University of Minnesota


Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Autriche, U.N. Doc. CAT/C/17/Add.21 (1998).


Deuxièmes rapports périodiques des États parties
devant être présentés en 1992


Additif


AUTRICHE




/Le rapport initial présenté par le Gouvernement autrichien figure dans le document publié sous la cote CAT/C/5/Add.10; pour son examen par le Comité, voir les documents publiés sous les cotes CAT/C/SR.18 et 19 et les Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-quatrième session, Supplément No 46 (A/44/46), par. 202 à 230.


[6 octobre 1998]



Introduction


1. L'Autriche a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en 1987 (Journal officiel No 492/1987); elle a présenté son rapport initial en 1988 en application de l'article 19 de la Convention (CAT/C/5/Add.10).


2. Le présent rapport, qui rend compte de manière circonstanciée de la période comprise entre 1989 et août 1998, vise à compléter le rapport initial en faisant le point de l'état actuel de la législation, en particulier dans les domaines qui sont directement liés à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Si la République d'Autriche regrette que ce rapport soit remis avec du retard, elle tient à souligner que plusieurs réformes d'ordre aussi bien législatif que pratique ont maintenant été menées à bien dans le pays, ce qui lui permet de présenter aujourd'hui un rapport plus complet.


3. L'Autriche accorde un rang élevé de priorité à la surveillance internationale de la protection des droits de l'homme. Elle s'emploie en permanence à mieux protéger ces droits et veille particulièrement à entretenir le dialogue avec les organismes de défense des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies et du Conseil de l'Europe. En 1958, l'Autriche a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), dont l'article 3 est libellé comme suit : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants".


4. La CEDH et les protocoles y relatifs ont une place très importante en Autriche : ils ont valeur constitutionnelle et sont directement applicables par les tribunaux et les autorités autrichiennes. La CEDH et la surveillance de son application par les organes conventionnels ont fortement influé sur le système juridique dans le domaine législatif comme dans le domaine exécutif, en particulier s'agissant de la procédure pénale, de la compétence des autorités administratives à trancher les affaires civiles et de la procédure pénale administrative. De manière générale, les pouvoirs publics veillent à protéger les droits de l'homme et à les mettre en oeuvre. Lorsque des violations isolées des droits de l'homme se produisent néanmoins, il existe un système efficace de protection juridique. Après avoir épuisé toutes les voies de recours internes, c'est-à-dire après avoir fait appel devant la plus haute instance du pays et dûment utilisé les voies de recours extraordinaires devant la Cour constitutionnelle ou le Tribunal administratif, le plaignant peut saisir à titre individuel la Commission européenne des droits de l'homme pour dénoncer une violation des droits qui lui sont garantis par la CEDH, puis s'adresser à la Cour européenne des droits de l'homme ou, depuis novembre 1998, à la Cour européenne des droits de l'homme permanente de Strasbourg, instituée en application du Protocole No 11 à la CEDH.


5. En outre, l'Autriche a ratifié en 1989 la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (Journal officiel No 74/1979). Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) est venu deux fois en Autriche, en 1990 et en 1994 (voir par. 49 du présent rapport).


6. Les dernières années ont été marquées par une réforme de la loi sur les pouvoirs de la police autrichienne qui a de grandes conséquences sur le statut juridique des personnes vivant en Autriche. Le point de départ de ce processus a été la loi sur les forces de l'ordre (Sicherheitspolizeigesetz, Journal officiel No 566/1991) entrée en vigueur le 1er mai 1993. Cette loi inscrit pour la première fois les mesures de prévention de la police dans un cadre réglementaire; elle confère aux individus ayant affaire à la police d'importants droits subjectifs ainsi qu'une protection juridique plus étendue. La même année, un code déontologique a été introduit dans les directives sur l'intervention des organes chargés de la sécurité publique, publiées sous forme d'ordonnance (Richtlinienverordnung/RLV, Journal officiel No 266/1993), qui va au-delà de la sphère de compétence de la police et contient des dispositions interdisant tout traitement discriminatoire et régissant la conduite des interrogatoires.


7. L'étape suivante du processus de réforme a consisté en une révision radicale des dispositions relatives à la détention provisoire introduite par la loi de 1993 portant modification de la procédure pénale (Strafprozeßänderungsgesetz, Journal officiel No 526). Cette révision est un premier pas vers une réforme globale de la procédure pénale préliminaire, attendue depuis longtemps.


8. Troisième élément de cette réorganisation totale des pouvoirs de la police, la loi sur les étrangers a été complètement remaniée et adoptée sous sa nouvelle forme en juin 1997. La loi sur les étrangers de 1997 (Fremdengesetz, Journal officiel I No 75/1998) et la loi sur l'asile de 1997 (Asylgesetz, Journal officiel I No 76/1998) sont entrées en vigueur le 1er janvier 1998 et reprennent les principes généraux de la loi sur l'immigration en vigueur depuis le début des années 90. Ce "programme d'intégration" visait essentiellement à conserver les principes fondamentaux de la législation relative à l'immigration, qui tiennent compte de l'augmentation des mouvements migratoires dus à l'ouverture des frontières à l'est et sont caractérisés par la séparation stricte des étrangers en groupes distincts et leur traitement spécifique en conséquence (touristes, travailleurs migrants et demandeurs d'asile), d'une part, et par le souci de prévenir des abus en matière de droit d'asile, d'autre part; ces mesures visent en outre à assurer une application plus juste de la loi dans chaque cas.


9. Ainsi, un processus de codification est en cours, qui a déjà permis de réviser des pans entiers de la loi en moins de dix ans et doit se parachever durant la législature à venir par une révision de la procédure pénale préliminaire (enquêtes policières comprises).



I. LA LOI SUR LES FORCES DE L'ORDRE (Sicherheitspolizeigesetz, SPG)



A. Principes régissant l'accomplissement des fonctions
de la police et la protection juridique


10. La loi sur les forces de l'ordre (Sicherheitspolizeigesetz, SPG) modifie sensiblement les règles applicables aux responsables de l'application des lois, dans la mesure où elle montre clairement qu'une personne ayant affaire à la police doit être considérée comme un sujet de droit, c'est-à-dire comme une personne possédant des droits subjectifs qui ne peuvent être restreints que dans des cas précis et dans la mesure exigée par les fonctions à accomplir. En outre, cette personne bénéficie d'une totale protection juridictionnelle assurée principalement par les tribunaux administratifs indépendants (Unabhängige Verwaltungssenate).


11. L'un des objectifs implicites de la SPG, qui trouve son expression dans les dispositions susmentionnées, est de sensibiliser les agents de la force publique aux droits des personnes auxquelles ils ont affaire, ce qui est essentiel pour prévenir les violations de droits de l'homme.


1. Principes régissant l'accomplissement des fonctions de la police


12. S'agissant de l'accomplissement des fonctions de la police, les principes énoncés dans la SPG :


a) Indiquent clairement que l'objectif principal de l'intervention de la police est non pas de servir les intérêts de l'État, mais de protéger l'intégrité physique des êtres humains;


b) Visent à garantir que les droits des individus concernés par des actes commis par la police dans l'exercice de ses fonctions sont dûment protégés (principe de proportionnalité);


c) Confèrent à ces personnes certains droits minimums, dont le droit d'être informées à leur demande du motif et du but de l'intervention et le droit de faire valoir des faits qui s'y rapportent et de les faire établir officiellement;


d) Donnent aux agents de la force publique des directives qui visent à assurer une interaction normale avec les personnes concernées et à réduire le risque de conflit.


2. Les directives sur l'intervention des organes chargés de la sécurité publique (Richtlinienverordnung, RLV)


13. L'objectif fondamental mentionné ci-dessus, à savoir respecter les droits des personnes concernées, est formulé dans les directives sur l'intervention des organes chargés de la sécurité publique, publiées sous forme d'ordonnance (RLV).


14. L'article 5 de la RLV, intitulé "Respect de la dignité humaine", interdit toute discrimination, en particulier contre les groupes marginaux; dans l'exercice de leurs fonctions, les agents des forces de l'ordre doivent s'abstenir de tout acte susceptible de créer une impression de partialité ou d'être perçus comme une discrimination fondée sur le sexe, la race ou la couleur, l'origine nationale ou ethnique, l'appartenance religieuse, les convictions politiques ou l'orientation sexuelle. Hormis dans un petit nombre de cas, ils sont tenus de s'adresser poliment à chacun en utilisant le vouvoiement.


15. Toute personne ayant affaire à la police doit, à sa demande, être informée de ses droits et du but de l'intervention (art. 6, par. 1).


16. Dans la mesure du possible, les personnes interrogées doivent être autorisées à s'asseoir (art. 6, par. 2).


17. Les interrogatoires des personnes en état d'arrestation doivent généralement se dérouler dans des locaux officiels (art. 6, par. 3). En cas d'interrogatoires qui durent longtemps, des pauses doivent être ménagées. Les interrogatoires doivent être consignés par écrit de sorte qu'il soit possible d'en retracer le déroulement par la suite.


18. Les organes chargés de la sécurité publique doivent informer les personnes arrêtées devant être examinées par un médecin commis qu'elles sont libres de demander un médecin de leur choix pour autant que l'examen n'en soit pas indûment retardé (art. 8, par. 3).


19. Les personnes ayant affaire à la police peuvent porter plainte pour non-respect des directives devant une instance supérieure (Aufsichtbeschwerde) (dont il est question séparément dans l'article 89 de la loi sur la police). Si le plaignant n'est pas satisfait de la décision de cette instance, il peut en demander la révision par un tribunal administratif indépendant.


20. L'instance supérieure peut également, à l'occasion de la plainte, favoriser le dialogue entre le plaignant et le défendeur. Cette procédure vise à faciliter un règlement du conflit en donnant à la personne concernée le sentiment que son problème est pris au sérieux tout en lui permettant de comprendre que l'escalade d'un conflit n'est souvent pas le fait de l'une des deux parties seulement. Le plaignant, s'il est satisfait du dialogue, peut retirer sa plainte.


3. Droit à une intervention conforme à la loi et protection juridique


21. L'article 87 de la SPG est une caractéristique du droit autrichien en ce qu'il donne à toute personne ayant affaire à la police un droit subjectif à une intervention conforme à la loi. Cette disposition est à rapprocher de l'article 88, qui offre aux personnes victimes d'une atteinte quelconque à leurs droits la possibilité de déposer plainte auprès du Tribunal administratif indépendant. Une protection juridique aussi large en cas d'intervention de la police constitue un cas unique en droit autrichien, étant donné qu'elle n'est généralement accordée qu'en rapport avec certains actes impliquant l'exercice de prérogatives de la puissance publique (hoheitliches Handeln).



B. Rapport sur la sécurité publique


22. Conformément à l'article 93 de la SPG, le Gouvernement fédéral est tenu de présenter au Parlement autrichien un rapport annuel sur la sécurité publique. Ce rapport doit également comporter des statistiques sur les plaintes déposées contre les forces de l'ordre devant une juridiction disciplinaire ou pénale. Ainsi, le rapport sur la sécurité publique de 1996 (p. 217 et 218) contient des renseignements détaillés sur les plaintes déposées contre des membres de la police et de la gendarmerie fédérales. D'autres renseignements sont fournis (p. 298 et 299) sur des affaires dans lesquelles des agents de police ont été accusés de mauvais traitements et qui ont été portées à la connaissance du ministère public. Il y a eu 715 plaintes et huit condamnations pendant l'année considérée.



II. LA LOI DE 1993 PORTANT MODIFICATION DU CODE DE
PROCÉDURE PÉNALE ET LA LOI RELATIVE AUX PLAINTES
POUR VIOLATION DES DROITS FONDAMENTAUX


23. Étape importante de la réforme globale de la procédure pénale préliminaire, la loi de 1993 portant modification du Code de procédure pénale (Strafprozeßänderungsgesetz 1993, Journal officiel No 526/1993) constitue un remaniement fondamental des dispositions relatives à l'arrestation et à la détention provisoire.


24. En vertu des nouvelles dispositions, les décisions concernant la détention provisoire doivent être renouvelées dans des délais précis (deux semaines, un mois, deux mois); à chaque fois, le juge d'instruction doit rendre sa décision après avoir entendu le prévenu, l'avocat de la défense et le procureur. Un conseil doit toujours être présent. Un nouveau système d'aide judiciaire a été mis en place afin que toute personne arrêtée et placée en détention provisoire bénéficie immédiatement des services d'un conseil (Untersuchungshaft).


25. Toute personne arrêtée dans un lieu qui ne relève pas de la juridiction du tribunal ayant délivré le mandat d'arrêt doit en être transférée afin de comparaître devant ce tribunal dans les 72 heures suivant l'arrestation.


26. La nouvelle loi a entraîné une réduction considérable (de plus de 20 %) et permanente du nombre de personnes en détention provisoire.


27. S'agissant de la détention, il est possible depuis le 1er janvier 1993 de faire réexaminer les sentences et décisions des cours pénales par la Cour suprême en vertu de la loi sur les plaintes pour violation des droits fondamentaux (Grundrechtsbeschwerdegesetz, Journal officiel No 864/1992), afin de vérifier s'il y a eu violation du droit fondamental à la liberté personnelle, par exemple en raison d'une mauvaise évaluation des conditions justifiant la détention provisoire, de la durée excessive de cette détention ou d'une application incorrecte de la loi au moment de l'arrestation ou de la détention.



III. LA LOI SUR LES ÉTRANGERS DE 1997 ET LA LOI SUR L'ASILE DE 1997


28. La législation actuelle relative aux étrangers et à l'asile comporte quelques dispositions importantes destinées à prévenir le risque de mauvais traitements.



A. Défense d'expulsion et de refoulement


29. Une défense explicite d'expulsion et de refoulement au sens de l'article 33 1) de la Convention relative au statut des réfugiés (Journal officiel No 55/1955), qui est en vigueur en Autriche au même titre qu'une loi fédérale sous la forme du Protocole relatif au statut des réfugiés (Journal officiel No 78/1968), a déjà été introduite dans la loi autrichienne relative aux étrangers (art. 13 a) de la loi relative aux étrangers parue au Journal officiel No 190/1990). Cette disposition a été incorporée sans apporter de changement de fond à la loi sur les étrangers de 1997 (art. 57) et amendée par une disposition de procédure spéciale (art. 75), qui oblige les autorités à vérifier s'il existe un risque réel de persécution en cas de refoulement.


30. La loi interdit l'expulsion ou le refoulement d'un étranger dans un autre pays s'il existe des motifs sérieux de croire que l'intéressé risquerait d'y être exposé à des peines ou traitements inhumains ou à la condamnation à mort, ou que sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. Cette interdiction a un caractère absolu et doit être observé ex officio à tous les stades d'une procédure visant à mettre fin à un séjour. Conformément au paragraphe 1 de l'article 75 de la loi sur les étrangers, les autorités doivent vérifier, à la demande de la personne concernée, s'il existe de bonnes raisons de penser que celle-ci est menacée dans un État désigné par elle conformément au paragraphe 1 de l'article 57 de ladite loi. Cette règle ne s'applique pas, et c'est la seule exception, lorsque l'Office fédéral de l'asile a déjà pris une décision concernant l'expulsion dans un autre État ou a établi que l'étranger concerné sera à l'abri de toute persécution dans un pays tiers.


31. La loi sur l'asile de 1997, qui est entrée en vigueur le même jour que la loi sur les étrangers, le 1er janvier 1998, prévoit que l'Office fédéral de l'asile examine séparément la question du bien-fondé du non-refoulement. Ce procédé permet de garantir que des spécialistes décident du bien-fondé des mesures de police dans les cas sensibles. En outre, l'Office fédéral de l'asile est tenu de respecter la clause du "pays tiers" qui, contrairement à la loi antérieure, est essentiellement orientée vers l'avenir et requiert donc l'établissement d'un pronostic sur le niveau de sécurité à attendre dans le pays tiers, le but étant d'éviter l'apparition de lacunes en matière de protection qui pourraient être dues à une interprétation de cette clause fondée sur la situation passée dudit pays.


32. Ainsi, la loi prévoit clairement que, face au risque de peines ou traitements inhumains ou de peine de mort, il ne peut être mis fin au séjour, même dans les cas où le paragraphe 2 de l'article 33 de la Convention relative au statut des réfugiés est applicable. En effet, en vertu de cette disposition, une mesure mettant fin au séjour d'un étranger ne serait pas contraire au paragraphe 1 dudit article, s'il y a des raisons sérieuses de considérer le réfugié comme un danger pour la sécurité de la République d'Autriche ou si cette personne, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit grave, constitue une menace pour la communauté.


33. La disposition relative à l'autorisation temporaire de séjour (art. 15 de la loi sur l'asile) doit être interprétée en liaison avec l'examen du bien-fondé de non-refoulement. Conformément à cette disposition, l'Office fédéral de l'asile est tenu d'accorder une autorisation temporaire de séjour aux demandeurs d'asile qui n'ont pas obtenu satisfaction pour des motifs autres que ceux excluant l'octroi de l'asile (art. 1.F de la Convention de Genève) et qui n'ont pas d'autorisation légale de séjour sur le territoire fédéral si ledit examen a montré que ces personnes ne pouvaient être expulsées ou refoulées. Cette disposition permet de garantir que les étrangers qui ne peuvent pas être contraints à quitter le pays ont le droit d'y rester aussi longtemps que la situation ne s'améliore pas dans le pays de destination. Ainsi, un permis temporaire de séjour est généralement accordé lorsque l'asile est refusé; il peut toutefois être également accordé à un stade ultérieur, lorsqu'un permis de séjour initialement accordé cesse ensuite d'être valable.


34. Enfin, en vertu du paragraphe 6 de l'article 57 de la loi sur les étrangers de 1997, il ne peut y avoir refoulement tant que la personne concernée bénéficie de mesures conservatoires prises par la Commission européenne des droits de l'homme ou la Cour européenne des droits de l'homme, autrement dit, tant que celles-ci n'ont pas statué.



B. La chambre fédérale indépendante des recours en matière d'asile
(Unabhängiger Bundesasylsenat)


35. Le législateur a perfectionné la procédure de l'asile en créant une juridiction d'appel indépendante en la matière, la chambre fédérale indépendante des recours en matière d'asile (art. 38 de la loi sur l'asile de 1997), dont les membres siègent pendant une durée illimitée et jugent en toute indépendance. Cette nouvelle instance est organisée comme un tribunal et, contrairement à l'Office fédéral de l'asile qui dépend du Ministère fédéral de l'intérieur, relève de la compétence du Chancelier fédéral, constituant ainsi un tribunal au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ce système garantit que les décisions concernant l'asile, qui sont intimement liées quant au fond aux droits fondamentaux universellement reconnus et contribuent souvent dans une large mesure à prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, sont prises dans les meilleures conditions et par des personnes compétentes en la matière.



C. Protection des personnes déplacées


36. La loi sur les étrangers de 1997 contient une disposition qui contribue spécialement à la prévention de la torture en ce qu'elle protège même les "personnes déplacées" (art. 29) auxquelles la Convention relative au statut des réfugiés ne s'applique pas. Conformément au paragraphe 1 de cette disposition, le Gouvernement fédéral est habilité, avec l'accord de la Commission principale du Conseil national (Nationalrat), à délivrer une autorisation temporaire de séjour à des groupes d'étrangers qui sont directement touchés et ne peuvent trouver asile ailleurs en cas de conflits armés ou dans d'autres circonstances qui menacent la sécurité de groupes ethniques entiers. Ce système s'est révélé extrêmement utile durant la crise en Bosnie-Herzégovine.


37. Pour que le nécessaire puisse être fait lorsqu'une ordonnance ne peut être prise par le Gouvernement fédéral avec l'accord du Conseil national parce que l'ampleur et la durée du conflit armé dans la région en crise ne peuvent être convenablement évaluées ou parce que le Conseil national ne peut pas examiner la question suffisamment rapidement, par exemple pendant les vacances d'été, il est possible, avec l'accord du Ministre fédéral de l'intérieur et en application du paragraphe 4 de l'article 10 de la loi sur les étrangers, d'accorder ex officio aux étrangers déplacés une autorisation de séjour de trois mois pour des raisons humanitaires, même s'il existe des raisons sérieuses de refuser cette autorisation. Ce système garantit l'adoption des mesures voulues dès le début d'une crise.



IV. SÉLECTION ET FORMATION DES AGENTS DE POLICE


38. La sélection et la formation des agents de police constituent des moyens importants de prévenir la torture ou les traitements inhumains.



A. Sélection des agents de police


39. Depuis janvier 1996, les autorités autrichiennes utilisent un test appelé Inventaire multiphasique de personnalité du Minnesota (Minnesota Multiphasic Personality Inventory, MMPI) pour vérifier que les candidats à un emploi à vie répondent aux conditions requises. Ce test est conçu pour détecter avec fiabilité tous les troubles psychologiques latents et les pathologies de la personnalité. En cas de résultats anormaux, un expert en psychiatrie est consulté, ce qui permet de veiller à ce que toute personne présentant des troubles majeurs de la personnalité ne puisse pas être recrutée dans les forces de l'ordre.



B. Enseignement dispensé dans le cadre de la formation
professionnelle de base


40. Durant leur formation de base, les agents de police suivent des cours de droit constitutionnel qui les familiarisent avec les droits fondamentaux et leur enseignent comment exercer leurs fonctions dans le respect de la dignité humaine. Le programme de formation destiné au personnel d'encadrement comprend un cours spécifique intitulé "Droits de l'homme", qui met l'accent sur l'importance des droits fondamentaux. Dans le cadre de la formation ultérieure et interne, il est souvent fait référence à l'importance des droits de l'homme et des lois pertinentes, en particulier à la loi sur les forces de l'ordre. De plus, les articles 5 et 6 des directives sur l'intervention des organes chargés de la sécurité publique comportent d'importantes dispositions sur le respect des droits de l'homme et la manière de traiter les personnes qui ont affaire à la police. Les officiers de la police judiciaire, à qui incombe principalement la tâche d'interroger les personnes arrêtées, reçoivent une formation spéciale aux techniques de l'interrogatoire.



C. Semaine des droits de l'homme


41. Le Ministère fédéral de l'intérieur est convaincu que des contrôles plus stricts ne suffisent pas à empêcher durablement la police de commettre des excès et que la prévention ne sera efficace que si les agents de police comprennent bien leur rôle et leurs fonctions. Afin de susciter une réflexion sur la relation entre les droits fondamentaux des personnes qui ont affaire à la police et les devoirs des membres des forces de l'ordre au regard de la loi, une semaine des droits de l'homme a été organisée du 2 au 6 février 1998 au cours de laquelle des responsables des forces de l'ordre provenant de tous les services du Ministère ont été sensibilisés à l'importance des droits de l'homme dans la pratique quotidienne.


42. Ce projet a été lancé à la suite des accusations de mauvais traitements pendant la garde à vue formulées par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Le groupe cible auquel il s'adressait en priorité - pour des raisons financières -comprenait des officiers de police de rang supérieur, par exemple des chefs de services de gendarmerie au niveau du district ou de hauts responsables de la police et des détectives de la direction de la police fédérale. Il est encourageant de constater que cette semaine a été organisée en collaboration avec l'antenne autrichienne d'ONG telles que Caritas et Amnesty International.


43. Ont été notamment abordées des questions telles que la conduite des agents de police à l'égard des délinquants et des suspects ainsi que les violations des droits de l'homme commises à l'encontre d'étrangers, de marginaux et de minorités. En s'appuyant sur leur expérience personnelle, les participants ont pu élargir et approfondir leur compréhension de questions délicates ayant trait aux droits de l'homme qui se posent à eux dans l'exercice de leurs fonctions et réfléchir à de nouvelles façons d'agir.


44. En dépit du scepticisme initial des participants, le stage a permis de faire disparaître les préjugés de part et d'autre, en grande partie grâce à la présence de groupes extérieurs.


45. Il convient de noter que les participants ont élaboré des projets visant à faire connaître les questions et problèmes à leurs subordonnés. Une importante contribution est venue du service de gendarmerie de Wolfsberg, qui a réalisé un projet remarquable sur le thème "la gendarmerie répond aux besoins des citoyens", lequel avait trait pour une grande part aux droits de l'homme. Il est intéressant de relever qu'à la suite de ce projet, le nombre de plaintes dans la région a diminué de moitié. À la lumière de cette expérience positive, les participants ont proposé que d'autres semaines de travail ou séminaires soient organisés, que la question fasse dorénavant partie du programme des cours de perfectionnement professionnel, que la formation de base soit modifiée et élargie et que des tables rondes soient organisées avec des représentants des ONG et d'associations de citoyens.


46. On peut dire pour finir que la semaine des droits de l'homme n'a pas été une manifestation ponctuelle, mais plutôt le début d'un projet qui devrait se poursuivre. Cet objectif ne peut toutefois être atteint que si la formation ultérieure d'éducateurs ("multiplicateurs") est garantie, si le groupe cible comprend tous les membres des forces de police et si certaines idées concernant la formation de base et ultérieure des agents de police sont mises en pratique.



V. EXAMENS MÉDICAUX


47. Le Ministère fédéral de l'intérieur a déjà demandé aux autorités de la gendarmerie et de la police (par des arrêts ministériels du 6 et du 15 février 1990, respectivement) de veiller à ce que des examens médicaux puissent être effectués sans préavis par le médecin compétent dans les locaux de la police. Ces arrêtés ministériels ont été rappelés expressément aux responsables des forces de l'ordre en 1996, à l'occasion de la visite en Autriche du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Le nombre de ces examens doit être au minimum de 12 par année.


48. Conformément à l'article 5 des statuts des médecins exerçant dans la police fédérale, toute lésion constatée au cours d'un examen médical doit être consignée dans un rapport qui doit en fournir une description détaillée, indiquer avec précision les traces, les signes visibles ou les conséquences de violence physique qui ont été constatés et donner des renseignements sur les violences qui auraient été commises et sur leurs causes et leurs séquelles. Lorsque les nouveaux statuts des médecins seront publiés, il sera important de mettre de nouveau l'accent sur les dispositions susmentionnées. Il existe une obligation générale d'examiner toute infraction, y compris d'éventuelles lésions, conformément aux lois pertinentes. Cette obligation est faite en particulier aux agents des forces de l'ordre qui exercent des fonctions de surveillance.



VI. LE COMITÉ EUROPÉEN POUR LA PRÉVENTION DE LA TORTURE
ET DES PEINES OU TRAITEMENTS INHUMAINS
OU DÉGRADANTS (CPT)


49. Le CPT s'est rendu en Autriche à deux reprises, du 20 au 27 mai 1990 et du 26 septembre au 7 octobre 1994. Dans ses deux rapports, il a critiqué certains aspects des arrestations effectuées par la police. En particulier, il a fait observer lors de ses deux visites que les personnes arrêtées par les forces de l'ordre couraient le risque d'être maltraitées. Les deux rapports du CPT et les observations générales du Gouvernement fédéral autrichien ont été publiés (documents du Conseil de l'Europe publiés sous les cotes CPT/Inf (91) 11 du 3 octobre 1991 et CPT/Inf (96) 29 du 31 octobre 1996). (Dans une lettre datée du 3 octobre 1996, le CPT a exprimé le souhait que certains aspects des observations de l'Autriche sur le rapport relatif à sa deuxième visite en Autriche soient modifiés, ce qui a été fait le 31 janvier 1997.)



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