Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Algérie, U.N. Doc. CAT/C/25/Add.8 (1996).
Deuxième rapports périodiques des Etats parties
devant être soumis en 1994
Additif
ALGERIE*
[23 février 1996]
*/ Le rapport initial présenté par le Gouvernement algérien porte la cote CAT/C/9/Add.5;
il est rendu compte de l'examen de ce rapport par le Comité dans les documents
CAT/C/SR.79 et 80, ainsi que dans les Documents officiels de l'Assemblée générale,
quarante-sixième session, Supplément No 44 (A/46/46) par. 263 à 290.
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Introduction |
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I. |
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A. |
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B. |
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C. |
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D. |
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E. |
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II. |
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Introduction
1. L'Algérie a ratifié la Convention internationale contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par décret présidentiel
no 89-66 du 16 mai 1989, après approbation par l'Assemblée populaire nationale
(loi no 89-10 du 25 avril 1989).
2. Lors de l'approbation et de la ratification de cet instrument international,
l'Algérie n'a émis aucune réserve. De plus, elle a reconnu les compétences du
Comité contre la torture telles que résultant des articles 17 et suivants de
ladite convention.
3. Au cours de la sixième session du Comité, l'Algérie a présenté son rapport
initial, en application de l'article 19 de la Convention.
4. En vertu de ce même article l'Algérie présente le présent rapport périodique.
Ce rapport comporte deux parties. La première partie concerne les renseignements
généraux sur toutes nouvelles mesures prises par l'Algérie aux fins de la mise
en oeuvre des dispositions de la Convention et de tout changement dans la législation
qui affecte cette mise en oeuvre; ceci, depuis la date de présentation de son
rapport initial jusqu'à ce jour. La deuxième partie comporte, quant à elle,
des éléments d'informations complémentaires aux observations faites par le Comité
lors de l'examen du rapport initial de l'Algérie.
I. NOUVELLES MESURES ET NOUVEAUX FAITS TOUCHANT LA CONVENTION
A. Mesures prises pour la mise en oeuvre de la Convention
5. Sous la section 2 du Code pénal intitulée "Attentats à la liberté",
l'article 11 bis prévoit et réprime les actes de torture. Cet article stipule
que "tout fonctionnaire ou agent qui exerce ou ordonne d'exercer la torture
pour obtenir des aveux est puni d'un emprisonnement de six mois à trois ans".
Cette disposition du Code pénal répond aux prescriptions des articles 1, 2 et
4 de la Convention en punissant tout agent de l'Etat, qu'il soit fonctionnaire
des services de sécurité ou autre, qui, intentionnellement, aurait infligé des
souffrances physiques ou mentales à une personne aux fins d'obtenir d'elle des
aveux. La même disposition punit d'une peine identique tout fonctionnaire ou
agent de l'Etat qui, sans commettre lui-même l'acte matériel consistant à infliger
des tortures, a donné l'ordre à une tierce personne, de les commettre.
6. Parallèlement, le décret exécutif no 92-276 du 6 juillet 1992 portant Code
de déontologie médicale stipule, en son article 12, que "le médecin, le
chirurgien-dentiste, sollicité ou requis pour examiner une personne privée de
liberté ne peut, directement ou indirectement - ne serait-ce que par sa seule
présence -, favoriser ou cautionner une atteinte à l'intégrité physique ou mentale
de cette personne ou à sa dignité. S'il constate que cette personne a subi des
sévices ou des mauvais traitements, il doit en informer l'autorité judiciaire.
Le médecin, le chirurgien-dentiste ne doit jamais assister, participer ou admettre
des actes de torture ou toute autre forme de traitements cruels, inhumains ou
dégradants".
7. En outre, l'article 32 du Code de procédure pénale indique que "toute
autorité constituée, tout officier ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de
ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, est tenu de
donner avis, sans délai, au ministère public et de lui transmettre tout renseignement,
acte ou procès verbal qui lui est relatif".
8. Dans le même Code, l'article 72 stipule que "toute personne qui se prétend
lésée par un infraction peut, en portant plainte, se constituer partie civile
devant le juge compétent".
9. Ainsi, et conformément à l'article 4 de la Convention, l'Algérie "veille
à ce que les actes de torture constituent des infractions au regard de son droit
pénal".
B. Changements intervenus dans la législation algérienne depuis
la présentation du rapport initial et faits nouveaux de
nature à effectuer la mise en oeuvre de la Convention
10. Depuis quelques années, l'Algérie a connu de profondes mutations qui ont
eu pour aboutissement la promulgation de la Constitution du 23 février 1989.
Cette nouvelle loi fondamentale a mis en place un dispositif d'ensemble consacrant
les principes de construction d'un véritable Etat de droit, démocratique, pluraliste,
oeuvrant pour le renforcement des libertés individuelles et collectives et à
la sauvegarde des droits de l'homme.
11. A partir des principes édictés par la Constitution, la justice, érigée en
pouvoir indépendant, a oeuvré au double plan international et national, pour
consacrer dans les faits cette indépendance.
12. Au plan international, il a été procédé à l'harmonisation de la législation
nationale avec les instruments juridiques internationaux relatifs aux droits
de l'homme.
13. Au plan national, un travail d'assainissement de la législation antérieure,
dans ses aspects frappés d'obsolescence, a été entrepris. Il a été procédé,
ainsi, à la suppression de la relégation, de la section économique et des procédures
privilégiées pour certains justiciables. Pour sa part, le Code de procédure
pénale a connu des amendements renforçant les droits fondamentaux de l'individu
:
Garde à vue limitée à 48 heures;
Communication de la personne gardée à vue avec sa famille;
Perquisitions assujetties à l'accord du maître de maison et au mandat du juge;
Détention préventive limitée dans le temps;
Contrôle judiciaire mis en place pour suppléer à la détention préventive.
14. Parallèlement, une loi portant Statut de la magistrature, qui consacre le
principe de l'indépendance de la justice, a été promulguée. En outre, une nouvelle
loi portant organisation de la profession d'avocat a renforcé le caractère indépendant
de cette profession, sa vocation à oeuvrer pour le respect des libertés et droits
du citoyen et le renforcement et la sauvegarde des droits de la défense. Enfin,
les fonctions de notaire et d'huissier de justice ont été organisées en profession
libérale.
15. Cependant, tout ce dispositif légal s'est trouvé entravé par un phénomène
nouveau caractérisé par les manifestations violentes de l'extrémisme religieux
et du terrorisme.
C. L'instauration de l'état d'urgence
16. L'apparition et la multiplication de graves atteintes à l'ordre public et
à la sécurité des personnes et des biens ont amené les pouvoirs publics à décréter,
le 9 février 1992, l'état d'urgence pour une durée de 12 mois (décret présidentiel
no 92-44).
17. Conformément aux procédures prévues par le Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, auquel elle a adhéré en 1989, l'Algérie avait informé
les autres Etats parties, par l'entremise du Secrétaire général de l'Organisation
des Nations Unies, de l'usage du droit de dérogation à certaines de ses obligations.
18. En raison de la persistance des troubles dus à l'activité terroriste, l'état
d'urgente a été prorogé le 6 février 1993 (décret législatif no 93-02).
L'Etat d'urgence vise à restaurer l'ordre public et à mieux assurer la sécurité
des personnes et des biens ainsi que le bon fonctionnement des services publics.
19. En vertu du décret présidentiel portant état d'urgence, "le Ministre
de l'intérieur, pour tout ou partie du territoire national, ainsi que le Wali,
pour sa circonscription, sont habilités à prendre, par voie d'arrêté, les mesures
de préservation ou de rétablissement de l'ordre public dans le respect des directives
gouvernementales". La mise en vigueur de l'état d'urgence donne au Ministre
de l'intérieur, pour l'étendue du territoire national, ou au wali, pour l'étendue
de sa circonscription, les pouvoirs suivants, dans le respect des directives
gouvernementales :
Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules sur des
lieux et selon des horaires déterminés;
Réglementer la circulation et la distribution de denrées alimentaires et des
biens de première nécessité;
Instituer des zones à régime de séjour réglementé pour les non-résidents;
Interdire de séjour ou assigner à résidence toute personne majeure dont l'activité
s'avère nuisible à l'ordre public et au fonctionnement des services publics;
Réquisitionner des travailleurs pour accomplir des activités professionnelles
habituelles, en cas de grève non autorisée ou illégale;
Ordonner exceptionnellement des perquisitions de jour et de nuit.
20. Le Ministre de l'intérieur et le wali territorialement compétent sont également
habilités à ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, lieux
de réunions de toute nature et à interdire toute manifestation susceptible de
troubler l'ordre et la tranquillité publics.
21. En vertu de l'article 5 du décret précité, "le Ministre de l'intérieur
peut prononcer le placement en centre de sûreté, dans un lieu déterminé, de
toute personne majeure dont l'activité s'avère dangereuse pour l'ordre public,
la sécurité publique ou le bon fonctionnement des services publics". Cette
mesure, à laquelle les pouvoirs publics ont dû recourir, en particulier durant
les premiers mois qui ont suivi l'instauration de l'état d'urgence, répond au
souci d'endiguer les actes de violence qui portent gravement atteinte à l'ordre
public, à la sécurité des citoyens et à la paix sociale, menaçant ainsi la stabilité
du pays. La mesure de placement est prononcée par le Ministre de l'intérieur
ou par l'autorité qu'il aura déléguée.
22. Le décret exécutif no 92-75 du 20 février 1992, fixant les conditions d'application
de certaines dispositions du décret présidentiel portant état d'urgence, définit
le placement dans un centre de sûreté comme une "mesure administrative
à caractère préventif qui consiste à priver toute personne majeure dont le comportement
est susceptible de compromettre dangereusement l'ordre et la sécurité publics
ainsi que le bon fonctionnement des services publics, de sa liberté d'aller
et venir en la plaçant dans un des centres créés par arrêté du Ministre de l'intérieur".
23. Le même décret stipule que la mesure de placement est susceptible de recours
auprès du wali de la wilaya du lieu de résidence de la personne placée. Les
éventuels recours, instruits et assortis de toutes observations utiles, sont
soumis au "Conseil régional de recours" qui se prononce dans les 15
jours suivant la saisine. Le décret institue six conseils régionaux de recours
implantés à travers le territoire national.
24. Les personnes placées bénéficient des mesures d'assistance et de soins médicaux
dans les conditions fixées par le règlement intérieur applicable au centre de
sûreté. Parmi les personnes interpellées entre février et avril 1992 (10 000
personnes environ), un nombre important a été libéré quelques jours après examen
de leur situation. Les autres ont été placées dans des centres de sûreté ouverts
conformément aux dispositions des décrets précités. A partir du mois de mai
1992, il a été procédé à la libération progressive des personnes placées ainsi
qu'à la fermeture des centres de sûreté.
25. Il convient de relever que les mesures exceptionnelles prises dans le cadre
de l'état d'urgence ont toutes été entourées de garanties de protection des
droits de l'homme. Les droits et libertés énoncés dans les articles 6, 7, 8,
11, 15, 16 et 18 du Pacte international sur les droits civils et politiques
n'ont été soumis à aucune restriction.
26. Par ailleurs, les mesures de préservation ou de rétablissement de l'ordre
que le Ministre de l'intérieur ou le wali sont habilités à prendre doivent l'être
"dans le respect des directives gouvernementales" en ce qui a trait,
notamment, au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
1. La loi sur le terrorisme et la subversion
27. Pour se doter des instruments juridiques à même de lui permettre d'affronter
la criminalité terroriste par les moyens de l'institution judiciaire, l'Algérie
a élaboré un texte de loi traitant du terrorisme. Il s'agit du décret législatif
no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre le terrorisme et la
subversion, qui met en place des juridictions spécialisées dénommées "cours
spéciales" pour juger les affaires de terrorisme.
28. En fait, ces cours spéciales ne sont pas des juridictions d'exception et
ne sont spéciales que par rapport à la nature des infractions qu'elles sont
chargées de juger. Cette affirmation est étayée par le fait que :
Les cours spéciales sont composées exclusivement de magistrats professionnels
de l'ordre judiciaire de droit commun, soumis statutairement à la loi portant
Statut de la magistrature;
Ce sont les règles du Code de procédure pénale qui sont applicables aux infractions
justiciables des cours spéciales, hormis quelques aménagements mineurs qui n'effectent
en rien les droits de la défense;
Les audiences sont publiques, ouvertes à la presse nationale et internationale;
Les droits de la défense sont scrupuleusement respectés, et les prévenus qui
ne peuvent recourir, pour des raisons financières, aux services d'un avocat
bénéficient de la commission d'office d'un avocat désigné par le bâtonnier de
l'ordre des avocats;
Les voies de recours admises en matière ordinaire sont ouvertes aux inculpés
des cours spéciales à toutes les phases de la procédure, sans restriction aucune
(appel contre les ordonnances des juges d'instruction, opposition et pourvoi
en cassation contre les arrêts).
29. Enfin et conformément aux dispositions constitutionnelles et légales, les
condamnés à la peine capitale peuvent bénéficier de la grâce présidentielle.
A cet égard, il y a lieu de noter que plusieurs personnes condamnées à mort
par les cours spéciales ont été graciées et, qu'en tout état de cause, aucune
condamnation à mort n'a été exécutée depuis le mois de septembre 1993.
2. L'abrogation des dispositions sur le terrorisme et la subversion et la suppression
des cours spéciales
30. Soucieuse d'uniformiser son système judiciaire, l'Algérie a abrogé le décret
législatif 92-03 et supprimé les cours spéciales. Le phénomène de la subversion
et du terrorisme est ainsi replacé dans son contexte normal de délinquance pure
et simple, et traité au plan judiciaire par les juridictions ordinaires.
31. L'ordonnance no 95-11 du 25 février 1995, modifiant et complétant l'ordonnance
66-156 du 9 juin 1996 portant Code pénal, a donc défini une nouvelle catégorie
d'actes criminels, les "crimes terroristes et subversifs" dont le
traitement judiciaire est confié aux tribunaux criminels. Est ainsi défini comme
"acte terroriste et subversif" (art. 87 bis du Code modifié), tout
acte visant la sûreté de l'Etat, l'intégrité du territoire, la stabilité et
le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet
de :
Semer l'effroi au sein de la population et créer un climat d'insécurité, en
portant atteinte moralement ou physiquement aux personnes ou en mettant en danger
leur vie, leur liberté ou leur sécurité ou en portant atteinte à leurs biens;
Entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et occuper
les places publiques par des attroupements;
Attenter aux symboles de la nation et de la République et profaner les sépultures;
Porter atteinte aux moyens de communication et de transport, aux propriétés
publiques et privées, d'en prendre possession ou de les occuper indûment;
Porter atteinte à l'environnement ou introduire dans l'atmosphère, sur le sol,
dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale,
une substance de nature à mettre en péril la santé de l'homme ou des animaux
ou le milieu naturel;
Faire obstacle à l'action des autorités publiques ou au libre fonctionnement
des établissements concourant au service public;
Faire obstacle au fonctionnement des institutions publiques ou porter atteinte
à la vie ou aux biens de leurs agents, ou faire obstacle à l'application des
lois et règlements.
D. L'ordonnance no 95-12 du 25 février 1995 portant mesures de clémence
32. Soucieux de favoriser le rétablissement de la paix civile, l'Etat algérien
a décidé des mesures de clémence destinées à ouvrir une issue aux personnes
qui se sont fourvoyées dans des activités criminelles et qui souhaitent réintégrer
le chemin de la loi. Une loi sur la clémence a été adoptée en direction des
terroristes repentis, prévoyant une série de mesures allant de l'exemption des
poursuites à la réduction substantielle de l'échelle des peines et des condamnations.
33. Les mesures de clémence prévoient notamment que :
Ne sera pas poursuivi celui qui a fait partie d'une des organisations visées
à l'article 87 bis 3 du Code pénal et qui n'a pas commis d'infraction prévue
par ledit article ayant entraîné mort d'homme, infirmité permanente, atteinte
à l'intégrité morale et physique des citoyens ou destruction des biens publics
(art. 2);
Ne sera pas poursuivie la personne qui aura détenu des armes, explosifs ou d'autres
moyens matériels et les aura remis spontanément aux autorités (art. 3);
Dans le cas où les personnes visées à l'article premier se sont rendues coupables
de crimes ayant entraîné mort d'homme ou infirmité permanente, la peine encourue
sera la réclusion à temps de 15 à 20 ans lorsque la peine prévue par la loi
est la peine de mort et la réclusion à temps de 10 à 15 ans lorsque la peine
encourue est la réclusion perpétuelle. Dans tous les cas la peine est réduite
de moitié;
Les personnes visées aux articles 4, 8, 9, 10 et 11 de l'ordonnance sont conduites
immédiatement au tribunal compétent pour être présentées au Procureur de la
République (art. 7). Le Procureur de la République doit établir sur-le-champ
un procès-verbal de constat et mettre en oeuvre l'action publique. Les personnes
concernées peuvent être soumises, à leur demande, à un examen médical.
E. La création de l'Observatoire national des droits de l'homme
34. A la faveur de l'adoption de la Constitution de 1989 et de l'adhésion de
l'Algérie aux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l'homme,
un poste de Ministre des droits de l'homme a été créé en juin 1991. Mais devant
la difficulté de concilier l'action de défense des droits de l'homme avec la
responsabilité gouvernementale, l'Algérie a décidé, à l'instar d'autres pays,
de mettre en place un Observatoire national des droits de l'homme (créé par
décret présidentiel no 92-77, signé le 22 février 1992.
35. Institution indépendante placée auprès du Président de la République, et
jouissant de l'autonomie administrative et financière, l'Observatoire national
des droits de l'homme est un organe d'observation et d'évaluation en matière
de respect des droits de l'homme. Il a un rôle de consultation dans les domaines
intéressant les droits de l'homme, et son mandat s'articule autour des axes
suivants :
Promouvoir les droits de l'homme en Algérie conformément aux principes contenus
dans la Déclaration universelle des droits de l'homme;
Observer et évaluer l'application des dispositions en matière de droits de l'homme
figurant dans les conventions internationales ratifiées par l'Algérie et les
dispositions de la Constitution, des lois et règlements;
Entreprendre toute action lorsque des atteintes aux droits de l'homme sont constatées
ou portées à sa connaissance;
Etablir un bilan annuel sur l'état des droits de l'homme.
36. L'Observatoire mène des activités de sensibilisation et de vulgarisation
des principes des droits de l'homme contenus dans la législation national et
les instruments juridiques internationaux et publie dans ce contexte une revue
trimestrielle des droits de l'homme, une revue de presse et un bulletin d'information
interne relatif à ses activités.
37. Pour se rapprocher davantage de la population et conférer plus d'efficacité
à son action de protection et de promotion des droits de l'homme, l'Observatoire
a entrepris de renforcer ses activités sur le terrain grâce à l'ouverture d'antennes
décentralisées à travers tout le pays.
38. Illustrant l'attachement de l'Algérie à l'oeuvre de promotion des droits
de l'homme, le Président de l'Etat a récemment adressé une directive aux différentes
structures de l'Etat, les invitant à apporter leur pleine assistance à l'Observatoire
dans sa mission de surveillance du respect des droits de l'homme.
II. INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES AUX OBSERVATIONS FAITES
PAR LE COMITE LORS DE LA PRESENTATION DU RAPPORT INITIAL
Homicide par négligence
39. L'homicide par négligence ne peut jamais être passible de la peine de mort,
ni d'ailleurs d'une peine criminelle. L'article 288 du Code pénal dispose que
"quiconque, par maladresse, imprudence, inattention ou inobservation des
règlements, commet involontairement un homicide ou en est involontairement la
cause, est puni d'un emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende
de 1 000 DA". Ainsi donc, l'auteur d'un homicide par négligence est justiciable
du tribunal des délits et encourt une peine délictueuse.
L'erreur judiciaire
40. L'erreur judiciaire est prévue dans la législation algérienne dans le cadre
d'une demande de révision d'un procès. L'article 531 dispose que les demandes
en révision sont admises contre les jugements et arrêts passés en force de chose
jugée, auprès des juridictions ayant prononcé des condamnations criminelles
ou délictueuses. Il prévoit qu'en matière de révision, c'est la Cour suprême
qui est compétente.
41. L'article 531 bis stipule que la décision de la Cour suprême d'où résulte
l'innocence d'un condamné alloue à ce dernier, ou à ses ayants droit, des dommages
et intérêts en réparation du préjudice moral et matériel que lui a causé la
condamnation. La demande en réparation formulée par le condamné ou ses ayants
droit est recevable en tout état de la procédure de révision. L'article 531
bis dispose que les dommages et intérêts alloués à la victime de l'erreur judiciaire
ou à ses ayants droit, les frais d'insertion et de publication de la décision
de justice, ainsi que les frais d'instance, sont à la charge de l'Etat.
42. Si le demandeur en révision le requiert, l'arrêt de révision d'où résulte
l'innocence du condamné est affiché dans le ressort de la juridiction qui a
prononcé la condamnation, dans celle du domicile du demandeur en révision et
du dernier domicile de la victime de l'erreur judiciaire si elle est décédée.
Dans les mêmes conditions, ladite décision est publiée par voie de presse dans
trois journaux, au choix de la juridiction ayant prononcé la décision de révision.
Les traitements cruels, inhumains ou dégradants
43. En Algérie, la peine capitale n'est pas considérée comme un traitement cruel
et inhumain. Il faut cependant souligner que l'application de cette peine répond
aux Règles et garanties pour la protection des personnes passibles de la peine
de mort adoptées par le Conseil économique et social dans sa résolution 1984/50.
C'est ainsi que :
La peine de mort, à l'instar de toutes les autres sanctions pénales, ne peut
être prononcée par les tribunaux algériens que pour les crimes intentionnels
les plus graves, ayant des conséquences fatales ou extrêmement graves;
A l'instar de toutes les autres sanctions pénales, la peine de mort ne peut
être prononcée que pour un crime pour lequel la peine de mort était prescrite
au moment où celui-ci a été commis, étant entendu que si, après que le crime
a été commis, la loi prévoit l'imposition d'une peine moins grave, le criminel
bénéficiera de cette disposition;
Le principe de non-rétroactivité est consacré aussi bien dans la Constitution
que par l'article 2 du Code pénal qui énonce que "la loi pénale n'est pas
rétroactive, sauf si elle est moins rigoureuse".
La peine de mort ne peut être prononcée à l'encontre d'un mineur de 18 ans (qui
bénéficie de l'excuse de minorité prévue par l'article 50 du Code pénal);
La peine de mort ne peut être exécutée ni à l'encontre d'une femme en état de
grossesse ou allaitant un enfant de moins de 24 mois ni à l'encontre d'un condamné
gravement malade ou devenu dément (art. 197, alinéa 2, du Code de la réforme
pénitentiaire et de la rééducation);
La peine de mort ne peut être exécutée qu'en vertu d'un jugement ayant acquis
l'autorité de la chose jugée et après épuisement des voies de recours auprès
de la juridiction de pourvoi et auprès du chef de l'Etat, l'article 499 du Code
de procédure pénale dispose que pendant les délais de recours en cassation et,
s'il y a eu recours, jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour suprême, il est
sursis à l'exécution de la décision, sauf en ce qui concerne les condamnations
civiles;
Tout condamné à mort, quel que soit son crime, a le droit de faire un recours
en grâce et de présenter une requête en commutation de peine;
Lorsque la peine de mort est appliquée, elle est exécutée de manière à causer
le minimum de souffrances physiques.
L'extradition
44. Indépendamment de l'adhésion de l'Algérie aux conventions judiciaires qui
consacrent l'extradition et sa mise en oeuvre, la législation, notamment le
Code de procédure pénale dans son titre I "de l'extradition", définit
son cadre juridique, ses conditions (art. 697) et les cas de refus de celle-ci.
L'article 698 dudit Code énumère un certain nombre de cas où l'extradition n'est
pas accordée :
Lorsque l'individu objet de la demande est de nationalité algérienne, cette
qualité étant appréciée à l'époque de l'infraction pour laquelle l'extradition
est requise;
Lorsque les crimes ou délits ont été commis sur le territoire algérien;
Lorsque les crimes ou délits, quoique commis hors du territoire algérien, y
ont été poursuivis et jugés définitivement;
Lorsque d'après les lois de l'Etat requérant ou celles de l'Etat requis, la
prescription de l'action s'est trouvée acquise antérieurement à la demande d'extradition
ou la prescription de la peine antérieurement à l'arrestation de l'individu
réclamé et, d'une façon générale, toutes les fois que l'action publique de l'Etat
requérant sera éteinte;
Si une amnistie est intervenus dans l'Etat requérant ou si une amnistie est
intervenue dans l'Etat requis, à la condition que, dans ce dernier cas, l'infraction
soit au nombre de celles qui peuvent être poursuivies dans cet Etat lorsqu'elles
ont été commises hors du territoire de cet Etat par un étranger à cet Etat.
45. Il est à noter que dès que la demande d'extradition est parvenue au Gouvernement
algérien et après vérification des pièces transmises avec le dossier, la personne
objet de l'extradition est mise immédiatement aux arrêts et écrouée à l'établissement
pénitentiaire d'Alger (art. 702 du Code de procédure pénale). La chambre criminelle
de la Cour suprême est saisie sur-le-champ des procès-verbaux et de tous autres
documents. L'étranger comparait devant elle dans un délai maximum de huit jours
à compter de la notification des pièces. Si la Cour suprême, par avis motivé,
rejette la demande d'extradition, cet avis est définitif et l'extradition ne
peut être accordée (art. 710 du Code de procédure pénale).
46. L'individu arrêté provisoirement dans les conditions prévues par l'article
705 peut être mis en liberté si, dans le délai de 45 jours à dater de son arrestation,
le Gouvernement algérien ne reçoit pas l'un des documents mentionnés à l'article
702 (art. 713 du Code de procédure pénale).
Statut de la magistrature
47. L'ordonnance no 27-69b du 31 mai 1969 portant Statut de la magistrature
considérait la magistrature comme étant "une fonction spécialisée du pouvoir
révolutionnaire", son rôle primordial étant la protection et la défense
de la révolution, ce qui supposait un engagement politique de la part de la
magistrature et des magistrats. Le Conseil supérieur de la magistrature était
composé de magistrats élus par leurs pairs mais aussi de représentants de la
fonction politique et de la fonction législative (Assemblée populaire nationale).
48. La Constitution de 23 février 1989 a consacré le principe de l'indépendance
du pouvoir judiciaire en vertu de la stricte séparation des pouvoirs. Sur cette
base, une nouvelle loi portant Statut de la magistrature a été promulguée le
12 décembre 1989 et complétée par un décret législatif du 24 octobre 1992. Ce
nouveau statut définit la nouvelle mission du magistrat, assure son impartialité
et le protège contre toute forme de pression. Il consacre l'inamovibilité du
magistrat et sépare la fonction du grade pour permettre à la carrière de ce
dernier d'évoluer sans qu'il ait besoin de changer de poste.
49. Le Conseil supérieur de la magistrature a été expurgé de ses membres représentant
l'autorité politique et législative et est devenu l'organe exclusif chargé de
la carrière du magistrat. Il est désormais composé de huit magistrats (le Premier
président de la Cour suprême, le Procureur général de la Cour suprême et six
magistrats élus par leurs pairs), quatre membres désignés par le Chef de l'Etat
et trois membres représentant le Ministère de la justice. Il est présidé par
le Chef de l'Etat, le Ministre de la justice étant vice-président.
La population pénale en Algérie
50. Depuis l'indépendance en 1962, et jusqu'à ce jour, la population pénale
n'a pas dépassé le chiffre de 28 000 personnes, toutes catégories et nationalités
confondues. La capacité d'accueil des 115 établissements pénitentiaires est
de l'ordre de 25 000 places, ce chiffre ayant été arrêté sur la base de critères
et procédures en vigueur au niveau international.
51. Le régime pénitentiaire en Algérie permet l'utilisation de chantiers extérieurs.
Près de 2 000 détenus sont affectés dans des fermes agricoles dans le cadre
de l'emploi de la main-d'oeuvre pénitentiaire tel que prévu par le Code de la
réforme pénitentiaire et de la rééducation dont les cadres référentiels sont
l'ensemble des règles minima adoptées lors du premier Congrès des Nations Unies
sur la prévention du crime et le traitement des délinquants, ainsi que les directives,
normes et recommandations ultérieures des Nations Unies.
Le Conseil constitutionnel
52. Le Conseil constitutionnel (art. 153 à 159 de la Constitution) est composé
de sept membres dont deux désignés par le Président de la République, deux élus
par l'Assemblée populaire nationale et deux élus par la Cour suprême en son
sein.
53. Le Président de la République désigne, pour un mandat unique de six ans,
le Président du Conseil constitutionnel.
Supériorité des conventions internationales par rapport à la loi
54. Aux termes de la Constitution, les conventions internationales ratifiées
par l'Algérie ont une autorité supérieure à la loi. Cette disposition induit
tout naturellement la prise en charge des dispositions découlant des conventions
internationales par la législation nationales en vigueur.
55. Par sa décision no 1 du 20 août 1989, le Conseil constitutionnel a considéré
à cet égard "qu'après sa ratification et dès sa publication, toute convention
internationale s'intègre dans le droit national et, en application de l'article
123 de la Constitution, acquiert une autorité supérieure à celle des lois, autorisant
tout citoyen algérien de s'en prévaloir devant les juridictions".
Déclaration de l'état d'urgence
56. L'article 86 de la Constitution stipule qu'en cas de nécessité impérieuse,
l'état d'urgence est décrété par le Président de la République après consultation
du chef du Gouvernement et du Président du Conseil constitutionnel.