La Situation Actuelle des Organisations des Droits de l'Homme en Afrique Sub-Saharienne

L'environnement Economique et Politique


De toute évidence, la transition à un environnement politique plus démocratique dans certains pays africains offre de nouvelles possibilités aux organisations des droits de l'homme. En même temps cette transition force plusieurs organisationsà redéfinir leurs liens avec les partis politiques. Dans le passé, quand les partis d'opposition politique ne pouvaient pas fonctionner, la démarcation entre une critique politique du gouvernement et la défense des droits de l'homme s'estompait ou disparaissait totalement. Puisque la transition a bien eu lieu, beaucoup d'activistes des droits de l'homme ont émergé comme personnages proéminents dans les partis politiques--souvent, bien sûr, dans un parti politique qui vient au pouvoir dans des élections démocratiques. C'est ainsi que de nombreux groupes des droits de l'homme se trouvent dans la nécessité de redéfinir leur mission avec une plus grande clarté dans plusieurs pays--par exemple en Afrique du Sud, au Malawi et en Zambie--afin de mettre en évidence l'impartialité politique de leur oeuvre. Dans d'autres pays, on n'a pas encore réussià réaliser une telle séparation entre les droits de l'homme et l'engagement politique actif.

Dans d'autres pays--le Rwanda, l'Angola, le Tchad et la Somalie en sont les exemples les plus flagrants --les moniteurs africains des droits de l'homme s'efforcent toujours de fonctionner sous les vieilles conditions de répression extrême.

Beaucoup d'autres pays appartiennentà une catégorie moyenne dans laquelle l'activité en faveur des droits de l'homme est tolérée mais où les activistes sont constamment harcelés et travaillent dans des conditions difficiles.

Dans un petit nombre de pays--au Libéria, au Mozambique, en Somalie et tout dernièrement au Rwanda --l'état a presque cessé d'exister et la plupart de ses fonctions ont été assumées par des agences intergouvernementales. Dans un nombre d'autres pays--par exemple, en Afrique du Sud jusqu'… récemment--il y a une forte présence d'organisations intergouvernementales qui cherchentà promouvoir le rapprochement ouà faciliter la transition politique. Cependant, ces organes intergouvernementaux sont devenusà leur tour des acteurs politiques qui doivent faire l'objet d'un examen minutieux et d'un contrôle indépendant. Les troupes des Nations Unies en Somalie et les forces de l'Afrique occidentale pour le maintien de la paix au Libéria (ECOMOG), par exemple, ont été accusés de violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire international, tandis que les forces de l'ONU au Mozambique auraient aussi commis des abus contre la population civile. En même temps, il est peu clair qui contrôle ces corps ou par quelles normes ils doivent être jugés; les forces de l'ONU en Somalie ont indiqué qu'elles ne se considèrent pas soumises aux dispositions de la Convention de Genève, et au Libéria, les groupes des droits de l'homme locaux ont eu du malà critiquer ECOMOG parce qu'ils voient ces forces comme le garant principal de leur sécurité.

Ces exemples brefs soulignent la variété des contextes politiques dans lesquelles opèrent les groupes africains des droits de l'homme. La conjoncture économique està beaucoup d'égards plus uniforme. Le continent se trouve dans une crise économique profonde résultant de la dégradation des termes de commerce, du fardeau croissant de l'endettement et du surpeuplement. Les mesures prises pour s'adresserà cette crise--le plus souvent il s'agit d'une forme "d'ajustement structural"--comportent des coûts sociaux énormes supportés par les couches les plus pauvres de la société. Dans la plupart des pays africains, par suite de la tendance d'institutions financières internationales (IFI) telles que la Banque Mondiale et le Fond Monétaire International qui dictent le programme politique, tant les partis d'opposition que le gouvernement supportent des mesures d'ajustement structural, ce qui constitue une démission de leur responsabilité de formuler la politique économique en faveur des institutions financières internationales. Une des conséquences de cette abdication est que les partis politiques n'offrent pas d'alternativeà la population quant au choix de l'orientation de la politique économique. A défaut de tels choix, les partis tendentà s'attirer le soutien populaire en faisant appel aux appartenances ethniques et régionales.

En outre, le consensus politique international--dont plusieurs groupes africains des droits de l'homme se font l'écho--tendà voir un lien étroit entre l'introduction du multipartisme, le respect pour les droits de l'homme et l'économie du marché libre sous le mot d'ordre général de "bonne gouvernance". Dans la pratique, les mouvements pour le changement politique et pour le respect des droits politiques et civiques dans des pays tels que la Zambie et le Nigéria ont souvent été stimulés par l'échec de l'étatà faire respecter les droits sociaux et économiques. Cependant, la liaison formel de droits de l'hommeà une seule doctrine économique empêche les groupes africains des droits de l'homme de s'adresser … l'impact des mesures d'ajustement structural de la perspective des droits économiques et sociaux. Ceci ne veut pas dire que les groupes des droits de l'homme devraient s'aligner sur une seule alternative économique, mais plutôt qu'ils devraient prendre comme point de départ l'impact humain de toute politique. Par conséquent, un aspect vital de leur travail doit viserà jauger l'impact des politiques économiques sur le bien-être social et économique de la population. Le mouvement des droits de l'homme risque de se marginaliser s'il est incapable de s'adresser aux problèmes d'une telle importance primordiale.

On peut citer deux grandes exceptions où des organisations des droits de l'homme ont analysé des questions sociales et économiques d'une perspective des droits et ont mené des campagnes dans ce sens. D'abord, il y a l'Afrique du Sud où, pour des raisons historiques particulières, des questions telles que le logement, les pensions, l'éducation et la propriété figurent comme des éléments essentiels dans la lutte pour les droits de l'homme. L'autre exception est le grand nombre d'organisations africaines faisant campagne pour les droits des femmes, qui ont manifesté un activisme tant sur le plan des droits individuels que sur celui des problèmes économiques et sociaux. Nous avons observé que dans ce domaine--comme dans plusieurs autres--le mouvement africain des femmes peut offrir des le‡ons importantesà la communauté plus large des droits de l'homme.


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