaintes ont été portées directement auprès de la Commission. En 1997, 13 plaintes ont été formulées auprès des détachements. De ce nombre, trois ont été réglées sans formalités après la conclusion d’une entente avec l’enquêteur. Les 10 autres ont été réglées selon la procédure, suivant une enquête exhaustive. Deux de ces plaintes ont été déférées à la Commission des plaintes du public contre la GRC, qui a jugé que l’enquête et les recommandations afférentes répondaient aux normes. En 1998, six plaintes ont été déposées auprès de détachements et une autre auprès de la Commission. De ces sept plaintes, une a été réglée sans formalités, tandis que les autres l’ont été selon la procédure prévue. En 1999, les détachements ont reçu cinq plaintes, et la Commission, sept. De ces nombres, trois ont été réglées sans formalités et neuf, selon la procédure officielle.

235.   L’Î‑P‑É ne possède aucun mécanisme d’examen des gestes posés par les agents de police municipaux hormis le dépôt d’une plainte auprès du chef du service de police en cause. La province ne possède pas non plus de commission de police mais a prévu un mécanisme d’enquête et d’instruction applicable aux plaintes, lequel prévoit que, lorsqu’une personne porte plainte au sujet de la conduite d’un agent de police, l’agent responsable des relations publiques mène enquête à l’égard de la plainte et fait état de ses constatations au chef de police.

236.   La plupart des plaintes se règlent à ce niveau, mais dans le cas où le plaignant est mécontent du résultat, il peut s’adresser à un comité de police, qui relève des conseils municipaux. Le comité est composé d’un président et d’un membre d’un conseil, du directeur des services au public et de deux conseillers, dont le chef de police et l’agent responsable des relations publiques. Il revoit les activités quotidiennes du service de police pour s’assurer que celui-ci respecte les politiques et les marches à suivre en vigueur. Le service de police a son code déontologique, et, selon la nature de la plainte, la procédure d’instruction pourrait prévoir la comparution devant un comité de discipline présidé par le maire de la municipalité. Le plaignant peut également s’adresser au Procureur général s’il estime que sa plainte n’a pas été instruite comme il se doit ou qu’il y a eu tentative de camouflage. De plus, s’il agit d’une affaire criminelle grave, ou si le plaignant le juge nécessaire, le comité de police peut demander à un autre service de police de faire enquête.

237.   L’on ne tient pas de statistiques sur le nombre de plaintes que traitent les comités de police ni sur l’issue de celles‑ci.

238.   La loi sur les services correctionnels (Correctional Services Act) confère au lieutenant‑gouverneur en conseil le pouvoir d’établir des règlements en ce qui concerne le traitement des détenus dans les établissements carcéraux de la province. En vertu de la loi sur les services correctionnels de 1992, le directeur des services communautaires et correctionnels est responsable de l’administration des services correctionnels, sous la direction du Procureur général. Il peut établir, modifier et mettre en application un code déontologique applicable aux directeurs et aux employés des centres. En vertu de l’ancienne loi sur les prisons, le ministre était directement responsable de l’application de la loi, et le gardien de prison (que l’on appelle désormais le «directeur du centre de détention») exerce les fonctions relatives au soin et à la garde des détenus ainsi qu’au maintien de la discipline chez ceux‑ci, sous la houlette du ministre. La loi ne prévoyait pas de code déontologique ni de disposition, comme celle prévue à l’article 15 de la loi sur les services correctionnels, relative à la réalisation d’enquêtes et d’examens au sujet de la conduite des employés des centres de détention.

Article 14.  Réparation et indemnisation

239.   À l’Île‑du‑Prince‑Édouard, les victimes qui subissent des blessures dans le cadre d’actes criminels commis après la promulgation, en 1989, de la loi sur les victimes d’actes criminels (Victims of Crime Act) peuvent recevoir des indemnisations. Pour y être admissible, l’intéressé(e) doit avoir subi des lésions corporelles, y compris une commotion cérébrale. Les personnes qui encourent des pertes pécuniaires ou qui engagent des dépenses à cause de la blessure ou du décès d’une victime d’acte criminel peuvent aussi demander compensation auprès des services aux victimes, organisme chargé de l’administration des demandes de compensation. Si l’on a des preuves qu’il s’agit d’un acte criminel, une indemnisation peut être accordée, même si l’auteur de l’acte criminel a été ni appréhendé ni condamné. L’acte en question doit cependant avoir été signalé à la police et la victime doit collaborer à l’enquête. Entre 1996 et 1999, 109 victimes ont reçu une compensation, c’est‑à‑dire 22, en 1996, 25, en 1997, 30, en 1998, et 32, en 1999.

 


NOUVELLE‑ÉCOSSE

Introduction

240.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements en Nouvelle‑Écosse d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

241.   Le Ministère provincial de la justice applique les dispositions du Code criminel du Canada et notamment de l’article 269.1, qui indique spécifiquement que la torture est un acte criminel et qui écarte tout moyen de défense fondé sur l’obéissance aux ordres d’un supérieur.

242.   Aux termes de la loi sur les hôpitaux de la Nouvelle‑Écosse (Hospitals Act, R.S.N.S. 1989, chap. 208), un agent de la paix qui appréhende et détient une personne en vue d’un examen médical qui peut entraîner son admission dans un établissement de soins psychiatriques doit, dans les 24 heures qui suivent l’appréhension, présenter un rapport complet au Procureur général. La personne détenue doit être examinée par un médecin dans les 24 heures suivant son admission, et une personne admise officiellement peut demander à un comité d’examen de revoir la déclaration de capacité ou de compétence qui la concerne.

Article 6.  Détention et autres mesures légales, et
Article 7.  Poursuites judiciaires

243.   Les dispositions législatives provinciales sur l’habeas corpus sont énoncées dans la loi sur la liberté de la personne (Liberty of the Subject Act, R.S.N.S. 1989, chap. 253). Cette loi garantit que les recours par voie d’habeas corpus en common law ne peuvent être abrogés ou modifiés. Elle affirme également que ce recours a son plein effet et ne peut être refusé à quiconque en Nouvelle‑Écosse.

Article 10.  Éducation et formation

244.   Tous les agents de correction de la province suivent une formation de base obligatoire qui comprend l’examen de la Charte canadienne des droits et libertés. Depuis 1992, environ 25 % des agents de correction ont suivi un cours sur l’intervention verbale en situation d’urgence. Ce cours vise à diminuer le nombre d’interventions physiques et il est encore offert aux agents qui n’ont pas eu la possibilité de le suivre. Le programme des services correctionnels, qui est enseigné au niveau des collèges communautaires, est en voie de constituer un comité consultatif du programme composé de membres provenant des services correctionnels pour les jeunes, de foyers de groupes, des ministères fédéral et provincial de la justice et des départements de criminologie des universités. Le programme traite de la Charte canadienne des droits et des libertés et de la loi sur les droits de la personne (Human Rights Act) de la Nouvelle‑Écosse.

245.   Au mois de mars 1996, la Nouvelle‑Écosse est devenue la première province au Canada à appliquer dans l’ensemble de la province une politique sur le recours à la force. Cette politique vise à réduire le recours inutile à la force ainsi que les blessures aux policiers et aux suspects, et elle signale la possibilité d’utiliser d’autres moyens que la force meurtrière. Environ 97 % des policiers de la province ont suivi le cours de deux jours au sujet de cette politique; ce cours sera offert chaque année à tous les agents.

246.   Comme mentionné dans le troisième rapport du Canada, la province a constitué une équipe spéciale interinstitutions chargée de faire enquête au sujet des incidents critiques. Cette équipe réunit des représentants de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), des corps policiers municipaux, de la police militaire, du Ministère des ressources naturelles, du Ministère des pêches et de Ports Canada. L’équipe est chargée de faire enquête sur les cas de décès ou de blessures graves causées ou subies par un agent de la paix. Chaque enquête est dirigée par un membre d’un organisme autre que l’organisme en cause dans l’incident et le rapport doit être rendu public.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

247.   La loi sur les services correctionnels (Corrections Act, R.S.N.S. 1989, chap. 103) prévoit la garde sûre et sécuritaire des délinquants, l’inspection des établissements de détention et le respect des normes prescrites.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate

248.   La loi sur les enquêtes en cas de décès (Fatality Inquiries Act, R.S.N.S. 1989, chap. 164) prévoit la tenue d’une enquête sur les causes et les circonstances du décès d’une personne dans une prison ou dans un autre endroit s’il y a lieu de croire que le décès est attribuable à la violence ou à la négligence coupable.

Article 13.  Allégations de torture

249.   Aux termes de la loi sur la police (Police Act, R.S.N.S. 1989, chap. 348), la Commission de police de la Nouvelle‑Écosse est responsable d’enquêter sur les plaintes portées contre la police. Si l’enquête de la Commission n’aboutit pas, la plainte peut être portée devant la Commission d’examen, qui doit tenir une audience publique et fournir par écrit les motifs de ses décisions. La Commission d’examen peut confirmer ou modifier les sanctions prises contre les agents ou accorder des dépens.

250.   Le règlement d’application de la loi sur la police oblige les corps policiers municipaux à saisir la Commission de police des cas de discipline interne. On peut se procurer le rapport annuel de la Commission de police de la Nouvelle‑Écosse dans les bibliothèques publiques et à la librairie du gouvernement de la Nouvelle‑Écosse.

251.   La loi sur l’ombudsman (Ombudsman Act, R.S.N.S. 1989, chap. 327) autorise le personnel du bureau de l’Ombudsman à pénétrer dans des locaux et à faire enquête au sujet des allégations d’infraction à l’endroit d’une personne détenue dans un établissement correctionnel ou à l’endroit d’un patient d’un hôpital psychiatrique. S’il existe d’autres recours, le personnel du bureau peut déterminer si la procédure et la politique sont équitables et, le cas échéant, si la procédure a été suivie comme il se doit.

252.   Le bureau de l’Ombudsman tient des dossiers distincts pour les plaintes visant des établissements correctionnels à l’exception de celles visant le Ministère de la justice qui est responsable de ces établissements. Le bureau mène des visites mensuelles dans tous les établissements correctionnels pour les adolescents et maintient un registre des plaintes que peuvent consulter tant les détenus que les employés de ces établissements qui ne sont pas des gestionnaires.

Article 14.  Réparation et indemnisation

253.   Selon la loi sur les blessures mortelles (Fatal Injuries Act, R.S.N.S. 1989, chap. 163), les membres de la famille d’une personne dont le décès est attribuable à la négligence ou à un délit ont le droit d’intenter une action et de recouvrer des dommages‑intérêts.

254.   Aux termes de la loi sur les poursuites contre l’État (Proceedings Against the Crown Act, R.S.N.S. 1989, chap. 360), le Gouvernement peut être tenu responsable des actes délictueux de ses agents et de ses fonctionnaires, notamment les agents qui exercent des fonctions prévues par la loi.


NOUVEAU‑BRUNSWICK

Introduction

255.   Ce rapport signale les changements survenus depuis le troisième rapport du Canada et offre de l’information additionnelle au sujet de la façon dont le Nouveau‑Brunswick respecte la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le rapport couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

256.   Le Nouveau‑Brunswick souscrit pleinement aux principes de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et met pleinement en œuvre ces dispositions sur son territoire.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

257.   La loi sur la garde et la détention des adolescents, R.S.N.B. 1973, chap. C‑40, reconnaît et déclare que les adolescents qui commettent des infractions ont des besoins spéciaux qui exigent conseils et assistance. Ils ont, à titre propre, des droits et libertés, y compris ceux énoncés dans la Charte canadienne des droits et libertés, notamment le droit de se faire entendre au cours du processus conduisant à des décisions qui les touchent et de prendre part à ce processus.

Article 10.  Éducation et formation

258.   Au Nouveau‑Brunswick, il n’y a pas de centre de formation des policiers. Le centre de formation régional des policiers est l’Atlantic Police Academy, qui se trouve à Summerside, dans l’Île‑du‑Prince‑Édouard. La formation des policiers est conforme aux principes de la Charte canadienne des droits et libertés, du Code criminel du Canada et de la Convention contre la torture des Nations Unies, qui sont tous mentionnés dans les cours qui sont offerts. Dans le cadre de la formation, les agents sont renseignés au sujet des droits des détenus, des procédures de traitement des suspects, des méthodes de contention et des conséquences du recours à la force. L’Atlantic Police Academy se charge également de la formation permanente en cours d’emploi.

259.   Au Nouveau‑Brunswick, deux programmes d’enseignement en sciences infirmières sont offerts, l’un à la faculté des sciences infirmières de l’Université du Nouveau‑Brunswick et l’autre à l’école des sciences infirmières de l’Université de Moncton. Dans le cadre de son programme d’études de deuxième année, la faculté des sciences infirmières offre un cours qui traite de façon spécifique des soins aux victimes de torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Au cours de la deuxième, de la troisième et de la quatrième années du programme, les étudiants travaillent dans divers organismes communautaires et organismes de soins tertiaires où ils peuvent appliquer et approfondir les connaissances acquises. L’école des sciences infirmières offre, dans le cadre de son programme, la formation en vue du traitement des victimes d’agression physique et sexuelle, quelle qu’en soit la cause. Le contenu de certains des cours facultatifs offerts aux futurs infirmiers et infirmières comporte l’examen des droits de la personne dans le contexte de la Convention contre la torture. Là encore, les étudiants peuvent mettre en pratique et approfondir les connaissances acquises dans les établissements communautaires et les centres de service tertiaire.

260.   Des politiques et des procédures ont été établies de concert avec l’Association des familles d’accueil du Nouveau‑Brunswick au sujet des enquêtes relatives aux allégations de mauvais traitement ou de négligence à l’égard des enfants en famille d’accueil, pour lesquelles le Ministre est responsable.

261.   Des protocoles interministériels pour les enfants victimes de mauvais traitements ont été élaborés pour garantir que toutes les mesures prises au Nouveau‑Brunswick en vue de protéger les enfants contre les mauvais traitements et le manque de soins soient efficaces et adaptées aux besoins des enfants. Ces protocoles prévoient des dispositions précises au sujet des familles d’accueil et des établissements de soins de groupes pour les enfants. En particulier, les protocoles interdisent les châtiments corporels dans les foyers de groupes et les familles d’accueil au Nouveau‑Brunswick.

262.   La faculté de droit de l’Université du Nouveau‑Brunswick offre deux cours directement liés à la Convention contre la torture des Nations Unies, soit les suivants:

·               Droit humanitaire international 4133, un cours d’initiation aux théories, aux politiques, aux pratiques et aux règles du droit des conflits armés et du droit humanitaire international;

·               Les droits de la personne 3908, qui présente les droits de la personne au Canada et au niveau international dans le contexte de la Convention des Nations Unies.

263.   Le département des sciences politiques de St. Thomas University offre un certain nombre de cours qui traitent de façon générale de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s’agit des cours suivants: Histoire‑Droits de la personne 3913: le Canada et les crimes de guerre à l’époque contemporaine; Criminologie 3243: les services correctionnels; Criminologie 3133: le droit pénal et la Charte canadienne des droits et libertés (étude de la Convention des Nations Unies et de l’article 12 de la Charte); Criminologie 3223: les jeunes contrevenants; Criminologie 3123: les questions contemporaines.

264.   La section étudiante de l’organisme Amnesty International a parrainé une conférence au Mount Allison College qui a attiré les étudiants et les citoyens intéressés de tout l’est du Canada. Parmi les conférenciers invités, on retrouvait un certain nombre de défenseurs des droits de la personne de renommée internationale, notamment le directeur général de Médecins sans frontières et Stephen Lewis, l’ancien Ambassadeur du Canada aux Nations Unies.

265.   La faculté de droit de l’Université de Moncton offre un cours intitulé Droits fondamentaux, qui est axé spécifiquement sur tous les droits fondamentaux, et un autre cours, intitulé Droit international public, qui traite des droits de la personne. En plus de ces deux cours, l’Université doit offrir à compter de septembre 2000 un troisième cours, Droit de l’immigration, traitant des droits fondamentaux tels l’asile politique et des motifs spécifiques permettant d’accorder l’asile politique, comme la torture et la cruauté.

266.   De plus, le département de sociologie de la faculté des sciences sociales prépare en ce moment un programme menant à une mineure en criminologie et qui doit débuter en septembre 2000. Le programme comprendra deux cours en criminologie traitant directement des droits de la personne et plus spécifiquement des droits visés par la Convention contre la torture.

267.   Le Collège communautaire de Miramichi, qui offre les programmes de techniques correctionnelles, de travail social auprès des jeunes et de justice pénale, dispense dans ces trois programmes des cours qui traitent de la Convention contre la torture. Le contenu de la Convention a été ajouté au cours sur les opérations correctionnelles et au cours sur les opérations de travail social auprès des jeunes, et tous les étudiants des programmes mentionnés ci‑dessus doivent suivre un de ces cours. Ces cours offrent un contenu spécifique portant sur les règles de déontologie des agents de services correction, sur la Charte canadienne de droits et libertés, et plus spécifiquement son article 12 sur le droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités, sur les règles du Code criminel du Canada qui traitent du recours à la force raisonnable et de la politique correctionnelle relative à la force excessive, et sur l’information concernant le harcèlement à l’égard des collègues de travail et des clients dans le système de justice pénale.

268.   Le Collège communautaire de Dieppe offre un programme de techniques correctionnelles qui intègre la Charte canadienne des droits et libertés et qui mentionne spécifiquement l’article 12 concernant le droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités, les règles prévues au Code criminel du Canada concernant le recours à la force raisonnable ainsi que les règles relatives au recours à la force prévue dans la politique sur la juridiction correctionnelle. À compter de l’an prochain, le Collège de Dieppe pourra y intégrer le contenu de la Convention de Nations Unies.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

269.   Le rapport de 1992 intitulé Les services de police au Nouveau‑Brunswick: Le XIe siècle (le rapport Grant) a recommandé de nombreux changements aux règles provinciales concernant la police, notamment l’élaboration de normes professionnelles applicables aux corps policiers.

270.   Les normes ont été élaborées dans le cadre d’un processus exhaustif de consultations et, le 1er mai 1997, par l’effet de l’article 1.1(3) de la loi sur la police, les normes de police du Nouveau‑Brunswick sont entrées en vigueur sous la forme de lignes directrices ministérielles. Le Solliciteur général a donné aux corps municipaux et régionaux de la province cinq ans pour se conformer à ces normes, peu importe que les services policiers soient dispensés par le corps policier ou par un autre corps policier, dans le cadre d’une entente de services avec la GRC ou un corps policier municipal ou régional. Les normes de police du Nouveau‑Brunswick reflètent les plus hautes exigences professionnelles et les pratiques exemplaires prescrites pour les corps policiers, tout en offrant assez de polyvalence pour permettre leur mise en œuvre à l’échelle locale.

271.   Un chapitre des normes de police du Nouveau‑Brunswick traite des aspects organisationnels et opérationnels des services relatifs aux jeunes contrevenants. En raison du statut juridique spécial des jeunes et des jeunes contrevenants, les normes exigent des directives et des modalités claires et conformes à la Charte canadienne des droits et libertés et aux lois actuelles. De plus, la Partie 6 des normes traite des opérations relatives aux prisonniers et aux tribunaux, du transport des détenus, des établissements de détention et de la sécurité dans les tribunaux.

Article 13.  Allégations de torture

272.   Au mois d’avril 1996, le Ministère de la sécurité publique a créé un comité de révision de la loi sur la police (CRLP) composé de représentants de tous les groupes qui s’intéressent directement à la prestation des services policiers. Le Comité est chargé d’examiner la loi sur la police et de recommander au Ministère les modifications qu’il convient d’apporter à la loi.

273.   Au mois de novembre 1998, le comité de révision de la loi sur la police a entrepris une révision exhaustive de la Partie III de la loi sur la police qui concerne les plaintes et la discipline des membres des corps policiers. Étant donné que ce domaine a beaucoup évolué depuis que cette partie de la loi a été adoptée, le Comité a décidé de procéder à une révision complète du processus disciplinaire plutôt que de simplement modifier certaines dispositions. Il est prévu qu’un document exposant les modifications que l’on propose d’apporter à la loi sur la police sera complété au mois de mai 2000. À compter de ce moment, les principaux intervenants examineront le document avant de faire des recommandations au gouvernement.

274.   La loi sur la police autorise la Commission de police du Nouveau‑Brunswick à faire enquête directement, de son propre chef, en réponse à une plainte ou à la demande d’une commission de police ou d’un conseil municipal sur toute question concernant un aspect du maintien de l’ordre dans toute partie de la province. La Commission peut renvoyer une plainte concernant la conduite d’un membre d’un corps policier au chef de police (à la condition que ce dernier ne soit pas visé par la plainte) ou mener elle‑même l’enquête, en nommant un enquêteur ou en tenant une audience. La loi sur la police oblige aussi les chefs de police à informer la Commission de police, dans les 20 jours, de toutes les plaintes reçues. Lorsqu’une enquête est renvoyée par la Commission à un chef de police, celui‑ci doit présenter à la Commission un rapport détaillé sur l’enquête dans les 20 jours suivant son achèvement.

275.   Le Règlement 86‑49 pris en vertu de la loi sur la police et intitulé Règlement sur la discipline, établit un Code de discipline qui prévoit notamment que tout agent de police dans la province doit respecter les droits de la personne, remplir avec impartialité ses devoirs conformément à la loi et sans abus de pouvoir, et se conduire, en tout temps, d’une manière à ne pas jeter de discrédit sur son rôle à titre d’agent de police.

276.   De façon plus spécifique, le paragraphe 39(1) du Règlement 86‑49 interdit à tout policier d’être impoli ou de manquer de respect à l’endroit du public, ou d’utiliser abusivement la force ou d’appliquer un traitement cruel à l’égard d’un détenu ou d’une autre personne qu’il peut rencontrer dans l’exercice de ses fonctions.

277.   Le Code de discipline prévoit également que le harcèlement en milieu de travail peut constituer une infraction grave ou légère et prévoit des dispositions concernant l’abus de l’autorité et la discrimination.

278.   Aux termes des dispositions de la loi sur la police, si une plainte entraîne un verdict de culpabilité à l’égard d’une violation grave du Code, le policier peut faire l’objet de diverses mesures disciplinaires, notamment la suspension ou le congédiement.

Article 14.  Réparation et indemnisation

279.   Le Ministère de la sécurité publique du Nouveau‑Brunswick offre aux victimes d’actes criminels de la province une gamme de services. Aux termes de son mandat, le programme des services aux victimes du Nouveau‑Brunswick doit offrir plusieurs services d’aide et veiller à ce que les victimes soient informées de leurs droits et responsabilités, qu’elles soient aiguillées vers les services et les recours qui conviennent et qu’elles soient traitées avec courtoisie et compassion en atténuant le plus possible les conséquences de leur participation au système de justice pénale. Ce programme autosuffisant est financé en totalité au moyen de la suramende compensatoire perçue à l’égard de toutes les infractions aux lois fédérales ou provinciales commises dans la province. Les lois prévoyant l’établissement et la prestation des services aux victimes sont le Code criminel du Canada et la loi sur les services aux victimes du Nouveau‑Brunswick.

280.   Les services suivants figurent parmi ceux offerts aux victimes d’actes criminels:

·               L’information relative aux services offerts aux victimes d’actes criminels;

·               Le soutien des victimes et la préparation en vue de leur témoignage au tribunal;

·               L’aide pour préparer une déclaration de la victime à l’intention du tribunal, en veillant à ce que les victimes sachent qu’elles peuvent préparer et lire une déclaration de la victime devant le tribunal au moment où il est appelé à déterminer la peine conformément au Code criminel du Canada;

·               La prestation de services de counselling, notamment en ce qui concerne le traumatisme, pour aider les victimes à surmonter le traumatisme et à offrir leur témoignage devant le tribunal;

·               Le renvoi au counselling à court terme et sans frais par des thérapeutes en vue de contrer les effets de la victimisation;

·               L’indemnisation;

·               Le renvoi, au besoin, à des organismes communautaires qui offrent des services aux victimes d’actes criminels.

281.   La loi sur les services aux victimes du Nouveau‑Brunswick prévoit la perception de la suramende compensatoire à l’égard des infractions commises dans la province, les subventions aux organismes communautaires chargés de la prestation des services aux victimes, la promotion de services aux victimes, la diffusion de l’information relative à ces services, la recherche relative aux victimes d’actes criminels et la prestation de services aux victimes dans la province, y compris l’administration de l’indemnisation des victimes d’actes criminels.

282.   En 1996, la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels a été abrogée et le programme d’indemnisation est maintenant régi par le Règlement d’application de la loi sur les services aux victimes.


QUÉBEC

Introduction

283.   Le gouvernement du Québec s’est déclaré lié par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en adoptant, le 10 juin 1987 et conformément à son droit interne, le décret 912‑87. Le présent rapport met à jour, au 31 avril 2000 et sauf indication contraire, les informations contenues dans les rapports précédents sur l’application de ladite Convention.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

284.   Aux termes de la Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., c. C‑12, adoptée en 1975 par l’Assemblée nationale, «tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne». En tenant compte de ce texte, des mesures législatives et administratives ont été prises pour s’assurer du respect des dispositions de la Convention.

285.   La loi sur l’organisation policière, L.R.Q., c. O‑8.1, assujettit tous les policiers et constables spéciaux du Québec aux mêmes règles de conduite, celles prescrites par le Code de déontologie des policiers du Québec, R.R.Q., c. O‑8.1, r. 1. Le Commissaire à la déontologie policière et le Comité de déontologie policière veillent au respect du Code et traitent les plaintes du public à l’encontre de la conduite des policiers. En octobre 1997, l’Assemblée nationale a adopté des modifications à la loi sur l’organisation policière dans le but de procéder à une réforme du régime de déontologie policière. Les principes de base du système ont été maintenus: transparence, accessibilité et indépendance des juridictions complémentaires. La nouvelle législation accorde une priorité à la conciliation comme mécanisme alternatif de résolution des plaintes déposées par le citoyen plutôt que le recours aux tribunaux. Le nouveau régime prévoit, entre autres modalités, que toute plainte jugée recevable est soumise à la conciliation, sauf les plaintes prévues à la loi que le Commissaire doit réserver à sa compétence, notamment celles impliquant la mort ou des blessures graves, les infractions de nature criminelle, les récidives ou autres matières graves de même que les situations où la confiance du public envers les policiers peut être gravement compromise. Ces modifications à la procédure de conciliation se caractérisent également par le traitement privé des plaintes plutôt que par l’audition publique de celles‑ci devant le tribunal, puisqu’il appartient aux parties de s’exprimer elles‑mêmes sans qu’elles soient représentées par des procureurs, de parvenir ensemble à une meilleure compréhension des circonstances et de consigner par écrit leur entente.

Article 4.  Criminalisation de la torture

286.   Le Code criminel (art. 269.1) prohibe la torture d’un citoyen par un fonctionnaire. Au cours de la période couverte, une seule accusation a été portée relativement à cette disposition. Le jugement n’a pas encore été rendu, le processus judiciaire prévoyant que l’accusé, un militaire, sera cité à son procès en octobre 2000.

Article 10.  Éducation et formation

287.   Le Ministère de la sécurité publique a continué à dispenser les sessions de formation relatives au respect des droits et libertés de la personne aux nouveaux agents des services correctionnels. Au cours des dernières années, des sessions de formation portant sur l’intervention physique dans une cellule à occupation double ou sur l’asphyxie positionnelle lors de situations exigeant l’emploi de la force ont également été réalisées.

288.   Quant à la formation du personnel policier, le Ministère de l’éducation continue à assurer la responsabilité de la formation professionnelle et technique au niveau collégial, tel qu’énoncé au paragraphe 169 du troisième rapport du Canada sur l’application de la Convention.

289.   En décembre 1999, un projet de loi destiné à remplacer la loi sur la police et la loi sur l’organisation policière était déposé à l’Assemblée nationale. Ce projet de loi reprend substantiellement les dispositions relatives au fonctionnement des corps de police et prévoit l’intégration des dispositions prévues actuellement dans la loi sur l’organisation policière en matière de déontologie. Le projet de loi oblige tout directeur d’un corps de police à établir des plans de formation professionnelle. Il oblige également toute municipalité à prendre un règlement concernant la discipline des membres de son corps de police et institue un conseil de surveillance de la sûreté du Québec.

290.   Le projet de loi 86 prévoit également l’institution d’une École nationale de police qui succédera à l’Institut de police du Québec. L’École aura pour mission d’assurer la formation initiale dans le domaine de la patrouille‑gendarmerie, de l’enquête et de la gestion policière.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

291.   Sur le plan policier, en plus de maintenir en application les diverses actions mentionnées au paragraphe 173 du troisième rapport du Canada, le Ministère de la sécurité publique s’est engagé à mettre en œuvre des mesures s’inscrivant dans la politique gouvernementale en matière de violence conjugale rendue publique en décembre 1995. Ces actions, réalisées de concert avec les services de police, visent à assurer la protection, l’intégrité et la sécurité des victimes de violence conjugale ainsi que celles de leurs proches. L’implantation des diverses mesures sur le plan policier pour contrer la violence conjugale a eu des conséquences positives:

·               La grande majorité des policiers inscrivent au Centre de renseignements policiers du Québec les cas de violence conjugale;

·               La presque totalité des policiers procèdent, s’il y a lieu, à la saisie des armes à feu dans le cas de violence conjugale;

·               Une proportion élevée de services de police informe les victimes des conditions de mise en liberté de leur présumé agresseur.

292.   Depuis plus de deux ans, une campagne de sensibilisation à propos de la violence faite aux femmes a permis d’atteindre la population en général et les jeunes en particulier. Elle a pour but de les sensibiliser au phénomène non acceptable et criminel de la violence faite aux femmes, notamment dans un contexte de relations amoureuses ou conjugales.

293.   Les corps de police ont utilisé les divers outils mis à leur disposition pour assurer, en matière de garde et de traitement, le respect des droits des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées, dont un «Guide des pratiques policières» visant à assurer le respect de la Charte des droits et libertés de la personne en énonçant, entre autres, des directives concernant l’usage de la force, l’arrestation et la détention et les techniques d’enquête.

294.   Sur le plan correctionnel, les admissions dans les établissements de détention connaissent une baisse constante. Pour l’année 1995‑1996, 65 461 personnes étaient admises en prison. Les admissions se chiffraient à 62 985 en 1996‑1997, 56 954 en 1997‑1998 et à 49 791 en 1998‑1999. Les données préliminaires pour l’année 1999‑2000 semblent suivre cette tendance à la baisse. Ces diminutions constantes sont le résultat de l’utilisation de mesures alternatives à la détention comme par exemple la suspension de permis de conduire et le recours accru aux travaux compensatoires.

295.   Plusieurs directives ont été élaborées ou mises à jour, dans le domaine des services correctionnels pour assurer le respect des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées. Elles concernent entre autres les soins de santé aux personnes incarcérées, les normes d’utilisation et d’application des instruments de contrainte et de contention, et l’utilisation d’une arme à feu.

Article 13.  Allégations de torture, et
Article 14.  Réparation et indemnisation

296.   Il existe plusieurs forums ou recours permettant à tout citoyen qui s’estime lésé dans ses droits ou incorrectement traité de porter plainte. À l’égard du travail des policiers, tout citoyen peut formuler une plainte auprès du Commissaire à la déontologie policière. La procédure suivie dans un tel cas a été élaborée dans les paragraphes 87 à 90 du deuxième rapport du Canada. Le bureau du Commissaire à la déontologie a reçu 1 188 plaintes en 1999‑2000 (1er avril 1999 au 30 mars 2000) mettant en cause 1 934 policiers. Dès réception de la plainte, le Commissaire s’assure que les conditions préalables à la recevabilité de la plainte sont respectées, soit: le respect du délai d’un an prescrit par la loi pour porter plainte; que les allégations concernent un membre d’un corps policier ou un constable spécial; que celui‑ci ait été dans l’exercice de ses fonctions au moment des incidents reprochés et que la conduite reprochée contrevient au Code de déontologie des policiers du Québec. Ainsi, le Commissaire a refusé d’enquêter sur 677 plaintes (56 %), tenter de concilier les parties dans 283 dossiers (23 %) et décidé d’enquêter sur 206 dossiers (17 %). Après enquête, le Commissaire a décidé de porter des citations à comparaître devant le Comité de déontologie policière dans 77 dossiers impliquant 122 policiers.

297.   Sur le plan correctionnel, les personnes qui estiment avoir été maltraitées par les services correctionnels peuvent porter plainte devant les tribunaux civils ou criminels et, si la preuve y donne ouverture, être indemnisées pour le préjudice subi ou obtenir une déclaration de culpabilité contre l’assaillant. Dans l’arrêt Gauthier c. Beaumont ((1998) 2 R.C.S. 3), un individu soupçonné de vol avait été victime de comportement abusif des policiers d’un corps de police du Québec. La Cour suprême du Canada, en dernière instance, a statué que le comportement des policiers avait violé les droits garantis par les articles 1 et 4 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. La Cour a condamné les policiers à 50 000 dollars pour dommages pécuniaires et à 200 000 dollars pour dommages moraux en vertu de l’article 49(1) de la Charte québécoise. Les policiers sont aussi condamnés à 50 000 dollars à titre de dommages exemplaires en vertu de l’article 49(2) de la Charte québécoise pour avoir intentionnellement porté atteinte aux droits du plaignant. Dans Leroux c. Communauté urbaine de Montréal ((1997) R.J.Q. 1970), la Cour supérieure a condamné les policiers et leur employeur à 132 000 dollars à titre de réparation pour arrestation et détention illégales, insultes et mauvais traitements alors que l’individu arrêté pour méfaits se trouvait à l’hôpital, soit 122 000 dollars pour dommages pécuniaires et moraux en vertu de l’article 49(1) de la Charte québécoise et 10 000 dollars à titre de dommages exemplaires en vertu de l’article 49(2) de la Charte québécoise. Dans l’arrêt Protection de la jeunesse‑988 (J.E. 99‑1550), la Cour supérieure du Québec a prononcé un arrêt des procédures sous une accusation de vol, en vertu de l’article 24(1) de la Charte canadienne des droits et libertés pour réparer l’usage abusif de la force par les policiers lors de l’arrestation d’un jeune contrevenant, qui constituait une violation de l’article 12 de la Charte. Il était clair dans cette affaire que l’intimé aurait de toute façon bénéficié soit d’une probation ou même d’une absolution. Dans R. c. Serré ((1999), J.E. 99‑1033), la cour d’appel du Québec statuait que l’arrêt des procédures en vertu de l’article 24(1) de la Charte canadienne, n’était pas la mesure appropriée en l’espèce pour réparer les mauvais traitements infligés par des gardiens de prison à la suite d’une tentative d’évasion au cours de laquelle un des gardiens avait été pris en otage et violenté.

298.   Deux organismes, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et le Protecteur du citoyen assurent la surveillance de la gestion des établissements de détention québécois et interviennent régulièrement. Par exemple, la Commission a adopté une grille d’analyse et énoncé des principes concernant l’utilisation de la contention en cas d’hébergement obligatoire d’un enfant. Au sens de la Commission, la contention doit toujours conserver un caractère exceptionnel et n’être employée, en dernier recours, qu’en cas de nécessité. Toute mesure disciplinaire doit être prise dans l’intérêt de l’enfant.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

299.   L’article 43 du Code criminel prévoit que «tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances». Une importante réflexion est en cours au sujet de la nécessité de maintenir ou non cet article.

300.   Au cours de la période couverte, deux décisions dans lesquelles l’article 43 du Code criminel a été évoqué ont été rendues. Dans St‑Amour c. Peterson ((1998), R.R.A. 103 (C.S.)), la Cour supérieure a conclu qu’un chauffeur d’autobus scolaire, qui ne faisait face à aucune accusation criminelle, avait utilisé la force raisonnable en poussant sur son siège un élève qui bloquait l’allée centrale. Dans l’affaire Laroche c. R. ((1999), J.E. 99‑338), la cour d’appel statuait que le fait de lancer une poignée de sable au visage d’un enfant ne pouvait se qualifier de droit de correction suivant l’article 43 du Code criminel et, à ce titre, constituer une défense valable à une accusation de voie de fait.


ONTARIO

Introduction

301.   L’information présentée dans le présent rapport constitue une mise à jour du troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements en Ontario et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Information générale

302.   La torture constitue une infraction criminelle, et l’Ontario assure le respect de la loi avec vigueur et efficacité.

303.   Le système correctionnel de l’Ontario subit actuellement de grandes transformations qui modifieront en profondeur la prestation des services aux détenus. Ces transformations visent à rééquilibrer le système correctionnel afin de tenir davantage compte des droits des victimes et d’instituer pour les contrevenants des sanctions percutantes. De plus, un projet de discipline stricte, visant à réduire la récidive et particulièrement adapté aux contrevenants récidivistes de sexe masculin de 16 et 17 ans, est en cours. Un programme structuré privilégiant les compétences professionnelles et les études a également été instauré dans tout le système des jeunes contrevenants.

304.   L’Ontario tient à ce que la sécurité publique soit la considération prioritaire dans les décisions concernant la libération des détenus. Le renforcement des politiques relatives aux libérations conditionnelles, le respect rigoureux des conditions de la libération et une réduction du taux d’octroi de la libération conditionnelle se sont avérés efficaces dans le maintien de la sécurité publique. La réforme du système correctionnel prévoit également un vaste projet de renouvellement des immobilisations qui éliminera les inefficiences économiques et freinera la détérioration des établissements carcéraux de la province. À cette fin, le gouvernement est en train de remplacer ses pénitenciers vétustes pour adultes par des établissements modernes et plus humains.

Article 1.  Définition de la torture

305.   Le 21 mai 1996, la Commission des droits de la personne de l’Ontario dévoilait sa politique sur la mutilation génitale féminine. La Commission estime que la pratique de la mutilation génitale féminine fait injure à la dignité inhérente des femmes et des fillettes et contrevient aux droits conférés à celles‑ci par le Code des droits de la personne de l’Ontario. Pour cette raison, elle acceptera les plaintes relatives à la mutilation génitale féminine déposées par les victimes de cette pratique ou leurs tuteurs légaux; elle mènera une enquête et rendra une décision à ce sujet.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

306.   La loi sur le Ministère des services correctionnels et les règlements, directives, politiques, méthodes, modules de formation et normes connexes interdisent les mauvais traitements aux personnes détenues dans les établissements correctionnels de l’Ontario. Le Ministère des services correctionnels surveille l’application de la loi dans les établissements carcéraux de la province.

307.   En Ontario, les normes applicables au personnel et aux installations carcéraux et aux détenus sont les suivantes:

·               Déclaration de principes déontologiques − des normes déontologiques pour le personnel carcéral dans l’exercice de ses fonctions;

·               Conditions d’emprisonnement − des politiques se rapportant aux conditions régnant dans les établissements carcéraux provinciaux et des normes relatives aux installations, aux programmes et aux soins de santé destinés aux détenus;

·               Principes régissant la détention − les principes régissant les droits et les privilèges des détenus, les conditions à respecter par les détenus et les sanctions en cas de non‑respect.

308.   En vertu de la loi sur les services policiers de l’Ontario, qui est appliquée par le Ministère du Solliciteur général, il incombe aux municipalités de fournir des services de police qui soient suffisants et efficaces, et le lieutenant en conseil a le pouvoir d’établir des normes applicables aux services en question.

309.   En vertu du Police Adequacy and Effectiveness Standards Regulation (Règlement sur la pertinence et l’efficacité des services policiers, promulgué en janvier 1999) de la loi sur les services policiers, les services de police doivent exécuter certaines fonctions de base et remplir certaines exigences en matière d’exécution de services, dont l’élaboration d’ici l’an 2001 de politiques et de méthodes se rapportant à l’arrestation, au soin et au contrôle des détenus et à la gestion des enquêtes criminelles. Cela s’applique également à la Police provinciale de l’Ontario.

310.   Le Ministère du Solliciteur général émet des lignes directrices visant à aider les commissions de police, les chefs de police, la Police provinciale de l’Ontario et les municipalités à comprendre et à mettre en application la loi sur les services policiers et ses règlements d’application.

311.   Un nouveau Policing Standards Manual (Manuel des normes policières) a été émis en février 2000 et contient 58 lignes directrices et exemples de politiques élaborées à l’appui du Adequacy Standards Regulation. Le Manuel contient de nouvelles lignes directrices sur l’arrestation, le soin et le contrôle des détenus et sur la gestion des enquêtes criminelles. Les lignes directrices sur l’arrestation respectent les conditions prévues dans les lois et dans la Constitution. La Commission civile des services policiers de l’Ontario a le mandat de tenir des audiences et d’imposer des réparations dans les cas de non‑respect des lignes directrices.

312.   Le Major Case Management Manual (Manuel de gestion des cas importants) énonce la marche à suivre pour les interrogatoires. Le Ministère du Solliciteur général a élaboré un modèle de formation, des règlements d’application de la loi sur les services policiers ainsi que des normes se rapportant à l’usage de la force par la police.

Article 10.  Éducation et formation

313.   Tous les employés du Ministère des services sociaux et communautaires reçoivent une formation relative à l’usage de la force contre les clients, conformément au Young Offender Services Manual (Manuel des services aux jeunes contrevenants) du Ministère. Ces critères couvrent les domaines suivants:

·               Usage de contraintes physiques et mécaniques;

·               Utilisation des cellules d’isolement;

·               Maintien de la discipline;

·               Contrôle de la contrebande;

·               Recours aux fouilles;

·               Appréhension;

·               Recours aux peines et châtiments.

314.   Tous les agents correctionnels des établissements carcéraux de la province reçoivent une formation de base et avancée, y compris de l’éducation et de la formation sur l’interdiction des mauvais traitements en milieu correctionnel. Tout le personnel carcéral reçoit une éducation et une formation relatives aux lois et règlements, aux protocoles de sécurité, aux principes déontologiques, au bon usage de la force et aux interventions non physiques qui s’appliquent.

315.   En vertu de la loi sur les services policiers et des politiques et marches à suivre connexes, les services de police municipaux et la Police provinciale de l’Ontario doivent offrir une formation, une éducation et une information suffisantes aux agents de police quant à la marche à suivre pour les arrestations et la détention, la garde, les interrogatoires, les enquêtes et l’usage de la force.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

316.   Tous les jeunes qui sont détenus dans des établissements du Ministère des services sociaux et communautaires pour jeunes contrevenants tombent sous le coup de la loi sur les services à l’enfance et à la famille, laquelle énonce les droits et les mesures de protection dont jouissent les enfants, dont:

·               Le droit de parler en privé avec son avocat et toute personne représentant l’intéressé(e) et de recevoir des visites de ceux‑ci;

·               L’exercice d’un contrôle quant à l’utilisation des cellules d’isolement;

·               La prestation régulière de conseils au sujet de leurs droits.

317.   Des mécanismes d’examen du respect font en sorte que les normes énoncées dans le Young Offender Services Manual (Manuel des services aux jeunes contrevenants) au sujet des droits, de la procédure d’instruction des plaintes, des rapports relatifs aux incidents graves, des mauvais traitements infligés aux enfants, du recours aux châtiments, des fouilles, des contraintes mécaniques et des vérifications obligatoires du casier judiciaire des employés soient respectées.

318.   Le Ministère des services correctionnels et le Ministère du Solliciteur général revoient ponctuellement les lois, les politiques et les méthodes se rapportant à l’interdiction des mauvais traitements pendant l’arrestation, l’interrogatoire, l’enquête, la détention et la garde.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate, et
Article 13.  Allégations de torture

319.   Selon la procédure du Ministère des services sociaux et communautaires applicable aux incidents graves, tous les exploitants et/ou fournisseurs de services doivent signaler au Ministère les incidents graves mettant en cause des enfants et des adultes vulnérables dans les 24 heures, y compris les blessures graves et les allégations de mauvais traitements.

320.   Le service des enquêtes indépendantes du Ministère des services correctionnels fait en sorte que les personnes qui sont parties au système correctionnel de la province puissent porter plainte à l’égard de mauvais traitements infligés par des employés du Ministère et que les plaintes fassent l’objet d’une enquête rapide et impartiale.

321.   Les personnes qui sont parties au système correctionnel de la province peuvent porter plainte à l’égard de mauvais traitements auprès du bureau de l’Ombudsman, du Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée, de la Commission des droits de la personne de l’Ontario ou de l’Enquêteur correctionnel du Canada. Dans les établissements carcéraux provinciaux, la pratique consistant à ouvrir le courrier pour faire échec à la contrebande ou autres activités illicites ne s’applique pas à la correspondance en provenance ou à destination de ces organismes. Les enquêtes menées par ces organismes sont indépendantes et bénéficient de la pleine collaboration du Ministère des services correctionnels.

322.   La loi sur les services policiers prévoit un système d’instruction des plaintes du public en vertu duquel tout membre du public qui est directement touché par la conduite d’un agent de police ou par les politiques et les services fournis par un service de police peut porter plainte directement auprès du service de police visé ou de la Commission civile des services policiers de l’Ontario. La Commission est un organisme civil et indépendant de nature quasi judiciaire qui est investi du pouvoir de faire enquête à l’égard de plaintes, de tenir des audiences, de rendre des décisions et d’imposer des réparations.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

323.   En vertu de la loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario, tous les exploitants doivent avoir un énoncé écrit et à jour des politiques et des marches à suivre relatives au maintien de la discipline et des lignes directrices régissant les méthodes de châtiment et d’isolement susceptibles d’être utilisées dans l’établissement. Nul exploitant ne peut recourir à des mesures délibérément sévères ou dégradantes dans le but d’humilier un résident ou de miner le respect de soi d’un résident.

324.   Le gouvernement de l’Ontario a récemment adopté une nouvelle loi visant à accroître la sécurité, la sûreté et le respect dans les écoles. Trois nouvelles initiatives ont été élaborées dans la foulée de la nouvelle loi:

·               Des vérifications du casier judiciaire pour toute personne enseignant ou travaillant dans une école et ayant des contacts réguliers avec les élèves. Le Ministère de l’éducation a également demandé aux conseils scolaires de revoir leurs méthodes en matière de recrutement en vue de relever et de signaler les cas d’abus sexuels allégués ou soupçonnés;

·               Des programmes scolaires de discipline stricte pour les élèves qui ont été expulsés de l’école à la suite d’incidents graves, comme le port d’une arme à feu. Des programmes scolaires de discipline stricte ou l’équivalent pour les élèves qui ont été expulsés fourniront une approche structurée afin d’aider les élèves à se reprendre en main de manière à pouvoir réintégrer l’école et réussir le programme scolaire régulier;

·               La nouvelle loi confère au Ministre de l’éducation le pouvoir d’établir des paramètres en ce qui concerne les suspensions d’élèves ou toute autre forme de discipline et d’offrir des orientations quant aux circonstances atténuantes à prendre en considération lorsqu’il s’agit de déterminer les sanctions applicables aux élèves qui ne respectent pas les règles de l’école. Les circonstances atténuantes et la capacité pour les écoles d’adopter un régime disciplinaire gradué pour les incidents considérés comme moins graves feront en sorte que les sanctions prévues (comme les suspensions ou les expulsions) n’aient pas un effet punitif disproportionné sur, par exemple, les élèves doués.

325.   Dans le but de prévenir les traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les établissements carcéraux provinciaux, le Ministère des services correctionnels suit de près le respect des lois, des règlements, des politiques et méthodes, des modules de formation et des normes en ce qui concerne le bon usage de la force et le recours à des interventions et des communications non physiques.


MANITOBA

Introduction

326.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements au Manitoba et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

327.   La loi sur les mesures correctionnelles du Manitoba et son règlement d’application ont été abrogés au moment de la proclamation de la loi sur les services correctionnels du Manitoba le 1er octobre 1999. Le Règlement sur les services correctionnels, 128/99, est lui aussi entré en vigueur ce même jour. La révision complète et la reformulation de cette nouvelle loi traitent maintenant de façon plus complète les droits et les responsabilités dans un contexte progressif et contemporain qui englobe la Charte canadienne des droits et libertés et d’autres textes législatifs. La loi et l’autorité réglementaire accrue s’appliquent maintenant à tous les services correctionnels de garde ou communautaires (tant pour les jeunes que pour les adultes).

328.   La loi contient maintenant des énoncés de ses «motifs» ainsi qu’un article exposant les principes généraux de la loi. Un des motifs indiqués concerne «l’hébergement dans des conditions humanitaires, sûres et sécuritaires, des personnes qui sont légalement détenues», et un autre mentionne «les programmes, services et aides appropriés pour que les contrevenants puissent se réinsérer dans la société». Un article du Règlement traite des «principes et procédures de surveillance et de discipline» applicables aux établissements de garde pour les jeunes. D’autres mesures sont envisagées pour le traitement des infractions disciplinaires dans les établissements de garde pour les adultes.

329.   De même, la politique des services correctionnels a été reformulée en fonction des dispositions prévues dans la nouvelle loi et le règlement. Le règlement lui‑même doit, dans les cinq ans de son entrée en vigueur, être revu par le Ministre qui peut le modifier ou l’abroger.

330.   En plus de la formation poussée que l’on donne aux recrues, tous les employés du Service correctionnel doivent suivre des cours de perfectionnement pour conserver leurs compétences, en particulier en ce qui concerne le traitement des situations d’urgence, notamment «la prévention des situations de crise non violentes».

Article 10.  Éducation et formation

331.   Aux services correctionnels, la formation s’est améliorée progressivement au fil des ans au Manitoba, avec l’appui de gestionnaires consciencieux, de formateurs compétents qui ont mis à jour un programme d’études offrant aux nouveaux employés la formation initiale à l’égard des compétences essentielles. Le perfectionnement professionnel dans les domaines de compétence essentiels est également prévu.

332.   Auparavant, les policiers intervenaient dans les cas de perturbations importantes dans les établissements de détention alors que maintenant, une équipe d’intervention d’urgence composée d’employés spécialement formés peut intervenir d’une façon professionnelle et sécuritaire. De même, chaque établissement a une équipe qui peut intervenir au besoin dans des cas précis.

333.   Le personnel des établissements manitobains collabore avec les corps policiers pour régler les problèmes que posent les membres des gangs de rue qui organisent dans les établissements des activités reliées aux gangs. Le personnel de la sécurité préventive dans les établissements assure la liaison avec les agents de l’équipe provinciale d’intervention contre les gangs pour échanger des renseignements en vue de régler de façon efficace les problèmes reliés aux gangs que l’on a constatés au cours des dernières années.

334.   Des règles complètes concernant l’utilisation du matériel de contention et du gaz poivré, la formation à l’utilisation de ce matériel et les mesures de contrôle ont été approuvées.

335.   Dans le domaine de la santé mentale, une nouvelle loi sur la santé mentale (entrée en vigueur le 29 octobre 1999) a élargi le droit des patients en cure obligatoire d’obtenir ou de refuser un traitement. La loi prévoit aussi un mécanisme permettant d’obtenir le consentement au traitement dans les cas où un patient est incapable de donner ce consentement. La loi impose aussi des responsabilités plus lourdes aux médecins qui cherchent à confiner les patients dans des établissements de soins psychiatriques.

336.   Les politiques applicables aux établissements de soins psychiatriques du Manitoba font l’objet d’un examen constant (tous les trois ans). Par exemple, le centre Selkirk Mental Health procède actuellement à l’examen de la documentation concernant la contention et l’internement afin d’évaluer la compatibilité de ses méthodes avec les valeurs fondamentales (le soin, l’espoir et l’habilitation) des établissements de ce genre.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

337.   La loi sur la santé mentale précitée permet également au Ministre d’établir à l’égard des établissements de santé mentale des comités des normes et permet au directeur des services psychiatriques d’exiger du directeur médical d’un établissement qu’il lui fasse rapport au sujet de la détention, du soin et du traitement des personnes qui se trouvent dans son établissement.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate

338.   Le domaine des «enquêtes» est traité de façon plus précise dans la nouvelle loi sur les services correctionnels. La loi interdit également de gêner une investigation, une enquête, un examen ou une inspection. La province est en voie d’élaborer une politique relative aux enquêtes menées dans les établissements correctionnels. Le projet de politique est à l’étude en collaboration avec les représentants des employés et ceux des ressources humaines.

339.   Au mois de mai 2001, le gouvernement du Manitoba a également mis en vigueur la loi sur la protection des personnes recevant des soins, qui prévoit un mécanisme d’enquête impartial à l’égard des personnes âgées qui se trouvent dans les foyers de soins personnels et les hôpitaux.

Article 13.  Allégations de torture

340.   Selon un des principes énoncés dans la nouvelle loi sur les services correctionnels, «les contrevenants et les tuteurs des contrevenants adolescents devraient participer aux décisions prises dans le cadre de l’application de la présente loi qui concernent les contrevenants, dans toute la mesure possible». La partie du Règlement qui concerne les plaintes et les appels met en œuvre le mécanisme requis par la loi pour traiter l’issue des décisions ou des plaintes qui concernent les conditions ou la situation prévalant dans l’établissement et qui touchent le détenu.

341.   Aux termes du Règlement sur les services correctionnels, les détenus peuvent communiquer par téléphone et on les informe que leurs communications peuvent être interceptées. Le Règlement énumère également les personnes ou les services avec lesquels les communications sont privilégiées, et dans ces cas, le courrier ne sera pas inspecté ou lu; il s’agit des ministres, de la Commission des droits de la personne, de l’Ombudsman, des avocats qui représentent le détenu, des hauts fonctionnaires de l’administration correctionnelle ou des autres personnes exerçant une responsabilité légale.

Article 14.  Réparation et indemnisation

342.   La loi du Manitoba la plus récente concernant les victimes est la Déclaration des droits des victimes qui a été adoptée le 29 juin 1998 (et est entrée en vigueur le 31 août 2001 en même temps que le Règlement sur les infractions désignées). La Déclaration a remplacé la loi sur les droits des victimes qui avait été sanctionnée l’année précédente et qui abrogeait la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels et la loi sur les droits des victimes d’actes criminels. La nouvelle loi est mise en œuvre par étapes, et l’étape deux, qui énumère d’autres infractions à l’égard desquelles les victimes ont droit à des services, entre en vigueur le 31 janvier 2002. On envisage que toutes les infractions soient désignées, mais on le fait progressivement en fonction de la capacité du système d’appui de répondre aux besoins des victimes.

343.   Le «Fonds d’aide aux victimes» et le «Fonds d’indemnisation des victimes d’actes criminels» établis en vertu de la loi sur les droits des victimes sont maintenus par la nouvelle loi, mais ils peuvent être modifiés.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

344.   On mentionnait dans le deuxième rapport du Canada que l’ancien Conseil consultatif de révision du lieutenant gouverneur était remplacé par le Conseil de révision du Manitoba (Code criminel) (les autres provinces ont des organismes semblables). Les tribunaux sont constamment appelés à se prononcer sur la façon dont le Conseil de révision respecte les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés. En ce moment, on procède à l’examen d’un projet de modification de la loi habilitante, et un mémoire sera présenté au comité parlementaire fédéral à ce sujet.

345.   La loi sur la santé mentale de la province a renforcé les dispositions prévoyant des infractions et des peines dans les cas de mauvais traitements, dans les établissements de soins psychiatriques ou ailleurs, infligés aux personnes atteintes de troubles mentaux.

346.   Le 4 octobre 1996, la loi sur les personnes vulnérables ayant une déficience mentale a été proclamée en vigueur. Elle avait été sanctionnée en 1993 lorsque la Partie II de l’ancienne loi sur la santé mentale avait été abrogée. La nouvelle loi prévoit un cadre permettant de répondre aux besoins des personnes qui avaient été désignées auparavant «déficientes mentales». Ainsi, la loi prévoit notamment une gamme de mesures de protection des personnes vulnérables et elle crée le Commissariat aux personnes vulnérables.

Documentation

347.   Les documents suivants sont remis au Comité en même temps que le présent rapport:

·               Loi sur les services correctionnels;

·               Règlement sur les services correctionnels 128/99;

·               Loi sur la santé mentale;

·               Loi sur la protection des personnes recevant des soins;

·               Loi sur les droits des victimes;

·               Loi sur les personnes vulnérables ayant une déficience mentale.


SASKATCHEWAN

Introduction

348.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements en Saskatchewan et couvre la période de mai 1996 à avril 2000.

Informations additionnelles demandées par le Comité

349.   Lorsque le Comité sur la torture a examiné le troisième rapport du Canada, il a posé des questions concernant certains incidents mettant en cause les autochtones et la police municipale de Saskatoon. Les observations de la Saskatchewan dans le cadre de ce rapport traitent de cette question.

350.   En février 2000, Darrel Night, un autochtone, a affirmé que deux agents de la police municipale de Saskatoon l’ont fait monter dans leur voiture, l’ont conduit à l’extérieur de la ville et l’ont déposé assez loin de Saskatoon dans une température inférieure au point de congélation. Plus tôt au cours de l’hiver, on avait trouvé les corps de deux autochtones près de la centrale électrique Queen Elizabeth. On a allégué que ces deux hommes pouvaient également avoir été conduits à cet endroit par la police.

351.   Depuis ces incidents, une vaste enquête a été lancée au sujet de ces décès et de trois autres décès (Darcy Ironchild, Lloyd Dustyhorn, Rodney Naistus, Lawrence Wegner et Neil Stonechild) et concernant d’autres allégations de mauvais traitements attribuables à des policiers.

352.   L’enquête concernant l’incident signalé par Darrel Night a permis que des accusations soient portées contre deux agents de la police municipale de Saskatoon qui ont été reconnus coupables de séquestration en octobre 2001. Chacun d’eux a été condamné à huit mois d’emprisonnement. Les deux ont fait appel de la peine.

353.   Les enquêtes sur les décès de Darcy Ironchild, Lloyd Dustyhorn, Rodney Naistus et Lawrence Wegner sont terminées. La Division des poursuites pénales du Ministère de la justice de la Saskatchewan a examiné les rapports d’enquête et a conclu qu’il n’était pas justifié de porter des accusations criminelles. Le Ministre de la justice a ordonné une enquête du coroner au sujet de chacun de ces quatre décès. En Saskatchewan, les enquêtes du coroner sont publiques. La preuve est présentée devant un jury composé de six personnes assignées au hasard. En plus de déterminer le moment, le lieu et les causes médicales du décès, le jury du coroner peut faire des recommandations pour empêcher d’autres décès à l’avenir.

354.   L’enquête concernant le décès de Darcy Dean Ironchild a eu lieu du 12 au 14 décembre 2000 à Saskatoon. L’homme de 33 ans est décédé tôt le matin du 19 février 2000. En début de soirée le 18 février 2000, les policiers de Saskatoon l’avaient incarcéré pour ivresse. M. Ironchild a été gardé en cellule sous observation et vers minuit, il a été libéré et envoyé chez lui en taxi. Le jury a conclu que le décès de M. Ironchild était accidentel et que la cause du décès était une surdose d’hydrate de chloral. Le jury a fait un certain nombre de recommandations visant à empêcher l’obtention d’ordonnances multiples. Il a également recommandé une révision des politiques policières relatives au traitement et à la garde des personnes ivres et a recommandé aux gouvernements fédéral, provincial et locaux de financer la création d’un centre multiculturel de désintoxication où l’on pourrait amener les personnes intoxiquées au lieu de les laisser à la garde des policiers.

355.   L’enquête concernant le décès de Lloyd Joseph Dustyhorn a eu lieu du 8 au 10 mai 2001 à Saskatoon. L’homme de 53 ans est décédé tôt le matin du 19 janvier 2000. Le soir du 18 janvier 2000, la police de Saskatoon l’avait incarcéré pour ivresse. M. Dustyhorn a été gardé sous observation en cellule et tôt le matin du 19 janvier 2000, il a été libéré et ramené chez lui par la police municipale de Saskatoon. Le jury a conclu que le décès de M. Dustyhorn était accidentel et était attribuable à l’hypothermie. Ce jury a également recommandé la création d’un centre de désintoxication d’urgence à Saskatoon où les personnes non violentes en état d’intoxication pourraient être amenées au lieu de rester à la garde de la police. Le jury a aussi recommandé que l’on améliore les communications et la tenue des dossiers contenant les personnes détenues, ainsi que des améliorations au niveau de l’éducation et de la formation du personnel chargé de surveiller les détenus en ce qui concerne le traitement des personnes ivres et la sensibilisation à la culture autochtone.

356.   L’enquête concernant le décès de Rodney Hank Naistus a eu lieu du 30 octobre au 2 novembre 2001 à Saskatoon. Le corps de l’homme de 25 ans a été trouvé en fin de matinée du 29 janvier 2000 dans le secteur industriel situé au sud-ouest de Saskatoon. On l’avait vu la dernière fois au centre-ville tôt le matin du 29 janvier 2000. Le jury a pu attribuer la cause du décès à l’hypothermie, mais il a été incapable d’établir les circonstances qui ont mené au décès de M. Naistus. Les recommandations du jury portaient toutes sur les politiques policières et les relations entre la police et les autochtones.

357.   L’enquête sur le décès de Lawrence Kim Wegner a eu lieu aux mois de janvier et de février 2002 à Saskatoon. Le corps de l’homme de 30 ans a été trouvé le 3 février 2000 dans un champs situé au sud du lieu d’enfouissement de la ville de Saskatoon. On l’avait vu pour la dernière fois tôt le matin du 31 janvier 2000 dans le secteur sud-ouest de la ville. Comme dans le cas de M Naistus, le jury a conclu que le décès était attribuable à l’hypothermie mais il n’a pu déterminer les circonstances qui ont mené au décès de M. Wegner. Le jury a fait un certain nombre de recommandations reliées aux services de santé mentale et de lutte contre l’alcoolisme et la toxicomanie, aux procédures policières en matière de communication, de préservation des lieux du crime et d’interrogatoire des témoins; il a également fait des recommandations générales concernant des séances de sensibilisation interculturelle pour les policiers et l’amélioration de l’accès au système de justice pour les autochtones.

358.   Le corps de Neil Stonechild a été exhumé à la fin d’avril 2001. L’enquête concernant le décès de M. Stonechild se poursuit.

359.   En plus des enquêtes criminelles, le bureau des enquêtes sur les plaintes contre la police a embauché du personnel additionnel qu’il a chargé d’examiner les plaintes spécifiques visant les agissements des policiers qui ne sont pas des actes criminels.

360.   Le 15 novembre 2001, le Procureur général de la Saskatchewan a annoncé la création d’une Commission des premières nations, des métis et de la réforme de la justice. La Commission indépendante doit amorcer un dialogue avec la population de la Saskatchewan, en particulier les collectivités et les organismes autochtones, en vue d’identifier les réformes qui vont améliorer le système de justice pour tous les citoyens de la province. La Commission est chargée de cerner les mesures de réforme du système de justice qui soient efficientes, efficaces et justifiables au plan financier.


ALBERTA

Introduction

361.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements en Alberta et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Information générale

362.   Le rôle de l’ombudsman provincial a été expliqué par l’Alberta dans le troisième rapport du Canada relatif à cette Convention et n’a fait l’objet d’aucune modification depuis.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

363.   Les dispositions de la loi sur la santé mentale (Mental Health Act) et de la loi sur la santé publique (Public Health Act) de l’Alberta, qui permettent la détention des patients en cure obligatoire en vue d’un examen et d’un traitement, n’ont pas changé.

364.   Il n’y a eu aucune décision judiciaire concernant la mise en œuvre de la Convention.

Article 10.  Éducation et formation

365.   Les policiers de l’Alberta continuent de suivre des cours qui précisent les limites de la force à laquelle les policiers peuvent avoir recours.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

366.   La Division des services correctionnels du Ministère de la justice de l’Alberta a un grand nombre de politiques qui signalent la nécessité de traiter de façon équitable les personnes incarcérées. Les politiques prévoient des mécanismes d’appel aux responsables des services correctionnels et à des tiers, ainsi que l’examen, par des hauts fonctionnaires des services correctionnels, des décisions prises par leurs subalternes. Les directives exigent la formation du personnel. Tous les agents, anciens et nouveaux, suivent une formation complète qui touche tous les aspects dont traite la politique, notamment les méthodes de sécurité et de discipline approuvées, les techniques de gestion des délinquants, la résolution de conflits et les mesures de protection offertes aux délinquants.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate

367.   Les dispositions de la loi sur les enquêtes en cas de décès (Fatality Inquiries Act) mentionnées par l’Alberta dans le troisième rapport du Canada relatif à cette convention restent en vigueur.

368.   Le comité d’examen de l’application de la loi et le comité d’appel de l’indemnisation n’ont reçu aucune plainte concernant le recours à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

369.   La politique qui interdit les châtiments corporels dans les familles d’accueil en Alberta, dont a fait mention l’Alberta dans le troisième rapport du Canada concernant cette convention, reste en vigueur.

370.   La loi sur la protection des personnes recevant des soins (Protection of Persons in Care Act) adoptée en 1997 vise à assurer aux adultes qui sont dans des établissements de soins la protection contre les mauvais traitements. Cette loi fait en sorte que les adultes de l’Alberta, en particulier s’ils sont vulnérables, puissent vivre avec dignité et respect. La loi protège les adultes qui se trouvent dans des établissements bénéficiant de l’aide financière gouvernementale, comme les hôpitaux, les foyers pour personnes âgées, les foyers de groupe et les foyers de soins infirmiers.

371.   La loi sur la protection des personnes recevant des soins prévoit les mesures suivantes:

·              Elle définit en quoi consistent les mauvais traitements;

·              Elle exige que les personnes signalent les cas possibles de mauvais traitement;

·              Elle établit un service téléphonique sans frais pour permettre aux personnes de signaler les cas de mauvais traitement;

·              Elle protège les personnes qui signalent de bonne foi des cas de mauvais traitement contre les mesures de représailles;

·              Elle prévoit les peines applicables en cas de défaut de signaler des mauvais traitements possibles et en cas de fausse déclaration;

·              Elle prévoit une procédure d’enquête et de règlement dans les cas de mauvais traitements;

·              Elle exige une vérification du casier judiciaire pour tous les nouveaux employés et bénévoles œuvrant dans des établissements de soins.

Article 14.  Réparation et indemnisation

372.   Les personnes qui prétendent être victimes de la police municipale peuvent se plaindre par écrit au Chef de police et peuvent faire appel de la décision du Chef de police concernant leur plainte à la Commission de police ou au comité d’examen de l’application de la loi, un organisme quasi judiciaire indépendant établi aux termes de la loi sur la police (Police Act) de l’Alberta.

373.   Les personnes qui prétendent être victimes de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) peuvent faire une plainte par écrit au commissaire adjoint de la Division K de la GRC, ou à la Commission des plaintes du public de la GRC, un organisme indépendant créé par le Parlement et chargé d’examiner de façon impartiale les plaintes faites contre la GRC. Les décisions du commissaire adjoint peuvent être portées en appel à la Commission des plaintes du public contre la GRC.

374.   Les personnes qui allèguent être victimes d’un corps policier des premières nations peuvent se plaindre par écrit au Chef de police, et peuvent faire appel de la décision concernant leur plainte au comité d’examen des premières nations, un organisme indépendant établi aux termes de l’accord tripartite en matière de police.

375.   La loi sur les victimes d’actes criminels de l’Alberta (Alberta Victims of Crime Act) a été proclamée le 1er novembre 1997. La loi prévoit l’indemnisation des victimes innocentes qui ont subi des blessures lors de la perpétration d’un acte criminel, et elle permet le financement des organismes d’aide aux victimes d’actes criminels. Le financement de ces programmes est assuré par la suramende compensatoire prélevée au moment de la perception des amendes.

376.   L’indemnisation des victimes d’actes criminels est faite par un paiement forfaitaire dont le montant est établi en fonction de la gravité des blessures subies par la victime. Si un demandeur n’est pas satisfait de la décision du directeur du programme d’indemnisation, il peut demander une audition devant le comité d’appel de l’indemnisation. Cet organisme se compose de trois membres nommés par le gouvernement de l’Alberta.

 


COLOMBIE BRITANNIQUE

Introduction

377.   Ce rapport met à jour l’information contenue dans le troisième rapport du Canada à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements en Colombie britannique et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

378.   Tel que précisé dans le troisième rapport du Canada, le Procureur général de la Colombie britannique est chargé de l’application des lois provinciales et des poursuites des infractions pénales commises dans la province. Aucune disposition d’une loi ou d’une politique de la Colombie britannique ne peut être invoquée pour justifier la torture ou une autre forme de traitement inhumain. En fait, la torture est une infraction criminelle interdite à l’article 269.1(1) du Code criminel, qui s’applique sur tout le territoire canadien. Cette infraction est assortie d’une peine maximale de 14 ans d’emprisonnement. La définition de la torture que prévoit l’article 269.1(1) du Code criminel est conforme à la définition qu’en donne l’article premier de la Convention contre la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

379.   D’autres mesures sont susceptibles d’empêcher la torture, notamment les codes de déontologie des diverses professions. En ce qui concerne la police, tant les agents des corps policiers municipaux que ceux des services de police autochtones sont régis par le Règlement sur le Code de discipline (Code of professional Conduct Regulation, B.C. Reg. 205/98). Ce code prévoit 12 catégories de «fautes disciplinaires», notamment la conduite répréhensible, la négligence dans l’exercice de ses fonctions, l’abus d’autorité, l’usage abusif d’une arme à feu et les actes constituant une infraction. Les sanctions vont de la réprimande verbale ou écrite au congédiement.

380.   De plus, les corps policiers sont tenus de se conformer au décret no 748 des normes provinciales applicables aux corps policiers municipaux en Colombie britannique (Provincial Standards for Municipal Police Departments in British Columbia). Ce décret prévoit environ 400 normes, soit les normes minimales acceptables pour les policiers, sur des sujets qui vont de l’utilisation de chiens à l’entreposage des armes à feu. La Division des services policiers du Ministère du Procureur général procède périodiquement à des vérifications auprès des corps policiers de la Colombie britannique pour s’assurer que ces normes sont respectées. Des exemples de ces normes sont inclus à l’annexe CB‑1. Un exemplaire du Règlement sur le Code de discipline et du Règlement sur le recours à la force (Use of Force Regulation, B.C. Reg. 203/98) sont soumis au Comité en même temps que le présent rapport.

381.   Les normes de conduite des agents de correction provinciaux sont prévues dans des documents du Ministère du Procureur général, notamment les normes de conduite des agents de correction (Standards of Conduct for Correction Branch Employees), le guide des politiques sur la garde des détenus adultes (Adult Custody Policy Manual), le guide des politiques sur les services correctionnels communautaires (Community Corrections Policy Manual), et les règles et règlements des centres correctionnels (Correctional Centre Rules and Regulations). La norme de conduite de la Direction des services correctionnels en ce qui concerne le recours à la force raisonnable est soumise au Comité avec le présent rapport.

382.   Des normes de conduite semblables visent les shérifs qui sont chargés de la sécurité des tribunaux et de l’accompagnement des détenus. Les dispositions du Code de conduite des shérifs (Deputy Sheriff’s Code of Conduct) relatives aux moyens de contention, au recours aux armes à feu et aux bâtons et à l’utilisation de gaz poivré sont soumises au Comité en même temps que le présent rapport.

383.   Les médecins et les infirmiers qui travaillent dans les établissements psychiatriques sont également assujettis au code de déontologie de leur profession respective. Chaque établissement psychiatrique peut également ajouter des règles et des règlements à ces normes professionnelles. Par exemple, l’établissement Riverview, un des plus grands établissements psychiatriques de Vancouver, a élaboré son propre ensemble de politiques écrites visant la conduite du personnel. Enfin, tous les employés des établissements psychiatriques sont assujettis au paragraphe 17(2) de la loi sur la santé mentale (Mental Health Act, R.S.B.C. 1996, chap. 288), qui interdit de maltraiter les patients. Selon cette disposition, «commet une infraction punissable aux termes de la loi sur les infractions une personne employée dans un établissement provincial de santé mentale ou dans un hôpital psychiatrique privé, ou toute personne ayant la garde d’un patient, qui maltraite un patient, lui inflige des voies de fait ou fait preuve à son égard d’une négligence volontaire.».

Article 3.  Expulsion et extradition

384.   Tel que précisé au paragraphe 263 du troisième rapport du Canada, la Société de l’aide juridique de la Colombie britannique fournit les services d’un avocat (l’aide juridique) aux personnes qui, dans les procédures en matière d’immigration, risquent l’expulsion, pourvu qu’elles soient admissibles à l’aide juridique selon les lignes directrices applicables. Si la Société de l’aide juridique ne garde pas de données statistiques quant au nombre de personnes qui revendiquent le statut de réfugié et qui allèguent un cas de torture, des allégations de ce genre ne sont pas rares. Les statistiques fournies dans le tableau ci-dessous indiquent de manière détaillée le nombre total de renvois d’immigrants et de réfugiés à l’aide juridique en Colombie britannique pour chaque exercice de 1996 à 2000.

Exercice

Dates

Nombre de renvois

1996-1997

1er avril 1996 au 31 mars 1997

2 430

1997-1998

1er avril 1997 au 31 mars 1998

2 690

1998-1999

1er avril 1998 au 31 mars 1999

3 094

1999-2000

1er avril 1999 au 31 mars 2000

3 949


Article 6.  Détention et autres mesures légales
Article 7.  Poursuites judiciaires

385.   La Direction des services correctionnels du Ministère du Procureur général permet la détention des seules personnes qui ont comparu devant le tribunal et qui sont visées par un mandat de dépôt décerné conformément à la loi. La décision d’intenter une poursuite ou des procédures en extradition relève du poursuivant provincial.

386.   Si une personne accusée de torture est déclarée inapte à subir son procès ou non criminellement responsable en raison de troubles mentaux, elle sera internée dans un établissement psychiatrique plutôt que dans une prison. En établissement psychiatrique, cette personne est sous la responsabilité de la Commission d’examen provinciale. La Commission d’examen doit examiner le cas de cette personne dans les trois mois qui suivent la décision du tribunal et, par la suite, une fois chaque année. La Commission doit remettre en liberté les personnes qui ne présentent aucun danger pour la société. Si la Commission d’examen conclut que la personne pose une menace, celle-ci sera gardée en établissement psychiatrique ou bénéficiera d’une libération conditionnelle.

Article 10.  Éducation et formation

387.   En Colombie britannique, les études et la formation médicales comportent deux facettes principales. Premièrement, les étudiants en médecine suivent leur programme à l’Université de Colombie britannique. En ce qui concerne les médecins en exercice, leur formation et leur perfectionnement sont assurés par la Continuing Medication Education.

388.   Le programme médical dispensé aux étudiants en médecine couvre un large éventail de matières. Toutefois, le programme des étudiants de premier cycle n’aborde pas de façon spécifique le traitement des victimes de torture.

389.   Selon les responsables de la Continuing Medical Education, la formation offerte aux médecins pour leur permettre de soigner les victimes de la torture constitue une grande préoccupation pour cet organisme. Cependant, comme les programmes de formation permanente en médecine sont autofinancés, c’est‑à‑dire que les coûts des programmes doivent être couverts par les frais de scolarité, la création des cours dépend de la demande.

390.   Les dispositions relatives à la formation des policiers et des agents du service correctionnel demeurent celles soulignées aux paragraphes 266 et 267 du troisième rapport du Canada.

Article 11.  Traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées

Interrogatoire

391.   La Charte canadienne des droits et libertés s’applique aux mesures prises par tous les fonctionnaires, notamment les policiers, les shérifs et les agents de correction. Lorsqu’une personne est détenue ou mise en état d’arrestation, le policier doit l’informer de son droit d’obtenir sans délai les services d’un avocat. En pratique, cela signifie qu’il faut lui permettre d’utiliser un appareil téléphonique et un bottin, et lui donner les renseignements concernant l’aide juridique.

392.   L’article 7 de la Charte prévoit d’autres mesures de protection. Cette disposition englobe la protection contre l’auto-incrimination ainsi que la garantie du droit à la vie et à la sécurité de sa personne. Les policiers ne peuvent donc pas obtenir des aveux en utilisant la violence ou la torture.

393.   Le gouvernement et les corps policiers ont élaboré d’autres règles précises au sujet de l’interrogatoire des jeunes. Afin d’assurer le respect de la loi de la Colombie britannique sur les jeunes contrevenants (Young Offenders (British Columbia) Act, R.S.B.C. 1996, chap. 494), la norme policière D11.2.3 oblige chaque corps policier à établir une politique écrite concernant la procédure d’interrogatoire des jeunes, et cette politique mentionne notamment la possibilité de communiquer avec un avocat, son père ou sa mère, son tuteur, des parents ou d’autres adultes.

Garde

394.   En Colombie britannique, la responsabilité à l’égard de la garde des prisonniers et des détenus incombe au Procureur général. La garde et l’accompagnement des détenus au tribunal sont assurés par les services des shérifs de la Direction des services judiciaires. La Direction des services correctionnels assure le soin, la garde et la supervision des personnes en détention provisoire et des personnes condamnées et, dans certains cas, la détention des migrants.

395.   Des règles strictes régissent le recours à la force contre les personnes dont l’État a la garde. Par exemple, les agents des services correctionnels peuvent recourir à la force en leur qualité d’agent de la paix conformément au Code criminel du Canada, aux règles et règlements des centres correctionnels et aux normes de conduite des employés de la Direction des services correctionnels (Standards of Conduct for Corrections Branch Employees) de la Colombie britannique. La force raisonnable ne peut être utilisée que pour empêcher qu’une infraction soit commise ou se poursuive, pour maintenir ou rétablir l’ordre, pour appréhender un délinquant, pour empêcher un délinquant de se blesser volontairement ou pour aider un autre agent dans l’une ou l’autre de ces situations. Les politiques de la Direction des services correctionnels précisent les situations et les cas qui justifient l’usage de la force. Selon le principe général, il ne faut recourir qu’à la force nécessaire pour maîtriser la situation, et le recours à la force doit cesser dès qu’il n’est plus nécessaire.

396.   Les personnes qui sont déclarées inaptes à subir leur procès pour une infraction pénale ou qui sont déclarées non criminellement responsables à cause de troubles mentaux seront placées dans des établissements psychiatriques. La direction de l’unité ou de l’établissement psychiatrique est responsable des patients qui se trouvent dans l’établissement.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate
Article 13.  Allégations de torture

397.   Le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police a été créé le 1er juillet 1998. Il remplace la Commission de police de la Colombie britannique et est chargé de faire enquête à l’égard des plaintes portées contre la police municipale en Colombie britannique. La procédure relative aux plaintes créée à cette fin en vertu de la loi sur la police (Police Act, R.S.B.C., chap. 367) prévoit la nomination d’un commissaire indépendant chargé de superviser le traitement des plaintes portées contre les agents de la police municipale. Le commissaire agit dans l’intérêt public pour faire en sorte que les plaintes soient traitées de la manière prévue par la loi. En particulier, le commissaire doit recevoir et consigner les plaintes, conseiller et aider les plaignants, les policiers visés par la plainte, les chefs de police et les conseils de police au sujet des plaintes.

398.   Pour chaque plainte officielle portée contre un corps policier municipal, la première étape consiste en une enquête interne menée par le directeur du service de police en cause. Si le commissaire aux plaintes n’est pas satisfait de l’enquête interne, il peut ordonner une audience publique ou recommander une instruction judiciaire de la plainte. En général, ces instructions sont confiées à des juges à la retraite.

399.   Le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police tient des données statistiques indiquant le nombre et la nature des plaintes reçues et en fait rapport tous les trois mois. Le premier rapport trimestriel pour l’an 2000 est soumis avec le présent rapport à titre d’illustration des travaux entrepris par le commissaire. Aux fins de l’analyse du rapport trimestriel, il convient de signaler qu’une «plainte mettant en cause la confiance du public» englobe les plaintes dans lesquelles il y a allégation de préjudice physique ou psychologique.

400.   Les plaintes visant les membres des services de police autochtone ne sont pas régies par le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police mais plutôt par le Règlement sur la procédure applicable aux plaintes contre les constables provinciaux (Special Provincial Constable Complaint Procedure Regulation, BC Reg. 206/98). Le texte de ce règlement est soumis au Comité en même temps que le présent rapport. Les données précises quant au nombre de plaintes portées contre des agents des services de police autochtone ne sont pas disponibles.

401.   Les prisonniers des centres correctionnels provinciaux ont également le droit de porter plainte en vertu des règlements des Correctional Center Rules and Regulations. L’article 40 institue la procédure qui permet aux prisonniers de déposer une plainte par écrit auprès d’un fonctionnaire, d’un directeur de centre, d’un directeur de district ou d’un directeur régional. La personne qui reçoit la plainte doit l’instruire et communiquer avec les prisonniers dans les sept jours. L’article 41 établit le processus qui permet aux prisonniers de formuler une plainte par écrit et de l’acheminer au directeur du bureau des enquêtes, des inspections et des normes.

402.   Dans certaines circonstances, notamment lorsqu’un coup de feu a été tiré pour protéger la vie ou empêcher des blessures corporelles graves, le bureau des enquêtes, des inspections et des normes peut être appelé à faire enquête au sujet des incidents mettant en cause un shérif. Le service du shérif du Ministère du Procureur général indique qu’une politique sur l’examen des incidents graves est en voie d’élaboration.

403.   L’ombudsman constitue le dernier recours en matière d’examen des plaintes. L’ombudsman est un organisme indépendant qui fait rapport à l’Assemblée législative. Selon l’article 10 de la loi sur l’ombudsman (Ombudsman Act, R.S.B.C. 1996, chap. 340), l’ombudsman peut, lorsqu’il est saisi d’une plainte ou de sa propre initiative, faire enquête au sujet d’une décision ou d’une recommandation, d’une mesure, d’une omission ou d’une procédure prise par une autorité et qui lèse ou peut léser une personne. Peuvent notamment être visés par une telle enquête les ministères provinciaux, les municipalités, les districts régionaux et les hôpitaux. La loi sur l’ombudsman est soumise avec le présent rapport.

Article 14.  Réparation et indemnisation

404.   Deux lois en particulier prévoient l’aide aux personnes qui ont été victimes d’un acte criminel: la loi sur les victimes d’actes criminels (Victims of Crime Act, R.S.B.C. 1996, chap. 478) et la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels (Criminal Injury Compensation Act, R.S.B.C. 1996, chap. 85). Ces lois ne visent pas spécifiquement les victimes de la torture mais elles prévoient les services et l’aide dont doivent bénéficier toutes les victimes d’un acte criminel, notamment celles qui ont subi une agression physique ou sexuelle grave et d’autres formes de traitements cruels et dégradants.

405.   La loi sur les victimes d’actes criminels, adoptée le 1er juillet 1996, prévoit les objectifs suivants:

          Dans la mesure du possible, le gouvernement doit favoriser les objectifs suivants:

a)       Établir des services à l’intention des victimes et favoriser un accès égal aux services aux victimes partout en Colombie britannique;

b)      Assurer aux victimes une protection adéquate contre l’intimidation et les représailles;

c)       Faire en sorte que la police remette rapidement aux victimes les biens qui leur appartiennent et que leur ont enlevés les délinquants lors d’une infraction, si la conservation de ces biens n’est pas nécessaire aux fins d’une enquête ou d’une poursuite;

d)      Offrir au personnel du système de justice la formation leur permettant de venir en aide aux victimes;

e)       Tenir compte comme il se doit des attentes des victimes au sujet de la célérité des enquêtes et des poursuites;

f)       Offrir aux victimes, dans les palais de justice, des salles d’attente distinctes de celles de l’accusé et des témoins de l’accusé;

g)       Offrir aux victimes partout en Colombie britannique un accès égal:

i)        À des salles d’audience et des bureaux des poursuivants qui sont adaptés aux personnes handicapées;

ii)       À des interprètes dans toutes les langues; et

iii)      À des services adaptés à la culture des autochtones et aux minorités ethnoculturelles.

406.   La deuxième loi axée sur les victimes, la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels, prévoit l’indemnisation des personnes qui ont été blessées ou tuées en Colombie britannique en conséquence de certains actes criminels. Notamment, les victimes de la torture (art. 269.1 du Code criminel) peuvent demander une indemnisation aux termes de la loi. Ainsi, une victime peut obtenir une indemnisation financière ou des services médicaux comme des membres artificiels, des lunettes et des prothèses auditives. Elle peut aussi obtenir des services de counselling.

407.   Outre la loi sur les victimes d’actes criminels et la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels, aux termes de la loi sur la responsabilité de l’État (Crown Proceeding Act, R.S.B.C. 1996, chap. 89), le gouvernement provincial est responsable des délits commis par ses agents et ses fonctionnaires. Ainsi, si une personne en Colombie britannique a été victime d’un traitement cruel ou dégradant de la part d’un fonctionnaire, y compris, par exemple, un agent de police municipal, cette personne pourrait intenter une poursuite civile tant contre le policier que contre la province.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

408.   Le Code des droits de la personne de la Colombie britannique (Human Rights Code, R.S.B.C. 1996, chap. 210) interdit dans l’emploi, le logement, la prestation des services publics et les publications, la discrimination fondée sur la race, la couleur, l’origine ancestrale, le lieu d’origine, la religion, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience physique ou intellectuelle, le sexe ou l’orientation sexuelle. Le traitement ou les peines cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas assimilables à la torture peuvent être visés par les interdictions prévues au Code. Ainsi, le harcèlement au travail peut être assimilé à un traitement cruel, inhumain ou dégradant. La jurisprudence établit clairement que l’intention de faire une distinction n’est pas requise pour qu’un acte soit déclaré contraire au Code.

409.   La Commission des droits de la personne de la Colombie britannique, qui est un organisme indépendant, est chargé de l’application du Code des droits de la personne. Toute personne peut déposer une plainte de discrimination interdite par le Code. Si les dispositions du Code s’appliquent aux actes mentionnés dans la plainte, celle-ci est renvoyée pour enquête à un agent des droits de la personne. Si l’enquête révèle qu’il y a eu discrimination et que la médiation a échoué, l’agent transmet son rapport au commissaire des enquêtes et de la médiation. Ce dernier peut rejeter la plainte ou la renvoyer pour audition devant le tribunal des droits de la personne de la Colombie britannique.

410.   Si un membre du tribunal conclut qu’il y a eu discrimination, diverses mesures peuvent être prises. D’abord, le membre doit ordonner à la personne de cesser de contrevenir au Code et de s’abstenir de commettre la même infraction ou une infraction semblable. Les autres mesures sont notamment une ordonnance déclarant que la conduite mentionnée dans la plainte constitue de la discrimination contraire au Code, une ordonnance obligeant le défendeur à prendre des mesures en vue d’écarter la pratique discriminatoire ou à adopter et mettre en œuvre un programme d’équité en matière d’emploi, ou une ordonnance d’indemnisation pour la perte de salaire ou les dépenses attribuables à l’infraction. Enfin, des dommages-intérêts pour atteinte à la dignité et vexations peuvent également être accordés.

411.   Tout comme son prédécesseur le Conseil des droits de la personne de la Colombie britannique, la Commission des droits de la personne de la Colombie britannique joue un rôle important au plan de la sensibilisation du public. Chaque année, des programmes de sensibilisation sont offerts aux enfants et aux adultes, dans les écoles et auprès des entreprises. À titre d’exemple, au cours de l’exercice 1998-1999, les responsables du programme d’information et de communication de la Commission ont mis sur pied un comité directeur du cinquantième anniversaire, composé de représentants d’organismes des gouvernements fédéral et provincial et chargé de coordonner divers programmes de sensibilisation pour marquer le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Documentation

412.   Les documents suivants sont remis au Comité en même temps que le présent rapport:

·              Code of Professional Conduct Regulation, BC Reg. 205/98

·              Use of Force Regulation, BC Reg. 203/98

·              Corrections Branch Standards: Use of Reasonable Force

·              Deputy Sheriff’s Code of Conduct

·              Office of the Police Complaint Commissioner − Statistical Report: January 1 to March 31, 2000

·              Special Provincial Constable Complaint Procedure Regulation

·              Ombudsman Act, R.S.B.C. 1996, chap. 340.


ANNEXE CB-1

Autres renseignements pertinents à l’Article 2: les normes provinciales
applicables à la police

Les normes provinciales applicables aux corps policiers municipaux en Colombie britannique, les premières du genre au Canada, ont été élaborées en 1992, dans le cadre d’un projet conjoint de la Commission de police et de l’Association des chefs de police de la Colombie britannique, par des agents de police détachés auprès de la Commission. Les normes indiquent plus de 400 domaines que devraient toucher les politiques d’un corps policier, et les vérifications se fondent sur ces normes. Elles indiquent les normes minimales acceptables pour la police qui doivent être appliquées de façon uniforme dans tous les services policiers municipaux.

Les normes qui visent des domaines pertinents à la Convention de l’ONU sont notamment les suivantes:

a)       Enquêtes internes

·              La norme de gestion D6.1.1 exige l’établissement de politiques administratives prévoyant un mécanisme assurant l’impartialité, l’équité et l’objectivité du service lors des enquêtes visant les membres du service.

·              La norme de gestion D6.1.2 exige l’établissement d’une politique écrite spécifiant les activités de la fonction d’enquête interne, notamment la consignation, l’enregistrement et le contrôle des enquêtes relatives aux plaintes contre les agents; la supervision et le contrôle des enquêtes visant les cas d’écart de conduite allégués ou possibles au sein du service; le maintien de la confidentialité des enquêtes et des dossiers internes; ainsi que l’orientation des supérieurs hiérarchiques.

·              La norme opérationnelle D6.2.1 précise qu’aux termes de la politique, le service doit faire enquête concernant toutes les plaintes écrites portées contre le service ou ses employés conformément à la loi sur la police.

·              La norme opérationnelle D6.2.3 signale que le service doit assurer la liaison avec le poursuivant lors des enquêtes concernant un acte criminel qui aurait été commis par un employé.

b)      Transport des détenus

·              Les normes opérationnelles D14.2.7 et D14.2.8 exigent que des politiques écrites précisent les méthodes à employer pour le transport de détenus atteints de troubles mentaux ou d’une déficience, malades ou blessés, et qu’elles indiquent notamment la manière d’entraver les détenus et le moment où il faut le faire.

c)       Établissements de détention

·              Selon la norme E1.2.1, les établissements de détention doivent offrir aux détenus les conditions minimums qui suivent: un éclairage suffisant, une circulation d’air conforme aux normes de la santé publique, un lit et la literie pour chaque personne détenue plus de huit heures.

·              La norme E1.4.1 exige l’élaboration d’une politique écrite régissant le rangement sécuritaire des armes à feu dans l’établissement de détention.

·              La norme E1.4.4 exige qu’un système d’alarme de sécurité soit relié à un point de contrôle désigné, de façon à assurer la sécurité des détenus et du personnel.

·              La norme E1.4.5 exige l’utilisation d’un système de surveillance vidéo et d’enregistrement dans toutes les aires de détention des détenus, pour assurer la protection des agents à l’égard des allégations non fondées ou, subsidiairement, pour conserver les éléments de preuve si une enquête est amorcée.

·              La norme E1.4.8 prévoit des procédures spécifiques d’admission, notamment l’inscription des médicaments que prennent les détenus ainsi que leur condition physique et leur état psychologique.

·              Les normes E1.4.9 et E1.4.10 exigent que les adolescents soient détenus à l’écart des adultes, et que les femmes soient détenues à l’écart des hommes.

·              La norme E1.4.11 exige l’établissement d’une politique écrite exposant les méthodes de traitement, de détention et de mise à l’écart des personnes qui ont consommé de l’alcool ou des drogues, qui sont violentes ou qui ont des tendances autodestructrices.

·              La norme E1.4.14 exige la tenue d’un registre dans lequel sont consignés les incidents importants ou inhabituels, en plus de toutes les autres inspections de l’établissement de détention requises par ces normes.

·              La norme E1.5.1 exige une politique écrite indiquant les règles et les procédures à suivre lorsqu’un détenu a besoin de soins médicaux.

·              Les normes E6.1.2 et E6.1.3 exigent une politique écrite visant à faire en sorte qu’il ne soit pas fait obstacle à la possibilité de remise en liberté légitime d’un détenu, que l’on s’efforce de permettre aux détenus de communiquer en privé avec leur avocat, et qu’un détenu puisse utiliser un appareil téléphonique, un bottin téléphonique et qu’il ait accès à l’aide juridique.

d)      Utilisation de chiens

·              La norme de gestion D2.1.5 exige que l’on précise dans une politique écrite les critères pour l’utilisation de chiens.

 


 

 

 

 

 

 

PARTIE IV

MESURES ADOPTÉES PAR LES GOUVERNEMENTS DES TERRITOIRES

 


NUNAVUT

Introduction

413.   Ce rapport donne un aperçu des activités du territoire de Nunavut ayant trait à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et couvre la période d’avril 1999 à avril 2000.

Information générale

414.   Le 1er avril 1999, le nouveau territoire du Nunavut a été créé à même les Territoires du Nord‑Ouest conformément à l’article 3 de la loi sur le Nunavut, L.C. 1993, chap. 28. Calquée sur la loi sur les Territoires du Nord-Ouest et sur la loi sur le Yukon, la loi sur le Nunavut accorde au gouvernement du Nunavut des pouvoirs équivalents à ceux qui sont accordés aux deux autres territoires. Aux termes de l’article 29 de la loi sur le Nunavut, toutes les lois territoriales en vigueur dans les Territoires du Nord‑Ouest immédiatement avant la création du Nunavut sont reproduites pour le Nunavut le 1er avril 1999. Toutes les autres règles de droit en vigueur dans les Territoires du Nord‑Ouest à ce moment (par exemple les lois fédérales, la common law) continuent de s’appliquer au Nunavut, dans la mesure où elles peuvent s’y appliquer.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

415.   Les règles de droit et les politiques du Nunavut relatives à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants n’ont pas été modifiées au cours de la période couverte par ce rapport et demeurent telles qu’indiquées relativement aux Territoires du Nord‑Ouest dans le premier, le deuxième et le troisième rapport du Canada.

Documentation

416.   Le texte du Nunavut Act, S.C. 1993, chap. 28, est soumis au Comité en même temps que le présent rapport.

 


TERRITOIRES DU NORD-OUEST

Introduction

417.   Ce rapport met à jour les informations contenues dans le troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements aux Territoires du Nord‑Ouest et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

418.   Aucun changement n’a été apporté à la législation ou aux politiques du gouvernement des Territoires du Nord‑Ouest au cours de la période couverte par le rapport. Les mesures législatives inscrites dans le troisième rapport du Canada demeurent en vigueur.

Article 10.  Éducation et formation

419.   Aucun programme de formation relatif aux effets de la torture n’a été offert au personnel médical au cours de la période couverte par le rapport.

Article 16.  Prévention d’autres actes constitutifs de peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

420.   Aucun changement pertinent n’a été apporté à la loi sur la santé mentale (Mental Health Act) depuis la publication du troisième rapport du Canada.

 


YUKON

Introduction

421.   Ce rapport met à jour les informations contenues dans le troisième rapport du Canada sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des développements au Yukon et couvre la période d’avril 1996 à avril 2000.

Article 2.  Mesures législatives, administratives, judiciaires et autres

422.   Tel qu’indiqué dans un rapport précédent, la loi sur la torture (Torture Prohibition Act) L.Y. 1988, chap. 26 du Yukon, accorde aux victimes de la torture des recours civils contre les fonctionnaires. Cette loi n’a pas été modifiée et aucun recours n’a été intenté en vertu de cette loi pour la période que vise ce rapport.

423.   La loi sur les coroners (Coroners Act) L.Y. 1986, chap. 35, prévoit une investigation et une enquête subséquentes à l’égard d’un décès lorsqu’il est permis de croire que la mort a été causée à la suite d’un acte de violence, d’une mésaventure ou d’une façon anormale, ou en conséquence d’un acte de négligence ou d’une faute intentionnelle ou professionnelle.

424.   La loi sur l’ombudsman (Ombudsman Act) L.Y. 1995, chap. 17, permet à un ombudsman indépendant de mener une enquête, sans frais pour le plaignant, sur la façon dont les ministères, les organismes et les autorités du Yukon prennent des mesures, des décisions, des pratiques et des procédures.

Article 12.  Enquête impartiale et immédiate
Article 13.  Allégations de torture
Article 14.  Réparation et indemnisation

425.   La loi sur l’ombudsman fait en sorte que les plaintes contre les fonctionnaires donnent lieu rapidement à une enquête indépendante. Pour la période que vise ce rapport, aucune plainte n’a été faite à l’ombudsman concernant le recours à la torture ou à d’autres traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants.

426.   Au cours de la période visée par ce rapport, 50 plaintes ont été acheminées à la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada (GRC) au Yukon. De ce nombre, 33 plaintes se sont avérées sans fondement, alors que sept ont donné lieu à une enquête et le dossier a été clos. À la fin de la période, 10 plaintes faisaient toujours l’objet d’un examen.

427.   Au cours de la période visée par ce rapport, aucun détenu n’a porté plainte contre des agents des services correctionnels chargés de la garde des détenus au Yukon en vertu de la loi sur les services correctionnels, L.Y. 1986, chap. 26.

428.   Aucune plainte en vertu de la loi sur la torture n’a été formulée au cours de la période que vise ce rapport.

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* Pour le rapport initial et les deuxième et troisième rapports périodiques présentés par le Gouvernement canadien, voir les documents CAT/C/5/Add.15, CAT/C/17/Add.5 et CAT/C/34/Add.13 et pour l’examen de ces documents par le Comité, voir les documents CAT/C/SR.32, 33, 139, 140, 446, 449 et 453 et Documents officiels de l’Assemblée générale, quarante‑cinquième et quarante‑huitième sessions, Suppléments nos 44 (A/45/44, par. 218 à 250 et A/48/44, par. 284 à 310 et A/56/44, par. 54 à 59). Les annexes mentionnées dans le rapport peuvent être consultées au Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

* Ordre géographique, d’est en ouest.

[1] K.K.H. c. Canada, Communication nº 35/1995, opinions exprimées le 22 novembre 1995 (CAT/C/15/D/35/1995; V.V. c. Canada, Communication nº 47/1996, opinions exprimées le 19 mai 1998 (CAT/C/20/D/47/1996).

[2] Kwame Williams Adu c. Canada, Communication nº 654/1995, opinions exprimées le 18 juillet 1997 (CCPR/C/60/D/654/1995); Andres Badu c. Canada, Communication nº 603/1994, opinions exprimées le 18 juillet 1997 (CCPR/C/60/D/603/1994); Joseph Nartey c. Canada, Communication nº 604/1994, opinions exprimées le 18 juillet 1997 CCPR/C/60/D/604/1994).

[3] Les décisions se trouvent aux adresses suivantes: http://www.lexum.umontreal.ca/csc-scc/rec/html/suresh.en.html et http://www.lexum.umontreal.ca/scc-scc/fr/rec/html/ahani.fr.html.

[4] United States v. Burns, [2001] 1. S.C.R. 293 (http://www.lexum.umontreal.ca/csc-scc/2001/vol1/html/2001scr1_0283.html).

[5] Le Bureau de l’Enquêteur correctionnel (BEC) est indépendant de Service correctionnel Canada et fait office de protecteur des détenues sous responsabilité fédérale. On trouvera dans le présent rapport de plus amples renseignements sur l’organisme.

[6] La perte de privilèges peut inclure, par exemple, l’interdiction de participer à des activités récréatives qui ne figurent pas dans le plan correctionnel.



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